Nécrologie

J.-Gabriel Prod'homme

Tous ceux qui ont connu J.-Gabriel Prod'homme apprendront avec regret sa mort annoncée par les journaux au mois de juin. Né en 1871, il était entré tard dans notre carrière puisque c'est seulement en 1930 qu'il devint administrateur de la Bibliothèque de l'Opéra, succédant à Charles Bouvet; il reçut en outre la direction de la Bibliothèque du Conservatoire en 1934, au départ d'Henry Expert.

Dès sa jeunesse, J.-Gabriel Prod'homme avait été attiré par la musique et la musicologie. Les deux importants volumes de son Cycle Berlioz datent de 1896 (Damnation de Faust) et de 1898 (Enfance du Christ). Depuis lors il n'avait cessé de multiplier ses études sur les grands musiciens. Il était revenu à plusieurs reprises sur le maître romantique français. Son travail sur Berlioz, sa vie, son œuvre, paru en 1904, connut le succès et plusieurs rééditions. En 1932, il publia encore les Souvenirs de voyage de Berlioz. Entre temps, il consacra plusieurs ouvrages à Beethoven : les Symphonies en 1906 (rééditées en 1938), les Sonates pour piano en 1937 (rééditées en 1950), la Jeunesse de Beethoven en 1920 et 1927, l'Immortelle bien-aimée de Beethoven en 1946. Il inaugura en 1927, avec Beethoven raconté par ceux qui l'ont vu, une série à laquelle il ajoute successivement, en 1928, un Schubert et un Mozart.

Prod'homme avait fait, de 1897 à 1900, un long séjour à Munich où il avait même créé une Revue franco-allemande. La parfaite connaissance de l'allemand qu'il avait acquise alors lui permit de s'attaquer à la traduction des Œuvres en prose de Wagner dont il donna les treize volumes entre 1906 et 1923, suivis de cinq volumes (1922-1927) consacrés aux Œuvres dramatiques. Il traduisit aussi les Ecrits sur la musique de Schumann, et l'importante étude de Schurig sur Mozart en 1943. Une des dernières publications de ce travailleur infatigable est la traduction des Entretiens sur la musique de Furtwaengler, en 1953.

Revenant à Mozart, il donna successivement la traduction des livrets de la Flûte enchantée et, en collaboration avec Adolphe Boschot, de l'Enlèvement au Sérail (1951).

Nous n'avons pas l'intention, en quelques lignes, de donner la bibliographie complète de J.-Gabriel Prod'homme. Les titres que nous avons cités montrent suffisamment l'étendue et la variété de ses connaissances. A ses études sur les musiciens, il ajoutait encore un Glück en 1948 et un Gossec en 1949. Par ailleurs, la richesse des collections de dessins et d'estampes de la Bibliothèque de l'Opéra lui avait permis de publier plusieurs volumes sur le costume féminin...

Prod'homme, pour ceux qui l'ont connu, restera le type du bibliothécaire de l'ancienne mode, connaissant un à un les volumes rares de ses dépôts, non pas tant pour en avoir fait exactement les fiches que pour les avoir lus et relus. D'une extrême obligeance (mais ses brusques colères étaient célèbres), il mettait volontiers les trésors de son érudition au service de ses amis et bien des lecteurs assidus de la Bibliothèque de l'Opéra lui conservent, à juste titre, un souvenir reconnaissant.