La médiathèque Marguerite Yourcenar

Rue d’Alleray, Paris XVe

Marie-Françoise Garion-Roche

La médiathèque Marguerite Yourcenar doit ouvrir ses portes à la fin de l’année 2007. Elle permettra de rééquilibrer l’offre documentaire sur le XVe arrondissement, et rayonnera au-delà.

Illustration
Chantier de la médiathèque Marguerite Yourcenar. © Photo : Jacques Cuzin

Pourquoi le XVe ?

Le XVe est l’arrondissement le plus vaste et le plus peuplé de Paris. Situé à l’ouest, il héberge une population qui équivaut à celle de Bordeaux, avec plus de 200 000 habitants.

En matière d’équipement, l’arrondissement compte de nombreuses écoles, de la maternelle à l’enseignement supérieur. Les lieux de culture et de loisirs, les parcs et les jardins, mais aussi les nombreux commerces et marchés en font un arrondissement particulièrement dynamique. De nombreuses librairies y sont installés, et le parc Georges Brassens, non loin de l’emplacement de la future médiathèque, accueille tous les samedis et dimanches le marché des livres rares et anciens.

L’arrondissement présente cependant une réelle faiblesse en matière d’offre documentaire. Trois bibliothèques de la ville de Paris y sont aujourd’hui implantées : les bibliothèques Beaugrenelle, Gutenberg et Vaugirard. Mais les chiffres révèlent une situation problématique : 1 document par habitant (alors que la moyenne parisienne est de 1,5 et que la moyenne nationale est de 2,5) et 11,5 % d’inscrits en bibliothèque (alors que la moyenne parisienne est de 16,5 % et que la moyenne nationale est de 17,5 %). Le choix des élus de construire cette nouvelle médiathèque est la marque d’un vrai désir d’élargissement de l’offre documentaire municipale dans la capitale.

Il était une fois la médiathèque Marguerite Yourcenar…

Si le projet d’implanter une bibliothèque sur le terrain remonte au milieu des années quatre-vingt-dix, le lancement effectif a eu lieu à la fin de l’année 2001. Le concours d’architecture a été remporté par l’agence Babel, dirigée par Michel Seban et ses associés. La nomination du bibliothécaire responsable de cette création est intervenue six mois plus tard, à l’issue d’un appel à candidatures sélectionnées sur projet. La délégation de maîtrise d’ouvrage a été attribuée en 2002 et le marché de maîtrise d’œuvre en janvier 2003.

Les acquisitions ont commencé en 2003. La méthode de travail a consisté à répartir les champs de la connaissance en domaines et à leur attribuer une volumétrie. Pour chaque domaine, un ou deux acquéreurs se chargent d’effectuer la sélection. En parallèle, un travail de rédaction très riche est mené pour pouvoir suivre la réflexion bibliothéconomique qui préside à ces choix. Les bibliothécaires rédigent une fiche domaine qui définit les grandes lignes. Puis ils rédigent un argumentaire qui présente la démarche effectuée, l’état des lieux de l’édition dans ce domaine précis, établissent la liste des sites Internet généraux et l’état de la documentation dans le réseau de la ville de Paris sur le sujet, etc. Ces argumentaires comportent donc une série d’« instantanés » du monde de l’édition, domaine par domaine.

La réception du bâtiment est prévue pour la fin juin 2007, et la médiathèque devrait accueillir ses premiers lecteurs fin 2007, avec 70 % de la volumétrie totale des collections dans ses murs.

Architecture et particularités du bâtiment

De l’extérieur, la médiathèque offrira aux regards des habitants une grande façade vitrée, orientée plein sud, l’entrée étant soulignée par un parvis. Le bâtiment comporte sept niveaux, dont quatre entièrement réservés au public. À l’arrière, un jardin de lecture sera ouvert au public par beau temps.

L’intérieur du bâtiment est entièrement décloisonné, ce qui permettra une circulation fluide des lecteurs et offrira aux bibliothécaires la souplesse d’espaces évolutifs. Les plateaux sont d’une superficie de plus de 400 m² chacun, sans aucun poteau.

Le plancher technique est intégral : les boîtiers de sol sont donc déplaçables en entier. Cela permettra une grande souplesse pour faire évoluer les aménagements, renforcée par l’installation du wi-fi.

Le bâtiment est équipé d’une façade « double peau » qui permettra de faire face à l’ensoleillement – puisque le bâtiment est orienté plein sud. Cette technologie n’est pas nouvelle, puisqu’elle est déjà utilisée à la médiathèque Mériadeck de Bordeaux. Cependant, à la différence de cette dernière, où elle a été adoptée essentiellement pour l’isolation phonique, elle est ici conçue pour créer une isolation thermique régulée. L’hiver, elle aura pour effet de conserver la chaleur, et l’été, d’évacuer les calories dues à l’effet de serre grâce à une circulation d’air entre les deux parois vitrées espacées de 80 cm.

