L'évolution des métiers des bibliothèques aux États-Unis
Terry L. Weech
Pour bien se rendre compte de l'étendue de l'évolution de la formation des professionnels des bibliothèques aux Etats-Unis, il faut considérer à la fois les compétences souhaitées par les employeurs et les professionnels, et examiner celles exprimées dans les écoles de bibliothéconomie. Ll'auteur passe en revue les programmes de formation aux métiers des bibliothèques, l'impact des nouvelles technologies et des préoccupations sociopolitiques actuelles. Enfin, il s'interroge sur les tendances des futures formations, et tente de prévoir ce que sera un programme type pour l'an 2000 et au-delà.
To determine the extent of the evolution of the education of library professionals in the USA, it is helpful to look at both the statements of competencies desired by the employers and the profession as well as reviewing the competencies as reflected in the curricula of library schools. Library education programs are examined with special attention paid to the impact of new technology and public social and political concerns on the design of new curricula. Finally, the author speculates on the future direction of library education in the US, with an attempt to predict the typical curriculum in the year 2000 and beyond.
Wenn man die Weite der Bildungsentwicklung für das Bibliothekspersonal in den Vereinigten Staaten verstehen will, muß man die von den Arbeitgebern und den Fachleuten gewünschten und die in den Fachschulen gelehrten Kompetenzen gleichzeitig betrachten. In diesem Aufsatz legt der Verfasser die Bildungsprogramme für Bibliotheksberufe aus und evaluiert die Wirkung der neuen Technologien und der heutigen sozialpolitischen Sorgen. Endlich fragt er sich über die Tendenzen der künftigen Bildungen und versucht, ein Musterprogramm für 2000 und nachher vorauszusetzen.
Ces quarante dernières années ont vu les écoles de formation des professionnels des bibliothèques des Etats-Unis évoluer considérablement. Les premiers terminaux OCLC, les premiers systèmes de prêt automatisé et les catalogues de livres sur ordinateur, les OPAC (catalogues automatisés en ligne), le WWW (World Wide Web) et les pages d’accueil réalisées avec HTML (HyperText Markup Language) – sans parler des URLs (Uniform Resource Locaters) –, donnent une idée de l’ampleur de cette évolution que l’on pourrait définir plus exactement comme une révolution.
En 1965, une seule école de formation de professionnels des bibliothèques (Université de Pittsburgh) reconnue par l’ALA (American Library Association) faisait figurer l’expression « sciences de l’information » dans son nom officiel. En 1975, neuf (15 %) des 55 écoles reconnues par l’ALA le faisaient aussi. En 1985, la majorité (71 %) des 59 établissements reconnus incluait les expressions « sciences de l’information », « études en sciences de l’information », « management de l’information » dans leur nom officiel. Enfin, dans le répertoire 1995 des écoles reconnues par l’ALA, presque toutes intègrent « sciences de l’information » ou une expression similaire dans leur nom officiel.
En fait, on trouve « bibliothéconomie », « sciences de l’information », « études en sciences de l’information », ou des expressions analogues dans 42 (84 %) des 50 titres officiels des programmes reconnus par l’ALA. Deux d’entre eux s’intitulent « études en sciences de l’information » sans référence aux bibliothèques dans leur appellation officielle. L’un utilise la formule « politique et sciences de l’information », l’autre « communication, information et bibliothéconomie », ou bien « bibliothéconomie et enseignement des technologies », ou encore « sciences de l’information ». A la mi-95, une seule école, à l’Université de l’Arizona, conserve le nom d’« école de bibliothéconomie ».
Objectifs et orientation
Un changement dans les titres n’implique pas nécessairement un changement dans les programmes ou dans les compétences requises. Il suggère le besoin de faire passer la perception de ce changement, et d’une évolution des objectifs ou de l’orientation.
Pour se rendre compte de l’étendue de cette évolution, et en particulier de l’impact des technologies, il faut considérer à la fois les compétences souhaitées par les employeurs et les professionnels et celles qui figurent dans les programmes des écoles américaines de bibliothéconomie. Les nouveautés présentes dans les programmes de formation aux métiers des bibliothèques vont être étudiées ici, et une attention particulière portée à l’impact des nouvelles technologies et des préoccupations sociopolitiques actuelles dans leur conception. Enfin, on s’interrogera sur les tendances futures de la formation à ces métiers, et on tentera de prévoir un programme type pour l’an 2000 et au-delà.
