Le livre et le mot

essai

par Michel Melot

Raymond Jean

Arles : Actes Sud ; Montréal : Leméac, 2004. – 123 p. ; 21 cm. – (L’Écritoire).
ISBN 2-7427-5340-0 (Actes Sud). ISBN 2-7609-6061-7 (Leméac) : 15 €

Ce petit volume sous-titré « essai » cache, sous son titre générique, quatre textes dont seul le troisième, une pièce de théâtre jouée au Vieux Colombier en 2001, est inédit.

Le premier est connu des bibliothécaires puisqu’il est le fruit d’une commande du ministère de la Culture, et sans doute du ministre Jack Lang lui-même, pour accompagner la publication de Bibliothèques : une nouvelle génération. Dix ans de constructions pour la lecture publique (Réunion des musées nationaux, 1993). Il n’était pas inutile de republier ce bel hommage à la lecture publique qui n’a rien perdu de son actualité. Si les idées, neuves alors, se sont aujourd’hui répandues, il faut en rendre justice à leurs promoteurs. Ainsi en est-il de la bibliothèque où l’on se retrouve « solitaires et ensemble », lieu de convivialité et de citoyenneté, ou de la bibliothèque comme antidote à la rotation accélérée des stocks de libraires, comme lieu d’échange non-marchand où les livres vivent au-delà de leur mort économique (ce qui rétrospectivement rend au « droit de prêt » sa cynique injustice). Le titre « Le rempart des livres » a toujours plusieurs sens, tous aussi pertinents.

Il était juste aussi qu’à l’âge flamboyant d’une vie bien remplie par une carrière généreuse et prolifique, Raymond Jean, né en 1925, et qui publia à 28 ans son premier recueil de poèmes chez Seghers, s’offre un clin d’œil en s’interviewant lui-même, en propos liminaire. La liste de ses œuvres, récapitulée à la fin de l’ouvrage, compte une quarantaine de titres : romans, essais, critique d’art, histoire littéraire, etc. Cela nous vaut une tranche d’autobiographie toujours instructive pour un acteur aussi engagé, sur le parcours d’un écrivain, universitaire et artiste, compagnon de route à la fois du Parti communiste et du Nouveau roman.

Les deux autres textes sont plus anecdotiques : le premier sur la posture physique du lecteur, issu d’un colloque de Cerisy-la-Salle, le second sur la recherche des mots à la fois dans les trous de mémoire et dans la composition littéraire. Le bibliographe aurait apprécié que l’éditeur donne la référence des premières publications de ces textes. À ceci près, l’édition est impeccable comme toujours chez Actes Sud, associé ici à un éditeur de Montréal.