Une nouvelle image pour les médiathèques de l'assistance publique-hôpitaux de Paris
Jean-François Bargot
Le 11 mars dernier, la Délégation à la formation de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), à travers son réseau de médiathèques 1, accueillait à l'hôpital Saint-Louis plus de cent cinquante participants pour une manifestation importante dans le domaine de la lecture en milieu hospitalier. Un public varié (bibliothécaires du réseau de l'AP-HP, bibliothécaires municipaux, personnels soignants...) a suivi avec intérêt les différentes interventions.
Cette journée était organisée dans le cadre du lancement de la nouvelle image du réseau des médiathèques. L'AP-HP a en effet judicieusement décidé de confier la création des documents de communication de ses médiathèques (sacs, signets, affiches) à Olivier Douzou, l'un des auteurs-illustrateurs-éditeurs les plus remarquables de ces dernières années dans le domaine de la littérature de jeunesse. A la suite de rencontres avec des enfants hospitalisés et confrontés à la douleur de la séparation, il a imaginé un personnage qui évoque davantage la douceur et l'accompagnement que le statut d'enfant malade. C'est donc un pingouin, inspiré du personnage central d'« Esquimau », qui devient l'image du réseau des médiathèques jeunesse, celle des médiathèques adultes ayant été dessinée par Lynda Corraza, également illustratrice aux Éditions du Rouergue.
Cet événement a été également l'occasion de faire connaître, au travers de deux tables rondes, quelques-unes des multiples actions menées par les bibliothécaires auprès des patients, adultes ou enfants. Pour introduire la première table ronde, « Animation : hasard ou nécessité ? », Michèle Petit 2 a rappelé combien, au-delà du plaisir et de la distraction, la lecture a une fonction réparatrice qui permet une recomposition de l'image de soi, de reconstruction de son intériorité, alors que le corps blessé devient objet et que l'individu perd son espace privé. Elle a affirmé l'importance des médiathèques en milieu hospitalier, « espace de libre choix et de rencontre à partir duquel le malade peut retrouver sa propre continuité et sa capacité d'établir des liens avec le monde ».
Une variété d'activités
Après cette intervention, les participants ont pu découvrir la variété des activités menées auprès des différents publics adultes. La bibliothécaire de l'hôpital Broca-La Rochefoucauld et un comédien, faisant régulièrement des lectures à haute voix dans un service de gériatrie, ont relaté leur expérience. Dans ce lieu, où se posent avec une grande acuité les problèmes de repli sur soi et de coupure avec l'environnement, le texte devient alors prétexte à l'échange et l'acte de lecture restitue le plaisir sans élitisme ni académisme. L'importance du partenariat, en interne avec les soignants et en externe avec des institutions culturelles, a été illustrée par la collaboration de la médiathèque de l'hôpital Raymond-Poincaré, à Garches, avec le Théâtre des Amandiers. Des comédiens proposent des séances de lecture dans un service de rééducation neurologique. Le personnel soignant a évoqué le « ressenti » des patients – les uns « papillons » vibrant au son de la voix, les autres « scaphandres » murés dans leur handicap – et a souligné combien la sensibilisation de tout le corps médical aux enjeux de la lecture était essentiel.
De nombreux patients ne pouvant se déplacer, les bibliothécaires de l'hôpital Saint-Louis ont ensuite expliqué que l'une des activités spécifiques du bibliothécaire en milieu hospitalier était le passage hebdomadaire du chariot de chambre en chambre. L'hôpital Tenon terminait cette première table ronde par la présentation de rencontres littéraires organisées à destination des personnels, également utilisateurs des médiathèques.
Des livres pour panser
Après une rapide visite des locaux de la médiathèque de l'hôpital Saint-Louis, la séance reprenait avec « Des livres pour panser », autour des expériences menées dans les hôpitaux de pédiatrie. En introduction, Patrick Ben Soussan 3, pédopsychiatre, a parlé de la violence affective intense provoquée par les hospitalisations chez le jeune enfant. Il a insisté sur le livre comme objet de rencontre entre le tout-petit enfant malade et celui qui lit.
Les interventions suivantes ont montré le travail des médiathèques en collaboration avec différents services de l'hôpital : services éducatifs, services de soins, école... Le responsable du service éducatif de l'hôpital Saint-Vincent-de-Paul a expliqué la nécessité de la présence du livre partout où c'est possible : salles d'attente, médiathèques, passages du chariot de livres dans les chambres... La bibliothécaire de l'hôpital Jean-Verdier et la conteuse Nassereh Mossadegh ont ensuite évoqué ces moments hors du temps, moments d'apaisement et de liberté, instants privilégiés de partage et d'échanges que sont les séances de contes dans les services de pédiatrie.
Pour clore ces réflexions, les animations thématiques organisées par la médiathèque de l'hôpital Raymond-Poincaré, en partenariat avec l'Établissement RÉgional Adapté (EREA) situé dans l'hôpital, ont été développées. Son directeur a insisté sur le rôle de la médiathèque comme lieu de préparation à la sortie de l'hôpital et au retour dans les circuits scolaires traditionnels. Les activités présentées ont permis, entre autres choses, de découvrir le travail des auteurs-illustrateurs Paul Cox et Olivier Douzou auprès des enfants de l'école, rencontres qui ont donné lieu à de riches créations artistiques.
Venait alors le temps des remerciements qui s'adressaient à celles et ceux qui s'attachent au quotidien à faire de ces médiathèques des lieux attrayants, vivants et animés. Tout au long de cette manifestation, chacun a pu mesurer le chemin parcouru par les médiathèques de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris et l'intérêt que représente leur activité pour le réseau « classique » de lecture publique.