Le british Library Document Supply Centre

Pierre-Marie Belbenoit-Avich

Le British Library Document Supply Centre est pour beaucoup de collègues français une bibliothèque quasi mythique, supposée tout fournir mais à des prix élevés. En réalité, peu le connaissent bien. Après plusieurs séjours dans cet établissement, l'auteur décrit sa place au sein de la British Library, sa situation géographique, son fonctionnement et sa politique promotionnelle. Mais le plus grand problème est notre dépendance à son égard. Il convient de la connaître pour y prendre garde et essayer de ne pas trop en dépendre.

The British Library Document Supply Centre is for many French librarians an almost mythical library, supposed to provide everything, but costly. In fact, not many people know it very well. After several stays in this institution, the author describes its place within the British Library, its geographic position, its functioning and its promotional policy. The most important problem is our dependance to it. It's good to know that problem to take care of it and try in part not to have it as an only source.

Il ne peut être question de décrire en quelques pages l'intégralité du fonctionnement du British Library Document Supply Centre *. D'une part ce serait fastidieux, d'autre part de nombreux manuels de l'utilisateur existent, dont la plupart traduits en français.

Il semble préférable de s'arrêter sur trois points plus importants : d'abord une description du Centre, que par commodité et selon l'usage britannique nous appellerons DSC, description géographique mais aussi analyse de l'ensemble de son fonctionnement essentiel, en particulier la promotion et la recherche de la performance. Dans un deuxième stade, nous verrons plus brièvement comment l'utiliser au mieux. Enfin, nous aborderons une question sans doute fondamentale : la dépendance de la France vis-à-vis de la Grande-Bretagne en matière de documentation.

Une usine à fournir des documents

Contrairement à ce qu'on s'imagine, le Document Supply Centre n'est qu'une partie de la British Library (cf. fig. 1). Les autres services ou départements implantés en divers endroits de Londres vont être regroupés dans le nouveau bâtiment de Saint-Pancras, du moins pour une partie, car tous ceux qui n'ont pas de raison majeure de rester à Londres seront transférés, ou le sont déjà, sur le terrain du DSC. Ce sera entre autres le cas du National Bibliographic Service et de tout ce qui touche à l'acquisition et au catalogage des ouvrages.

Ce nouveau bâtiment de Saint-Pancras sera très important **. Il ouvrira ses portes en deux temps, l'un en 1993 et l'autre en 1996. Installé sur un site de quatre hectares, l'ensemble des surfaces construites dépassera 112 000 m2, le nombre des places assises sera supérieur à 1 200 et la longueur des rayonnages en libre-accès ou accès contrôlé atteindra 340 kilomètres.

Mais si l'ensemble de la British Library est à l'évidence fait pour le lecteur, le DSC répond à un tout autre but. Il a été implanté à plus de 200 kilomètres au nord de Londres, dans le West Yorkshire, région où à l'époque le terrain était assez bon marché. Il a du reste occupé la place laissée vacante par une ancienne usine d'armement. Les principales villes universitaires, industrielles ou touristiques, Leeds et York, sont à une trentaine de kilomètres, de même que l'aéroport de Bradford.

En effet, l'établissement ne cherche pas à accueillir les lecteurs dans ses murs. La salle de lecture est du reste très petite : 25 à 30 places. Son rôle essentiel est d'envoyer des livres en prêt en Grande-Bretagne ou à l'étranger, et surtout des photocopies d'articles. Il s'agit véritablement, sans exagération aucune, d'une usine à fournir des documents. Tout est fait pour rechercher l'amélioration des performances, tout est signe, symbole de compétitivité économique.

Marketing et rentabilité

Cela est d'autant plus vrai que le Centre doit répercuter dans le prix des photocopies le coût du personnel, des bâtiments, des investissements, en particulier technologiques, car les subventions gouvernementales ne suffisent pas, et de loin, à couvrir toutes les dépenses. Il s'agit là d'une différence fondamentale d'avec les bibliothèques universitaires françaises qui n'ont pas à inclure ce genre de dépenses dans le prix d'un document en prêt-inter. Et cela explique le malentendu entre le DSC, qui estime le prix de ses services calculé au plus juste, et les usagers, en particulier nos collègues des universités, qui trouvent les tarifs élevés.

Quoiqu'il en soit, le DSC cherche continuellement à rentabiliser ses services. Et quoi de plus symptomatique que le changement d'appellation, vers 1985-1986, puisque de British Library Lending Division (BLLD), nom sous lequel la très grande majorité de nos collègues le connaissent encore, il est devenu British Library Document Supply Centre, ce qui, en bon français, signifie que de « Centre de prêt » il est devenu « Centre fournisseur de documents », c'est-à-dire essentiellement de photocopies, ces dernières étant davantage source de profit que le prêt des ouvrages.