Pour donner un cadre à ce travail, les essais de définition des compétences des bibliothécaires faites dans le passé seront brièvement présentées, ainsi que les tentatives actuelles d’identification de ces compétences. Seront commentés les tendances récentes du changement des exigences de base, les aides spécifiques de la Fondation Kellogg pour la révision de la formation bibliothéconomique, le mouvement vers la spécialisation au sein des programmes et l’impact possible du projet « Goal 2000 » de l’ALA sur l’avenir de la formation aux métiers des bibliothèques.
Compétences des professionnels des bibliothèques
La première tentative de définition des compétences des professionnels des bibliothèques est peut-être représentée par un essai intitulé Les qualifications professionnelles du bibliothécaire, écrit par Melvil Dewey 1. Dans la liste des qualités énumérées, on trouve des traits de caractère tels que le courage, l’ambition, l’enthousiasme, l’énergie, la persévérance et la foi. Les langues étrangères sont citées comme d’essentiels outils de travail, l’allemand et le français sont désignés comme les plus usitées, et constituent, avec l’anglais, un bon matériau de base. Dans le chapitre « Un économiste des bibliothèques », les législations, municipale, nationale, fédérale, la manière de collecter des fonds financiers, les bâtiments et l’équipement, et la conservation des livres sont parmi les secteurs cités. Sous « Connaissance et expérience », figurent les compétences concernant la restauration des livres, la calligraphie – la formation des lettres –, la sténographie, et la dactylographie.
Dans les années 70, un groupe de 13 bibliothèques, plus celle de l’Etat de Californie ont présenté une liste de 36 conditions requises avant l’entrée dans un emploi de bibliothécaire 2. Ces compétences vont du travail de référence, catalogage, et sélection d’ouvrages à la résolution de problèmes généraux. En termes de technologie, les compétences en écriture manuscrite, et dactylographie – qui figuraient sur la liste de Dewey de 1899 –, ont été remplacées en 1977 par la recherche documentaire informatisée. Mais cette année-là, une seule de ces 36 compétences traitait spécifiquement d’informatique.
Dans une enquête menée en 1979 par des responsables du personnel, les 32 bibliothèques universitaires ayant répondu ont indiqué que les qualités attendues par les bibliothèques de leur personnel débutant, et devant avoir été acquises au cours de leur formation professionnelle, étaient des capacités de gestion (pour 30 % des recruteurs), une formation en informatique (20 %), des diplômes de haut niveau et la connaissance approfondie d’une discipline (17 %) 3. Ces qualités étaient analogues à celles considérées comme indispensables pour le développement à long terme d’une bibliothèque universitaire de recherche.
Au début des années 1980, on assista à une agitation soudaine dans la littérature et la recherche professionnelles, des congrès furent organisés autour du thème des compétences professionnelles. Le ministère de l’Education américain accorda en 1983 un contrat à King Research, Inc. afin de procéder à une réflexion sur les compétences nécessaires à différents cadres de travail dans les bibliothèques. Le rapport final fut publié en 1986. Plus de cent listes différentes de compétences furent élaborées pour ce projet 4.
Au printemps de 1983, l’École supérieure des bibliothèques et des sciences de l’information de l’Université de l’Illinois a tenu une conférence sur le thème : compétences professionnelles, technologie et bibliothécaire. Les communications s’interrogeaient sur les compétences nécessaires à certains types de bibliothécaires, sur les services de bibliothèque, et sur le rôle des associations dans le développement de ces compétences professionnelles 5.
Les qualifications professionnelles n’ont pas toujours été considérées d’un œil favorable. En 1983, Herbert White caractérisait la définition de compétences pour les professionnels de l’information comme un « exercice dangereux », dans la mesure où cette définition minimum pourrait signifier que, pour un moindre coût, des postes pourraient être attribués à des personnes qui ne possèdent pas les diplômes reconnus par l’ALA 6. Il mettait en doute les motivations de l’établissement d’une liste de compétences des professionnels de l’information présentée par le bureau de l’Education ; il demandait à la profession de se méfier de tout essai d’établir une liste de qualifications de base qui « ne représente ni une approche professionnelle ni une philosophie » 7.
