Animer et organiser des formations pour bibliothécaires

Jean-Claude Utard

La journée de réflexion, organisée le 24 juin 1997 par Médiadix et la Bibliothèque publique d’information, sur le thème « Animer et organiser des formations pour bibliothécaires », était ouverte à tous les personnels des bibliothèques intervenant dans la formation professionnelle, initiale ou continue, à destination de personnels en poste ou d’étudiants, qu’elle prenne la forme de préparations à des concours ou de cycles de perfectionnement.

Parenthèse de réflexion sur l’ensemble des pratiques pédagogiques dans les formations de bibliothécaires, elle fut une pause heureuse et nécessaire, tant l’organisation des stages et des formations ou l’élaboration des plannings des préparations à concours prennent trop souvent le pas sur la réflexion pédagogique proprement dite et sur la confrontation des expériences. De même, nombreux sont les formateurs de l’enseignement professionnel à apprendre leur métier sur le tas, sans qu’ils aient le temps et le lieu pour analyser leurs pratiques pédagogiques et les comparer avec celles de leurs collègues.

Les formations pour bibliothécaires sont en effet de plus en plus nombreuses. En ouverture à cette journée, Annie Béthery, de Médiadix, en rappela quelques données : importance numérique (2 000 stagiaires ont été reçus à Médiadix dans quelque 180 stages organisés depuis 1993), insertion des plans de formation dans les politiques d’établissements, insistance sur la formation de formateurs, obligations actuelles pour les bibliothèques universitaires de former les jeunes étudiants, au travers d’un tutorat documentaire, à l’utilisation des bibliothèques et à la recherche documentaire.

Stagiaires et formateurs

Les participants durent ensuite travailler. Cinq ateliers les accueillirent, dont les conclusions ne furent remises qu’en fin de journée. Le premier, animé par Anne-Marie Raynal, de la Société Points Communs, fut celui qui, hélas, attira le moins de monde. S’interrogeant sur les stagiaires, il dut avouer que les représentations, motivations et freins des stagiaires sont insuffisamment connus, qu’il existe des résistances, voire des peurs devant la formation, celle-ci participant d’un changement trop souvent craint. Certaines pistes furent cependant explorées : associer plus étroitement les stagiaires aux contenus des formations ou proposer d’autres réponses aux demandes que la seule formule des stages.

Françoise Hecquard, de la bibliothèque départementale de prêt des Yvelines, pilotait le deuxième atelier, qui devait étudier logiquement le formateur ou plutôt, vu leur diversité de profils, les formateurs. Motivés aussi bien par le souci de se remettre en question que par celui de transmettre et valoriser un certain savoir, par celui d’être reconnu comme par celui de participer au mieux-être professionnel, ces derniers rencontrent également quelques obstacles puissants : l’absence de formation de formateur, le sentiment de se répéter, la discrimination selon les catégories (l’activité de formation n’est reconnue que dans le statut de conservateur) et... la rémunération pas toujours prévue ou insuffisante. Certains participants soulevèrent la nécessité d’une charte déontologique des formateurs.

Méthodes, contenus, objectifs

Le troisième des ateliers, animé par Marielle de Miribel, de Médiadix, s’interrogea sur les méthodes, elles aussi multiples, qui vont des plus classiques aux plus participatives, lesquelles cependant correspondent mieux au public adulte des formations. Une formation ne se résume d’ailleurs pas à un seul contenu, elle est appréciée sur la capacité d’écoute des formateurs et sur la possibilité pour les participants de se rencontrer et d’échanger leurs expériences, d’où le besoin de varier les méthodes et les approches. Si le système pédagogique (le public, le matériel, le sujet...) peut parfois freiner les changements de méthodes, le caractère du formateur, sa confiance et ses aptitudes pédagogiques sont cependant les traits qui déterminent l’adoption d’une méthode et la résistance éventuelle à en changer. D’où le besoin, pour tout formateur, de clarifier ses motivations et de pouvoir accéder à des formations méthodologiques spécifiques.

Christine Girard, de Médiaquitaine, rappela en conclusion du quatrième atelier que les objectifs des formations étaient, là aussi, différents selon les établissements et les individus et que les prescripteurs les formulent selon des thématiques et des besoins à court terme (mise à jour de telle compétence ou connaissance), alors que les formateurs doivent raisonner sur le plus long terme, y intégrer la pédagogie et mieux prendre en compte les niveaux des stagiaires. Les formateurs ont également la tâche de faire évoluer les finalités des formations, comme celles d’assurer leurs suivis en ayant la possibilité de s’appuyer sur des plans de formations et des correspondants formation dans les établissements.

Les programmes de formation

Très justement, le dernier atelier, piloté par Jacqueline Ekizian, de la bpi, insista sur les programmes de formation au sein des bibliothèques. Un plan de formation n’est pas qu’un prêt-à-porter de stages, il suppose une communication d’acteurs importante, il doit être perpétuellement révisable, réajustable, perfectible. Cela suppose à la fois la collaboration de la hiérarchie et de la base, une bonne remontée des informations et des désirs, une claire définition des objectifs, et une continuelle évaluation, y compris en différé.

Martine Blanc-Montmayeur, de la bpi, fut chargée de faire la synthèse les travaux. Utilisant justement la « lorgnette d’un établissement » pour clore cette journée, elle insista sur le fait que la formation doit être reconnue comme un des objectifs prioritaires de l’entreprise, ce qui implique qu’il lui soit accordé des moyens, forcément coûteux, avec une communication importante où la hiérarchie tient un rôle important et actif (l’ensemble des décideurs doit être convaincu de l’utilité des formations), et où les résultats doivent être évalués à long terme. Trois niveaux d’objectifs peuvent d’ailleurs être déterminés : des objectifs généraux pour l’établissement, des objectifs au niveau des services, enfin des objectifs individuels. S’il est souhaitable de faire coïncider ces objectifs, il n’en demeure pas moins qu’il faut dégager des priorités (ceux de l’établissement ont-ils le pas sur ceux des individus ?), priorités et objectifs devant être définis dans une charte, formalisée, communicable et évidemment toujours révisable.