Cette recherche de rentabilisation va évidemment de pair avec une politique agressive en matière de promotion et de marketing. On s'imagine toujours, de loin, en l'espèce en France, que le DSC se contente de vivre sur sa réputation. Il n'en n'est rien. La baisse relative des subventions qui représentaient 79, % du budget de la British Library en 1984-1985 et seulement 70,5 % en 1989-1990 pousse d'autant plus à trouver d'autres sources de revenus et de financement. Dans cette optique, le service de promotion a pris au fil des ans une place de plus en plus prépondérante. En particulier ont été créés des postes de « Business development » et de « Account manager », celui-ci chargé des utilisateurs importants, britanniques ou étrangers, auxquels il rend des visites régulières. On voit qu'on est loin de l'image classique d'une bibliothèque qui attend son public.

En même temps, des cadres ont reçu la responsabilité de différentes zones géographiques, cela en fonction de leur importance. Par exemple, plusieurs personnes veillent au développement des intérêts du Centre en France. Notre pays, et ses centres de documentation ou ses bibliothèques, est surveillé et écouté de façon à ce qu'on réponde à ses besoins, voire à ce qu'on les précède ou les stimule. De même la majorité des manuels ont été traduits dans les principales langues, dont le français : qu'il s'agisse du manuel de l'utilisateur international ou de la brochure consacrée à « BookExpress », le nouveau service destiné à développer et rentabiliser le prêt d'ouvrages. Tout cela pour rendre le DSC plus près de ses clients, en réduisant au maximum les différentes barrières.

Rapide, exhaustif, efficace

Par ailleurs, l'accent a été mis sur quelques points perçus comme primordiaux par les usagers : la rapidité de fourniture des documents tout d'abord, en réduisant au minimum les délais de traitement des commandes ou en expédiant au plus vite les photocopies ou les livres.

Deuxième action : la comprehensiveness, c'est-à-dire la recherche de l'exhaustivité dans le domaine scientifique au sens large, ce qui revient à dire tout ce qui n'appartient pas aux œuvres de fiction. Le DSC reçoit 56 000 titres de périodiques en cours sur les 80 000 supposés exister de par le monde. Pour les titres qu'il ne possède pas, il s'appuie sur quelques bibliothèques britanniques appelées back-up libraries, ou de deuxième ligne, auxquelles peuvent être transmises - si l'usager le désire expressément - les demandes de documents qui ne sont pas au DSC. Une politique de coopération à l'intérieur du Royaume-Uni qui permet au DSC d'atteindre un taux de satisfaction de 95 %. Cette comprehensiveness est un atout fondamental. Si l'usager sait trouver là tout ce qu'il recherche et l'obtenir rapidement, il va devenir de plus en plus enclin à concentrer ses demandes sur ce seul établissement.

Calcul intelligent, qui se révèle juste, et dans le cas de notre pays très mauvais et dangereux.

Efficacité enfin, qui se situe dans deux directions. D'une part la mise en route d'un programme de total quality ou contrôle de qualité à tous les niveaux. Un manuel complet et impressionnant a été distribué largement au personnel pour l'inciter, l'aider non seulement à corriger les erreurs, mais aussi et surtout à les éviter. Chacun des stades est concerné : acquisition, catalogage, processus informatique, promotion, fourniture et expédition des documents, etc. Tout cela, encore une fois, pour donner la plus grande satisfaction possible à l'usager.

D'autre part, des enquêtes régulières éclairent les différents aspects du fonctionnement comme les délais d'acheminement postaux ou le traitement de tel ou tel type de demandes, grâce à un questionnaire envoyé aux utilisateurs, tel celui qui fut diffusé, en 1991, en français pour la France. Voilà sans nul doute une des grandes leçons que peut donner le DSC : l'écoute constante des besoins et un effort non moins constant et simultané pour y répondre.

L'évolution des demandes

Naturellement, l'augmentation du nombre des demandes est la conséquence logique de cette politique (cf. fig. 2) : 10 % seulement d'entre elles concernent des livres, secteur considéré comme peu rémunérateur jusqu'à il y a peu ; 23 % du total viennent de l'étranger, chiffre à peu près stable sur toute la période considérée. Mais comme le total augmente, cela signifie que la part des autres pays est de plus en plus forte et que leur dépendance s'accroît. Ceci dit, la part assez importante du Royaume-Uni ne doit pas étonner. Il existe au DSC deux tarifs : l'un national, qui est le même qu'une demande quelconque entre deux bibliothèques universitaires ; et l'autre, international, destiné - comme le dit pudiquement le DSC - à un « financement croisé » qui permet de diminuer le prix demandé aux usagers nationaux.