Tendances actuelles : le regard de la profession
Alors qu’il y a toujours beaucoup de débats dans la littérature professionnelle sur les compétences des bibliothécaires – particulièrement en ce qui concerne l’accès à l’information électronique –, il n’y a aucun consensus sur les compétences requises pour tous les professionnels des bibliothèques. En fait, l’intérêt pour les activités de recherche et l’organisation de congrès manifesté dans les années 80 semble s’être tari dans les années 90.
L’Association des bibliothèques médicales, qui avait autrefois un programme destiné à la certification (ou reconnaissance professionnelle) de ses bibliothécaires, et fondé sur des compétences, s’est tournée vers une procédure de qualification professionnelle en appui sur un programme de certification jugée par des pairs. Le programme modèle présenté par cette Association inclut des éléments spécifiques d’informatique, ainsi que la fourniture de services d’information, la gestion et la recherche documentaire faisant partie des éléments souhaités 8.
La seule association professionnelle qui travaille actuellement sur les compétences professionnelles est l’Association des bibliothèques spécialisées. Dans un article écrit en 1993, Marydee Ojala propose des compétences spécifiques de base pour les directeurs de bibliothèques spécialisées (qu’elle appelle cybrarians), qui sont davantage des principes généraux que des qualifications spécifiques 9. En 1994, cette Association a mis sur pied une commission chargée de préparer un document décrivant les capacités et les compétences, dont ont besoin les diplômés qui souhaitent accéder au secteur des bibliothèques spécialisées. La publication de ce document est prévue dans le courant de l’année 1996 10.
Tendances actuelles : le regard de la formation
Malgré l’annonce en 1994 de la mise en place d’une commission sur les compétences par l’Association des bibliothèques spécialisées, il semble qu’un désintérêt se soit manifesté dans les années 90 sur les questions de compétences professionnelles spécifiques identifiées par les organismes professionnels et/ou gouvernementaux. L’accent a été mis sur le rôle d’un enseignement professionnel capable de donner les compétences dont auront besoin les nouveaux diplômés dans des emplois de bibliothèques, aussi bien que pour d’autres métiers, à l’ère de l’informatique.
Le résultat est que les écoles professionnelles étudient les compétences en informatique dont les étudiants ont besoin avant de commencer leur diplôme, ainsi que la formation spécialisée dont ils ont besoin pendant leurs études afin de survivre après l’obtention de leur diplôme, dans un univers de concurrence pour l’emploi.
A une époque, la connaissance de plusieurs langues, ainsi qu’une bonne culture générale, étaient considérées comme une bonne chose avant l’entrée dans une école supérieure des bibliothèques. Ces trente dernières années, ces critères ont eu tendance à disparaître des exigences demandées à l’inscription.
Mais, depuis deux ou trois ans, de nouvelles attentes sont apparues. Un certain nombre d’écoles demandent des compétences en technologie et en informatique, et les exigent de tous les étudiants qui veulent suivre la formation. Ceux-ci sont supposés les avoir acquises avant le début de leurs études professionnelles ou bien doivent les acquérir au cours de leurs études. Dans une enquête de 1994 effectuée par Tom Kochtanek, Norm Howden et Nancy Zimmerman, 41 écoles reconnues par l’ALA ont répondu à des questions concernant les compétences informatiques des étudiants. Une seule de ces 41 écoles a indiqué qu’elle exigeait des compétences en informatique pour l’admission, et 34 (82,9 %) qu’elles exigeaient une compétence en technologie pour l’obtention du diplôme. La plupart (31, soit 91,2 %) satisfont à cette exigence par des cours de base obligatoires, et neuf d’entre elles (26,5 %) demandent un stage pratique en laboratoire informatique 11.
