Actualité, informations, services de références en bibliothèques

Laurence Tarin

« Actualité, informations, services de références en bibliothèques », tel était le thème de la journée d’étude de la filière bibliothèque de l’Institut universitaire de technologie (iut) Michel de Montaigne-Bordeaux 3, organisée le 7 avril 1998, et au cours de laquelle journalistes et bibliothécaires se sont succédé à la tribune.

Jean-Pierre Vosgin et Marie Dinclaux, responsables de cette filière, avaient souhaité s’interroger sur le rôle de fournisseurs d’information des bibliothèques, et se souvenant que l’iut Michel de Montaigne comprend aussi un département journalisme, avaient tenu à ce que les débats soient ouverts par des journalistes, producteurs d’information s’il en est.

La lecture de la presse

Jean-Pierre Spirlet, de l’association « Presse à l’école » et journaliste à Sud-Ouest, a décrit les actions menées par certains quotidiens régionaux auprès des établissements scolaires : découverte de la presse par des visites de locaux de journaux, fourniture d’invendus, conférences, prêt d’expositions, formation des enseignants, etc. Son intervention a permis de poser le problème de la maîtrise de l’analyse par le public des informations qu’il reçoit. La formation à la lecture de la presse, mais aussi à celle de toute information, semble d’autant plus nécessaire que son volume croît de façon exponentielle et qu’il devient difficile d’en appréhender la fiabilité.

A propos d’Internet, exemple particulièrement significatif, Michèle Rouhet, de Médiadix, s’est interrogée sur les enjeux des nouvelles technologies pour les bibliothèques, et a insisté sur le rôle de médiateur que ces dernières peuvent jouer dans la formation à l’utilisation du réseau.

Marthe Cousin, journaliste et rédactrice à Sciences actualité, a présenté l’expérience originale de cette revue de vulgarisation scientifique, implantée à l’intérieur de la médiathèque des sciences de la Villette. Créée par des journalistes scientifiques, Sciences actualité a pour supports des panneaux d’exposition et des bandes vidéo ou radio. Elle s’efforce de replacer l’actualité scientifique dans son contexte social, politique, culturel et industriel, produit également des documents pédagogiques et tient à jour un serveur Internet.

L’accent fut mis sur la collaboration qui existe entre les journalistes de la revue et les bibliothécaires de la médiathèque de la Villette. Revue et médiathèque se sont trouvées par hasard dans le même lieu, et, petit à petit, des liens se sont tissés entre les deux structures. Les bibliothécaires ont pris l’habitude de fréquenter la salle d’exposition de la revue afin de mieux comprendre l’actualité scientifique, les journalistes ont commencé à demander aux bibliothécaires des références bibliographiques pour la rédaction de leurs dossiers thématiques. C’est donc tout naturellement qu’ils se sont associés pour élaborer le serveur Internet sur lequel apparaissent des articles enrichis de lexiques commentés, de bibliographies ou de filmographies. Sur ce projet particulier, la fusion est telle entre les deux professions que Marthe Cousin a éprouvé quelques difficultés à définir ce qui relève de l’une ou de l’autre.

A travers le récit de cette expérience, c’est l’une des facettes de l’évolution du métier de bibliothécaire qui fut mise en relief. En effet, si les bibliothécaires se rapprochent des journalistes, c’est aussi parce qu’ils doivent de plus en plus se situer dans l’actualité et fournir de l’information à leurs publics.

Actualité et références en bibliothèque

Les interventions de bibliothécaires venant d’horizons différents ont permis de mieux comprendre comment cette évolution se traduit concrètement sous la forme de salles d’actualité et de références.

Gilles Gudin de Vallerin, de la médiathèque de Montpellier, et Nadine Massias, de la bibliothèque municipale de Bordeaux, ont montré le rôle que peut jouer un service d’actualité et de références dans une grande bibliothèque municipale. Annie Bertrand a expliqué comment un tel service a sa place au cœur du service commun de la documentation de l’université de technologie de Compiègne, et Debbie Shorley, de la Library of University of Ulster at Jordonstown, au Royaume-Uni, a parlé de l’expérience des Anglais, précurseurs dans ce domaine.

De ces différents exposés, on retiendra que, dans ces services, on trouve avant tout des usuels et des périodiques, mais aussi un choix de documentaires, dans le cas des bibliothèques publiques, ou d’ouvrages de culture générale et de littérature, dans le cas d’une bibliothèque universitaire technologique (butc) comme celle de Compiègne. La sélection d’information et de documentation qui se trouve dans ces salles est particulièrement soignée, récente et à jour. A Bordeaux et Montpellier, seuls les trois derniers numéros des revues sont présentés ; à Montpellier toujours, il est envisagé d’exposer – après un tri précis – les nouveautés des autres départements de la bibliothèque municipale.

Les différents intervenants ont souligné que, dans de tels services, les revues occupent une place fondamentale et qu’il ne s’agit pas seulement de proposer au public des titres d’abonnements, mais également un accès direct à l’information. La mise à disposition d’index, le dépouillement de certains périodiques et l’élaboration de dossiers de presse sont très appréciés des utilisateurs.

Les nouvelles technologies pourront rendre plus facile un travail coûteux en personnel, comme l’ont fait remarquer les représentants de la bibliothèque municipale de Bordeaux et des bibliothèques anglaises. Les dossiers de presse peuvent désormais être numérisés, et, surtout, la multiplication des cédéroms permet de faire l’économie d’une partie du travail. La plupart des bibliothèques dont les expériences ont été relatées durant cette journée proposent d’ailleurs la consultation de cédéroms et d’Internet au sein de leur service d’actualité et de références. Cet espace peut également servir à l’initiation du public aux nouvelles technologies, comme l’envisage la bibliothèque municipale de Montpellier. Par extension, ce lieu est souvent équipé de micro-ordinateurs qui permettent l’utilisation en libre accès de logiciels de bureautique, comme c’est déjà le cas à la butc, et comme cela le sera à Montpellier.

Des services pratiques

Enfin, on notera que les salles d’actualité et de références offrent des services pratiques. Le plus répandu est celui de l’aide à la recherche d’emploi et à l’orientation professionnelle que l’on trouve à Bordeaux et à Montpellier (où les bibliothèques municipales ont des contacts avec l’onisep-Office national d’information sur les enseignements et les professions, voire avec l’Agence nationale pour l’emploi), mais aussi, dans une certaine mesure, à la butc de Compiègne qui propose aux futurs ingénieurs un fonds documentaire sur l’information économique et la gestion des entreprises. C’est la bibliothèque municipale de Bordeaux qui a poussé le plus loin cette logique d’ouverture sur des services pratiques puisqu’elle offre une documentation recueillie auprès de différentes administrations comme la poste ou les impôts.

Bien entendu, ces services ne valent que par la présence de professionnels capables d’informer et d’orienter. L’on s’inquiétera donc de la remarque de Debbie Shorley qui a indiqué que les services de références anglo-saxons sont gravement menacés par le manque de moyens humains.

Pour conclure sur cette journée, à laquelle assistait un public désormais fidèle, on soulignera, avec Dominique Arot, du Conseil supérieur des bibliothèques, que ces débats ont amené les participants à s’interroger non seulement sur le rôle des bibliothèques en matière d’information, mais au-delà, sur les relations qu’elles entretiennent avec leurs publics et avec la connaissance.