Ce coût réduit pour les clients de Grande-Bretagne peut et doit faire douter d'une possibilité de pénétration du marché britannique par les Européens et la France en particulier. Pourquoi une bibliothèque, un centre de documentation britannique demanderait-il, par exemple, à la France un document que possède le DSC ? Alors que, raison supplémentaire, le prix intérieur est inférieur au tarif que les bibliothèques universitaires françaises demandent à leurs clients étrangers. Il convient de s'attendre, bien au contraire, à un poids de la British Library de plus en plus lourd, d'autant que le Strategic plan en cours prévoit cela explicitement.

Un mot maintenant sur l'évolution du mode d'envoi des demandes, car il témoigne bien d'une réalité. Un tableau en fait l'analyse sur neuf années. La voie postale qui a longtemps été majoritaire avec 60 % du total diminue progressivement pour atteindre 47 % en 1990-1991. Cela correspond au désir des usagers de gagner du temps. A l'intérieur de l'ensemble « voie-non-postale », l'évolution reste identique. La part des télex, qui représentait 87 % en 1982-1983, atteint à peine 20 % actuellement, tout simplement parce qu'il peut être considéré comme long ou fastidieux d'envoyer un télex. C'est le système ARTEL qui prend la relève, passant - évolution considérable - de 10 à 69 %.

Ce système a les faveurs des uns et des autres. Il permet d'envoyer les demandes depuis un micro-ordinateur, donc rapidement, sans qu'il y ait surcoût imposé par le DSC. Au contraire, cet organisme souhaite le favoriser car il évite, entre autres, l'engorgement du département arrivée-courrier. Il est très utilisé par le secteur privé, un peu moins par le secteur public et en particulier les bibliothèques universitaires, car il suppose que le client ait un compte, ce qui pose parfois des problèmes administratifs.

L'Urgent Action Service s'inscrit également dans cette optique de recherche de la rapidité. Les demandes sont traitées en priorité et expédiées de même, mais le coût est nettement plus élevé.

Cette façon de procéder est appréciée des demandeurs importants, même si son utilisation demeure limitée, tout comme celle des commandes en ligne après recherche sur des bases bibliographiques.

Je voudrais terminer cette description du DSC par l'évocation d'un secteur particulier, les magasins, car ils ne correspondent pas du tout à l'idée que nous en avons ici, mais sont organisés de façon à permettre un accès immédiat au document. Ils sont divisés en deux secteurs, les livres et les périodiques, ce dernier incluant les suites, toutes disciplines confondues. Ce qui surprend le plus, c'est de trouver un classement absolument alphabétique, et qui plus est, par mot du titre du périodique ou de l'ouvrage. Plus besoin de vérifier l'orthographe du nom de l'auteur. Inutile de chercher la cote. A la réception de la demande, le personnel sait immédiatement où se diriger de manière, encore une fois, à servir l'usager sans attendre.

Pour une meilleure utilisation

Vu de la British Library, il ne semble pas que le DSC soit utilisé en France comme il pourrait l'être. Non que le but de cet article soit qu'on l'utilise plus mais plutôt qu'on l'utilise mieux, en particulier dans trois directions.

D'abord au niveau de l'information, trop d'usagers se contentent en tout et pour tout de la Current list of serials received at the BLDSC : document très maniable et complet mais qui ne paraît qu'annuellement et ne fournit pas l'état des collections. Ce à quoi le DSC répond qu'une telle précision est superflue puisqu'il possède en principe les périodiques depuis le début de leur publication.

Et je ne parle ni des livres pour lesquels il n'existe pas de catalogue papier, ni des congrès recensés dans l'Index of conferences proceedings que ne possèdent pas toutes les bibliothèques.

A l'heure des nouvelles technologies, on peut penser que les CD-ROM produits récemment par le DSC offrent une information plus grande et plus rapide. Les trois types de documents énumérés précédemment sont catalogués dans les disques compacts qui portent les noms de Boston Spa books, Boston Spa serials et Boston Spa conferences mis à jour tous les trois mois. En ce qui concerne les ouvrages, on peut aussi, par le serveur BLAISE - précisément celui de la British Library -, avoir accès à la liste des ouvrages reçus au DSC depuis 1980 et écrits dans des langues européennes, avec possibilité - comme cela existe aussi sur certains des disques compacts du Centre - de commander en ligne, sans surcoût. C'est une voie d'accès très peu connue en France, sinon par le secteur privé, toujours à la recherche de la rapidité.

