URSS

Les Principaux problèmes du catalogage en URSS

E. Novikova

Les règles de catalogage doivent obéir à des principes homogènes et immuables, tout en gardant dans le cadre de ces principes une souplesse permettant de suivre l'actualité et les besoins naissants des bibliothèques. En URSS, la Commission interbibliothèque de catalogage a pleinement résolu ces problèmes en dotant les bibliothécaires soviétiques d'un complexe de « Règles unifiées de catalogage... » pour tous les genres de productions typographiques. L'auteur analyse et discute l'ensemble de la codification catalographique, en particulier les choix de vedettes de collectivités, les limitations à apporter dans la pratique à leur utilisation, le traitement des auteurs multiples et des anonymes, etc...

Le développement de la science et de la culture qui caractérise l'évolution de l'URSS trouve sa plus vive expression dans l'augmentation d'année en année du volume des imprimés pour lequel il faut prévoir un accroissement avec la mise en œuvre du nouveau programme du parti communiste. De 1918 à 1960, notre pays a édité plus d'un million et demi d'ouvrages et de brochures dans les 89 langues des peuples d'URSS et en 48 langues étrangères. Le tirage global de ces publications s'élevait à environ 24 milliards d'exemplaires.

Le réseau des bibliothèques suit le même mouvement. Il existe à l'heure actuelle en Union soviétique plus de quatre cent mille bibliothèques de tout type, en commençant par de petites bibliothèques professionnelles et rurales, dont le fonds n'excède pas quelques milliers d'ouvrages, et finissant par des bibliothèques géantes, dont les fonds comportent quelques millions et même des dizaines de millions d'imprimés. A côté des livres, périodiques et journaux, le lecteur trouve à la bibliothèque d'autres formes d'imprimés : musique, cartes, estampes, publications étroitement spécialisées comme les normes et les brevets. Il y trouve également des enregistrements sur disques ou bandes magnétiques de la parole humaine et des œuvres musicales.

La seule source susceptible d'informer d'une façon exhaustive sur les richesses que renferment les rayons des bibliothèques, c'est leur catalogue, et en premier lieu le catalogue alphabétique d'auteurs. Quel que soit le système adopté pour les catalogues d'une grande bibliothèque, l'élément de base est le catalogue alphabétique, dans la mesure où il répond avec exactitude aux questions : la bibliothèque possède-t-elle une édition déterminée d'une œuvre donnée? Quelles éditions possède-t-elle d'une œuvre donnée ? Et enfin quelles sont les œuvres d'un auteur qui se trouvent dans la bibliothèque ?

Les problèmes qui se posent aux catalographes pour les différentes bibliothèques ne sont évidemment pas les mêmes. Le lecteur d'une bibliothèque d'étude exige du catalogue plus d'informations qu'un lecteur de bibliothèque de lecture publique. D'autre part, l'information d'une bibliothèque soviétique, ayant à desservir des larges masses de population, a un dynamisme tout particulier : le catalogue non seulement y constitue la source d'information sur la composition du fonds, mais sert aussi d'instrument de rapprochement entre le livre et le lecteur. Ces différences ne doivent cependant pas affecter les principes d'organisation du catalogue alphabétique. Quelle que soit la catégorie de lecteurs à laquelle il s'adresse, il doit pleinement assurer l'information sur le fonds de la bibliothèque et ceci sous les trois aspects dont il était question ci-dessus. Dans quelle mesure y parvenir? Cela dépend tout d'abord de la façon dont sont classées les fiches du catalogue. Leur ordonnance est définie par des principes qui président au choix des premiers mots de la notice, à l'extraction de la vedette et à l'établissement des fiches secondaires. Il en résulte que les catalogues de toutes les bibliothèques, indépendamment de leur structure, de leur destination et du nombre d'utilisateurs, doivent être établis selon une méthode uniforme. C'est d'autant plus vrai que les différentes catégories de lecteurs ne sont pas séparées par des cloisons étanches et le lecteur de la bibliothèque de lecture publique aujourd'hui deviendra demain le lecteur d'une bibliothèque d'étude.

Une autre qualité que les bibliothécaires soviétiques exigent du catalogage, c'est la constance de ses principes. L'ampleur des fonds de bibliothèques, et par conséquent celle des catalogues, est actuellement si importante que les catalographes ne peuvent se permettre le luxe de prendre des décisions irréfléchies. Refaire le catalogue d'une grande bibliothèque contemporaine demande non seulement une somme de temps et des moyens considérables, mais présente le risque de désorganiser pour longtemps le catalogue existant. C'est la raison pour laquelle les principes une fois choisis doivent être inébranlables, du moins dans les limites d'un futur prévisible.