L’Université d’Illinois a constitué un ensemble de compétences informatiques en 1994. Les étudiants doivent auto-évaluer leurs compétences. Six ateliers (introduction au PC et à Windows, traitement de texte, gestion de bases de données, catalogue de bibliothèque informatisé avec banques de données de périodiques, courrier électronique sur Internet, et Internet gopher/telnet/ftp/, etc.) sont mis à leur disposition une semaine avant le début du trimestre universitaire. En 1994, parmi les 125 nouveaux étudiants, 96 % (tous sauf cinq) avaient choisi de suivre un ou plusieurs de ces ateliers. La gestion de bases de données, le catalogue en ligne de l’université, ainsi que l’utilisation d’Internet, sont les plus populaires.
L’Ecole de bibliothéconomie et de sciences de l’information de l’Université du Michigan offre, en introduction, des ateliers à tous les nouveaux étudiants, ce qui donne l’occasion aux arrivants d’acquérir des savoir-faire technologiques considérés comme indispensables par la faculté dès les premiers jours de leurs études 12. L’Ecole des bibliothèques et des sciences de l’information du Kentucky propose également des ateliers sur les opérations Windows, le traitement de texte et le courrier électronique à ses nouveaux étudiants 13. L’Ecole supérieure des bibliothèques et des sciences de l’information du Rosary College (Illinois) exige des compétences en micro-informatique de tous ses étudiants en les faisant participer à des travaux pratiques d’informatique de niveau débutant. Ces derniers peuvent éviter ces cours en passant un test prouvant leur niveau. L’Université de San José (Californie), depuis le début de l’automne 1995, exige un niveau minimum en informatique dès l’inscription. Simmons College (Massachusetts) a introduit un cours de nouvelles technologies hors cursus 14.
A l’Ecole des bibliothèques et des études en sciences de l’information de l’Université d’Alabama, l’un des six cours obligatoires porte sur les technologies de l’information, ce qui donne aux étudiants des bases en informatique et en informatisation des bibliothèques 15. L’Ecole des bibliothèques et sciences de l’information de l’Université de Pittsburgh travaille sur une liste de compétences nécessaires pour ses diplômés en bibliothéconomie 16.
Compétences des bibliothécaires
Le gouvernement fédéral fait des efforts importants pour financer des recherches visant à établir des compétences pour les bibliothécaires et la reconnaissance de listes de compétences mises au point par un certain nombre d’organismes professionnels d’Etat ou fédéraux. Cependant, une méfiance semble subsister envers tout ce qui pourrait imposer des compétences spécifiques dans la définition de l’emploi du professionnel des bibliothèques. Même dans le secteur de la formation aux métiers des bibliothèques, l’accent a davantage été mis sur les compétences au moment de l’entrée dans une formation que sur celles acquises à l’obtention du diplôme. En fait, l’attention récente s’est essentiellement portée sur la capacité des étudiants en cours de formation professionnelle à faire face aux prérequis exigés pour pouvoir suivre les cours des programmes professionnels.
Les besoins fondamentaux
La nature des programmes fondamentaux dans les écoles de bibliothéconomie et sciences de l’information aux Etats-Unis a été récemment étudiée et résumée par Guy Marco dans Libri 17. Ce dernier fait remarquer que le mot « fondamental » se réfère aux sujets et non à des cours spécifiques et que les « sujets fondamentaux » sont ceux qui doivent être maîtrisés par tous les inscrits à une formation diplômante. Ceci est généralement réalisé par la mise en place d’un ensemble de cours qui incluent ces sujets indispensables pour tous les étudiants.
Guy Marco remarque que, dès les années 90, les sujets fondamentaux étaient à peu près réduits à la bibliographie et au catalogage dans la plupart des écoles reconnues aux Etats-Unis. Il souligne également que les « sciences de l’information » ne semblent pas faire partie des listes de sujets obligatoires pour tous les étudiants dans les programmes de sciences de l’information examinés au début de ces années-là. Guy Marco mentionne également une étude qui suggère que les directeurs des bibliothèques continuent à chercher du personnel ayant des connaissances en sélection de documents, bibliographie, catalogage et applications informatiques, alors que les écoles de bibliothécaires et de sciences de l’information semblent s’orienter vers des sujets plus pointus et éloignés de ceux que la plupart des directeurs attendent des nouveaux diplômés au moment de l’embauche 18.
