Chronique des bibliothèques

Bibliothèque nationale. Département de la Musique. Enrichissements 1959

Dépôt légal.

Parmi les œuvres entrées au département de la Musique en 1959 par dépôt légal on peut signaler la Messe et la 2e Symphonie de Florent Schmitt, dont ce sont les dernières œuvres. Parmi les œuvres instrumentales reçues citons encore de Darius Milhaud : le Divertissement pour quintette à vent, le Concerto pour flûte, violon et orchestre ; de Raymond Loucheur : la 2e Symphonie ; d'André Jolivet : le Concerto pour percussion et orchestre ; de Maurice Thiriet : Poème pour orchestre de chambre.

La plupart des œuvres vocales déposées - à de rares exceptions près (Laudes de Saint-Antoine de Padoue de F. Poulenc, la Tragédie humaine (A. d'Aubigné) de D. Milhaud... - empruntent leurs textes aux poètes contemporains : Procession nocturne de Henri Tomasi (Milosz); Cantate de Darius Milhaud (Jean Cassou); le Soleil des eaux de Pierre Boulez (René Char)... Comme œuvres lyriques nous avons reçu le dépôt des deux pièces de Francis Poulenc : Dialogue des Carmélites (Bernanos) et La Voix humaine (Cocteau)...

La peinture elle-même, selon une formule lancée récemment, est parfois appelée à servir de prétexte à la musique : ainsi avons-nous reçu le Déjeuner sur l'herbe de Manet, musicalement traduit pour orchestre par Jean Rivier.

Accueillants à quelques bons auteurs étrangers, les éditeurs français nous ont envoyé aussi d'intéressantes œuvres de G. Enesco (Symphonie de Chambre); L. Lajtha (7e Symphonie); H. Villa Lobos (Erosao, poème symphonique; Quatuor pour instruments à vent, 1er trio...)...

Malheureusement les éditions critiques de musique ancienne ont été bien peu nombreuses en 1959 : nous nous sommes enrichis toutefois du 3e Livre d'orgue de Gabriel Nivers (Publications de la Société française de Musicologie, N. Dufourcq), du Second livre des Octonaires de la vanité du monde de Paschal de Lestocart (Monuments de la musique française au temps de la Renaissance, J. Chailley, M. Honneger).

Acquisitions.

Comme à l'ordinaire, une bonne partie de nos crédits a été consacrée aux œuvres de compositeurs contemporains étrangers : allemands (S. Blacher, J. N. David, G. von Einem, H. W. Henze...), américains (S. Barber, L. Bernstein, N. Dello Joio, D. Diamond, V. Persichetti), anglais (A. Bliss, B. Britten, A. Busch, E. Rubbra...), italiens (L. Dallapiccola, G. F. et R. Malipiero, L. Nono, G. Petrassi...)... Nous ne manquons pas non plus d'acquérir aussi les œuvres de compositeurs français éditées à l'étranger (J. Françaix, J. Ibert...).

Avec les trente et quelques périodiques étrangers auxquels nous sommes abonnés, les collections monumentales constituent également une part importante de nos acquisitions : en effet, les musicologues allemands publient à un rythme rapide et soutenu la 2e édition revue et corrigée des œuvres de Bach, de Haendel et de Mozart, ils poursuivent celle de Haydn, ils ont entrepris et mènent rapidement celle de Gluck... cependant que les Anglais continuent leur édition Purcell; les Italiens refont une édition Palestrina.

Des enrichissements peu spectaculaires méritent peut-être cependant d'être signalés car ils caractérisent assez bien les préoccupations et en partie, la vocation même du département de la Musique : ce sont les microfilms d'ouvrages anciens que nous commandons petit à petit dans les bibliothèques étrangères, des manuscrits importants, indispensables à nos recherches ou demandés par des lecteurs sérieux, et surtout des imprimés français qui manquent dans nos fonds et que nous croyons avoir la mission d'y faire entrer sous une forme ou sous une autre : la plupart du temps, au moins provisoirement (un provisoire en certains cas définitif) le microfilm est le seul moyen de combler ces vides : cette année par exemple, nous avons pu enrichir notre filmothèque de quelques éditions musicales peu connues du XVIIe siècle (Messes de Fremart, Airs... de Moulinié, de Guidron, d'Aux Cousteaux) et nous avons même eu la chance de pouvoir acheter en Allemagne une « voix » des Airs à quatre parties d'Henri du Mont (1663) dont la Bibliothèque du Conservatoire possède une autre voix, et dont le Magdelene College de Cambridge pouvait nous envoyer le microfilm des parties complétant l'ouvrage.

Mais la plus belle acquisition de 1959, que nous avons pu faire grâce à un crédit exceptionnel, est la très riche section musicale de la bibliothèque du regretté folkloriste Patrice Coirault, composée de rares et nombreux textes musicaux et littéraires manuscrits (XVIIe-XVIIIe siècles) et imprimés (XVIe-XIXe siècles) ainsi que d'un important fonds d'instruments de travail, certains d'une grande rareté. Le département de la Musique, qui possédait déjà la bibliothèque de Weckerlin, est désormais, grâce à cet apport nouveau, un des plus riches centres d'études de folklore musical des deux mondes.

