Le schéma directeur informatique des réseaux de bibliothèques universitaires
Françoise Pellé
La politique d'informatisation de la fonction documentaire dans l'enseignement supérieur menée au ministère de l'Education nationale par la Sous-direction des bibliothèques, poursuit trois objectifs concordants :
- améliorer les services rendus aux publics des bibliothèques universitaires et de grands établissements ;
- permettre à celles-ci de faire face plus facilement à l'augmentation de leurs charges ;
- favoriser le travail en coopération.
Les deux grands volets de cette politique sont, d'une part, la participation à l'informatisation des établissements et, d'autre part, la mise en place de catalogues collectifs et outils informatiques. Ces catalogues et outils sont des services nationaux bien connus des bibliothèques : il s'agit du CCN-PS 1, de RAMEAU 2, de Téléthèses 3, de PEB 4 et PEB-micro 5, plus récemment du Pancatalogue 6, de ION 7 et enfin de FOUDRE 8.
Ces applications ont vu le jour à des dates différentes. Certaines sont nées il y a presque dix ans (CCN-PS), d'autres sont à l'heure actuelle en phase de test (FOUDRE). Certes, les plus anciennes d'entre elles ont connu des évolutions, mais un constat s'impose : les logiciels applicatifs ont vieilli, et la technologie évolue très rapidement : il faut automatiquement prévoir l'évolution des applications.
D'autre part, conçues à l'origine séparément, ces applications fonctionnent encore aujourd'hui indépendamment les unes des autres. Or, il existe des complémentarités évidentes entre, par exemple, PEB et CCN-PS - complémentarités que ne traduisent pas toujours aujourd'hui les fonctionnalités offertes aux utilisateurs : il n'est ainsi pas possible de « récupérer » automatiquement les données de localisation ou d'identification d'un périodique, issues de l'interrogation du CCN-PS pour remplir une demande de PEB.
Enfin, les services nationaux ont été conçus initialement pour répondre à des besoins professionnels. Certains d'entre eux sont désormais accessibles au grand public. Il s'agit là d'une évolution naturelle, mais qui pose la question suivante : quels services, quelles fonctionnalités pour qui ? Il faut donc redéfinir les objectifs et les priorités et, par conséquent, analyser les besoins, tant des professionnels que des publics desservis par les bibliothèques universitaires.
Un environnement complexe
Il y a donc, inhérente à l'histoire des applications, une nécessité interne de réécriture, et de réécriture à la fois plus cohérente au plan informatique et plus ergonomique pour les utilisateurs. Ce constat, en soi banal, implique que soit menée une réflexion globale sur l'ensemble des applications.
Un autre volet de la réflexion part de la constatation suivante, elle aussi banale : les services nationaux s'insèrent dans un environnement complexe et en rapide évolution.
Environnement professionnel tout d'abord, car les bibliothèques produisent en majeure partie les données, notamment bibliographiques, qui alimentent simultanément les services nationaux et les systèmes de gestion propres aux bibliothèques.
La production des données bibliographiques constitue par conséquent un aspect central du dispositif d'ensemble, tant pour les services nationaux que pour les établissements. Cet aspect, complété par une réflexion sur les principes d'articulation entre systèmes de gestion des bibliothèques et services nationaux sera par conséquent également pris en compte par le shéma directeur.
Le deuxième versant de l'environnement professionnel est celui des grands projets nationaux que sont la création de la Bibliothèque de France, le projet de Catalogue collectif de France et l'ouverture prochaine du Serveur bibliographique national. Un contexte national, différent de celui que nous connaissions au moment de la conception des applications du ministère de l'Education nationale, se met en place. La réflexion sur l'évolution des services nationaux doit tenir compte de ces événements majeurs, afin de garantir pour l'avenir des articulations et des possibilités d'évolution satisfaisantes.
Contexte universitaire aussi, car les projets et les travaux en cours au sein du ministère de l'Education nationale sur la gestion financière et comptable, les utilisations de la carte à mémoire ou le réseau RENATER représentent des opportunités tout à fait importantes pour les bibliothèques, dans deux directions principales : l'insertion dans le réseau national de la recherche et la gestion.
Toute réflexion aujourd'hui, toute réalisation demain doivent donc s'insérer dans ce nouveau paysage, en garantissant des articulations cohérentes et efficaces, en prévoyant les complémentarités, en permettant les évolutions.
Un enjeu important
Trois objectifs majeurs donc : dégager les axes de développement des services nationaux à moyen terme (cinq ans), renforcer la cohérence d'ensemble, préciser les articulations avec les projets documentaires complémentaires et avec les différents partenaires du ministère de l'Education nationale.
Pour cela, trois approches complémentaires et indissociables : organisationnelle et humaine, technique (informatique et bibliothéconomique), économique.
En effet, aucune solution technique, si satisfaisante soit-elle en théorie, n'a de chance d'aboutir si elle suppose, dans le contexte du ministère de l'Education nationale, un type d'organisation ou des ressources humaines non réalistes, ou des coûts démesurés. Réciproquement, il peut arriver que certaines solutions organisationnelles souhaitables supposent un état technique qui n'existe pas encore, ou qui n'est pas suffisamment fiable... Il s'agira donc de préserver l'acquis positif et de préparer l'avenir en trouvant le meilleur équilibre possible entre les différentes contraintes.
L'étude elle-même, dont les différentes phases seront validées par un comité consultatif 9 qui proposera les choix fondamentaux à l'arbitrage du cabinet du ministère de l'Education nationale, sera menée avec l'assistance d'une société externe 10.
La méthode de travail retenue est largement participative, ce qui se concrétisera de diverses façons :
- par la création d'un groupe de travail, instance d'élaboration du schéma directeur, qui comprendra bien entendu des professionnels ;
- par une série d'entretiens (une cinquantaine) menés par la société externe et par les membres du groupe de travail auprès d'autres professionnels des bibliothèques et des partenaires du ministère de l'Education nationale ;
- enfin par une étude qualitative des attentes et des besoins des professionnels et des publics desservis par les bibliothèques universitaires et de grands établissements 11.
Les travaux seront organisés en quatre étapes principales :
1. Un bilan de l'existant sera tout d'abord effectué. Ce bilan est destiné à faire ressortir les points forts et les points faibles de la situation actuelle ; le bilan et l'étude des besoins permettront de définir les grandes orientations.
2. Les orientations étant définies, une solution-cible, puis différents scénarios seront élaborés, pour aboutir au choix d'un scénario préférentiel.
3. Le scénario retenu sera découpé en plans d'action correspondant aux exercices budgétaires.
4. Les indicateurs et les structures de suivi permettant de contrôler la mise en oeuvre des plans d'action seront définis ; le travail s'achèvera par la rédaction d'un document final reprenant les principales décisions prises.
Le champ de l'étude est large, ses objectifs sont ambitieux mais réalistes. Il y a là un enjeu important pour les bibliothèques universitaires. L'élaboration du schéma directeur représentera, il est vrai, une charge importante pour les membres des différentes structures de travail et de suivi. Mais c'est la condition du succès, car la qualité des résultats sera d'autant plus grande que l'ensemble des acteurs concernés et des partenaires auront participé aux travaux.