Avant-texte, texte, après-texte

par Albert Labarre

Louis Hay

Péter Nagy

Budapest : Akadémiai Kiadô, Maison d'édition de l'Académie des sciences de Hongrie ; Paris : Éd. du CNRS, 1982. - 217 p. ; 25 cm.
ISBN 963-05-2910-6 (Akadémiai Kiadô). ISBN 2-222-02895-7 (CNRS) :$9.00.

Les actes du Congrès international de textologie, qui s'est déroulé à Budapest en 1978, apportent une documentation riche et diversifiée à travers les 25 communications qu'ils rassemblent. Toutes sont publiées en français, sauf une en langue allemande. Ce congrès a l'originalité de ne pas se limiter à l'édition critique en elle-même, mais de se soucier d'abord du préalable essentiel qu'est l'étude matérielle des manuscrits, et ensuite des conséquences que mettent en lumière les recherches sur l'interprétation du texte.

Il convient d'insister ici sur la première partie. Les problèmes posés par la matérialité des manuscrits concernent surtout le support (en l'occurrence le papier, car on traite essentiellement de manuscrits modernes) et l'écriture (encres et graphies). Il faut noter que les trois premiers articles, qui concernent le papier, valent aussi pour les recherches de bibliographie matérielle sur les impressions anciennes. J.N. Barrandon et J. Irigoin montrent comment les papiers fabriqués en Hollande peuvent être distingués de ceux de l'Angoumois, pour la période 1650-1810, grâce à l'analyse par activation neutronique. I. Bodgan étudie la possibilité de dater le papier à partir de ses propriétés matérielles, caractéristiques de lieu, d'époque et de mode de fabrication. Th. Gerardy insiste sur le fait que l'étude des filigranes ne doit pas se limiter à leur dessin, mais tenir compte aussi de leur emplacement dans la feuille. L. Hay présente des perspectives pour l'identification, la datation et l'analyse automatique des écritures modernes, entre autres par des procédures d'ordre statistique ou optique. S. Jakab et G. Varosi donnent quelques notes sur les possibilités pratiques de conserver les manuscrits (renforcement du support par du polyéthylène, encapsulage pour les manipulations et les communications) et de rendre les écritures lisibles, par des procédés optiques de préférence à des procédés chimiques. I. Kertész montre comment des documents carbonisés peuvent être restitués par un traitement de calcination thermique. Mme Talbot présente quelques procédés chimiques pour la restauration des encres métallo-galliques.

La seconde partie concerne la réalisation même de l'édition critique. Il y est traité successivement de l'atelier de Proust, du rétablissement d'un texte en l'absence de manuscrit autographe, de l'édition historico-critique, des œuvres complètes de Gorki, de la nomenclature des variantes, de la recherche pour la chronologie et l'identification des textes, de l'édition des textes épistolaires, de l'harmonisation des procédures d'édition des textes français modernes, et de la textologie du folklore en Hongrie. L'ensemble détaille des procédés intéressants en s'appuyant sur des cas concrets.

Les problèmes d'interprétation font l'objet de la troisième partie. Elle traite aussi de divers sujets : lecture psychanalytique des documents de rédaction, étude génétique des textes, impact des variantes sur l'évolution des textes, recours à l'informatique et à la linguistique de l'énonciation, recherche d'une typologie des manuscrits littéraires (2 articles), les textes sonores, l'action des lecteurs sur la modification des textes en cours d'élaboration. Enfin, M. Hay soumet quelques propositions pour une recherche internationale en textologie, en conclusion de cet intéressant ensemble, bien apte à convaincre que la textologie doit être prise pour support et pour point de départ de toute étude littéraire sérieuse.