Bibliothèques d’art

Mutualiser les ressources

Maryse Goldemberg

Le 17 octobre 2008, la commission Art de l’Association des bibliothécaires de France organisait à la Cité de l’architecture et du patrimoine une journée d’étude intitulée : « Bibliothèques d’art : mutualiser les ressources ». La dématérialisation des collections soulève de nouvelles problématiques pour l’ensemble de la profession. Quelles collections proposer ? Quels accès donner à ces collections ? Quels projets lancer, qu’il s’agisse de grands projets utiles à la communauté ou de projets plus pointus ?

Projets de coopération

Deux programmes majeurs, celui de la Bibliothèque nationale de France et celui de l’Institut national d’histoire de l’art, sont menés depuis l’origine en coopération étroitet. Lucile Trunel, chef du secteur Art de la BnF, retraçait le contenu artistique et iconographique de Gallica 1 et 2. Dès ses débuts en 1995, la bibliothèque numérique comportait un important volet de documents en histoire de l’art. En 2007, dans le cadre de la Bibliothèque numérique européenne et du programme de numérisation de masse, un corpus d’environ 500 revues d’art des années 1750-1938 a été défini ainsi que trois autres ensembles : salons et catalogues d’art, en concertation avec le musée d’Orsay ; ouvrages de référence ; totalité des documents figurant sous la cote V.

Parallèlement, le service de reproduction poursuit la sauvegarde des documents précieux, mais ces numérisations restent encore dans une base distincte. Frédérique Joannic-Seta, du département Pôle associés/Gallica de la BnF dressait un panorama de la coopération à la BnF : 144 partenaires œuvrent dans une optique de mutualisation de ressources en s’appuyant sur deux outils coopératifs, Gallica, qui moissonne déjà les catalogues de six pôles associés grâce au protocole OAI (Open Archives Initiative), et le CCFr (Catalogue collectif de France), qui permet d’interroger plusieurs catalogues collectifs.

Dans le domaine de l’art, des numérisations sont en cours dans trois pôles associés en dépôt légal éditeur (INHA, bibliothèque Forney, Cité internationale de la bande dessinée et de l’image d’Angoulême – Cibdi) et dans cinq pôles associés documentaires (bibliothèque municipale de Chaumont, Centre national des arts du cirque, Cibdi, Maison du Moyen Âge de Poitiers et Centre national de la danse). Ainsi sont signalés et numérisés des documents qui, autrement, échapperaient de fait au dépôt légal de la BnF : affiches contemporaines ou captations de spectacles.

Dans les 1 403 collections numérisées répertoriées sur le site « Patrimoine numérique » du ministère de la Culture, un millier environ concerne les arts, l’architecture, les arts du spectacle, le cinéma et l’audiovisuel. Les numérisations sont très axées sur de petits projets autour d’un certain type de document (partitions baroques de la BM de Versailles), d’un intérêt géographique (paysages et monuments du Forez à la BM de Saint-Étienne) ou d’un fonds particulier (fonds Berlioz à Grenoble) et davantage centrées sur l’image que sur le texte, à l’exception de la BnF et de l’INHA.

Vers une numérisation concertée ?

On peut alors se poser la question de la mise en place d’un réseau thématique de numérisation concertée en histoire de l’art, à l’instar de ce qui a été proposé pour les sciences juridiques lors de la journée d’information et d’échange organisée par la BnF et la bibliothèque Cujas le 28 mai 2008  1. Le répertoire des bibliothèques d’art établi par l’INHA indique déjà les lignes de force des établissements. Il conviendrait ensuite d’élaborer un premier tableau des numérisations déjà constituées, de faire remonter les besoins et les ambitions de chaque institution, de définir des axes documentaires d’intérêt national en collaboration avec les chercheurs et de déterminer un certain nombre de prérequis techniques : signalement préalable des collections, existence de standards de numérisation, interopérabilité, conservation pérenne.

Pierre-Emmanuel Guilleray, de la bibliothèque municipale d’étude de Besançon, présentait ensuite un exemple d’action menée en tant que pôle associé autour de la collection Pierre-Adrien Pâris, et des difficultés de cheminement pour les chercheurs lorsque les données sont éclatées sur plusieurs bases. Dominique Morelon, responsable des fonds patrimoniaux à l’INHA, décrivait la base des Classiques de l’histoire de l’art.

Anne Weber, responsable de la bibliothèque numérique de l’INHA exposait les aspects techniques et les évolutions -prévues de l’interface vers le futur système multimédia Agorha (Accès global et organisé aux ressources en histoire de l’art), puis soulignait la nécessité d’une collaboration entre établissements pour une sélection plus pertinente des documents, une bonne conservation des données et une amélioration de la mise à disposition. Catherine Granger, de la Direction des musées de France, détaillait les fonds numérisés de la Bibliothèque centrale des musées nationaux : catalogues imprimés du musée du Louvre de 1793 à 1920, souvent enrichis d’annotations manuscrites, inventaires manuscrits depuis 1784, carnets et correspondances d’artistes. En 2009, l’effort tendra à la mise en ligne des documents numérisés et à leur référencement. Anne-Solange Siret et Juliette Jestaz présentaient ensuite Cat’zArts, base de données des œuvres de l’Ensba (École nationale supérieure des beaux-arts). Longtemps consultable uniquement en interne, elle vient d’être mise sur internet, apportant au grand public des informations sur des documents peu accessibles physiquement  2.

Deux ateliers clôturaient la journée, l’un sur des questions d’art contemporain (reproduction, droit, coopération), l’autre sur les bibliothèques spécialisées en architecture, où Philippe Rivière présentait le portail documentaire de la Cité de l’architecture et du patrimoine qui fédère les ressources documentaires des trois départements constituant la Cité.