Une bibliothèque de quartier à Toulouse
Le Bulletin des bibliothèques de France a, dans son numéro de juin 1958, donné le compte rendu de l'inauguration, le 31 mai dernier, de la bibliothèque de quartier Fabre, à Toulouse. En publiant aujourd'hui des photographies de cette réalisation, nous apportons quelques précisions sur les caractéristiques de cette bibliothèque et sur les premiers résultats qu'elle a obtenus.
Le centre de l'agglomération toulousaine, de population très dense, était mal desservi au point de vue de la lecture publique par la Bibliothèque municipale, placée à une des extrémités de la vieille ville et dont, de surcroît, la section de prêt se trouve logée de façon peu pratique et à l'étroit. Il était difficile, pour pallier ce très sérieux inconvénient, d'envisager la construction d'une autre bibliothèque ou l'adaptation d'un ancien local commercial et cela, pour de multiples raisons d'ordre administratif et budgétaire. On put cependant trouver à ce problème une solution très satisfaisante en profitant de la reconstruction complète d'une école maternelle, sise précisément dans le noyau de Toulouse, à l'opposé de la Bibliothèque municipale; cette école ne devant occuper que le premier étage de l'immeuble, le rez-de-chaussée se trouvait libre. Il fut alors décidé d'en affecter une partie à la bibliothèque de quartier dont le besoin se faisait depuis si longtemps sentir.
Cette annexe occupe un excellent emplacement, au croisement de deux rues sur lesquelles sa façade se développe par une longue courbe, entièrement garnie de vitrages. Elle est tout à fait indépendante de l'école, tant par ses issues que par l'éclairage et l'adduction d'eau. Seul le chauffage est commun.
La disposition intérieure est très simple : sitôt franchie la porte, le visiteur se trouve dans un large vestibule; à sa droite, une grande porte intérieure vitrée le fera pénétrer dans la salle de lecture et de prêt; en face de lui une autre porte le conduit au bureau du bibliothécaire; au fond, à droite, se trouve l'installation sanitaire.
La salle de lecture dessine un carré 1 dont un angle, celui donnant sur les deux rues, est arrondi; légèrement en retrait, se greffe une annexe plus petite affectée à la section pour la jeunesse. L'ensemble mesure 168 m2, dont 30 pour la section des jeunes; la hauteur est de 3,25 m. Une large baie située derrière la banque de prêt fait communiquer la salle de lecture et le bureau du bibliothécaire, ce dernier peut être à volonté isolé de la salle par un store à lames orientables. Donnant sur le bureau, une pièce tapissée de rayonnages sert de réserve. Bureau et réserve ont respectivement 14 et 9 m2; 35 m2 sont affectés à la circulation et aux sanitaires.
La bibliothèque se trouvant à l'intersection de deux rues assez étroites, il importait de donner à l'intérieur le maximum de luminosité; cette question, à laquelle était pour une part liée celle du mobilier, a fait l'objet d'une étude très attentive de la part de l'architecte en chef de la ville, M. Brunerie, assisté de M. Tarrius, architecte principal.
Les murs sont peints en lie de vin, vert d'eau et gris dans la salle de lecture, en jaune dans le reste du local; le plafond et les colonnes qui le supportent sont blancs; le dallage est composé de carreaux de grès porphyré gris. L'éclairage est donné par des tubes fluorescents haute tension, qui soulignent de façon heureuse le quadrillage des poutrelles.
Le mobilier, entièrement dessiné par les services d'architecture de la ville, sauf les fichiers standard et les sièges, est en chêne clair verni, à l'exception de quelques piètements de petites tables et des sièges qui sont en tubes métalliques noirs. Pour ses collections, la bibliothèque dispose de cinq épis à double face, de 3 m de long, dont les rayons inférieurs sont inclinés pour permettre une meilleure présentation des titres et qui sont placés en éventail de façon à faciliter la surveillance à partir de la banque de prêt. Elle dispose encore de rayonnages muraux dans le coin des jeunes et celui des usuels et d'un rayonnage bas continu devant les glaces donnant sur la rue. Ce dernier supporte un long plateau en formica de teinte grise, sur lequel sont posés de place en place, face à la rue, des présentoirs métalliques munis d'une tablette en verre. De petites expositions consacrées aux dernières acquisitions ou groupant des livres par centres d'intérêt, y sont faites de façon permanente et connaissent un vif succès...
