Feuillets de route d'un psalmographe à travers la France

Jean-Daniel Candaux

Dans le cadre d’une vaste enquête collective qui devrait aboutir l’an prochain à la publication d’une Bibliographie générale des Psautiers traduits et imprimés en vers français 1525-1900, l’auteur s’est livré ces dernières années, dans l’Europe entière et notamment en France, à de nombreuses tournées de bibliothèques. Les lettres qu’il adressait à son retour à ses collègues, simples feuillets de route, traduisent à chaud les impressions d’un lecteur, et d’un lecteur heureux, à travers les bibliothèques françaises.

In the context of a huge cooperative investigation that should finish next year with the publication of a Bibliographie générale des Psautiers traduits et imprimés en vers français 1525-1900, the author spent several recent years making numerous visits to libraries all over Europe and especially in France. The letters that he has written to colleagues on his return, simple travel notes, convey on the spot impressions of a reader, a very happy reader, working his way through French libraries.

Im Rahmen einer umfangreichen gemeinsamen Untersuchung, die nächstes Jahr zu einer Publikation einer Bibliographie générale des Psautiers traduits et imprimés en vers français 1525-1900, führen soll, hat der Autor in den vergangenen Jahren in ganz Europa, besonders aber in Frankreich zahlreiche Bibliotheksbesuche unternommen. Die Briefe, die er nach seiner Rückkehr an seine Kollegen schrieb, einfache Reisenotizen, vermitteln unmittelbar die Eindrücke eines Lesers, eines glücklichen Lesers quer durch die französischen Bibliotheken.

En el marco de una vasta encuesta colectiva que debería concluir el próximo año con la publicación de una Bibliographie générale des Psautiers traduits et imprimés en vers français 1525-1900, el autor se ha entregado estos últimos años en toda Europa y particularmente en Francia a numerosas giras de bibliotecas. Las cartas que dirigía a su vuelta a sus colegas, sencillas hojas de viaje, traducen en caliente las impresiones de un lector, y de un lector feliz, a través de las bibliotecas francesas.

Voici dix ans que je me suis associé à Bettye Th. Chambers (Washington) et à Jean-Michel Noailly (Saint-Étienne) pour élaborer une bibliographie des psautiers traduits en vers français. L’ouvrage a toute une histoire qu’il vaudra peut-être la peine de raconter un jour. Ainsi, le champ de l’enquête, délicat à délimiter, a donné lieu à force débats. On s’était mis rapidement d’accord pour laisser de côté les versions manuscrites. Mais pour les imprimés, où et par qui fallait-il commencer ? Par Clément Marot ou par Pierre Gringore ? Et où fallait-il s’arrêter ? À la Révocation de l’Édit de Nantes, à la Révolution, ou tout bêtement à l’année 1900 (ce qui a prévalu) ? Mais encore et surtout : fallait-il s’en tenir aux seuls vrais psautiers complets de leurs 150 psaumes, ou bien fallait-il prendre aussi en considération les recueils partiels, les « Psaumes de la pénitence » par exemple -– et jusqu’aux psaumes insérés dans les œuvres complètes des grands poètes français ou publiés séparément en ephemera ?

À ces hésitations s’ajouta bientôt une difficulté majeure que les bibliographes d’autres textes anciens n’avaient sans doute pas rencontrée à un tel degré et que résume un peu brutalement cette lapalissade d’un bibliothécaire excédé : « Mais enfin, tous les psautiers se ressemblent ! » L’expérience ne devait pas tarder à nous montrer en effet que les psautiers offraient de très nombreux exemples d’éditions partagées entre plusieurs libraires-imprimeurs qu’il convenait donc de traiter comme des « émissions », de sorte que, plus nous progressions, plus nous sentions la nécessité, pour gagner le challenge, de ne pas borner notre enquête aux réservoirs bien connus de Paris, d’Amsterdam, de Genève ou de Neuchâtel, mais d’examiner de nos yeux le plus grand nombre possible d’exemplaires localisés et d’en prendre photocopie du titre. D’où, après une consultation systématique des catalogues disponibles (imprimés ou informatisés) corroborée au besoin par des échanges de correspondance, l’organisation de nombreuses tournées de bibliothèques à travers l’Europe, en France naturellement, mais aussi en Suisse, en Italie, en Allemagne, en Pologne, aux Pays-Bas, en Angleterre, en Écosse, sans parler du ratissage des États-Unis diligemment accompli par Bettye Chambers. À l’heure actuelle, sur 15 000 exemplaires localisés avec précision, 10 000 ont été collationnés livre en main.