La méthode du catalogage doit rester en même temps souple. Des méthodes ossifiées ne permettant ni dérogation ni décision alternative empêchent l'adaptation des principes généraux aussi bien aux besoins des bibliothèques de différents types qu'aux exigences croissantes des lecteurs et au changement de caractère de la production typographique. En revanche, conserver la souplesse des méthodes alors que les principes restent inébranlables, c'est permettre aux catalogues de résoudre les problèmes qui se posent à une bibliothèque donnée à un moment donné. Le travail des bibliothécaires soviétiques dans le domaine de la méthodologie catalographique était surtout centré au cours des dernières décades sur les possibilités de modifier éventuellement une règle précise en fonction des circonstances variables, tout en conservant un cadre de principes unifiés et immuables.

Les bibliothèques soviétiques ne sont pas administrativement soumises à une seule direction. Leur ensemble présente une série de systèmes autonomes dont chacun a ses propres buts, ses objectifs et sa structure. Il existe un réseau des bibliothèques d'État encyclopédiques, des réseaux autonomes des bibliothèques universitaires, des bibliothèques d'étude, des bibliothèques techniques, syndicales, etc. Depuis 1959, la coordination de leurs travaux est assurée par un organe de l'Union soviétique - l'Inspection principale des bibliothèques auprès du Ministère de la culture de l'URSS, et pour les relations publiques par le Conseil aux questions bibliothéconomiques auprès du même Ministère. Mais bien antérieurement il existait une étroite collaboration entre les bibliothèques de l'Union soviétique dans le domaine de la méthodologie - collaboration qui a permis aux bibliothécaires de l'URSS, dès les premières années post-révolutionnaires, de se fixer comme objectif l'élaboration des règles unifiées de catalogage à l'usage de toutes les bibliothèques. Ces objectifs ont été atteints par la Commission du catalogage, créée en 1922 à Moscou auprès du Cabinet de bibliothéconomie de la Bibliothèque du Musée Rumjancev (actuellement Bibliothèque d'État de l'URSS V. I. Lénine) qui a publié de 1926 à 1932 la première instruction soviétique de catalogage 2.

Cette instruction a apporté dans la pratiqué des bibliothèques soviétiques beaucoup de nouveautés. Grâce à elle on a pu entreprendre des catalogues ayant les mêmes bases méthodologiques, fondées sur le principe d'uniformité de vedettes-auteurs, des collectivités-auteurs et du catalogage d'anonymes sous la forme naturelle du titre. Ces principes restent depuis immuables et les bibliothécaires soviétiques ne voient aucune raison de les faire réviser. Il en est tout autrement de l'application de ces principes.

L'instruction de 1926-1932 était orientée surtout, sinon exclusivement, sur les bibliothèques encyclopédiques d'étude. Elle ne tenait pas compte des besoins des bibliothèques d'autres types, surtout de celles de lecture publique. C'est pour cette raison sans doute que les principes adoptés étaient absolus et gardaient une certaine rigidité, surtout en ce qui concerne le catalogage des documents émanant des collectivités. La pratique des bibliothèques, bien qu'elle ait confirmé la solidité des principales dispositions de l'instruction, a vite suggéré la nécessité d'y apporter de sérieux correctifs.

L'application pratique de l'instruction de 1926-1932 a fait souvent l'objet de délibérations et de conférences interbibliothèques qui ont reconnu la nécessité, tout en sauvegardant les principales dispositions en vigueur, de créer un code de catalogage plus pratique. Ce travail a été confié à la Commission interbibliothèque de catalogage, créée en 194I.

Les problèmes qui se sont posés à elle étaient plus vastes que ceux qu'avait à résoudre la première Commission. L'instruction de 1926-1932 concernait seulement le catalogage des livres. Le but de la nouvelle Commission était d'établir un code complet de catalogage comprenant toute la production typographique. Bien que la Grande Guerre nationale 194I-1945 ait interrompu pendant un certain temps les travaux de la Commission, sa mission a été accomplie. Entre 1949 et 1958, la Commission a publié un code complet de catalogage et de l'organisation des catalogues de livres, périodiques, cartes, musique, estampes, types spéciaux de publications techniques 3.