Le bâtiment sera sans doute équipé à terme d’une salle de conférences dans l’espace initialement prévu pour la réserve. Le réseau des bibliothèques de la ville de Paris est doté d’une réserve centrale, dont les ouvrages apparaissent dans le catalogue en ligne et peuvent être prêtés. Cette réserve locale, dès lors, semble accessoire, tandis que la salle de conférences paraît tout à fait centrale pour implanter la médiathèque dans la vie de l’arrondissement, notamment par la mise en place de cycles de projections ou de conférences.

Le décloisonnement de la future médiathèque ne sera pas seulement physique ou architectural, les bibliothécaires travaillant aujourd’hui sur la mise au point d’une organisation du travail non par section, mais transversale, par pôles.

Les livres, les documents

La médiathèque Marguerite Yourcenar proposera un fonds de documents spécialisés en écologie et développement durable. Cette orientation répond à un désir exprimé par les élus parisiens, et correspond à une préoccupation de plus en plus présente dans notre vie quotidienne. Un fonds important de bandes dessinées jeunesse et adultes sera également proposé, avec un pourcentage non négligeable de mangas.

La constitution d’un fonds ex nihilo constitue une expérience très riche. Elle offre aux bibliothécaires la possibilité d’engager une réflexion approfondie sur la politique documentaire et sur la profession. Cependant, même si ce fonds est construit intégralement, il ne faut pas négliger le fait que la médiathèque s’inscrit, comme tous les établissements de la ville de Paris, dans le contexte particulier du réseau parisien. Les bibliothécaires doivent donc prendre en compte les documents présents dans les autres bibliothèques du réseau avant acquisition. Ils doivent également s’appuyer sur les choix proposés par les comités de sélection du réseau. Les acquéreurs doivent donc rester vigilants en permanence pour respecter l’équilibre entre toutes ces données et constituer un fonds cohérent.

Les services offerts par la future médiathèque

Tous les services proposés par la médiathèque supposent un accompagnement de l’utilisateur par les bibliothécaires, afin qu’il puisse devenir autonome dans l’utilisation du matériel mis à disposition.

La médiathèque Marguerite Yourcenar sera par conséquent un espace de formation et d’auto-formation. Un laboratoire de langues de 10 carrels est prévu pour l’auto-apprentissage des langues, et une salle de formation multimédia proposera 10 postes aux lecteurs. Dans cette salle, des séances d’initiation à l’informatique seront proposées, ainsi que des séances de formation pour les utilisateurs plus avertis. Un partenariat avec une structure existante est à l’étude. L’acquisition de nombreux didacticiels à consulter sur place ou à emprunter est prévue. Ils porteront sur de nombreux domaines et les postes de la salle de formation pourront accueillir leur consultation. Les membres de l’équipe de la médiathèque seront invités à dispenser des formations en recherche documentaire pour tout lecteur intéressé.

La médiathèque Marguerite Yourcenar sera aussi un espace d’accueil du public en situation de handicap visuel. Du matériel sera mis à la disposition des déficients visuels, bien sûr, et un service sera proposé en parallèle par le biais d’un personnel disponible et compétent. Le matériel proposé est classique : synthèse vocale, scanner, imprimante braille, plage tactile de braille éphémère, agrandisseur. La nouveauté du projet réside dans la fourniture de « contenu », grâce à une convention passée avec l’association Sésame, qui a constitué la première bibliothèque numérique de France. Elle met à la disposition des déficients visuels 6 000 documents sous forme numérique. Les animateurs de l’association Sésame participeront à la formation des utilisateurs déficients visuels. Ils formeront également les membres du personnel de la bibliothèque à l’accueil de ce public spécifique.

Il faudra sans doute attendre quelques années avant que les résultats de cette expérience soient significatifs.

Médiathèque Marguerite Yourcenar

(ouverture prévue fin 2007)

41 rue d’Alleray

75015 Paris

Architecte : Agence Babel, Michel Seban et associés

Bibliothèque du réseau municipal parisien

Le XVe arrondissement

– 225 467 habitants (10,6% de la population parisienne)

– 120 700 actifs

– 1 document par habitant

– 11,5% de la population inscrite en bibliothèque

Le bâtiment

– 3 500 m² de surface (shon) sur 7 niveaux

– 4 niveaux pour le public

– 4 plateaux d’environ 400 m² chacun

– Coût des travaux : 14,5 millions €

Les collections et le multimédia

– 130 000 documents dont 100 000 livres, 20 000 CD et 10 000 DVD

– 40 postes multimédia pour le public, dont 10 pour l’auto-formation et l’apprentissage des langues, et 10 pour la formation