Mais il ne s'agit pas seulement de savoir comment trouver l'information, il faut aussi obtenir rapidement le document. Sans parler de la voie postale, système traditionnel légèrement dépassé, nous aimerions aborder le système ARTEL. On l'a vu précédemment, cette procédure permet d'envoyer des demandes depuis le monde entier à partir d'un micro-ordinateur. Ces demandes sont obligatoirement rédigées selon un format imposé.

Ainsi donc gagne-t-on du temps à l'aller mais aussi dans l'autre sens puisque, depuis peu, les réponses, positives ou négatives, sont expédiées à l'usager également par système ARTEL. En quelques heures celui-ci peut savoir si le document demandé est disponible, si l'article souhaité a pu être photocopié et expédié.

D'autres méthodes peuvent être utilisées. Nous n'en citerons que deux, le Reference Listing et le Urgent Action Service, toutes deux affectées d'un surcoût. La première évite de remplir les fameux formulaires. Elle permet d'envoyer des demandes sur papier dit « libre » sous la forme d'un simple listing, éventuellement par fax. Naturellement ces demandes sont ensuite retraitées par le personnel, ce qui explique les frais supplémentaires.

L'Urgent Action Service, quant à lui, permet d'expédier les demandes par fax et de recevoir les photocopies par le même procédé dans les deux à trois heures qui suivent, en France ou à l'étranger. Il va de soi que le prix élevé de cette procédure limite son emploi aux cas où l'urgence est une priorité absolue.

Bref, plusieurs portes donnent accès au Document Supply Centre. Certaines sont des voies lentes, d'autres plus rapides, d'autres plus encore mais très onéreuses, chacune répondant à des objectifs précis.

Mais le problème est précisément que les clients de la British Library ont souvent tendance, du moins dans le cas du secteur privé, à y envoyer toutes leurs demandes à cause de la rapidité de fourniture du document et du taux de satisfaction, sans bien réaliser qu'ils en deviennent par là dépendants.

Dépendance

Il s'agit bien là d'un fait qu'on ne peut plus ignorer. La France est largement dépendante de la Grande-Bretagne en matière documentaire. Elle se situe au premier rang des clients étrangers du DSC à qui elle envoie, à elle seule, plus de 18 % des demandes extérieures au Royaume-Uni. Bien plus, cet état de fait va en s'accroissant puisque le nombre des commandes françaises a été multiplié par 75 % entre 1985 et 1990. A cette date, elles ont coûté à notre pays plus de onze millions de francs actuels ou, si l'on préfère, un milliard cent millions d'anciens francs. Cela, en tenant rigoureusement compte des propres statistiques du DSC, selon lesquelles 10 % des demandes seulement concernent des prêts d'ouvrages et 90 % des photocopies d'articles. Encore n'a-t-on pas calculé le pourcentage des demandes expédiées par le Urgent action service, le Reference listing, à tarifs supérieurs, ou des expéditions faites par fax. Ce chiffre n'est donc qu'un plancher « a minimum ».

Cette dépendance est d'autant plus surprenante que la France est un des pays qui possèdent un catalogue collectif de périodiques, le Catalogue collectif national (CCN), permettant de savoir où est reçu tel ou tel titre sur le territoire. Or, malgré cela, de nombreuses demandes françaises concernent des titres possédés par les bibliothèques françaises : nous avons pu le constater pour des titres reçus à la Bibliothèque universitaire de Lyon I.

En réalité cette situation s'explique aisément. La majorité des clients français du DSC étaient, jusqu'à présent, de l'industrie, laquelle ne se soucie aucunement de répartir ses demandes entre les différentes bibliothèques universitaires, ce qui demande de passer un temps certain à « faire des localisations », comme on dit. Certes, une part du secteur privé travaille avec les BU, mais certaines sociétés expédient systématiquement leurs demandes au DSC sans s'inquiéter de savoir si ces documents sont reçus dans leur pays. Il est vrai aussi que parfois nos collègues ne servent pas toujours aussi vite que les usagers le souhaiteraient, ce qui constitue une incitation supplémentaire à s'adresser outre-Manche.

Par ailleurs, plusieurs services publics français, d'importance nationale, ont adopté eux aussi le chemin du DSC. La part qu'ils ont représentée en 1990-1991 est non négligeable - pour employer un euphémisme -, alors que par souci de bonne gestion, ou en tout cas de préservation des intérêts économiques nationaux, ils auraient pu s'adresser en France... Et là aussi le volume des commandes va augmentant.

