Chronique des bibliothèques françaises
Bibliothèque Nationale. Paris.
EXPOSITION CHATEAUBRIAND. - Le bicentenaire de Chateaubriand a été célébré durant l'année 1968 dans toute la France et dans de nombreux pays étrangers. La Bibliothèque nationale a clos cette série de manifestations par une exposition 1 « Chateaubriand, le voyageur et l'homme politique ».
Cette exposition s'est surtout attachée à monter des aspects méconnus du grand pré-romantique.
Le cadre de son enfance, Saint-Malo, Combourg, donne le ton de « cet ennui que j'ai traîné toute ma vie, de cette tristesse qui a fait mon tourment et ma félicité ».
Peut-être est-ce ce décor un peu obscur qui le pousse à voyager? L'Amérique, à 23 ans est une distraction rare. Et qu'importe si les tribulations de René ne concordent pas avec le voyage de M. de Combourg!
Un ensemble de lettres et de documents concernant son émigration montre les vicissitudes qu'il a connues à Londres en donnant des leçons de français. L'Essai sur les révolutions le tire de l'anonymat. Petitement, il vit jusqu'à son départ en 1800. Publier Le Génie du christianisme lors de la signature du concordat ne réussit pas à lui concilier les grâces de Bonaparte. Madame de Beaumont, Natalie de Noailles, la Baronne de Staël encadrent sa carrière de secrétaire d'ambassade à Rome, qui se terminera avec l'Itinéraire, de Paris à Jérusalem, ce voyage furtif et épuisant au bout duquel Cordoue l'attend.
Son exil à la Vallée-aux-Loups, est un intermède littéraire. L'œuvre s'ordonne et s'accroît. On parle de l'Académie. Membre du gouvernement pendant les cent jours, il a droit à toutes sortes de faveurs, ordre du lys, ordre de Saint-Louis, grade de colonel de cavalerie, comme aux quolibets (l'auteur affamé, dit M. Boursouflé de Maisonterne). Ministre à Berlin, puis ambassadeur à Londres, puis délégué au Congrès de Vérone, il règle en deux ans - et, toute sa correspondance le prouve, avec minutie, - la succession d'Espagne. Partisan de l'indépendance grecque, Chateaubriand s'oriente vers un libéralisme qui lui fera défendre avec acharnement la liberté de la presse. Des pièces de l'exposition relatent son ambassade à Rome, qui se revèle de loin, la plus fructueuse.
La monarchie de juillet sonne le glas de l'homme politique; elle lui confie encore quelques missions à l'étranger. Il voyagera jusqu'à sa mort, infatigable. Il s'est rallié au pouvoir. Il met la dernière main à ses œuvres. « La vie me sied mal, la mort m'ira peut-être mieux... ».
DÉPARTEMENTS DES ESTAMPES. - Le Cabinet des estampes a prêté son concours à la 5Ie exposition de la Société des peintres graveurs français. L'exposition 2 présentait 150 gravures d'artistes contemporains, Buffet, Cami, Chagall, Dali, Dunoyer de Segonzac, Miro, Picasso, Prassinos, Veillard, pour ne citer que les plus célèbres, utilisant toutes les techniques de la gravure, eau-forte, lithographie, burin, pointe sèche, aquatinte.
Les peintres graveurs français ont tenu à fêter le troisième centenaire de la mort de Rembrandt, ce qui fut l'occasion de présenter différents états des œuvres du Prince des graveurs, dont la Bibliothèque nationale possède un choix exceptionnel.
Bibliothèques universitaires.
Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme.)
Exposition « Pascal et ses médecins. » - Du mois de mai au mois de novembre 1968, a été présentée à la Section de médecine et de pharmacie de la bibliothèque de l'Université de Clermont, dans les locaux qu'elle occupe à la Faculté mixte de médecine et de pharmacie, une exposition consacrée à Pascal et ses médecins. Cette exposition, organisée à l'intention des participants de différents congrès : Congrès annuel de l'Association des bibliothécaires français en mai, congrès de chimie thérapeutique et Congrès de psychiatrie et de neurologie de langue française en septembre, en rappelant quelques souvenirs clermontois de Pascal, voulait principalement retracer ce que fut la vie souffrante du grand écrivain et le rôle tenu par les médecins dans sa biographie.
Les vitrines accueillaient tous documents relatifs aux divers médecins ayant soigné Pascal. En effet rencontrer la maladie, c'est aussi rencontrer des médecins. A Clermont, peut-être M. Bompart et Laporte, Jobert moins sûrement, ont prodigué leurs soins à Pascal, enfant ou adulte. A Paris, les plus grands médecins du temps furent appelés à son chevet : Guénault et Vallot notamment, ainsi que Vallant son médecin attitré, Renaudot, Brayer, Homets. Quand la douleur devint intolérable, Pascal les fit appeler, tout en craignant « qu'il n'y ait trop de recherche dans cette demande ». Grâce à Vallant, médecin de Mme de Sablé et de la famille Périer, et à ses « portefeuilles » conservés à la Bibliothèque nationale, nous connaissons le détail des consultations de ces grands praticiens, lors de la dernière maladie de Pascal.
