Francophonies et bibliothèques : innovations, changements et réseautage

1er Congrès de l’AIFBD

Frédéric Blin

Après quelques années de gestation, marquées notamment par la tenue d’une première assemblée générale constitutive au congrès de l’Ifla 2006 à Séoul, l’Association internationale francophone des bibliothécaires et documentalistes (AIFBD) a pu tenir son premier congrès à Montréal, du 3 au 7 août 2008, en satellite du congrès Ifla 2008 à Québec.

Francophonie

Tenir ce premier congrès au Québec donne tout son sens à la création de cette nouvelle association francophone. Si ses objectifs sont multiples, le principal est de fédérer les points de vue francophones pour mieux les représenter au sein de l’Ifla. Une plus grande connaissance mutuelle entre bibliothécaires francophones doit permettre de promouvoir la diversité culturelle et de soutenir le multilinguisme au sein des prochains congrès de l’Ifla.

Lors de l’ouverture du congrès, Réjean Savard, actuel président de l’AIFBD, a précisé : « pour nous, les Québécois, parler français est une résistance », mais surtout une résistance à la pensée unique et à l’uniformisation culturelle véhiculée par la domination anglo-saxonne. Toutefois, il ne s’agit pas de participer à quelque compétition que ce soit, mais bien plutôt de venir enrichir le patrimoine culturel mondial en partageant ses différences.

Le discours porteur et particulièrement motivant de Lise Bissonnette et l’émouvant témoignage de Françoise Beaulieu Thybulle (directrice de la Bibliothèque nationale d’Haïti) ont confirmé la vitalité du français dans le monde et l’importance de la lecture comme vecteur du savoir.

 

Amandine Jacquet

ajacquet@ladrome.fr

Vincent Bonnet

vbonnet@mairie-marseille.fr

    Étant hébergé dans le cadre très prestigieux et agréable de la grande Bibliothèque et Archives nationales du Québec à Montréal (et pour certains ateliers dans la bibliothèque de l’université du Québec à Montréal), ce congrès a permis de réunir une communauté francophone de plus de 200 personnes, issues de 26 pays différents. Plusieurs des délégués ont pu bénéficier de bourses octroyées soit par l’Organisation internationale de la francophonie (OIF), soutenant l’initiative depuis l’origine, soit encore par le Comité français Ifla. À noter également une délégation francophile, d’une quinzaine de personnes, venue des États-Unis pour rencontrer des collègues francophones et leur présenter leur Initiative de collaboration entre les bibliothèques françaises et nord-américaines (ICBFN/CIFNAL *).

    Ainsi, davantage encore que les contenus des communications, c’est dans le fait même de son organisation qu’a résidé toute l’importance de congrès, placé sous le signe du « réseautage », de la coopération, de la rencontre entre collègues de différents pays. C’était bien là l’objectif avoué par Réjean Savard, président de l’AIFBD, et réaffirmé par Pietro Sicuro, directeur de l’Institut de la francophonie numérique de l’OIF, dès l’ouverture du congrès. L’initiative ViceVersa (voir encadré ci-dessous), programme d’échanges professionnels à l’initiative de l’AIFBD présenté à l’occasion de ce congrès, témoigne ainsi de l’ambition de l’AIFBD d’aider à renforcer les liens entre les différentes parties de la communauté professionnelle francophone. Lise Bissonnette, présidente directrice générale de la BAnQ, insista quant à elle sur le rôle joué par les bibliothèques pour lutter contre l’homogénéité culturelle, regrettant l’absence des professionnels francophones dans les débats actuels sur la société de l’information et la diversité culturelle. De fortes attentes reposent ainsi sur l’AIFBD, qui doit amener des objectifs culturels dans tous les projets de coopération documentaire internationaux.

    ViceVersa

    ViceVersa est une interface d’échange de postes dans le milieu des bibliothèques francophones. Cette interface est proposée sur le site de l’AIFBD :

    http://aifbd-viceversa.camp9.org

    Elle a été construite sur le modèle de Libex (bibliothèques anglophones) :

    http://www.cilip.org.uk/jobscareers/libex

    Vous êtes bibliothécaire francophone et souhaitez faire un échange de postes ?