Dès le début de son fonctionnement, la Commission de catalogage interbibliothèque a envisagé d'établir, en même temps que le code complet de catalogage destiné aux grandes bibliothèques encyclopédiques et spécialisées, une variante simplifiée des « Règles unifiées » à l'usage des bibliothèques de lecture publique. La Commission a abordé ce problème seulement après avoir précisé et approuvé les principes méthodologiques de caractère général et ceci à partir d'un matériel nombreux et varié, sur lequel était fondée la première partie des « Règles unifiées ». Cette variante abrégée des « Règles unifiées » fut publiée en 1953 4; ce n'est pas un simple abrégé de l'instruction de 1949. Compte tenu de l'importance et de la composition des fonds de petites bibliothèques, ce que l'on appelle les petites « Règles unifiées » prévoient une limitation et une simplification en ce qui concerne le catalogage des collectivités-auteurs. Tenant compte des objectifs particuliers de ces bibliothèques, les petites « Règles unifiées » admettent, dans la mesure où cela est possible, la simplification de données bibliographiques formelles concernant le livre, mais exigent en même temps une information plus ample sur son contenu.

Au cours de l'élaboration du code soviétique, la Commission ne pouvait laisser passer le problème d'actualité que constitue l'intégration au catalogue de la littérature peu demandée et d'usage limité (par exemple des publications comme des instructions techniques, des projets et programmes d'études, catalogues d'éditeurs et libraires, programmes de théâtres et de concerts, etc.). Le flot croissant de ces imprimés a menacé d'inonder les catalogues d'une innombrable quantité de fiches inutiles des publications éphémères, qui ont perdu pour le lecteur tout intérêt. La Commission a élaboré à cette fin une instruction qui porte le nom de « traitement groupé » des imprimés 5. Sans entrer dans les détails, nous remarquerons seulement que la particularité essentielle du traitement groupé réside dans le fait que ce n'est pas une seule publication qui constitue l'unité de conservation et de catalogage, mais un groupe de publications réunies selon deux traits caractéristiques : le contenu (conformément à la classification adoptée dans la bibliothèque) et le caractère ou type des publications. La méthode du traitement groupé est actuellement appliquée avec succès dans de nombreuses bibliothèques soviétiques et en particulier dans les bibliothèques encyclopédiques d'importance nationale - Bibliothèque d'État de l'URSS Lénine de Moscou et Bibliothèque publique d'État Saltykov-Ščedrin de Leningrad.

L' « Instruction sur le catalogage des livres en langues orientales étrangères », publiée en 1960 par la Bibliothèque Lénine, est destinée à un nombre relativement limité des bibliothèques d'étude. Rigoureusement conforme aux « Règles unifiées », cette instruction les complète et les modifie dans la mesure où l'exigent les particularités de structure grammaticale, de graphie et d'alphabets de langues orientales. Le trait caractéristique de l'instruction est le fait qu'elle recommande d'établir la fiche principale dans la langue et la graphie originelles du livre et de donner en complément la translittération et la traduction en russe.

Les règles et les instructions établies et publiées pendant la dernière décade par la Commission interbibliothèque de catalogage sont fondées sur les principes généraux encore adoptés de 1920 à 1932. Mais comme nous l'avons dit, la catalographie soviétique contemporaine est caractérisée par plus de souplesse dans leur application. C'est l'élément nouveau que les « Règles unifiées » ont apporté à la pratique catalographique soviétique.

Le catalogue alphabétique, c'est en premier lieu un catalogue d'auteurs. De cette vérité irréfutable avancée par l'Instruction de 1926-1932, on en déduisait que chaque œuvre d'un auteur individuel doit être cataloguée à son nom et toute publication émanant d'une collectivité à l'intitulé de la collectivité. Du point de vue logique, ce raisonnement était irréprochable. Mais la logique formelle ne correspond pas toujours à la pratique. La rigoureuse application du principe de catalogage des œuvres à la vedette-auteur s'est avérée peu pratique même pour les publications qui sont œuvres d'auteurs individuels. La première nouveauté apportée par les « Règles unifiées » dans l'application des principes du catalogage concernait le catalogage des œuvres à auteurs multiples. On a reconnu comme règle générale que la principale notice d'une œuvre ayant quatre auteurs ou plus, est établie au titre. Cette limitation du « droit d'auteur » est logiquement injustifiable, de même que la limite quantitative qui détermine que l'œuvre est incontestablement « anonyme ». C'est une convention, issue de la pratique : les utilisateurs connaissent ces œuvres à leurs titres et non pas aux noms des auteurs.