Les documents photographiques présentés permettaient de suivre ces dernières consultations notamment au moment de l'ultime maladie de Pascal en 1662. Livres et objets exposés évoquaient la célèbre querelle de l'antimoine, les pharmacopées de l'époque accompagnaient et illustraient les « prescriptions » des plus célèbres médecins.
Ailleurs on rappelait que la vocation hydrologique de l'Auvergne et du Bourbonnais n'était pas méconnue au XVIIe siècle, cartes, livres et documents à l'appui, évoquaient le nom alors célèbre (aujourd'hui bien oublié) de Saint-Myon, et celui de Bourbon-l'Archambault où Pascal est sûrement venu en 1660.
La vitrine consacrée à Port-Royal évoquait le souvenir de M. Hamon, médecin et solitaire, mais aussi, textes à l'appui, le cas de Marguerite Périer qui outre la fistule lacrymale dont elle fut miraculeusement guérie, présentait un mal de Pott caractérisé.
Cette exposition, dans les étroites limites qui étaient les siennes, ne prétendait résoudre aucune question d'ordre historique ou pathologique. Elle en posait seulement quelques-unes : Qu'était en réalité la maladie pour Pascal ? Comment, lui qui avait le génie de l'expérience en tous les domaines, jugeait-il le médecin qui le soignait, sa méthode et ses palabres, ce « docteur qui parle un quart d'heure après avoir tout dit, tant il est plein de désir de dire » ? Toute valeur doit-elle être foncièrement déniée à la médecine du XVIIe siècle? D'autre part, en quoi Pascal, physicien, a-t-il influencé la médecine? La question si actuelle de la physio-pathologie de la pression sur l'organisme (astronomique, baro-traumatismes) part de la grande expérience sur le vide. L'expérience du Puy-de-Dôme était retracée et illustrée dans une dernière vitrine où l'on dégageait son incidence sur le plan médical et biologique, en rappelant qu'il y a dans cette expérience introduction du principe de la mesure manométrique.
Un catalogue n'a pu être publié, mais cette exposition fera l'objet ultérieurement d'une publication avec documents iconographiques.
Bibliothèques municipales.
Épinal (Vosges).
Catalogue. - La bibliothèque municipale d'Épinal vient de publier un catalogue d'ouvrages acquis entre mai 1967 et avril 1968. Chaque notice de ce catalogue sélectif comporte la cote de l'ouvrage, l'auteur, et le titre brièvement commenté. Ce catalogue recense un choix d'ouvrages d'imagination, de manuels généraux et de culture générale. Un index alphabétique des principaux thèmes rapprochés et regroupés clôt utilement cet ouvrage 3.
Nice (Alpes-Maritimes).
Constitution d'un fonds Jules-Romains à la Bibliothèque municipale. - Le 20 janvier 1969, Mme Gabrielle Jules-Romains a remis en l'hôtel de ville à M. Jacques Médecin, député-maire de Nice, un premier lot de lettres, photographies et pièces manuscrites concernant l'illustre académicien, ainsi qu'un volume des « Hommes de bonne volonté » dédicacé à celle qui fut une des principales inspiratrices de l'ouvrage.
Très attachée à la région niçoise dont on trouve l'évolution dans de nombreux volumes de l'auteur des « Copains », Mme Gabrielle Jules-Romains doit déposer prochainement des manuscrits, lettres et papiers personnels qui constitueront, pour la bibliothèque municipale de Nice l'embryon d'un fonds Jules-Romains.
Exposition. - La bibliothèque municipale de Nice a présenté, dans ses locaux de la villa Thiole, du 5 au 21 décembre 1968, une exposition de livres d'enfants organisée par l'association « Lire ». Les livres, provenant de la majorité des éditeurs français, étaient accompagnés de panneaux destinés à inciter les jeunes à la lecture. L'exposition a été inaugurée en présence de Monsieur l'Inspecteur d'académie des Alpes-Maritimes. Plus de 600 personnes, dont une majorité d'enseignants, se sont penchés sur cette exposition, accompagnée de travaux réalisés à l'occasion des fêtes de fin d'année par les jeunes lecteurs de la bibliothèque.
Riom (Puy-de-Dôme).
Inauguration des nouveaux locaux de la bibliothèque municipale. - Le 30 novembre 1968, Monsieur Maurice Caillet, inspecteur général des Bibliothèques, a présidé l'inauguration des nouveaux locaux de la bibliothèque municipale de Riom.
Constituée après la Révolution, la bibliothèque fut installée provisoirement au Collège de garçons, puis à l'Hôtel de ville. Transférée en 1905 dans l'ancien couvent des Carmélites, elle trouva refuge en 194I au musée Mandet. Mais au fonds ancien (15 000 volumes provenant du collège de l'Oratoire, du couvent des Cordeliers et des bibliothèques d'avocats) s'adjoignaient nombre d'ouvrages modernes qui attiraient de plus en plus les lecteurs. Devant cette situation, la municipalité décida l'aménagement de l'ancien hôtel des postes, qui offrait de vastes locaux situés au centre de la ville.
