Les étudiants à la bibliothèque universitaire de Paris X

Pratiques documentaires, satisfactions et attentes

Hubert Dupuy

Afin de mieux répondre aux besoins de ses lecteurs, le service commun de la documentation de Paris X a fait réaliser une étude quantitative et qualitative de son public étudiant au seuil du contrat quadriennal 2005-2008, où le développement des services aux lecteurs et la formation des usagers forment deux priorités affichées.

L’étude a été conduite par la société SCP Communication qui a réalisé, entre le 15 et le 20 novembre 2004, 820 interviews en face à face à la sortie de la bibliothèque. Les questionnements ont duré de 15 à 20 minutes, le questionnaire comportant 100 questions. L’étude ne prend pas en compte les étudiants inscrits à Paris X qui ne fréquentent pas la bibliothèque, minorité importante puisqu’elle est légèrement supérieure au quart des étudiants inscrits à cette université.

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Étude de la société SCP Communication

Habitude de fréquentation, pratiques documentaires et habitudes de lecture

Les étudiants 1 qui se rendent à la bibliothèque, soit 73 % des inscrits à l’université de Paris X, l’utilisent très régulièrement, 87 % d’entre eux s’y rendent au moins une fois par semaine. 13 % des étudiants y viennent tous les jours ; les juristes sont les plus assidus, un sur quatre vient quotidiennement consulter des documents et travailler au SCD. Aux yeux de la majorité des étudiants inscrits à l’université de Paris X, la bibliothèque est un service public nécessaire pour mener à bien leurs études.

L’intensité de la fréquentation varie selon les filières, les juristes séjournent en moyenne 1 h 40, quand la moyenne générale des séjours s’établit à 1 h 26. Les étudiants en sociologie, en histoire et en langues se distinguent également par une durée de fréquentation supérieure à la moyenne.

60 % des étudiants fréquentent aussi les bibliothèques des UFR (unités de formation et de recherche). En revanche, l’ouverture vers des bibliothèques d’étude extérieures au campus est modeste, en dehors de la Bibliothèque publique d’information qui attire 14 % des étudiants. On retrouve là l’effet de site observé ailleurs pour le lectorat étudiant des bibliothèques universitaires. La forte représentation dans le sondage des étudiants de premier cycle, 47 % des interviewés, a renforcé ce phénomène.

La diversité sociale des étudiants fréquentant la bibliothèque paraît correctement assurée ; le SCD reçoit 27 % d’enfants d’employés ou d’ouvriers, là où l’université compte 19 % d’inscrits issus de ces catégories. Avec des précautions, car l’interprétation délicate en la matière mérite d’être confortée par d’autres études, on peut observer que les fonds de livres et les services proposés par la bibliothèque ne provoquent pas de clivage social. Lors des études conduites par la bibliothèque en 1988 -1989, la situation était inverse, schématiquement, les usagers de la bibliothèque étaient en moyenne issus de milieux plus favorisés que les étudiants inscrits à l’université.

Qu’ont fait les étudiants durant leur séjour à la bibliothèque ? Une minorité – 23 % – a travaillé sur ses notes de cours ou ses propres documents, sans recourir aux ouvrages ou aux services proposés par la bibliothèque. Pour les autres, l’éventail des pratiques est résumé ci-après :

  • 53 % ont consulté des livres ;
  • 17 % ont consulté des journaux, des revues ou des magazines ;
  • 26 % ont consulté un catalogue informatique ;
  • 29 % ont emprunté des livres ;
  • 11 % ont consulté une base de données ou des périodiques électroniques ;
  • 8 % ont consulté Internet ;
  • 4 % ont fréquenté la vidéothèque.

Ces données montrent que ce sont les services classiques qui se taillent la part du lion dans les pratiques des étudiants lorsqu’ils se rendent à la bibliothèque. Ce constat doit cependant être pondéré par trois observations : le taux des collections en libre accès à la bibliothèque constitue un atout et un avantage important de l’université par rapport à la situation des SCD des universités de Paris intra muros, l’accès aux services numériques est loin d’être à égalité avec l’accès aux services plus traditionnels – le rapport entre les postes informatiques documentaires et les places assises est de 1 à 16 –, enfin le repérage des collections électroniques auxquelles la bibliothèque est abonnée demeure artisanal ; ce dernier point sera amélioré lorsque le SCD disposera d’un système d’information documentaire.