Le coin des usuels, dont nous avons déjà parlé, est muni d'une grande table de ligne sobre, entièrement en chêne, de 3,50 m sur 1,20 m, et 0,76 m de haut; quatre autres petites tables sont disposées entre le vitrage et les épis pour les lecteurs préférant la solitude; en tout dix-huit personnes peuvent ainsi travailler en même temps dans la section pour adultes; en plus, une table basse ronde de I,10 m de diamètre sur 0,50 m de haut, entourée de fauteuils, est affectée à la consultation des périodiques. Ceux-ci sont placés dans des couvertures en matière plastique et présentés sur des berceaux métalliques disposés à volonté sur un grand panneau d'isorel perforé, prévu pour recevoir une vingtaine de périodiques. Le coin des enfants dispose d'un mobilier semblable, mais, naturellement, de dimensions moindres, surtout en hauteur (0,70 m pour les tables). La banque de prêt, de 3,30 m de long sur 1 m de haut, est à angle arrondi; son plateau est en formica gris, semblable à celui qui court devant les fenêtres.
La bibliothèque est prévue pour pouvoir contenir 10.000 volumes, mais elle n'en dispose encore que de 3.050, dont 600 pour les jeunes. Son fonds pour adultes est composé de I.500 romans et 950 documentaires et usuels. Il faut y joindre les abonnements suivants : 7 périodiques pour les adultes, 5 pour les jeunes. Ces chiffres sont encore faibles et un sérieux effort devra être fait pour que le manque de livres ne soit pas, dès cette année, un sérieux obstacle au développement de la bibliothèque.
Celle-ci, en effet, et bien qu'elle n'ait commencé à fonctionner qu'à la veille des vacances, connaît un succès appréciable, qui risquerait d'être freiné si le nombre de livres mis à la disposition des usagers ne croissait pas proportionnellement à l'afflux du public.
La bibliothèque Fabre a, comme personnel, sous la direction de la bibliothécaire chargée de la lecture publique à la Bibliothèque municipale, une employée à temps complet pour la section d'adultes; une autre employée est détachée de la Bibliothèque municipale les jours d'ouverture de la section des jeunes. Pour les adultes, l'annexe fonctionne tous les jours, sauf dimanche et lundi, de 15 à 19 heures. Les enfants sont admis les mercredi, jeudi et samedi, aux mêmes heures; à partir du Ier novembre, ils le seront aussi le jeudi matin de 10 h à midi.
Compte tenu de ce personnel, de cet horaire et de ce fonds, il est indéniable que cette nouvelle bibliothèque a été accueillie très favorablement; il est encore trop tôt pour dresser un bilan de cette expérience, elle ne porte que sur trois mois, coupés par un mois de fermeture en août, et ce n'est qu'en janvier, après les premiers mois d'hiver, que le point pourra être fait sérieusement.
Il est trop tôt également pour définir la « zone d'influence » de cette bibliothèque et pour étudier les divers milieux qu'elle a conquis; d'après les premières constatations, elle paraît, dans un quartier de peuplement très varié, avoir touché à peu près tous les milieux; on peut noter en outre que, si pour le moment les étudiants ne l'ont, par la force des choses, qu'assez peu fréquentée, les écoliers s'y plaisent et que, parmi eux, on trouve une proportion notable d'enfants d'origine étrangère, proportion qui ne se rencontre pas chez les adultes. On notera aussi, et cette dernière constation est encourageante, que, si dans le prêt les romans l'emportent, la proportion des ouvrages classés n'est pas négligeable et que sa progression a été constante durant les quelques mois qui se sont écoulés depuis l'ouverture de l'annexe Fabre.