La veille technologique

l'information scientifique, technique et industrielle

par Arlette Boulogne

Hélène Desvals

Henri Dou

Paris : Dunod, 1992. - XII-436 p. ; 24 cm.
ISBN 2-10-000246-5

La veille technologique est présentée depuis quelques années comme un des éléments principaux de l'aide à la décision pour les responsables d'entreprises. Cette veille, définie par François Jakobiak et Henri Dou comme « l'observation et l'analyse de l'environnement suivies de la diffusion bien ciblée des informations sélectionnées et traitées, utiles à la prise de décision stratégique » (p. 3), est le plus souvent confiée à des professionnels choisis parmi les scientifiques ou les ingénieurs, ou parmi les documentalistes. C'est essentiellement pour eux qu'Hélène Desvals, documentaliste, auteur d'un très bon ouvrage méthodologique (Comment organiser sa documentation scientifique) publié en 1975, et Henri Dou, spécialiste français incontesté de la bibliométrie, ont réuni vingt-et-une contributions de professionnels et chercheurs d'horizons variés.

Des veilleurs mobiles

Après un plaidoyer sur la nécessité de développer l'utilisation de l'information dans les petites et moyennes industries écrit par Michel Aguilar du ministère de l'Industrie, l'évolution de la recherche documentaire est présentée dans deux articles. Hélène Desvals explique que, pour « apporter (au responsable à l'affût d'idées novatrices) des idées en émergence, de la prospective, et le surprendre utilement » (p. 72), il faut deux équipes. Un groupe de « veilleurs » très mobiles qui collectent des informations partout et sur tout (congrès, salons, catalogues de prix, publicités...), et un autre groupe plus sédentaire qui interroge avec performance les banques de données et sache « faire parler » les listes de références en les présentant sous forme de « schémas, diagrammes, camemberts, en faisant intervenir perspective, couleur, animation... », bref, en utilisant l'infographie. François Jakobiak et Henri Dou traitent en détail des méthodologies et outils de la veille technologique pour l'entreprise, point de vue complété par un autre article d'Henri Dou qui développe les aspects informatiques (l'outil micro-informatique, panorama du matériel, des logiciels avec prix mais sans date). La formation à l'interrogation des banques de données peut se faire grâce à l'enseignement assisté par ordinateur, nous explique Jean-Pierre Lardy, qui termine son article par un répertoire des didacticiels en recherche documentaire informatisée.

La veille appliquée

Une autre série de contributions proposent des relations d'expériences de veille appliquée à certains secteurs : en électronique et informatique (François Bus), en chimie (Christian Dutheuil), à l'Institut français du pétrole (Magdeleine Moureau, Anne Girard, Annie Buffeteau), dans la recherche pharmaceutique (Colette Gueunier). Quant à l'INIST * (Nathalie Dussoulier, Jacques Ducloy, Catherine Côme), son nouveau fonctionnement, avec utilisation des nouvelles technologies, mise à disposition de banques de données bibliographiques et fourniture des documents primaires, permet à tous ses utilisateurs d'avoir les outils pour leur propre veille.

Les brevets faisant partie des indicateurs à surveiller en permanence, une partie de l'ouvrage leur est consacrée. Jean-Louis Sommier nous informe de tout ce qu'il faut savoir sur les lois et procédures concernant la propriété industrielle en France et à l'étranger puis explique le rôle des brevets comme « outil de management pour la stratégie de l'entreprise ». Parina Hassanaly présente avec des exemples les banques de données brevets.

La bibliométrie

Le quatrième ensemble d'articles traite de la bibliométrie (ou exploitation statistique des publications), le traitement se faisant soit sur les références bibliographiques et leurs différents champs, soit sur les citations (« simple relevé de la référence faite par un document à un autre document », p. 283), soit sur les mots-clés d'indexation des articles scientifiques, chacun de ces thèmes étant présenté sous un angle méthodologique ou appliqué.

Ainsi les responsables de ce livre exposent la mise en évidence de l'activité et de l'évolution d'un laboratoire de chimie par la méthode d'analyse statistique des mots associés dans une grande banque de données, tandis que Luc Quoniam traite de la méthodologie de la bibliométrie sur des références bibliographiques et que Jean-Pierre Courtial, Françoise Laville, Anne Sigoneau, Marie-Gabrielle Schweighofer, William Turner proposent des développements de l'analyse des mots associés. Hervé Penan présente les principes de l'analyse des citations puis son application au domaine de la théorie microéconomique. Thierry Lafouge nous fait part de ses recherches pour modéliser la circulation des ouvrages dans une bibliothèque, Chantal Bedecarrax et Charles Huot de leurs travaux d'application de l'analyse relationnelle « aux fichiers avec information non standardisée ». Clément Paoli et Marie-Christiane Dionne, quant à eux, travaillent sur la structure des données permettant l'exploitation bibliométrique des banques de données en ligne.

Cet ouvrage, qui se veut d'information et de formation sur un sujet qui concerne maintenant tous ceux qui travaillent dans le secteur de l'information, va certainement décevoir en partie ses lecteurs. Il faut souligner la richesse de son contenu, la qualité de chaque contribution qui présente en général introduction, conclusion et bibliographie, l'absence de données redondantes malgré le grand nombre d'articles, les renvois faits d'une contribution à l'autre. On regrettera d'autant que les auteurs ne nous permettent qu'une lecture séquentielle de l'ensemble. En effet, le parti pris de présenter les articles sans plan organisé et surtout l'absence d'index matière ou de table des matières détaillée rendent l'utilisation de ce livre, après une première lecture, difficile. Comment retrouver facilement une information dans ses différentes parties avec, comme seul index, celui des auteurs, et une table des matières qui n'est qu'un sommaire, alors que chaque contribution (parfois très longue, plus de 20 pages) est structurée avec titres de parties et sous-parties ? Cette présentation, qui correspond plutôt à celle d'un numéro spécial de périodique, si elle permet peut-être une approche plus vivante de la veille technologique, nuit à l'usage à plus long terme que l'on a envie de faire de la masse d'informations indispensables que nous offrent les auteurs. Mais il est toujours possible à chacun de fabriquer son propre index...

  1. (retour)↑  INIST : Institut national de l'information scientifique et technique.