Later Gothic Manuscripts

1390-1490

par Philippe Hoch

Kathleen L. Scott

Foreword by J. J. G. Alexander. London : Harvey Miller, 1997. 2 vol., 48 p. + pl. et 434 p. : ill. ; 34 cm. (A Survey of Manuscripts Illuminated in the British Isles). ISBN 0-905203-04-6 (les deux vol.)

Avec l'étude que Kathleen L. Scott consacre au xve siècle, s'achève le vaste panorama des manuscrits enluminés des îles Britanniques, entamé il y a plus de vingt ans et publié sous la direction de J. J. G. Alexander, qui prit lui-même en charge l'examen de la première tranche chronologique de la série (vie-ixe siècles), confiant les suivantes à six spécialistes reconnus 1. Les chercheurs disposent donc désormais, en neuf volumes, d'un instrument de travail irremplaçable. Ce dernier vient prendre la suite des English Illuminated Manuscripts from the Tenth to the Fifteenth Century d'Eric Millar, publiés entre 1926 et 1928, travail de pionnier qui fit date.

Dans son avant-propos, le responsable de l'entreprise éditoriale, aujourd'hui parvenue à son terme, souligne combien la contribution portant sur le « gothique tardif » était attendue par la communauté des médiévistes et des historiens de l'art, non seulement parce qu'un imposant édifice trouve là son achèvement, mais aussi pour la raison, plus décisive sans doute, selon laquelle l'art insulaire du xve siècle demeure largement ignoré. A cet égard, souligne J. J. G. Alexander, les deux forts volumes de Kathleen Scott devraient contribuer à la « révélation » de cette dernière période de l'enluminure dans les îles Britanniques.

Le corpus proposé pourra sembler réduit : il se limite en effet à 140 manuscrits, sélectionnés parmi un millier environ recensés par l'auteur. Mais les pièces retenues constituent bien d'authentiques chefs-d'oeuvres de l'enluminure (il s'agissait, de fait, de ne retenir que des documents d'une « qualité artistique exceptionnelle ») ou de remarquables témoins de la littérature anglaise. En outre, parmi les manuscrits choisis par Kathleen L. Scott, beaucoup étaient jusqu'alors restés inconnus du monde savant ; s'ils avaient fait l'objet d'une publication, celle-ci n'était que partielle, voire péchait du point de vue scientifique. D'autres éléments encore du corpus revêtent une importance toute spéciale pour la connaissance de genres particuliers (citons l'exemple significatif des livres de dévotion).

Enfin, et ce n'est pas là le moindre de ses mérites, l'auteur « opère des regroupements inédits et apporte une contribution novatrice à l'étude des familles de manuscrits ».

Le moyen anglais, source d'inspiration nouvelle

Au long d'une riche introduction, Kathleen L. Scott situe la production des livres enluminés dans leur contexte historique, géographique et culturel. Ainsi, sont notamment examinés les lieux de production (Londres occupant une place centrale) et les ateliers, qu'ils soient religieux (en particulier bénédictins) ou laïques ; les possesseurs (commanditaires et acheteurs) ; l'usage des manuscrits ; les textes On notera que le moyen anglais, langue d'un tiers environ des ouvrages du corpus, et les oeuvres qu'il véhicule, dues à Chaucer et à d'autres grands noms de la littérature, constituent pour les artistes une abondante source d'images, plus originales sans doute que celles figurant dans beaucoup de livres composés en latin. Il va sans dire, enfin, que l'enluminure des manuscrits étudiés, le style des peintures, leur mise en page, l'identité des ateliers et des artistes font l'objet de développements d'une ampleur particulière.

Conformément au plan d'ensemble retenu pour la collection, le tome I regroupe, après l'introduction, toutes les reproductions en noir et blanc (au nombre de 505) ; les photographies en pleine page et les détails de lettrines ou d'autres éléments décoratifs alternent de manière équilibrée. Ce riche ensemble documentaire est complété par seize planches en couleurs insérées dans l'étude préliminaire de l'auteur.

Clé de voûte

Dans le tome II, le lecteur trouvera le catalogue des 140 pièces du corpus. Les notices se signalent, est-il besoin de le préciser, par leur richesse et leur précision. Ainsi, celle que l'auteur consacre au célèbre missel Sherborne de la British Library, présenté comme le chef-d'oeuvre par excellence de l'enluminure anglaise du xve siècle, occupe quelque seize pages, sur deux colonnes, dans cet ouvrage de grand format. Pour chaque manuscrit, le relevé des divers éléments constitutifs de l'enluminure est effectué avec minutie : peintures en pleine page, décoration marginale, éléments d'ornementation dans le texte (lettrines, rubriques). L'étude de la provenance du volume et les indications bibliographiques des travaux qui, le cas échéant, lui ont été consacrés, complètent les informations relatives à l'illustration.

Enfin, une bibliographie d'ensemble, un glossaire, quatre tables et quatre index facilitent grandement l'utilisation du travail de Kathleen L. Scott, clé de voûte d'un monument éditorial qui fait honneur à la science et à l'édition d'outre-Manche.