Enquête sur la fonction documentaire dans les universités françaises

étude préliminaire

par Yannick Valin

Marc Chauveinc

Paris : Ministère de l'éducation nationale, Inspection générale des bibliothèques, 1992. - 28 cm. T. 1 : 69 p. ; t. 2 : 86 p.

S'inscrivant dans une démarche remontant au milieu du XIXe siècle, cette étude préliminaire porte sur la place et la fonction des bibliothèques d'Unités de formation et de recherche dans l'université (BUFR) ; elle montre l'intérêt qu'il y aurait à les assimiler au système cohérent constitué par le Service commun de la documentation (SCD). Du rapport rédigé par l'Inspecteur général Marc Chauveinc, on appréciera la mesure et l'amplitude de vue face à un problème dont la résolution exigera une égale mesure, du tact, et des moyens financiers qui, seuls, crédibiliseront l'argumentation unificatrice.

Ambiguïté du terme

L'enquête n'a pu dégager une image authentique des BUFR au plan national : sur 75 universités, 23 seulement ont fourni des données complètes. En dépit d'un travail que l'on imagine considérable, l'enquête de 1990 se limite, pour beaucoup, à une comparaison sur 10 ans des bibliothèques évaluées en 1980. De plus, l'ambiguïté du terme générique BUFR est telle que la confusion s'installe. Le vocable englobe les anthentiques bibliothèques d'UFR et la masse énorme, composite, incernable des bibliothèques de laboratoires, d'instituts, de départements, voire d'enseignants-chercheurs isolés ; d'où le chiffre, estimé, de 3 000 BUFR en France, pour 51 UFR recensées. D'où aussi, cette disparité dans la taille des bibliothèques : de l'armoire aux collections dépassant les 20 000 volumes, des vacations de moniteurs étudiants, à l'équipe de professionnels.

L'étude s'efforce de pallier la carence d'informations directes par l'examen des crédits documentaires. En se limitant aux seuls comptes 618.3 (documentation technique et bibliothèque) et 216 (collections), les BUFR représenteraient 46 % du total des dépenses documentaires des universités, et 60 % en prenant en compte les autres ressources.

Mais, sur 10 ans, en francs constants, le budget documentaire des bibliothèques universitaires (BU) a progressé de 99 %, celui des BUFR baissé de 20 %. Le rapport BU/BUFR est passé de 0,66 en 1979 à 1,15 en 1990. L'augmentation des crédits documentaires des BU, corrélatif au tassement des crédits des BUFR, explique ce renversement de tendance qui devrait s'affirmer : de meilleurs services rendus par la BU permettent le désengagement des UFR du poste documentaire.

Des tentatives de réunification

Marc Chauveinc démontre que le système des BUFR est fondé sur la liberté individuelle et s'oppose en cela à la BU, issue d'une volonté collective. Il dissèque les raisons tant matérielles que psychologiques qui entretiennent ce dualisme documentaire. Ayant constaté qu'après chaque tentative de réunification des bibliothèques, la situation antérieure s'était progressivement rétablie, comme si elle procédait d'une nécessité organique, il imagine des voies nouvelles pour « réconcilier la cathédrale et les chapelles », autrement dit la BU et les BUFR.

Pour y parvenir, plusieurs types d'actions sont préconisés : l'identification et le regroupement de tous les crédits documentaires de l'université, le SCD assurant la gestion du 618.3. L'organisation plus fonctionnelle de ce service comblerait les exigences parfois contradictoires des utilisateurs par une osmose BU/BUFR selon un système de 4 niveaux : le service central d'organisation et de coopération, pilote du réseau ; la section actuelle, pluridisciplinaire, qui acquiert, catalogue et répartit les collections ; la bibliothèque de proximité ou section provenant du regroupement de BUFR intégrées ; les biblothèques associées (de laboratoires ou d'UFR refusant l'intégration) collaborant avec les SCD tout en demeurant autonomes.

Situés dans le droit fil des décrets de 1985 et de 1991, s'énoncent ainsi les principes d'une méthode. L'entreprise exige que l'effort financier en faveur des BU soit poursuivi, non seulement en crédits mais aussi en termes de locaux et de personnel.

Même si les intégrations ou les associations doivent être traitées au cas par cas, la mise en place d'un réseau documentaire informatisé peut être le facteur de mobilisation des éngergies autour d'un projet commun, précédant l'unification. Informatisation que Marc Chauveinc conçoit comme partie d'une modernisation des bibliothèques s'orientant vers un service plus proche du lecteur. Au terme de l'enquête, l'Inspection générale souhaite que ce travail puisse être poursuivi notamment par des statistiques régulières, comparables à l'Enquête statistique générale auprès des bibliothèques universitaires. Elles permettraient de clarifier la situation encore confuse du financement, et de l'exploitation de la documentation universitaire, hors BU.