    Il vous suffit d’entrer dans la base de données avec votre numéro d’adhérent à l’AIFBD et de remplir une fiche décrivant votre poste, le(s) pays et la durée qui vous intéressent.

    Vous pouvez également consulter les fiches déjà présentes dans la base.

    Si vous trouvez un « correspondant », vous devez obtenir l’accord de vos employeurs respectifs et déterminer les termes de l’échange. ViceVersa peut vous offrir son soutien logistique et une bourse. Elle ne se charge ni de trouver ni d’organiser l’échange pour vous : c’est un outil, une facilité.

     

    A.J. et V.B.

      Le programme, très dense, s’est concentré sur deux jours. Cinq sessions de conférences, comportant chacune quatre ou cinq ateliers parallèles, ont permis d’aborder des thèmes très variés, parmi lesquels : « formation et avenir » ; « SIGB libres » ; « WWW et bibliothèques : outils de diffusion incontournables » ; « la coopération et l’accès à l’information numérique » ; « patrimoine et bibliothèques » ; « former pour mieux informer » ; « les défis de l’information médicale » ; « nouvelles technologies et nouveaux outils pour les bibliothèques » ; « les bibliothèques nationales et le numérique ». Un temps pour des rencontres informelles entre collègues a en outre été prévu au cours de la dernière matinée, sous la forme de forums thématiques, avant que les congressistes puissent visiter différentes bibliothèques de la région montréalaise.

      Fondation pour une bibliothèque globale

      La Fondation pour une bibliothèque globale (FBG) est une ONG localisée au Québec et en France. Ses membres sont issus du milieu des sciences de l’information et proviennent de pays du Nord comme du Sud. Sa mission consiste à soutenir les bibliothèques des pays émergents, plus spécifiquement les pays francophones.

       

      Ses quatre programmes sont :

      • Bibliothécaires sans frontières : formation, expertise et échange culturel avec des professionnels ;
      • Bibliothèque globale numérique : favoriser le libre accès au contenu éducatif et culturel de qualité et permettre aux communautés de créer leur propre contenu ;
      • Observatoire des technologies libres : évaluer la pérennité et la qualité des technologies libres afin de permettre aux bibliothèques de choisir les outils les plus pertinents pour leurs besoins ;
      • Édition et droits numériques : promouvoir les bonnes pratiques en matière d’édition numérique.

      La fondation est financée par plusieurs agences internationales telles que le Centre de recherches pour le développement international (CRDI) et l’OIF.

      Après cinq années de préparation, la FBG a réalisé son lancement officiel sous la bienveillance honorifique de Paul Gérin-Lajoie, premier titulaire du ministère de l’Éducation du Québec, lors du congrès.

      Le bureau France est actuellement en phase de création et cherche à recruter de nouveaux membres. Vous pouvez apporter votre contribution en contactant :

      – Amandine Jacquet,

      directrice du Bureau France Fondation pour une bibliothèque globale

      Bureau France

      53 avenue Agirond

      26400 Crest, France

      09 70 44 75 54

      amandine.jacquet@bibliothequeglobale.org

      http://www.bibliothequeglobale.org

       

      A.J. et V.B.

        Le programme social du congrès était quant à lui également source de rencontres et de fraternité francophones. À une visite de la BAnQ ont ainsi succédé une soirée mémorable dans une « cabane à sucre » typiquement québécoise, avec « oreilles de crisse », sirop d’érable sur glace, et comique sénégalo-québécois au menu ; une réception officielle à l’hôtel de ville de Montréal ; et, pour clore le congrès et assurer la transition vers le congrès Ifla de Québec, une croisière sur le Saint-Laurent, malheureusement sous la pluie.

