Bibliotheca Erasmiana Bruxellensis

catalogue des oeuvres d'Erasme éditées au XVIe siècle et appartenant à la Bibliothèque royale Albert Ier = Bibliotheca Erasmiana Bruxellensis : catalogus der werken van Erasmus ultgegeven In de 16de eeuw aanwezlg in de Koninklijke Bibliotheek Albert I

par Philippe Hoch

Joseph De Reuck

éd. par Georges Collin et René Hoven
Bruxelles : [Bibliothèque royale Albert Ier], 1993. - 321 p. ; 42 cm.
ISBN 2-87093-072-0
ISBN 90-6637-081-5 : BF 3 000

Les historiens du XVIe siècle et, plus précisément, les spécialistes de l'humanisme se réjouiront vivement de la parution d'un nouvel instrument de travail appelé à rendre, sans aucun doute, de singuliers services aux chercheurs. A l'heure même où la constitution de répertoires « immatériels », projetée à l'échelle européenne, pourrait bien finir par quitter le domaine des vœux pieux pour celui des réalisations tangibles, comme pour tempérer l'enthousiasme légitime que suscitent de telles entreprises, et pour permettre aux seiziémistes d'attendre d'autant plus sereinement la mise en œuvre des bases de données dont ils ont, avec tous les autres amateurs de livres anciens, le plus grand besoin, voici, encore, un catalogue imprimé, et sans conteste un modèle du genre. Son objet est le recensement exhaustif des œuvres d'Erasme éditées durant le XVIe siècle et qui se trouvent conservées à la Bibliothèque royale Albert Ier de Bruxelles.

La communauté scientifique doit cette importante contribution - parût-elle indirecte - aux fécondes études érasmiennes, à la science et au labeur patient de Joseph De Reuck (1904-1986). Docteur en philosophie et en droit, l'auteur, d'abord assistant à l'Université de Gand, exerça les fonctions de chef de département à la Bibliothèque royale de Bruxelles, où il rédigea notamment les index de la Bibliotheca Belgica, avant d'entreprendre le travail bibliographique publié aujourd'hui, mis au point après la disparition de son principal artisan, par René Hoven, collaborateur de l'édition critique des écrits d'Erasme élaborée à Amsterdam.

Le savant catalogueur avait eu pour ambition première de décrire toutes les éditions d'Erasme appartenant à l'institution bruxelloise, quelle que fût leur date de publication. Mais la sagesse voulut que l'on fixât à l'année 1600 une indispensable limite chronologique. La Bibliotheca Erasmiana Bruxellensis réunit en effet, pour le seul XVIe siècle, quelque six cent trente-cinq numéros.

Erasme auteur, éditeur, traducteur...

Les notices sont réparties en trois séries. La première concerne les œuvres érasmiennes, que celles-ci soient ou non suivies, dans le même volume, d'écrits dus à d'autres auteurs. Le recensement débute, naturellement, par les Opera omnia, de format in-folio, issues de la célèbre officine bâloise de Froben, entre 1540 et 1542. Parmi les textes séparés ayant connu la fortune la plus grande, et dont l'établissement belge conserve le plus d'exemplaires, figurent, retenus ici parmi beaucoup d'autres, les Adagia (trente et une références), les Apophtegma (vingt-quatre) ou encore les Colloquia (seize). Outre les éditions latines, figurent également les traductions dans les principales langues européennes (allemand, néerlandais, italien, espagnol et français), grâce auxquelles l'on parvient à plus de cent soixante notices.

Dans la seconde partie de la Bibliotheca Erasmiana, Joseph De Reuck a réuni les textes d'auteurs très divers, anciens ou modernes, édités, traduits ou commentés par le grand humaniste. Par l'entremise de ce travailleur infatigable, un nombre impressionnant de « monuments » de l'Antiquité, tant païenne que sacrée, ont été « restitués ». Ainsi, au fil des pages, nous assistons au défilé des Grecs (Esope, Euripide, Xénophon, Lucien de Samosate...), mais plus encore des Latins, qu'ils fussent poètes, philosophes, rhéteurs... Du seul Cicéron - et malgré le Ciceronianus -, Erasme publia entre autres le De amiticia, le De officiis, le De senectute ou encore le Songe de Scipion ou les Tusculanes. S'agissant de l'Antiquité chrétienne, il convient de relever, outre, bien sûr, le Nouveau Testament, objet de tant de querelles, les éditions des principaux Pères grecs (saints Basile, Jean Chrysostome) ou de l'Eglise latine (saints Ambroise, Irénée, Cyprien...).

Quant à la troisième partie, elle recense les œuvres de différents personnages, accompagnées de textes d'Erasme ou préfacées par l'humaniste. Dans cette dernière série, apparaissent aussi bien Pindare, Tite-Live, Cicéron - encore -ou Sextus Empiricus, Saint Athanase ou Saint Augustin, que les contemporains « frères » en humanisme : Thomas More, Vivès ou Beatus Rhenanus, auteur d'une Vita Erasmi.

Savantes notices

Les notices de Joseph De Reuck, complétées par Georges Colin, auteur du relevé des marques de possession, ainsi que de la description des reliures, se signalent par la richesse et par la précision des informations qu'elles apportent. Pour la première zone (titre et mention de responsabilité), une reproduction photographique de la page de titre a été préférée à une transcription qui, pour fidèle qu'elle se voulût, n'eût peut-être pas été exempte d'erreurs. Passons sur la zone de l'adresse, conforme dans sa version bruxelloise aux usages en vigueur notamment en France, à la différence, toutefois, que l'indication du format bibliographique s'y trouve intégrée. S'agissant de la collation, elle comporte naturellement le relevé - toujours hautement souhaitable - des signatures, ainsi que celui des marques typographiques (que la pratique française tend plutôt à placer dans la zone des notes). Ces dernières, précisément, permettent au catalogueur d'apporter des précisions relatives ou au titre ou au contenu (épîtres dédicatoires, éloges, œuvres non mentionnées sur la page de titre...), de fournir les indispensables références aux bibliographies générales ou spécialisées, nationales ou intemationales, ainsi que de mettre en évidence les particularités d'exemplaire.

La Bibliotheca Erasmiana est complétée par sept index qui en facilitent l'utilisation et permettent au chercheur de tirer de ce savant catalogue tout le profit espéré. Relevons particulièrement la table des auteurs édités, traduits ou commentés par Erasme, qui sont ici au nombre de quarante-deux ; l'index topographique des imprimeurs, liste dans laquelle Paris se trouve cité quarante-huit fois, Anvers trente-cinq, tandis que les mentions des villes de Bâle et de Lyon, autres foyers importants de l'humanisme, s'élèvent, à égalité, à vingt. Un index général récapitule les principales informations contenues dans ce catalogue, qui constitue une nouvelle contribution à la connaissance du patrimoine des bibliothèques européennes et aux études humanistes.