Échanges.

Peu d'échanges internationaux en 1959 : ce mode d'enrichissement nous a toutefois permis de recevoir de Pologne d'intéressantes œuvres de compositeurs contemporains, et l'essentiel de la production musicologique de ce pays qui est loin d'être négligeable.

Dons.

Parmi les nombreux dons reçus en 1959, citons les importants extraits autographes des Mémoires de Gounod qui ont été offerts par ses petits-fils à la Bibliothèque de l'Opéra.

Grâce à Mrs Curtiss, auteur d'un récent et excellent livre sur Bizet, et qui a fait don à la Bibliothèque nationale de la précieuse documentation qu'elle avait réunie à cette occasion, nous nous sommes enrichis de nombreux manuscrits de jeunesse de l'auteur de Carmen, et de très intéressants documents concernant le musicien lui-même et son entourage musical.

Mérite une mention toute spéciale le manuscrit de la Symphonie sur un thème montagnard de Vincent d'Indy offert à la Bibliothèque du Conservatoire par le créateur et dédicataire de l'œuvre, le pianiste Armand Ferté, qui nous a également donné un bel autographe de Saint-Saëns (Conseils sur l'interprétation d'Orphée de Gluck).

Il n'est que juste enfin de signaler l'entrée dans nos fonds de manuscrits et documents de deux musiciens français : Albert Doyen, de qui Mme Doyen nous a donné entre autres, la partition d'Ahasverus et des notes précieuses relatives aux Fêtes du Peuple, et Paul Ladmirault, bien représenté désormais à la Bibliothèque du Conservatoire grâce à des dons répétés de Mme Ladmirault qui nous avait remis, entre autres importants manuscrits, celui de l'opéra inédit Gilles de Retz et tout récemment d'intéressants autographes et de nombreux documents biographiques envoyés à l'occasion de la récente exposition organisée rue de Madrid en l'honneur du musicien breton (voir ci-dessus). Signalons à ce propos que ces petites expositions consacrées à des compositeurs vivants ou récemment disparus nous valent toujours le don de quelque manuscrit et sont pour nous une source intéressante d'enrichissement.

Bibliothèque du Conservatoire national de musique.

Exposition Paul Ladmirault. - Mme Paul Ladmirault ayant fait récemment don au département de la Musique de la Bibliothèque nationale d'une importante série de manuscrits autographes du musicien et de divers autres documents le concernant, ces manuscrits et ces documents ont fait l'objet, du 20 novembre 1959 au 8 janvier 1960, d'une exposition à la Bibliothèque du Conservatoire. Le nombre et la variété des pièces exposées ont permis de donner aux visiteurs de cette exposition une idée assez exacte aussi bien de l'œuvre que de la personnalité si attachante de l'artiste, mort en 1944 dans la « poche de Saint-Nazaire ». Ses manuscrits, sa correspondance, ses portraits évoquèrent un musicien sensible, fin, laborieux, modeste, qui n'a jamais voulu quitter sa terre natale, la Bretagne, qu'il n'a cessé de chanter, dès ce Gilles de Retz, composé à l'âge de 15 ans, et jusqu'au magnifique poème de Tristan, les pittoresques tableaux de la Brière, de la Suite bretonne ou de la Princesse de Koridwen. L'exposition a été inaugurée par la fille du musicien, professeur d'harmonie, comme son père, au Conservatoire de Nantes.

Bibliothèque du Muséum national d'histoire naturelle.

En mars dernier ont commencé les travaux proprement dits de construction d'une nouvelle Bibliothèque du Muséum national d'histoire naturelle sur un terrain situé en bordure de la rue Geoffroy Saint-Hilaire, le long du Pavillon de la Zoologie.

Étant donné l'emplacement et la forme du terrain proposé pour cette construction, de nombreuses objections furent faites à l'avant-projet de l'architecte, M. Delaage, et bien que des crédits importants aient été ouverts pour cette opération dès 1957 ce n'est qu'à la fin de 1959 que le permis de construire fut délivré et que les fondations furent entreprises.

Alors que la bibliothèque actuelle, qui est riche de 450.000 volumes et de très nombreux périodiques dont I.500 vivants, ne peut accueillir que 30 lecteurs et que ses magasins sont combles, la nouvelle bibliothèque offrira, une fois achevée, près de 40.000 m de tablettes et environ 350 places assises réparties entre plusieurs salles publiques. Le personnel disposera, lui aussi, de locaux beaucoup plus vastes et bien reliés avec les services publics et les magasins.

L'achèvement du gros œuvre est prévu pour octobre 196I et le transfert dans les nouveaux bâtiments doit être opéré dans le courant de l'année 1962.

Bibliothèques municipales.

Barentin (Seine-Maritime).

La nouvelle bibliothèque a été inaugurée le 2 avril par le président André Marie, député-maire de Barentin, en présence de M. Chaussade, préfet de la Seine-Maritime, de M. Julien Cain, directeur général des bibliothèques, de l'inspecteur d'académie et de nombreux maires des communes voisines.

