S'informer pour se former et pour agir

par Abel Guggenheim

Ministère de la Recherche et de l'Enseignement supérieur. Conférence des grandes écoles

Paris : La Documentation française, 1987. - 173 p. ; 24 cm
ISBN 2-11-001770-8

Même s'ils ont la curiosité de lire, en bas à gauche et en tout petits caractères, le sous-titre (Relations d'expériences réalisées dans les grandes écoles et coordonnées par Danièle Bretelle-Demazières, maître de conférences au Conservatoire national des Arts et Métiers), ceux qui verront le titre de cet ouvrage auront malheureusement peu de chances de deviner de quoi il s'agit. A l'inverse, les gens ayant eu connaissance des expériences de formation à l'IST, réalisées de 1981 à 1984 avec l'aide de la MIDIST, pourront dificilement deviner sous ce titre. repris d'une journée d'étude organisée en 1979 par la CGE (Conférence des grandes écoles), seize intéressantes contributions écrites par les responsables pédagogiques de ces expériences ainsi que des réflexions générales sur ce programme.

Maîtrise de l'information spécialisée

Cet ouvrage collectif a été écrit à la suite d'une série d'expériences de formation à l'interrogation des bases et banques de données réalisées dans les grandes écoles avec l'aide et le soutien financier de la MIDIST (devenue depuis DIXIT puis DIST). C'est en effet surtout au sein des grandes écoles, pour des raisons diverses dont l'analyse n'a pas sa place ici, que de nouvelles théories, dans lesquelles l'information joue un rôle important, se sont développées. Le rôle de la Conférence des grandes écoles, et du groupe de recherche pédagogique créé en son sein en 1978, a sans doute été déterminant pour impulser, puis organiser des expériences et une pratique importante. C'est donc sur cette association que les pouvoirs publics se sont appuyés pour mettre en place une action concertée de formation des enseignants et des élèves à la maîtrise de l'information, qui comportait une aide matérielle et financière permettant l'implantation de la recherche documentaire automatisée ou favorisant son développement, et un soutien pédagogique destiné à augmenter l'efficacité des étapes de la formation.

Cette action a, en trois ans, concerné plus de dix mille élèves dans plus de cent écoles. Des leçons pouvaient donc en être tirées. C'est ce que s'efforce de faire ce petit livre.

Des expériences de formation

La forme choisie : seize textes courts, écrits par les responsables de seize des formations organisées. Chacune des contributions présente succinctement le cursus d'enseignement de l'école, les formations à la documentation organisées antérieurement et les principales caractéristiques des formations mises en place dans le cadre de l'action MIDIST/CGE. Cette présentation un peu systématique permet de se rendre bien compte de la façon dont ces actions peuvent s'intégrer à l'enseignement (c'est légitimement un souci important de plusieurs auteurs de contributions) et des obstacles à cette intégration - et pas seulement les obstacles financiers. Plusieurs contributions mettent l'accent sur la relation réciproque utilisation/production d'informations, pouvant aller jusqu'à l'étude et la conception de systèmes d'information spécialisés. Les problèmes rencontrés lors de la recherche d'informations et lors des interrogations permettent de sensibiliser les élèves, donc les professionnels qu'ils seront, à la nécessité d'une certaine rigueur formelle lors de la production et de la diffusion d'informations.

Les documentalistes qui liront cet ouvrage verront tout de suite qu'il a été fait par des documentalistes, par la présentation détaillée des seize établissements dont les responsables ont participé à l'ouvrage, une longue étude bibliographique (55 références) sur la naissance et le développement de la formation à l'information en France et à l'étranger et des annexes précises : listes des établissements ayant participé à l'opération MIDIST/CGE (avec adresse, téléphone et nom du responsable pédagogique de la formation), de nombreuses adresses utiles, et une liste des sigles et abréviations. Les documentalistes auront donc plaisir à le lire, pour sa forme, mais aussi pour son fond : presque chaque ligne est un vibrant plaidoyer pour l'IST. pour la place fondamentale qu'elle devrait occuper dans l'enseignement, et même pour la place effective qu'elle y occupe parfois. Mais il serait dommage que seuls les documentalistes le lisent : en filigrane de plusieurs contributions on peut repérer l'une des grandes difficultés de la mise en œuvre de l'IST automatisée - la réticence des enseignants et des directions d'écoles à ces techniques modernes - et son corollaire, la nécessité d'associer ces catégories si l'on veut qu'un enseignement de ce type soit vraiment intégré par l'école. « C'est souvent par le biais des étudiants (...) que les enseignants accèdent à de nouvelles conceptions de l'information » (p. 76). La difficulté est grande pour l'enseignement de la documentation d'être considéré comme une matière à part entière... et pour les documentalistes d'apparaître comme faisant partie du corps enseignant.

Écrit par des passionnés sans doute fonceurs, ce livre donne parfois l'impression que la formation à l'IST est très répandue, alors qu'elle est encore très minoritaire, même dans les grandes écoles. La situation réelle est sans doute bien illustrée par le texte de Jean Lossouarn, de l'Institut national agronomique : « Notre expérience a abouti (...) à une réflexion d'ensemble sur les problèmes posés au sein de notre institut par les liaisons entre documentation et enseignement. Le rapport que nous avons soumis (...) a été discuté au Conseil des enseignants, où il a reçu un accueil favorable dans l'ensemble. Toutefois, ses propositions d'action n'ont guère été suivies pour le moment » (p. 60).

Si dans son introduction, Danièle Bretelle-Demazières, présentant l'action des pouvoirs publics pour « favoriser la réussite des initiatives entreprises dans ce domaine » en accordant « des moyens financiers importants pour encourager les établissements volontaires » (p. 16), donne la précision suivante : « Le choix, dans un premier temps, des grandes écoles, (...) », elle n'ajoute cependant pas que ce sont des difficultés institutionnelles qui ont ensuite empêché l'expérience de se poursuivre, comme cela était prévu, dans les universités... Très diplomatiquement, l'ouvrage fait l'impasse sur les problèmes et les difficultés.