Les plans établis avec l'aide de la Direction des bibliothèques et de la lecture publique aboutirent à la réalisation d'un ensemble qui correspond aux besoins d'une clientèle composée surtout de jeunes ainsi que de chercheurs intéressés par le fonds local. Au rez-de-chaussée un hall d'exposition permet de présenter au public les plus beaux ouvrages de la réserve. La salle de lecture s'ouvre largement sur la rue par quatre baies. Un coin attrayant accueille les enfants; un autre est réservé à la consultation des périodiques. Le fonds de la salle convient bien à l'étude et nombreux sont ceux qui aiment venir y travailler. Au premier étage deux salles agréables que l'on peut réunir en cas d'affluence, permettent de recevoir des conférenciers. Pendant le mois de décembre, on y présenta une exposition réalisée avec l'aide du Comité national du livre illustré : les Riomois purent admirer, extraites des plus beaux livres édités en France depuis vingt-cinq ans, des œuvres de Dunoyer de Segonzac, Chagall, Matisse, Braque, Picasso, parmi d'autres.
Sarcelles (Val-d'Oise).
Cercle de lecture avec Bernard Clavel. - Le 17 janvier 1969, l'écrivain Bernard Clavel était l'invité de la soirée-débat organisée par le Club des lecteurs de Sarcelles, dans le cadre des activités culturelles qu'animent l'Office culturel municipal et la Bibliothèque municipale de Sarcelles.
C'est devant une assistance d'environ 200 personnes, dont une forte proportion de jeunes Sarcellois, que s'est déroulée cette rencontre avec le récent lauréat du prix Goncourt.
Le directeur de la bibliothèque municipale, était l'organisateur responsable de cette soirée, qui commença par la lecture de passages du dernier roman de Bernard Clavel : Les Fruits de l'hiver. Sur un fonds de musique d'Éric Satie, cinq jeunes Sarcellois présentèrent des chapitres de l'ouvrage, sur une scène dépouillée qu'éclairaient alternativement quelques projecteurs, dont les jeux de lumière suggéraient un décor.
Bernard Clavel vint ensuite, sur un ton chaleureux et direct, répondre aux questions d'un public très varié. Les questions furent particulièrement nombreuses sur les thèmes développés dans l'œuvre de l'auteur et sur le problème posé par l'adaptation d'un livre à la télévision et au cinéma.
La lecture des principaux extraits des Fruits de l'hiver et la discussion qui suivit ayant incité le public à mieux connaître l'œuvre de Bernard Clavel, la soirée prit fin sur une vente de livres que l'auteur dédicaça.
Bibliothèques centrales de prêt.
Alpes-Maritimes.
Catalogue des acquisitions. - La bibliothèque centrale de prêt des Alpes-Maritimes vient de faire paraître son catalogue 4 des nouvelles acquisitions 1966-1968. Ce catalogue recense d'abord les romans acquis pendant cette période, soit en raison de leur nouveauté, soit en raison du succès que certains ouvrages anciens ont obtenu auprès des lecteurs. Viennent ensuite les ouvrages documentaires, ordonnés suivant la classification décimale de Dewey. Un index alphabétique des ouvrages documentaires complète utilement ce catalogue.
Bas-Rhin.
Prêt direct aux adultes. - La Bibliothèque centrale de prêt, l'une des bibliothèques choisies en 1968 pour servir de bibliothèque pilote dans le domaine du prêt direct pour adultes, dispose désormais à cet effet de 4 nouveaux bibliobus. La directrice de cette Bibliothèque centrale de prêt, peut ainsi étendre l'expérience qu'elle avait amorcée dès novembre 1966.
L'inauguration d'un bibliobus en prêt direct a eu lieu le 17 janvier 1969 lors d'une tournée à Rosheim (chef lieu de canton : 3 ooo habitants). Les habitants prévenus par des articles de la presse locale, des tracts et des affiches, ont manifesté beaucoup d'intérêt pour cette formule qui leur permet de trouver aux principaux points de la ville (marché, place de la mairie, parking de l'hôpital, cour de l'école de garçons et du Collège d'enseignement général, Établissements Schlumberger), une fois par mois, à des heures judicieusement choisies, 3 000 livres (romans, ouvrages sur les sujets les plus variés; pédagogie, sciences, botanique, art, histoire, voyages, etc...). Un second bibliobus fonctionne à partir de 17 h 30 pour le prêt aux travailleurs à la sortie des usines (Ets Holweg, la Câblerie). Les bibliothécaires conseillent les lecteurs hésitants et prennent note des livres que certains désirent trouver au prochain passage.
Ces tournées, alimentées par les quelque 150 000 ouvrages de la Bibliothèque centrale de prêt doivent couvrir progressivement l'ensemble du département et concourir au développement de la lecture publique. Il faut déjà envisager la création d'annexes hors de Strasbourg pour pouvoir desservir les villes les plus éloignées.