Dictionnaire des éditeurs de musique française
T. 1 : des origines à environ 1820
Anik Devriès
François Lesure
« Les marchands de musique prétendent que la musique vieillit plus promptement que les oeuvres des autres arts... » C'est la raison que donne l'Almanach musical de 1781 à l'absence de dates sur les pages de titres des éditions musicales. Habitude qui crée de bien grandes difficultés tant au bibliothécaire-bibliographe qu'à l'historien de la musique ne disposant que de sources de datation partielles, souvent peu sûres, et extrêmement disséminées. En effet, l'histoire des rapports entre compositeurs, éditeurs, graveurs et marchands de musique est fort complexe, d'autant que les réglementations concernant l'édition de livres ne sont pas appliquées pour la musique, domaine où le « brigandage » demeure courant dans les toutes dernières années du XVIIIe s.
Il était donc primordial de réunir tous les renseignements que l'on pouvait collecter sur l'histoire de ces différents professionnels de la musique, d'une part dans le fonds musical de la Bibliothèque Nationale et des bibliothèques parisiennes (dépouillement systématique des périodiques musicaux, catalogues), et d'autre part dans les fonds des Archives de la Seine et du Minutier central des notaires.
Le 1er vol. du Dictionnaire recense pour Paris plus de 200 noms d'éditeurs - ou de professionnels de la musique ayant fait œuvre d'édition - et une trentaine de noms pour la province. Chaque notice réunit, outre des données biographiques très précises, une bibliographie et tous les éléments pouvant permettre la datation des éditions musicales : les différentes enseignes des magasins de musique ; les adresses, très importantes en raison des fréquents changements de domicile des éditeurs et aussi de ceux de la numérotation ou des noms des rues ; les cotages (numérotation des planches gravées) que l'on rencontre à partir de 1770, et qui sont, malgré une utilisation parfois peu cohérente, une excellente source de datation des premières éditions pour de grands noms comme par ex. Boieldieu, Naderman ou Pleyel ; les privilèges accordés par le roi ; les catalogues trouvés dans des sources d'archives ou publiés par l'éditeur soit séparément (vers 1810), soit dans les éditions elles-mêmes (dès 1760) à la suite de la page de titre ou à la fin du volume. Cette dernière source est parmi les plus sûres, car les éditeurs tenaient très à jour la planche gravée de leur catalogue, y rajoutant les nouvelles éditions, et parfois même grattant les titres qui n'étaient plus dans leur fonds. Le 2e volume du Dictionnaire contient la reproduction de 219 catalogues classés par ordre alphabétique d'éditeurs puis, pour chacun d'eux, par ordre chronologique. On a évité de reproduire les catalogues figurant dans l'ouvrage de C. Johansson, French music publishers' catalogues of the 2nd half of the 18th century (Stockholm, 1955), mais les nombreux renvois permettent de s'y reporter aisément.
La typographie claire - on regrettera simplement que le nom de l'éditeur ne soit pas rappelé en gros caractères en tête de chaque catalogue reproduit au t. 2 - le remarquable index des catalogues (index des compositeurs et index des titres) et l'indication précise des sources d'information et même des sources des catalogues photographiés, font de cet ouvrage, qui intéressera tous les chercheurs concernés par cette époque, un outil de travail indispensable aux bibliothécaires musicaux.