En face de ce tableau, il est possible d'adopter deux types d'attitudes, positives, il va de soi. L'une que je qualifierai de défensive, l'autre d'offensive. L'attitude défensive consisterait à tenter de limiter notre dépendance, par exemple en suivant quelques lignes possibles d'action. Il serait peut-être intéressant dans un premier temps d'analyser les demandes expédiées par les bibliothèques universitaires françaises au DSC pour voir s'il vaut la peine de prendre tel ou tel abonnement, malgré l'intérêt évident que lui portent certains chercheurs. Cela est d'autant plus vrai pour les revues récentes dont on sait bien que même les plus importantes ne sont pas toutes recensées au CCN.

Deuxièmement, lorsqu'on demande un fascicule de l'année en cours à une bibliothèque universitaire française, il est très difficile, voire impossible, de l'obtenir en prêt. La seule solution, si on en veut l'intégralité, est de le faire entièrement photocopier, ce qui constitue une infraction aux règles du copyright. Au contraire, le DSC accorde le prêt sans absolument aucune restriction, y compris du dernier fascicule reçu, quitte toutefois à se montrer beaucoup plus légaliste en ce qui concerne le droit des reproductions. Il serait éventuellement opportun là aussi de revoir notre politique, d'autant que l'industrie est essentiellement à la recherche des derniers articles.

Enfin, il faudrait peut-être encore envisager l'approche d'une modification en profondeur du comportement des bibliothèques universitaires en leur faisant découvrir tout l'intérêt qu'il y a à travailler pour le privé, si du moins on respecte quelques strictes règles de rapidité et de fiabilité... On ne saurait écarter l'idée que ce changement d'attitude pourrait inciter l'industrie à limiter le nombre des demandes envoyées à la British Library. Sous réserve, bien entendu, que le personnel de nos bibliothèques sente l'importance de l'enjeu.

En ce qui concerne l'attitude qu'on pourrait qualifier d'offensive, il s'agirait, en réalité il s'agit, de conquérir des parts de marchés extérieurs pour essayer de rééquilibrer par un autre biais notre balance de paiement, déficitaire dans le domaine de la documentation.

De nombreux pays francophones, ou liés culturellement ou historiquement à notre pays, souhaiteraient travailler avec la France pour plusieurs raisons. La Belgique, par exemple, ou certaines parties de la Suisse, l'Afrique francophone, mais également certains pays dits de l'Est, dont la bibliothéconomie est parfois beaucoup plus avancée que l'on croit. La Tchécoslovaquie, la Hongrie, la Slovénie (anciennement partie de la Yougoslavie) ou la Pologne, moins fortunée toutefois, ont des réalisations dont elles peuvent être fières et seraient disposées à diversifier leurs sources de fourniture de documents - précisément parce qu'elles sentent bien le risque qu'il y a à être dépendant d'un grand centre.

On peut aussi, sans fausse vanité mais avec courage et effort, s'attaquer au marché non francophone. Certains pays du Commonwealth tels le Canada oriental ou l'Australie, d'autres nations comme les pays scandinaves, l'Espagne ou le Portugal, l'Italie entre autres verraient d'un assez bon œil une coopération équilibrée. Et combien d'autres !

Cette recherche de marchés implique la sensibilisation de tous aux méthodes et aux techniques du marketing, de la promotion et du suivi de clientèle. Il ne sert à rien, par exemple, de simplement vendre ici ou là son « Répertoire de périodiques ». Certes c'est déjà un pas énorme d'accompli mais il faut rester au contact du client, étudier ses besoins, en un mot se rappeler continuellement à son attention. Et pour cela, il faut se former sérieusement. Les bonnes stratégies de marketing ne s'improvisent pas.

Le British Library Document Supply Centre est un des centres européens fournisseurs de documents les plus efficaces, sans doute le premier sur notre continent, et dans le peloton de tête au niveau mondial. Il n'y est arrivé que par la recherche constante du meilleur service, de la rapidité, du souci du lecteur alliés à une politique de marketing aussi agressive que continue.

Notre pays en est lourdement dépendant, et cela de plus en plus. Il n'est pas dit que ce soit une fatalité. La meilleure défense, dit-on, est l'attaque. En l'espèce, il s'agirait de s'inspirer des qualités de la British Library pour les utiliser à notre profit.

Février 1992

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Figure 1 - La British Library

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Figure 2 - Evolution du nombre des demandes

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Evolution du mode des demandes

  1. (retour)↑  Cet article s'appuie sur les différents séjours que l'auteur a effectués au Bristish Library Document Supply Centre (BLDSC).
  2. (retour)↑  Cf. Bulletin des bibliothèques de France, t. 36, n°5, p. 404.