        L’assemblée générale de l’association, qui s’est tenue à l’issue du congrès, a permis de présenter aux participants un premier rapport d’activité, et surtout d’évoquer l’avenir. Si une assemblée générale devrait se tenir chaque année à l’occasion des congrès de l’Ifla, les congrès de l’AIFBD ne devraient se tenir que tous les trois ans. Le prochain congrès pourrait ainsi être organisé en 2011 en satellite du congrès Ifla qui se tiendra à San Juan (Porto Rico) : le lieu du congrès serait situé dans une zone francophone de l’espace caribéen et nord-américain, à savoir, comme l’a annoncé Pascal Sanz, vice-président de l’association, en Martinique, Guadeloupe, Haïti, ou même… en Louisiane. L’année 2008-2009 sera aussi marquée par le renouvellement du conseil d’administration : les élections devraient se faire par correspondance entre janvier et juin 2009. L’appel à candidatures sera lancé au début de l’année 2009.

        Il ne nous reste qu’à souhaiter bon vent à cette association prometteuse !

        Pour plus d’information, voir le site internet de l’association, http://www.aifbd.org, ou le site Bibliodoc : http://bibliodoc.francophonie.org

        Enquête sur le Congrès de l’AIFBD

        Nous avons eu envie de savoir quelles personnes avaient participé au congrès de l’AIFBD et selon quelles modalités elles avaient pu se rendre à Montréal.

        Profil des participants 

        204 participants :

        115 personnes interrogées (soit 57 % des participants) :

        73 % des personnes interrogées sont venues sur leur temps de travail. 84 % étaient au moins en partie remboursées de leurs frais (dont 51 % par leur collectivité, 46 % par une association ou un organisme et 3 % par les deux).

        Les personnes venant d’Afrique ont majoritairement participé sur leur temps de travail (72 %) et ont été remboursées de leurs frais (96 %) par une association ou un organisme (92 %).

        En provenance d’Europe, les personnes sont majoritairement venues sur leur temps de travail (66 %) et ont été remboursées de leurs frais (94 %) par une association ou une organisation (34 %) ou par leur collectivité (55 %). Pour la France, les chiffres sont sensiblement les mêmes.

        Les francophiles des États-Unis participaient tous sur leur temps de travail, et ont tous été remboursés par leur collectivité (en effet, l’employeur budgétise par année une somme dévolue aux congrès, colloques etc. que les salariés peuvent employer en fonction de leurs intérêts et/ou projets professionnels).

        Les Canadiens (qu’ils soient de Montréal ou pas) ont participé majoritairement sur leur temps de travail (88 %) et n’ont pas été remboursés de leurs frais (69 %).

        Quelle que soit l’origine des participants, ceux qui travaillent en bibliothèques nationales, en instituts, ou en bibliothèques universitaires sont plus souvent venus sur leur temps de travail (respectivement 94 %, 92 %, et 76 %). Ils sont plus souvent remboursés de leurs frais (respectivement 89 %, 92 %, et 86 %) par leur employeur (respectivement 56 %, 62 % et 54 %).

        En revanche, ceux qui travaillent en bibliothèques municipales (presque tous Français) ont participé sur leur temps de vacances à 71 %, mais ont été remboursés de leurs frais par une association ou un organisme à 93 %.

        Parmi les 70 participants français, 16 ont en effet pu bénéficier d’un voyage à un prix plus que compétitif (500 €) organisé par le groupe Île-de-France de l’Association des bibliothécaires de France.

        Enfin, 80 % des hommes ayant répondu à notre enquête ont participé au congrès sur leur temps de travail, contre seulement 69 % des femmes. 76 % de ceux-ci ont été remboursés de leurs frais par une association (6 % par leur employeur), alors que 43 % d’entre elles ont été remboursées par une association et 37 % par leur collectivité.

        Bien sûr, cette enquête comporte des biais. Elle nous paraîtrait plus complète si elle intégrait l’âge et le niveau de responsabilités des personnes interrogées. Le fait que les participants au congrès cumulent ou non cet événement avec des vacances semble également influer sur la répartition temps de travail/temps de vacances et sur le remboursement des frais.

         

        A.J. et V.B.