Les mêmes problèmes se posaient aux rédacteurs des « Règles unifiées » chargés de réviser le catalogage des publications ayant pour auteur une collectivité. Ils devaient compter avec le fait que certains documents sont surtout connus comme publications émanant d'une collectivité, alors que pour d'autres l'intitulé de la collectivité qui publie le document n'éveille rien dans l'esprit du lecteur. Nous nous permettons de citer un exemple : le lecteur qui cherche dans le catalogue « Les Comptes rendus de l'activité de l'Académie des sciences de l'URSS pour... l'année... » ne peut ignorer la collectivité-auteur, car sans elle le titre perd son sens et les recherches du lecteur deviennent sans objet. Mais lorsqu'il s'agit, par exemple, d'un recueil statistique publié sous le couvert de la Direction centrale de statistique auprès du Conseil des Ministres de l'URSS et contenant des matériaux officiels émanant de cette direction, le lecteur peut ignorer la collectivité qui a publié le recueil. C'est d'autant plus vrai que de semblables recueils peuvent émaner d'autres organismes que la Direction centrale de statistique. Il est évident que, là aussi, il fallait sauvegarder l'intérêt du lecteur et donner certaines limites au principe général du catalogage des collectivités-auteurs. Les rédacteurs des « Règles unifiées » ont suivi dans ce cas la tendance qui s'est déjà dessinée en 1935.

La manière dont devaient être établies les limites ne créait aucun problème. De l'ensemble des publications cataloguées à la collectivité-auteur, il fallait extraire celles qui étaient susceptibles d'être demandées au titre et non pas au nom de la collectivité. La seule difficulté était de trouver des critères objectifs du choix de ces documents. Il existe un critère formel qui permet d'effectuer le choix d'une façon incontestable, non pas de documents à exclure, mais de ceux qui doivent toujours figurer à la collectivité-auteur. Si le titre est banal et impersonnel et si c'est l'intitulé de la collectivité qui lui donne son contenu et son entité logique, alors la publication doit sans aucune hésitation être cataloguée au nom de la collectivité. Ces publications mises à part, il est très difficile de trouver des critères de choix : il arrive que des publications ayant des titres analogues diffèrent à tel point les unes des autres dans l'esprit des lecteurs, qu'ils les recherchent tantôt au titre tantôt à la collectivité. On ne peut toutefois établir un critère unique, selon lequel on traiterait le document soit au titre, soit à la collectivité. En résumé, il s'agit d'élucider dans quels cas c'est la collectivité ou le titre qui caractérise le mieux la publication et lequel des deux est le plus acceptable comme premier mot de la notice.

L'étude de matériaux a démontré que les demandes des lecteurs, et par conséquent le choix de la vedette, dépendent d'un concours de circonstances où un rôle certain revient à un élément purement formel : le titre de la publication a-t-il un caractère stéréotype ou individuel? Mais la décision appartient dans la plupart des cas à la publication même, à son caractère, son contenu et sa destination. Dans le cadre d'un petit article d'information, on ne peut donner qu'une vue d'ensemble sur la façon dont les « Règles unifiées » définissent à partir de ces critères le catalogage des publications émanant des collectivités. Sont catalogués dans tous les cas à l'intitulé de la collectivité les écrits officiels d'administrations et d'organisations qui ont un caractère de programme, de déclaration, de directive, de compte rendu ou d'information. La façon de cataloguer des documents publiés par une collectivité et ayant un caractère instructif, méthodologique, de norme ou de référence, dépend surtout de la destination de ces documents. Si ce genre de publications est appelé à être utilisé dans le cadre de la collectivité qui les a publiées, c'est alors le nom de la collectivité qui est le trait le plus caractéristique et c'est à son nom qu'elles seront cataloguées. Des publications analogues, mais destinées à une large diffusion, sont cataloguées à leur titre qui alors constitue pour elles l'élément le plus caractéristique. Le catalogage des travaux scientifiques publiés par des sociétés et institutions savantes dépend du caractère du titre de chaque publication.