Puisque mon propos est ici limité aux bibliothèques françaises, je me bornerai à extraire des rapports que j’ai adressés régulièrement à Jean-Michel Noailly (lequel avait la lourde responsabilité de centraliser et de traiter sur notre base de données de Saint-Étienne les résultats de l’enquête), les pages relatives à quelques-unes de mes tournées dans les provinces de France ainsi qu’à deux de mes séjours à Paris. Ce sont des documents rédigés à chaud, de simples feuillets de route que l’on prendra pour ce qu’ils valent.

10 juin 1992

Mon voyage au travers du Massif central s’est déroulé comme prévu, malgré le mauvais temps. Les intempéries avaient manifestement découragé nombre d’excursionnistes, de sorte que les routes étaient partout dégagées. Autre compensation, et non des moindres : le spectacle des cours d’eau gonflés par les pluies et rougis par les éboulements était fascinant. À Cahors, où mon hôtel se dressait au bord même du Lot, j’ai vécu des heures « mississipiennes ». À Salles-la-Source, sur la route de Conques, la rivière qui sort en cascade du rocher était si grosse et forte que les gens du pays s’attroupaient. […] Ai-je besoin de vous dire que, pour travailler dans les bibliothèques, le temps était idéal ?

À Rodez, je suis allé faire une incursion non programmée à la belle « Médiathèque », où j’ai noté les ex-libris des trois psautiers que vous aviez vus et où j’ai découvert, dans un fichier XIXe siècle, quatre références énigmatiques, dont deux m’ont mis en mains des psautiers sans titre… du XVIIe siècle !

À Figeac, où le conservateur m’a reçu en plein déluge, j’ai extrait d’un gros tas de Bibles non cataloguées, pour les photocopier, un Barbier-Courteau de 1561 et deux Bibles sans titre, mais avec psautier musicalisé, dont l’une, si l’on en croit le titre conservé du Nouveau Testament, serait celle de Claude Ravot, Lyon, 1566, dont Bettye Th. Chambers ne connaît qu’un seul autre exemplaire, également incomplet.

À Cahors, le fonds ancien de la bibliothèque est aussi superbement logé qu’exactement catalogué. Mais je n’y ai trouvé que deux psautiers, un Pinereul 1562, incomplet de la fin, et un Cellier 1661. Pour trouver mieux, la conservatrice m’a conseillé la Bibliothèque du Séminaire, où je me suis rendu… pour m’entendre dire que le bibliothécaire venait de mourir et n’était pas encore remplacé.

À Pranles enfin, dans les montagnes de l’Ardèche, j’ai trouvé au musée du Vivarais protestant, les dix-sept psautiers que m’avait annoncés la « sœur Micheline, conservateur » et j’ai pu photocopier dans la localité la plus proche ceux qui intéressent notre enquête, soit cinq psautiers sans titre et onze psautiers avec titre, tous du XIXe siècle, mais pas tous de Marc Aurel, ô miracle ! Voici les dossiers de ces seize psautiers aux reliures usées et noircies par un long usage.

À Privas même, où j’étais basé, la médiathèque est toute neuve, mais son fonds ancien, qui a brûlé partiellement en 1988 et qui est assez mal catalogué, ne contient apparemment ni Bible ni psautier.

18 mai 1993

Je suis rentré hier après-midi de Reims et m’empresse de vous faire rapport pendant que les images sont encore fraîches dans ma mémoire.

