Les documents cartographiques
Pierre-Yves Duchemin
Le catalogage des documents cartographiques, du fait de leur variété, fut longtemps considéré comme secondaire, voire inexistant, sinon d'une extrême complexité. En effet, un document cartographique, c'est aussi bien un plan de ville qu'un portulan, un globe qu'un atlas, une sphère céleste qu'une spatiocarte, un calque manuscrit qu'un CD-Rom ou, tout simplement, une carte. Pourtant, un besoin existait : la meilleure preuve en est que l'ISBD (CM, for Cartographic Materials) fut le premier ISBD spécialisé à être publié en 1977. Traduit en français, puis devenu norme AFNOR, il a permis un essor rapide et un développement important des fichiers descriptifs en France, en incitant de nombreux établissements à traiter des fonds anciens provenant souvent de confiscations révolutionnaires ou des fonds modernes résultant d'une nouvelle politique d'acquisitions.
Parallèlement, ce développement du traitement catalographique des documents cartographiques a suscité l'apparition d'un enseignement spécifique, notamment dans de nombreux centres de préparation à la formation moyenne.
La structure descriptive issue de l'ISBD (CM) ne propose malheureusement pas de solutions concernant les accès au document cartographique. Ce type de documents nécessite, comme tout autre document, des accès auteurs, des accès collectivités, des accès matières, éventuellement des accès titres, pour lesquels existent des textes normatifs au sein de la production de l'AFNOR, ou des listes d'autorité de termes contrôlés et hiérarchisés (RAMEAU, PASCAL, FRANCIS, GEOMINES, ICOMOS, etc.).
Les toponymes
En revanche, même au niveau international, rien n'existe concernant la normalisation des toponymes ou noms géographiques. Cette question est actuellement discutée par la section « Bibliothèques de géographie et cartothèques » de l'IFLA. Un projet existe au sein de la Communauté européenne. Cette question est tellement à l'ordre du jour que la commission « Documentation » du Comité français de cartographie, associée à la commission de toponymie de l'Institut géographique national, a préparé, dans le cadre de l'AFNOR, un texte normatif précisant la forme et la structure des toponymes ; ce texte, après homologation comme norme française, est à paraître à l'automne 1993.
Comme il a été dit plus haut, la normalisation en matière de catalogage de documents cartographiques est le résultat du travail commun du programme fondamental UBCIM (Universal Bibliographic Control and International MARC Programme) et de la section « Bibliothèques de géographie et cartothèques » de l'IFLA. Cette tâche est relayée en France par la Commission « Documentation » du Comité français de cartographie qui forme l'essentiel du groupe d'experts chargé de ce travail de normalisation au sein de l'AFNOR.
Les formats
Devant l'informatisation croissante, non seulement des bibliothèques universitaires et des établissements spécialisés, mais aussi des bibliothèques publiques, un autre besoin de normalisation se fait sentir : si une norme AFNOR, issue de l'ISBD (CM), permet une description, voire des accès normalisés, elle est en revanche insuffisante pour standardiser la structure d'un enregistrement informatique destiné éventuellement à l'échange international. C'est là une autre tâche de la section « Bibliothèques de géographie et cartothèques » de l'IFLA qui compte parmi ses membres des spécialistes des « grands » formats MARC utilisés dans le monde.
Ces formats, de structure très proche, permettent une description très fine de tous les documents cartographiques. Le travail de la section consiste à effectuer un tri parmi toutes les données disponibles dans les formats LC-MARC, UK-MARC, INTERMARC (CP), CCK, etc. pour définir celles qui sont absolument indispensables pour décrire un document cartographique, qu'il soit carte nautique manuscrite sur vélin ou spatiocarte. Ce tri, sorte de plus petit commun dénominateur, est ensuite la base de propositions au programme UBCIM de l'IFLA pour une évolution d'UNIMARC vers une meilleure description des documents cartographiques.
Cette coopération internationale porte déjà ses fruits, ne serait-ce qu'au niveau national : la récente traduction française d'UNIMARC * prend en compte certaines données d'INTERMARC (CP). Par ailleurs, une convention entre l'agence de coopération AGIR (Agence pour la gestion de l'information en réseau) et la Bibliothèque nationale a pour but la réalisation d'un catalogue collectif des cartes antérieures à 1815 conservées dans les bibliothèques de la région Centre et le déchargement des notices catalographiques réalisées insitu dans la base BN-OPALINE. C'est là le premier résultat tangible de l'effort de normalisation entrepris depuis une dizaine d'années. D'autres projets existent, notamment avec des bibliothèques universitaires et des établissements du secteur public. La coopération passe nécessairement par la normalisation, l'idée est maintenant communément admise. Le mouvement est lancé et verra son aboutissement dans la réalisation du Catalogue collectif de France.
Avril 1993