La même tendance à différencier le catalogage (orienté vers la demande du lecteur tout en s'appuyant sur certains critères objectifs) apparaît dans les méthodes concernant les documents publiés au nom d'une personne qui les a composés à partir de documents qui ne lui appartiennent pas et figurent dans la publication sous le nom de compilateur, éditeur, etc. L'Instruction de 1926-1932 a considéré cette personne dans tous les cas comme auteur et a recommandé de cataloguer les publications à son nom. Les « Règles unifiées » de 1949 admettaient pour certaines catégories de livres le catalogage au titre, si le nom du compilateur ne figure pas sur la page de titre. Les petites « Règles unifiées » (1953) ont tenté de cataloguer les ouvrages au nom du compilateur en fonction de son apport de créateur car cet apport constitue l'élément de notoriété et détermine si le lecteur connaît le livre à son titre ou au nom du compilateur. Ce n'est cependant pas le jugement subjectif du catalographe qui doit constituer le critère, mais le fait objectif d'appartenance de la publication à une certaine catégorie. Doivent être cataloguées au nom du compilateur, seulement les publications dont le caractère exige son apport de créateur et ses connaissances particulières, comme par exemple des anthologies, des bibliographies scientifiques, etc... Dans la deuxième édition des « Règles unifiées » (1959) dont nous parlerons ultérieurement, cette méthode a été soigneusement élaborée en fonction des besoins de grandes bibliothèques d'étude.

Pour les publications anonymes qui n'ont pas d'auteur ou si l'auteur n'a pu être dévoilé, la catalographie soviétique contemporaine suit à la lettre la règle de l'Instruction de 1926-1932 qui préconise leur catalogage à la forme naturelle du titre figurant dans la publication. Ainsi, selon les « Règles unifiées », il n'est pas nécessaire de réunir sous la même vedette toutes les éditions et traductions d'une œuvre, pour autant que le résultat ne justifie pas la dépense des moyens et l'encombrement du catalogue par les renvois. Cependant pour indiquer à l'utilisateur l'existence à la bibliothèque des diverses éditions d'une même œuvre portant des titres différents, les « Règles unifiées » recommandent d'en faire mention sur la fiche principale ou d'établir des fiches secondaires. Toutefois, suivant la tradition de l'Instruction de 1926-1932, les règles font une exception pour les « classiques anonymes ». Chacune de ces œuvres a un seul titre généralement reconnu, du moins dans notre pays, sous lequel elle figurera dans le catalogue.

Le problème du choix de la forme de la vedette est résolu par les « Règles unifiées » de la même façon que le choix de la méthode de catalogage. L'uniformité de la vedette-auteur est une condition sans laquelle le catalogue alphabétique ne peut atteindre son but principal qui est de regrouper les œuvres d'un même auteur. Le choix de la forme du nom devant figurer en vedette, qu'il s'agisse d'un auteur personne physique ou d'une collectivité-auteur, dépend, selon les « Règles unifiées » de nombreuses circonstances : celle qui a été le plus souvent utilisée par l'auteur, celle qui correspond à la tradition nationale, celle qui est consacrée officiellement, la plus simple et la plus commode. Mais dans tous les cas, la priorité est accordée à celle qui est la plus connue du lecteur. Pour faciliter la recherche de chaque forme rejetée de nom d'auteur (individu ou collectivité) il convient, bien entendu, de faire un renvoi.

De tout ce qui vient d'être exposé, il est facile à déduire que la méthodologie catalographique soviétique prête une particulière attention au problème de l'établissement de la fiche principale sans contester l'importance des fiches secondaires : les bibliothécaires soviétiques les considèrent comme moyen auxiliaire de la recherche du livre ou pour compléter un ensemble de fiches d'un auteur dans un catalogue alphabétique. Bien que le progrès atteint dans la multigraphie des fiches atténue la différence entre la fiche principale et les secondaires, le rôle de la fiche principale n'est pas pour autant diminué. Il ne faut pas perdre de vue que la fiche principale du catalogue alphabétique d'auteurs sera la fiche de base des autres catalogues. Cette seule raison suffirait pour que la principale notice soit établie sous la forme qui sera vraisemblablement la plus demandée par l'utilisateur. La rédaction correcte de la fiche principale évite l'enc mbrement du catalogue par des fiches secondaires. Ceci est d'autant plus nécessaire que cela économise les moyens d'établissement du catalogue et facilite la recherche.