Ay. Le mystère reste total sur le destin de la riche collection léguée à cette petite ville du vignoble champenois par son ancien maire Nitot. La bibliothèque municipale, actuellement casée dans la Maison des jeunes et gérée par une contractuelle, ne contient manifestement que des livres modernes. L’abbé Pollet, curé de la paroisse depuis quinze ans, ne sait rien, et la bibliothèque de sa cure, en fait d’Écritures saintes, se réduit à une Bible latine. Vaudrait-il la peine d’interroger la mairie ou le conseil général de la Marne ?

Châlons-sur-Marne. Sur vos indications, j’ai borné ma visite aux archives départementales de la Marne, dont le fichier des imprimés ne signale aucun psautier, mais, ô merveille, une Bible liégeoise (en français) de 1521. Livre en mains, j’ai lu au bas du titre : A LIEGE, chez Jean-François Broncart, M.D.CCI. Bravo, les Châlonnais !

Château-Thierry. La bibliothèque municipale, joliment installée dans une ancienne abbaye, possède un fonds ancien peu important et fort mal catalogué sur des fiches en hauteur classées par matières dans de longues boîtes en bois brut. Je n’y ai trouvé ni Bible ni psautier en français de nature à nous intéresser.

Épernay. La Bibliothèque municipale occupe l’un des somptueux hôtels Belle Époque de l’avenue de Champagne, site prestigieux où toutes les grandes marques de champagne, Moët & Chandon en tête, ont leur siège. Les pertes dues à la Guerre de 14 ont rendu caduc le catalogue imprimé de 1883, mais j’ai trouvé, grâce au catalogue sur fiches, deux parfaits psautiers : un Charenton de Samuel Petit 1639, avec calendrier 1644-1659 (édition trop négligée jusqu’ici par les bibliographes) et un Pierre Pellet de 1761. En outre, l’aimable conservatrice m’a mis en mains une acquisition récente non encore cataloguée, à savoir un joli Cellier de 1661 en nonpareille, dans sa reliure à la Huguenote. Pour faire bon poids, j’ai photocopié aussi le Recueil complet de cantiques spirituels publié à Épernay même en 1825.

Laon. Ville absolument superbe et riche bibliothèque logée dans un cadre grandiose ! La liste que nous avait dressée le conservateur Jean Lefebvre était aussi exacte que complète, mais le nombre des psautiers qui intéressent notre recherche doit être ramené de six à cinq, car le Cellier de 1652 ne contient qu’une traduction des psaumes en prose – et cette édition est d’ailleurs l’un des plus effrontés « patchworks » de notre homme. Le Blaise de Vigenère conservé à Laon m’a paru témoigner également d’un curieux micmac. J’ai noté pour chaque exemplaire les détails que vous souhaitiez et j’ai commandé la photographie des pages de titre ornées d’ex-libris manuscrits.

Soissons. Belle bibliothèque municipale, bien installée dans un bâtiment ancien, voisin de la mairie. La Bible de 1561 signalée par Bettye ne contient point les psaumes en musique, mais la bibliothèque possède néanmoins six psautiers traduits en vers français : un Desportes de 1603 ; trois Godeau, l’un de 1649, actuellement en restauration à la Bibliothèque nationale de Paris, les deux autres, non identiques, de 1686 ; un beau Marot-Bèze de Leyde, Ph.de Croy, 1665, à la suite de la Bible ; et un Pellegrin de 1705. J’ai tout photocopié et quand le Godeau de 1649 sera revenu de Paris, l’aimable conservateur Anne-Marie Natanson nous en fournira également des vues si vous le souhaitez.

Voilà en quelques lignes le résultat de ma tournée champenoise. J’ai renoncé à me rendre à Rethel sur les assurances réitérées que l’on m’a données que je n’y trouverais rien. Et j’ai décidé de réserver Saint-Quentin à une autre expédition qu’il nous faudra nécessairement conduire dans la France du Nord en prenant Amiens pour base.