La bibliothèque qui occupe le premier étage du Centre culturel, édifié par M. Percheron, architecte, comprend une vaste salle de lecture, une section de prêt avec accès direct aux rayons et un coin pour les enfants.

Éclairée par de vastes baies ouvrant sur des perspectives étendues, meublée et décorée avec goût, cette bibliothèque a été agencée pour permettre à un seul employé d'assurer avec facilité le service tout en exerçant une surveillance efficace.

Comme l'ont souligné le président André Marie et M. Julien Cain dans leurs discours, la ville de Barentin a montré, par cette réalisation remarquable, son souci d'offrir à l'ensemble de la population les ressources inappréciables du livre et le moyen d'accéder à la culture.

Bordeaux (Gironde).

Une exposition intitulée « Panorama de l'École soviétique » s'est tenue du 19 au 27 mars dans la salle d'exposition de la Bibliothèque municipale de Bordeaux, sous le patronage du recteur de l'Université.

Toulouse (Haute-Garonne).

Comme chaque année, la ville de Toulouse a organisé une semaine culturelle qui a été consacrée en 1960 à la Belgique.

La Bibliothèque municipale y a participé avec une exposition : « L'Art du livre en Belgique et Christophe Plantin ». - Cette manifestation, inaugurée le 26 mars, groupe 150 volumes presque tous illustrés, appartenant au fonds ancien de la Bibliothèque et imprimés en Belgique du xve au XVIe siècle dans les villes suivantes : Anvers, Bouillon, Bruges, Bruxelles, Gand, Liège, Louvain et Mons; la part la plus grande étant faite aux impressions anversoises et particulièrement à celles de Christophe Plantin et de ses successeurs.

Il convient de signaler notamment une série de frontispices dessinés par Rubens pour Balthazar Moretus, des reliures aux armes des ducs de Bouillon et plusieurs ouvrages de numismatique romaine imprimés à Anvers et à Bruges et ayant appartenu à Racine. Des gravures relatives à la Belgique provenant du Musée Paul-Dupuy complètent l'exposition.

Les autres manifestations organisées dans le cadre de cette semaine culturelle étaient :
I° Représentations de Zémire et Azor de Grétry au Théâtre du Capitole avec les costumes et les décors du festival d'Aix-en-Provence; à cette occasion une exposition consacrée à Grétry et à ses œuvres avait été organisée au foyer du théâtre avec des ouvrages prêtés par la Bibliothèque municipale et le Conservatoire.
2° Exposition : « Hommage au Chevalier Edelinck », gravures belges du XVIIe siècle, au Musée Paul-Dupuy.
3° La peinture flamande et rétrospective de Maurice Soudan, au Musée des Augustins.

Bibliothèques municipales de Paris.

Le Bulletin municipal officiel de la Ville de Paris publie, dans son numéro 64 du 17 mars 1960, les statistiques des bibliothèques municipales de Paris pour l'année 1959. Le chiffre des prêts continue à s'accroître puisque, malgré la fermeture de deux bibliothèques, le nombre des livres prêtés à domicile s'est élevé à 3.02I.370, contre 2.94I.176 en 1958 : par contre le nombre des lecteurs est resté à peu près stationnaire.

Cet essor est particulièrement net à la Bibliothèque enfantine du 20e arrondissement (17, rue Sorbier), qui a doublé en six ans son chiffre de prêts (73.381 pour 1959) et dont le fonds pour adolescents créé en 1956 rencontre un succès grandissant. Plusieurs bibliothèques ont bénéficié d'aménagements et de transformations (7e, 16e ; travaux en cours dans le 15e et le 17e) et une nouvelle salle a été ouverte, rue du Colonel-Moll (17e) en mai 1959.

La modernisation des bibliothèques municipales doit se poursuivre; un programme est à l'étude pour construire un bâtiment pour la bibliothèque du 18e arrondissement, développer les bibliothèques pour la jeunesse et créer de nouvelles bibliothèques à la périphérie de Paris.

Bibliothèques centrales de prêt.

Haut-Rhin.

La Bibliothèque centrale de prêt du Haut-Rhin vient de faire imprimer, par la Maison Alsatia, un dépliant sur les romans de la vie paysanne : les seize romans sélectionnés ont été choisis dans le but d'attirer l'attention des lecteurs sur des œuvres ayant une valeur littéraire et documentaire, mais assez peu connus, tels que : Le Christ s'est arrêté à Eboli, de Carlo Levi, Sarn, de Mary Webb, ou Le Riz et la mousson, de Markandaya; pour chaque titre une notice présente très brièvement le roman et son auteur.

Ces dépliants illustrés seront diffusés au cours des tournées, à raison de 5 à 10 par commune.

Un nouveau tirage pourrait être effectué, à un prix égal ou inférieur à o,28 NF; la commande devrait être faite avant la fin juin 1960.

Marne.

Mlle Besredka vient de publier le Catalogue de la discothèque de la Bibliothèque centrale de prêt de la Marne. Ces deux gros volumes multigraphiés, qui constituent une réédition du catalogue paru en 1957, donnent une idée du choix particulièrement soigné de cette discothèque.