Le transfert des connaissances

5e Congrès national sur l'information et la documentation organisé par l'ADBS et l'ANRT à Grenoble, les 8, 9 et 10 juin 1983

Yves Le Coadic

Plus que les aspects généraux du transfert des connaissances, ce sont les aspects pratiques, les techniques de ce transfert, qui ont été évoqués lors de ce congrès, autant lors des deux journées de présentation des communications que lors de la journée des tables rondes qui terminait le congrès.

- Le premier thème « Les enjeux » essayait de donner un aperçu des enjeux actuels du transfert des connaissances et des espaces géographiques dans lesquels prend place ce transfert. Ces espaces proviennent en général, on a trop tendance à l'oublier, d'une volonté politique avouée ou cachée, nationale ou internationale.

Deux exposés illustraient ainsi les efforts faits par deux administrations pour répondre aux besoins de transfert des connaissances dans le nouvel espace régional français et dans l'espace européen. Un troisième exposé portant sur les transferts de connaissances dans l'espace des pays en voie de développement donnait une vision par trop optimiste de ces transferts, paternaliste et passéiste même, comme le constatait une participante. Enfin, l'espace de l'entreprise faisait l'objet d'un quatrième exposé et clôturait ce thème. Là encore, malgré l'enthousiasme de l'intervenant, rien de bien novateur. Surtout pas cette référence à « l'information, affaire de tous », appel à un mythique « esprit information » qui voudrait faire fi aussi des réalités de l'entreprise.

Toutefois, on notera une référence à la mise en place d'une « veille technologique » qui fait écho à « l'alerte technologique » réclamée au niveau européen et à la « veille scientifique et technique » exercée par les ateliers sectoriels de diffusion de l'information scientifique, proposés dans certains pays en voie de développement. Ces concepts renvoient certainement plus à des comportements de communication, passifs, de surveillance, qu'à des comportements actifs de production-distribution. Y aurait-il encore transfert ?

- Les techniques ont été abordées dans les thèmes 3 « Nouvelles techniques, nouvelles approches », 4 « Quelle demande, quelles réponses ? » et 5 « Réseaux formels, réseaux informels ».

On évoqua l'intérêt des nouvelles techniques : traitement de texte, informatique éditoriale, messagerie électronique, traduction assistée par ordinateur pour le transfert des normes, conception assistée par ordinateur, synthèse assistée par ordinateur, étude des relations structure-activité pour la production et le transfert des connaissances en chimie. L'informatique permet aussi d'assurer le suivi et la planification des recherches fournissant ainsi des outils d'aide à la recherche mais aussi d'aide à la décision.

Certains constataient que le développement de l'utilisation de ces nouvelles techniques était parfois lent, qu'elles (les banques de données en particulier) permettaient un meilleur accès à la connaissance mais pouvaient être en même temps un frein à la connaissance, que les techniques de l'information industrielle dans les PME et les PMI demeuraient parfois très traditionnelles et qu'un véritable service d'assistance leur était nécessaire.

Fait intéressant, la place importante accordée à la technologie des réseaux. Elle s'avère être, autant en France (Ministère de l'éducation nationale - bibliothèques universitaires, INSEE, Ports et Havres, Economie de l'énergie) qu'en Angleterre et dans les pays en voie de développement (à condition de savoir trouver le « ton juste » de la coopération), une forme organisationnelle particulièrement adaptée à résoudre le problème du transfert des connaissances. Ce sont à la fois des réseaux d'équipements, et les réseaux des acteurs du transfert.

- Le 6e thème « L'évolution des métiers documentaires » évoquait, comme il se doit dans un congrès professionnel, les mutations que connaît la profession des documentalistes, la « crise d'identité » qui les affecte. Du bibliothécaire à « orientation service » à l'expert technologique et social en information scientifique et technique, la profession est multiforme et évolutive. Aussi faut-il envisager dès maintenant de nouvelles formations à ces nouveaux métiers.

- Une session entière, le thème 4, a été consacrée aux « Axes de recherche en science de l'information ». Le premier axe abordait les problèmes des différents traitements mathématiques du transfert des connaissances. Le second, celui des recherches en intelligence artificielle, en indexation et en traduction automatiques.

- Les tables rondes du vendredi ont concerné la régionalisation de l'information (l'un des enjeux, rappellons-le), la presse et la télématique et deux dimensions importantes du transfert des connaissances : celle qui s'intéresse aux problèmes du transfert vers le public, la diffusion de la culture technique (boutique des sciences, centre de culture scientifique et technique) et celle qui concerne le problème du consumérisme et de la constitution de groupes de défense des consommateurs d'information scientifique et technique (les clubs d'utilisateurs). Un dernier aspect du transfert des connaissances, celui de ses limites, rapidement abordé, a laissé entrevoir une méconnaissance à son égard : ce pourrait être le thème d'un prochain congrès.