21 septembre 1993

Voici quelques échos de ma tournée dans la France du Nord, où j’ai visité en trois jours huit bibliothèques que je vous présente dans l’ordre inversement alphabétique :

Saint-Omer. La bibliothèque est belle, on travaille dans une salle immense dont les parois sont tapissées de livres anciens jusqu’à la voûte, mais le conservateur est désagréable et les photocopies sont interdites. J’ai obtenu tout de même celle du Lardenois de Niort 1668. Le catalogue ne signalait qu’un autre Marot-Bèze, sans titre et apparemment éliminé lors d’une épuration.

Dunkerque. La bibliothèque a brûlé en 1929. L’accueil est chaleureux, le personnel des plus serviables, mais le fonds ancien est maigre et je n’y ai rien trouvé du tout. Mon voyage n’a pourtant pas été inutile, puisque c’est à la bibliothèque municipale de Dunkerque que l’on m’a signalé le fonds de Bergues (voir ci-après).

Douai. La bibliothèque a été réduite en cendres par le bombardement allié du 11 août 1944. Aucun des ouvrages décrits dans le catalogue imprimé de 1874 n’a subsisté. Le conservateur (Michèle Demarcy), qui est l’obligeance même, m’a conduit aux rayons, car une partie du « nouveau fonds ancien » (provenant de la saisie d’un mystérieux dépôt nazi notamment) n’est pas cataloguée. Au total, sept psautiers, dont six ont pu être photocopiés tant bien que mal sur une méchante machine, mais dont trois attendent encore leur cote. Il faudra donc rester en contact avec Michèle Demarcy.

Calais. La bibliothèque est installée dans un beau bâtiment tout moderne, mais le fonds ancien est partiellement resté en caisses et n’a plus de conservateur. On a fini tout de même par me trouver les Bibles avec psautier de 1657 et 1747 signalées dans le catalogue imprimé et j’ai réussi à force d’insistance à photocopier celle de 1657. J’ai vu aussi la Bible de Rouen, David Berthelin, 1681, qui n’a point de psautier musicalisé.

Boulogne-sur-Mer. Très belle bibliothèque située dans la citadelle et dont le Catalogue pratique de 1899, très pratique en effet, est resté totalement valable, cotes comprises. J’ai pu y photocopier en toute quiétude six psautiers, à savoir le Boudewijn de Preys de 1644, deux Godeau, un Le Franc de Pompignan et les deux traductions publiées à Boulogne même, en 1857, par Léon Noël et, en 1868, par Leroy-Mabille, l’une et l’autre peu courantes, m’a-t-il semblé.

Bergues. Cette petite ville proche de Dunkerque, avec son enceinte fortifiée, ses canaux, ses portes, son beffroi, son hôtel de ville, ses églises, ses musées est un centre touristique renommé, ce qui ne l’empêche pas de posséder une riche collection de livres anciens, actuellement en cours de recatalogage sur base informatisée. J’y ai trouvé la grande Bible in-folio de 1615, le Blaeu de 1684, un Godeau oblong de 1724 […]. J’ai photocopié tout cela au secrétariat de la mairie et j’y ai joint aussi pour Bettye un Nouveau Testament de Rouen, Romain de Beauvais, 1606. Le pittoresque conservateur (J.-C. Guillemin) me promet encore l’envoi d’un autre petit Godeau.

Arras. De toutes les villes que j’ai visitées, voici de loin la plus belle ! La bibliothèque y occupe aujourd’hui un palais grandiose, mais elle a entièrement brûlé en 1915 et rien ne subsiste apparemment des livres décrits par le copieux catalogue méthodique de 1885. Je n’y ai trouvé, malgré tous mes efforts, qu’un petit Godeau de 1649. Aussi, pour me dédommager, ai-je photocopié une édition des sept Psaumes de la pénitence faite à Caen en 1748 et à laquelle on a ajouté les paraphrases en vers de trois autres psaumes.