En 1994, un grand nombre d’écoles américaines ont réexaminé leur programme de base. Sur 56 écoles reconnues par l’ALA qui ont fourni des données pour le rapport statistique 1995 sur la formation en sciences de l’information et bibliothéconomie 19, 17 (soit 30 %) ont indiqué qu’elles songeaient à réviser leur programme de base et/ou leurs cours obligatoires 20. Trois écoles, celles de l’Université du Michigan, de l’Université Drexel (Pennsylvanie), et de l’Université de l’Illinois, ont reçu des bourses de la Fondation Kellogg en 1994 pour réformer leurs formations en bibliothéconomie et sciences de l’information. Alors que les bourses étaient différentes d’une école à l’autre, la révision du programme de base était un élément présent dans toutes les bourses attribuées.
Les bourses Kellogg
La plus importante des bourses de la Fondation Kellogg (4,3 millions de dollars) a été attribuée à l’Ecole de bibliothéconomie et de sciences de l’information de l’Université du Michigan. Celle-ci devait imaginer un nouvel enseignement des sciences de l’information, des technologies de l’information, et de la bibliothéconomie (CRISTAL-ED) 21. En tant que membre participant au projet du groupe Kellogg, cette école réexamine son programme fondamental, réfléchit à des domaines possibles de spécialisation, explore de nouvelles approches de l’enseignement et de l’apprentissage (y compris l’Internet Public Library Experiment), autonome et à distance, et met en place la listserv CRISTAL-ED ; celle-ci couvre depuis janvier 1995 des sujets tels que la fabrication d’un programme d’études fondamental, la certification professionnelle, des compétences en informatique, le placement des diplômés de bibliothéconomie et de sciences de l’information dans des secteurs du marché du travail non liés aux bibliothèques, ainsi que la valeur économique de l’information. Plus de 1 000 personnes sont abonnées au service listserv. On peut y accéder sur le WWW par : http://http2.sils.umich.edu/Publications/CRISTALED/listserv.html ).
Le Collège d’études en sciences de l’information de l’Université Drexel a reçu 1,1 million de dollars en 1994 de la Fondation Kellogg pour le soutien d’un projet à développer sur quatre ans. Ce projet vise à développer de nouveaux programmes de formation professionnelle en informatique et sciences de l’information. 750 000 dollars ont été versés par la Fondation Alfred P. Sloan pour un projet d’apprentissage en coopération assisté par ordinateur qui inclut l’utilisation du réseau d’apprentissage asynchrone, et qui répond aux besoins pédagogiques du Collège d’études en sciences de l’information 22.
L’Ecole supérieure de bibliothéconomie et de sciences de l’information de l’Université de l’Illinois a reçu 63 826 dollars pour mettre en place un cours intégré de maîtrise en sciences de l’information et en bibliothéconomie que tous les étudiants devront suivre, quel que soit leur intérêt pour le travail traditionnel de bibliothèque ou le transfert électronique d’informations. Il s’agit d’un essai d’intégration des sciences de l’information et de la bibliothéconomie dans trois cours obligatoires. Ces cours traitent de l’organisation, de la collecte et de la recherche d’information, ainsi que des valeurs sous-jacentes associées à l’accès à l’information (droit, éthique et questions professionnelles). Dans l’Illinois, l’obligation de compétence en informatique est liée à ce programme revu et corrigé dans la mesure où l’on attend des étudiants qu’ils aient un minimum de connaissances dans l’utilisation des ordinateurs et des réseaux électroniques avant de suivre les enseignements fondamentaux.
Spécialisations/options
Un certain nombre d’écoles offrent des spécialisations (parfois appelées « options ») au sein du programme de bibliothéconomie professionnelle. L’Université de Caroline du Nord, par exemple, offre deux options, bibliothéconomie et sciences de l’information.
Dans l’option bibliothéconomie, existent des spécialisations pour les bibliothèques publiques et scolaires capables de répondre aux critères de certification de l’Etat permettant de trouver un emploi dans ces bibliothèques 23.