Pour atteindre des résultats satisfaisants dans le choix des méthodes de catalogage et de la forme de la vedette, il faut pouvoir recourir non seulement à une codification des principes généraux, mais aussi à des règles précises. L'Instruction soviétique a répondu à ces besoins en systématisant les règles sous forme de code en plusieurs volumes.

Les « Règles unifiées » constituent le principal document dont se servent les bibliothèques de l'URSS pour le traitement de leurs livres en russe et en langues étrangères. Nos bibliothèques rencontrent des conditions d'autant plus favorables qu'elles utilisent pour les livres nouvellement entrés des fiches imprimées, établies par les soins du catalogage centralisé. Les fiches éditées par le principal organisme bibliographique de l'URSS - la Chambre du livre - bénéficient de la plus large diffusion. Ce qui illustre l'ampleur du catalogage centralisé en URSS ce sont les chiffres atteints par la production de la Chambre du livre qui seulement pour l'année 1960 s'élèvent à 85 millions de fiches de 42 000 titres de livres publiés en russe. Les fiches imprimées établies en accord avec les « Règles unifiées » servent d'instruments d'unification du catalogage dans les bibliothèques de l'URSS. On procède actuellement à la diffusion d'une nouvelle forme de catalogage centralisé qui permettra de recevoir le livre nouvellement publié accompagné de sa notice bibliographique.

Les catalographes soviétiques sont loin de penser que les « Règles unifiées » ont tout résolu. Nombreux sont encore les problèmes litigieux et qui attendent leur solution. Ils ne peuvent être résolus par des bibliothécaires seuls, sans le concours des spécialistes de littérature et de linguistique. Les noms d'auteurs de différents pays, des peuples et d'époques, transcription et translittération correctes - autant de problèmes qui demandent encore à être étudiés. On attend beaucoup dans ces domaines de la collaboration internationale des bibliothécaires et particulièrement de la future Conférence sur les principes de catalogage.

Dans l'avenir, la vie même pose des problèmes que l'on ne peut prévoir. De nouvelles formes de production typographique apparaissent, l'édition change d'aspect, de nouveaux types de collectivités naissent et les catalographes sont alors obligés tout en sauvegardant les principes établis de les adapter aux nouveaux types de documents entrés dans la bibliothèque. A la faveur de l'expérience apparaît la nécessité de préciser les anciennes règles. C'est la raison pour laquelle la Commission interbibliothèque de catalogage procède simultanément à l'élaboration de différentes parties des « Règles unifiées » et à la révision et la réédition des anciennes. Actuellement, ont déjà été publiés deux fascicules d'une deuxième édition corrigée et augmentée de la première partie des « Règles unifiées » : fascicule I, Opisanie knig (catalogage des livres) (1959) et fascicule II, Organizacija alfavitnogo kataloga knig (organisation du catalogue alphabétique des livres) (196I). Au début de l'année 1962 on projette la réédition de la quatrième partie Opisanie notnykh izdanij (catalogage des œuvres musicales); cette partie sera complétée par les règles de catalogage et d'organisation de catalogues alphabétiques d'enregistrements sonores - des disques et bandes magnétiques. On travaille à la préparation de la nouvelle édition des « Règles unifiées » pour petites bibliothèques.

Un autre problème à l'ordre du jour est l'élaboration, avec le concours des spécialistes bibliographes, des règles de rédaction des références bibliographiques, en accord avec les règles à l'usage des catalogues des bibliothèques.

Une même méthode de rédaction de notices à l'usage des catalogues et des bibliographies a été déjà prévue par les petites « Règles unifiées ». Mais comme les petites règles étaient destinées aux petites bibliothèques, la normalisation des références bibliographiques concernait seulement les bibliographies recommandées à l'usage des lecteurs de ces bibliothèques. Actuellement le problème se pose de façon plus large : les règles doivent tenir compte de bibliographies de tout genre - de la bibliographie spécialisée courante, de la bibliographie scientifique rétrospective, recommandée, etc. Il est permis d'espérer que la Conférence internationale sur les principes de catalogage apportera des éléments précieux à la solution de ce problème.