Amiens. Grande, riche et confortable bibliothèque, dont le fonds ancien vient d’être doté d’un jeune et dynamique conservateur (M. Villebas, un spécialiste de Jean de Sponde, si j’ai bien compris). C’est un total de 22 psautiers que j’ai pu examiner et photocopier. Le seul Marot-Bèze de Genève 1666 était porté disparu (depuis mai 1990), mais il se retrouvera !

20 juin 1995

Ma première expérience parisienne de « bibliographie au portable » a été positive en tous points. À la Bibliothèque nationale, j’ai obtenu tant à la Réserve qu’à la Musique toutes les éditions que j’ai demandées, y compris celles dont notre listing donnait une cote erronée ou qu’une première réponse des magasiniers qualifiait d’introuvables. Dans la grande salle, j’ai pu m’installer commodément à l’Hémicycle. À la Réserve, j’ai bénéficié de deux places, travaillant à la lumière de l’une et alimentant mon portable à la prise de l’autre. C’est ainsi que j’ai pu « saisir » la description de 25 éditions des années 1562-1614, dont 17 ne sont connues que par l’exemplaire de la BN. Je continue de laisser en blanc l’indication du corps des notes de musique, mais il me faudra décidément un petit apprentissage, car, tant qu’il s’agit d’éditions qui se trouvent à Lyon ou à Paris, vous n’aurez guère de peine à compléter ma description, mais quand j’irai voir les unica de Dantzig, Aberdeen ou Macerata, ce sera une autre affaire…

12 septembre 1997

Besançon par ce beau soleil de septembre était un vrai bijou et le personnel de la bibliothèque municipale ne sait plus qu’inventer pour être agréable. Je suis allé boire le café chez Jean-Marc Debard, qui demeure de l’autre côté du Doubs. Là aussi, quel inoubliable accueil : le vieux professeur m’attendait devant son immeuble pour me guider jusqu’à son appartement du cinquième étage, il avait regroupé sur une table tous ses psautiers (une trentaine environ) et s’est prêté de bonne grâce à toutes mes questions. Avec son physique de corsaire, il est cependant fragile : il s’est cassé le bras cet hiver en glissant sur la glace […].

Ses grandes compétences d’historien montbéliardais lui valent de multiples demandes : il s’est engagé à fournir les notices des 400 pasteurs de la principauté, pour ne citer qu’un exemple. C’est dire que nous aurons de la peine à obtenir de lui l’article que vous lui avez demandé [sur les Psautiers imprimés à Montbéliard du XVIe au XIXe siècle]. J’ai acquis pourtant la conviction que le sujet était tout à fait curieux, car Montbéliard constitue à n’en pas douter un cas à part, dès lors qu’une population de confession luthérienne mais de langue française y a chanté durant des siècles les psaumes et les cantiques calvinistes.

20 mars 2000

Je reviens de Versailles, à la fois comblé et consterné. Comblé par tant de gentillesse dans l’accueil. Consterné parce qu’en consultant au mot « Psaumes » le nouveau fichier informatisé du fonds ancien, j’ai découvert 30 exemplaires à ajouter aux 18 que nous connaissions : trois psautiers sur cinq nous avaient donc échappé, proportion effrayante ! Vous verrez qu’il s’agit surtout de « grands classiques » bien connus, mais on peut se demander néanmoins si notre Bibliographie, dans ces conditions, sera jamais en état de paraître. Je n’ai d’ailleurs recherché à la bibliothèque municipale de Versailles ni les éditions du XIXe siècle (c’est un autre fichier) ni les éditions proprement musicales. Une autre expédition sera sans doute nécessaire.

22 septembre 2000

Me voici de retour de Troyes, ville admirable – où je me réserve de revenir en touriste avec ma femme – et bibliothèque grandiose, dont le personnel n’a rien négligé pour me faciliter la tâche. Non seulement tous les volumes demandés par lettre étaient prêts, mais on m’a livré en sus trois exemplaires de la Paraphrase de Charles Le Breton et une douzaine d’Imitation de Jésus-Christ dans la version de Pierre Corneille (en pure perte d’ailleurs, car ces éditions ne contenaient pas l’Office de la Vierge). Malgré des reliures parfois un peu serrées, j’ai pu obtenir quasiment toutes les photocopies que vous aviez souhaitées. J’ai eu la satisfaction de pouvoir identifier un psautier dont le traducteur est Henri Babeau, père de l’historien Albert Babeau et j’ai pris la peine de relever les incipit des 102 psaumes de l’abbé Sausseret.