Selon le résultat du sondage, le rapport des étudiants au livre et à la lecture reste fondamental, n’en déplaise aux pleureuses de l’édition en sciences humaines qui se lamentent abusivement sur le manque de curiosité livresque des étudiants. Le sondage ne confirme pas ce pessimisme morose. En effet, 58 % des étudiants consacrent plus d’une heure par jour à la lecture, un étudiant sur quatre lit chaque jour pendant au moins deux heures ; comme c’est logique, les étudiants de troisième cycle sont bien représentés dans l’effectif des forts lecteurs. Les étudiants sondés déclarent lire en moyenne plus de quarante livres par an. Toutefois, on doit observer que le sondage n’a pas permis de discerner un groupe de très gros lecteurs – usagers qui déclarent lire au moins six livres par mois.

Il convient d’ajouter par ailleurs que les étudiants sont très attentifs aux prescriptions de leurs professeurs quand ils choisissent leurs lectures. À la question : « En général, qui vous aide à choisir vos livres ? », 55 % des étudiants répondent que ce sont les enseignants et 39 % des amis.

Le point de vue des étudiants sur les services offerts

C’est l’ampleur et la pertinence disciplinaire de l’offre documentaire en libre accès qui recueillent le plus d’avis favorables, suivies par l’ambiance et la qualité de l’accueil, les conditions de consultation des bases de données et les conditions d’emprunt étant également appréciées.

Les étudiants usagers de la bibliothèque attendent des améliorations sur la disponibilité des documents, les délais de communication des ouvrages conservés en magasin, l’aide des personnels, les heures d’ouverture du service du prêt et surtout le bruit dans les salles de lecture !

L’enquête montre enfin que certains services demeurent assez méconnus, ce qui conduit à leur sous-utilisation ; ainsi des périodiques imprimés disponibles à la bibliothèque, de la consultation d’Internet et des revues électroniques, qui constituent les offres les plus ignorées.

Parmi les améliorations importantes mises en œuvre à la bibliothèque depuis cinq ans, l’une a consisté à rendre le catalogue en ligne plus ergonomique, une autre à étoffer l’offre électronique avec les abonnements à des bouquets de revues – au moyen d’un contrat avec Science direct par exemple. Si la bataille pour proposer un catalogue plus convivial a été gagnée – neuf étudiants sur dix affirment qu’il est très ou assez facile à utiliser –, la consultation extrêmement mesurée des revues électroniques démontre qu’en matière de recours à l’information électronique, pour l’heure, les fruits n’ont pas encore passé la promesse des fleurs.

Au total, les résultats du sondage apparaissent encourageants à la fois pour le service public de lecture et de documentation rendu par la bibliothèque de l’université avec le complément des BUFR, et pour les pratiques de lecture des étudiants. Les enseignants observeront également que leurs recommandations ou prescriptions bibliographiques sont bien reçues par leurs étudiants.

Cependant, la bibliothèque a bien conscience qu’une importante marge de progression demeure pour mieux répondre aux attentes de ses usagers ; à cet effet, une meilleure prise en compte de leurs attentes, une augmentation des horaires d’ouverture 2, un aménagement des espaces, une formation des étudiants à l’usage de la documentation, figurent en bonne place dans le contrat d’établissement 2005-2008.

L’enquête confirme que la lecture demeure une pratique largement et régulièrement exercée par une majorité notable des étudiants ; l’accoutumance à la lecture sur écran et la consultation des corpus numérisés semblent lentes, mais ce développement est à l’œuvre. Il reste également à explorer et à analyser les pratiques et le rapport au livre des étudiants qui ne se rendent pas à la bibliothèque.

  1. (retour)↑  Pour ne pas alourdir la rédaction par une périphrase, « les étudiants » signifiera désormais « les étudiants de Paris X fréquentant la bibliothèque ».
  2. (retour)↑  Depuis cette étude, la durée d’ouverture hebdomadaire a été portée à 54 heures en octobre 2005 contre 50 heures antérieurement.