Une des préoccupations actuelles des bibliographes soviétiques est de doter d'un code de catalogage les bibliothèques des républiques fédérées de l'URSS dont le fonds est composé en majeure partie des livres écrits en leur langue nationale. Les «Règles unifiées » sont en principe prévues pour la production typographique de langue russe et des langues étrangères utilisant les alphabets russe et latin. Mais l'URSS est un pays multinational dont les peuples ont des écritures fondées sur des graphies différentes : russe, latin, arménien, géorgien, hébreu. Il ne peut être question d'un ordre alphabétique unique pour toutes les publications. On ne peut appliquer les mêmes règles pour des documents de structure linguistique différente. C'est la raison pour laquelle la Commission interbibliothèque de catalogage a renoncé à soumettre à un seul code ces différentes bibliothèques nationales. Ces règles sont élaborées au sein même de diverses républiques, tenant compte des particularités de leurs bibliothèques, d'une étude approfondie de leur fonds et de la parfaite connaissance de leur langue nationale. Les « Règles unifiées » donnent aux bibliothèques des républiques de l'Union soviétique une base indispensable à l'élaboration des règles nationales qui, à l'échelle de toute l'Union soviétique, assure l'unité des principes et des méthodes de catalogage. Ces dernières instructions achèvent en URSS le travail d'unification du catalogage.

  1. (retour)↑  Traduit du russe par Mme I. Forest, bibliothécaire au Service technique de la Direction des bibliothèques de France.
  2. (retour)↑  Traduit du russe par Mme I. Forest, bibliothécaire au Service technique de la Direction des bibliothèques de France.
  3. (retour)↑  Instrukcija po sostavleniju alfavitnogo kataloga. Vyp. I. - « Materialy Instituta bibliotekovedenija Publičnoj biblioteki SSSR imeni V. I. Lenina ». M., 1928 (2° ispr. i dop. izd. M., 1934). (Instruction sur l'établissement du catalogue alphabétique. Fasc. I. « Matériaux de l'Institut de bibliothéconomie de la Bibliothèque publique de l'URSS V. I. Lénine ». Moscou, 1928 (2e éd. corr. et augm., Moscou, 1934).
    - To ze. Vyp. 3. M.-L., 1932 (Idem. Fasc. 3, Moscou-Leningrad, 1932).
    - Vtorym vypuskom Instrukcji sčitaetsja izdanie : Derman (G. K.), Ivanov (G. J.) i Trofimov (L. V.). - Instrukcija po katalogizacii proizvedenij kollektivov. M., 1926. (2° izd. ispr. i dop. M., 1929). (Instruction sur le catalogage des publications de collectivités. - Moscou, 1926. 2e éd. corr. et augm. Moscou, 1929.)
  4. (retour)↑  Edinye pravila opisanija proizvedenij pečati dlja bibliotečnykh katalogov. M.-L., 1949-1958.
    C. I. Vyp. I. Opisanie Knig. M., 1949.
    Č. I. Vyp. 2. Organizacija alfavitnogo kataloga knig. M., 1952.
    Č. 2. Opisanie periodičeskikh izdanij. L., 1954.
    Č. 3. Opisanie kartografičeskikh izdanij. L., 1950.
    Č. 4. Opisanie notnykh izdanij. M., 1952.
    Č. 5. Opisanie pečatnoj grafiki. L., 1958.
    Č. 6. Special'nye vidy tekhničeskikh izdanij. M., 1957.
    (Règles unifiées de catalogage à l'usage des catalogues des bibliothèques. Moscou-Leningrad, 1949-1958.
    Ie partie. Fasc. I. Catalogage des livres. -Moscou, 1949.
    Ie - - 2. Organisation du catalogue alphabétique des livres. - Moscou, 1952.
    2e - Catalogage des périodiques. - Leningrad, 1954.
    3e - Catalogage des cartes et plans. - Leningrad, 1950.
    4e - Catalogage des œuvres musicales. - Moscou, 1952.
    5e - Catalogage des estampes. - Leningrad, 1958.
    6e - Types spéciaux de publications techniques. - Moscou, 1957.)
  5. (retour)↑  Edinye pravila opisanija proizvedenij pecati dlja katalogov nebol'šikh bibliotek i bibliografičeskikh ukazatelej. - M., 1953. (Izd. 2° M., 1954). (Règles unifiées de catalogage des Imprimés à l'usage des catalogues des petites bibliothèques et des répertoires bibliographiques. - Moscou, 1953. 2e éd., Moscou, 1954.)
  6. (retour)↑  Gruppovaja obrabotka proizvedenij pečati. Instruktivno-metodičeskie ukazanija. M., 1958. (Traitement groupé des imprimés. Instructions méthodologiques. - Moscou, 1958).