5 mars 2001

Voici le résultat de cinq journées d’intense travail à Paris. J’ai trouvé partout le meilleur accueil, j’ai obtenu tous les livres que j’ai demandés (sauf le Le Breton de l’Institut qui n’était pas en place), on m’a fait (souvent gratuitement) toutes les photocopies que j’ai voulues. Mais il y a un abîme entre le paradis de la Mazarine et l’enfer de la Sorbonne, où les fiches sont illisibles à force d’avoir été manipulées et où l’on a changé plusieurs fois la cote des livres sans tenir de concordance [mais l’accueil de Jacqueline Astier compense tout].

J’ai recherché systématiquement nos « petits psalmistes » à l’Institut, à la Mazarine et à la Sorbonne et nos localisations s’augmentent ainsi d’une cinquantaine d’exemplaires. Vous verrez aussi que je suis tombé à la Bibliothèque historique de la ville de Paris sur un lot de Paraphrases des années 1640 plus important que ceux que nous connaissions déjà et enrichi de plusieurs précieuses identifications d’auteur. J’ai l’impression d’avoir ramassé tout ce qui était à portée de main, mais j’ai également le sentiment (que vous aviez eu à Bordeaux) qu’en se livrant à une enquête plus longue et plus approfondie, on ferait d’autres fascinantes découvertes.

Un mot de conclusion

Il m’est arrivé parfois de remplacer par un téléphone mes rapports écrits et c’est ainsi que je n’ai point gardé de trace de mes tournées dans d’autres régions de la France, à Orléans et Poitiers notamment (où les fonds anciens sont presque inépuisables), à Orthez et à Pau (où le protestantisme béarnais fait merveille), à Ferrières en Haut-Languedoc (quelle aventure !), à Montpellier et à Nîmes, à Aix-en-Provence (où la Méjanes a quitté son bel hôtel sans perdre ses richesses), à Carpentras (où j’ai pu me servir du fax de la Mairie pour me faire envoyer par Jean-Michel Noailly la copie des notices qui me manquaient), à Tournus, Beaune et Dijon, ailleurs encore.

Somme totale, je ne regrette pas d’avoir consacré – partiellement – dix ans de ma vie à la bibliographie des psautiers. L’intérêt de la recherche n’a jamais faibli et, jusqu’au bout, de fascinantes découvertes ont récompensé notre persévérance. En sillonnant la France, j’ai traversé des paysages magnifiques et fréquenté des villes superbes. J’ai trouvé partout bon accueil : non seulement la xénophobie est un sentiment totalement inconnu des bibliothécaires français, mais j’ai eu l’impression que ma qualité d’étranger me valait même certains égards (sans parler de ma religion calviniste, que je n’ai jamais manqué de proclamer hautement dans les bibliothèques de séminaire !).

Je sais gré à la Troisième République d’avoir fait imprimer tant de grands catalogues qui, aujourd’hui encore, sont utiles à ceux qui savent s’en servir et je remercie la Cinquième d’avoir entrepris de mettre enfin sur pied des catalogues collectifs informatisés dont la recherche tirera chaque jour de nouveaux profits. Un dernier aveu : je n’ai jamais voulu croire aux exemplaires « perdus ». À ceux qui m’annonçaient qu’un ouvrage était « introuvable », j’ai répondu invariablement : « Cherchez mieux » – et bien m’en a pris.

Je ne sais si la Bibliographie des psautiers, qui paraîtra dans quelques mois chez Droz, répondra à l’attente du public, mais je sais – et ce sera ma conclusion – qu’en travaillant à son élaboration, j’ai presque toujours été, en France et ailleurs, un lecteur heureux.

Avril 2002

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