Les spécialisations par type de bibliothèques sont parmi les plus courantes dans les études à finalité professionnelle. En plus des spécialisations pour les bibliothèques publiques et scolaires, souvent demandées par les bureaux pour la certification, on trouve des cours spécialisés dans les secteurs scientifiques médicaux, la bibliothéconomie juridique, ou musicale, dans les brochures des programmes des écoles.
Alors que la certification d’Etat n’existe pas toujours dans ces domaines, certaines spécialisations en études universitaires ou en bibliothèques spécialisées font parfois partie du programme conseillé en formation professionnelle. On trouve également dans certaines écoles des cours concentrés sur les services techniques (organisation, conservation, acquisition de documents), ou les services publics, ainsi que sur des secteurs particuliers comme les archives.
En 1991, Constance Mellott a examiné l’ensemble de l’offre existante dans les domaines de l’archivistique, et pour la gestion de bibliothèques d’art, de médecine, de musique, et de droit. Elle a découvert que la plupart des écoles disaient offrir un ou plusieurs cours en archivistique, ainsi que de gestion de bibliothèques d’art, de musique, ou de médecine. A une question ouverte de son enquête demandant si d’autres formations spécialisées étaient souhaitées, c’est la gestion de bibliothèque de droit qui est revenue le plus souvent dans les réponses 24.
L’Ecole supérieure des bibliothèques et des sciences de l’information de l’Illinois, qui a longtemps maintenu une tradition de programme généraliste, songe à introduire des spécialisations dans son cursus et projette d’organiser un séminaire à la faculté à l’automne prochain pour discuter de ces questions et de leurs implications. L’Université du Tennessee va étudier la possibilité d’ajouter des thèmes plus spécialisés à son programme 25.
Le XXIe siècle
L’ALA a lancé un projet de planification pour le siècle prochain (ALA Goal 2000). Ce projet, qui inclut un financement en augmentation pour le bureau de l’ALA de Washington et la mise en place d’un bureau des technologies de l’information, lui donnerait un rôle plus important dans la détermination d’une politique nationale d’information. Ce projet se préoccupe de l’orientation prise par la formation professionnelle des bibliothécaires aux Etats-Unis, en raison notamment de l’impact de la diffusion électronique de l’information et des autoroutes de l’information 26. L’augmentation des cotisations des adhérents individuels de l’ALA a été approuvée, et l’association mandatée pour jouer un rôle important dans l’infrastructure de l’information au XXIe siècle.
Les questions abordées dans cet article seront sans doute des éléments importants dans la forme que prendront les bibliothèques et les formations dans les décennies à venir. L’expansion des technologies et des logiciels informatiques qui les soutiennent sera probablement un facteur des plus significatifs. Nous avons déjà vu leur impact sur les réflexions sur l’enseignement bibliothéconomique, les étudiants devant commencer leurs études avec des connaissances suffisantes en informatique pour être à même d’utiliser ces nouvelles technologies durant leurs études.
Alors que la société met de plus en plus l’accent sur les aspects technologiques de la recherche documentaire, le programme des écoles de formation des bibliothécaires va probablement offrir davantage de cours de technologie. Ceci apparaît dans le souci de l’ALA, de repositionner la profession au centre de l’infrastructure nationale d’information mise en place par la technologie et les ordinateurs. Mais on peut se demander comment les écoles qui forment les bibliothécaires se différencieront de celles qui forment les informaticiens ou les ingénieurs de secteurs voisins. La réponse viendra sans doute du talent déployé par les écoles supérieures américaines qui forment les bibliothécaires de l’avenir pour mêler ce qu’il y avait de mieux dans les engagements du passé – service et justice sociale – et la formation à la technologie. Le programme qui réussira en l’an 2000 et au-delà sera probablement celui qui réunira les exigences d’ambition, d’enthousiasme, d’énergie, de persévérance et de foi mis en avant à la fin du XIXe siècle par Melvil Dewey. Mais pour ceux qui sont chargés de fixer l’orientation des programmes pour l’an 2000 et au-delà, c’est le courage, parmi les qualités décrites par Dewey, qui sera essentiel pour mêler forces du passé et exigences de l’avenir...
Septembre 1995