Editorial

Martine Poulain

La bibliothèque électronique crée, on le dit suffisamment, une conjoncture nouvelle. Passée la phase de familiarisation avec les nouveaux outils qu'offre la révolution technologique, phase au cours de laquelle les bibliothécaires ressemblent à d'autres utilisateurs néophytes, vient la phase de création, qui les conduit à repenser leurs services grâce à cette nouvelle donne.

Car numérisation, réseau, multimédia n'offrent pas que de nouveaux services. Ils offrent peut-être surtout la possibilité de repenser de manière plus perfectionnée des services déjà présents dans la bibliothèque.

Il en va ainsi dans les exemples ici analysés. L'audiovisuel était déjà présent à la Bibliothèque nationale de France. Si l'ouverture de Tolbiac est accompagnée d'une volonté d'en renforcer la présence, par l'acquisition de nouveaux fonds, elle est aussi marquée par une non moins forte volonté de développer de nouveaux usages, de contribuer à une émergence plus forte d'une consultation savante de l'image. D'où un accent mis sur la recherche de conditions de consultation qui permettent à l'utilisateur de personnaliser et parfaire sa démarche.

C'est conduite par une même volonté d'accroître et de perfectionner les conditions de consultation que la Bibliothèque publique d'information numérise ses dossiers de presse et la Mission du patrimoine photographique ses collections. C'est ce même souci, traduit bien sûr en des termes différents, qui guide la bibliothèque universitaire de Lyon 3 ou la bibliothèque municipale de Lisieux. C'est toujours la même ambition qui anime nos collègues étrangers, dont les initiatives, nombreuses, et souvent plus abouties que les nôtres, sont ici longuement évoquées.

On sent donc un double mouvement et une double exigence dans la manière dont les bibliothèques se servent des possibilités technologiques : comme occasion d'accroître virtuellement les fonds consultables, certes, mais aussi comme occasion de perfectionner la qualité de consultation et de conservation. L'offre virtuelle n'est pas là que pour accroître, jusqu'au vertige, les fonds ou l'information disponibles. Elle est aussi pensée comme pouvant offrir de manière plus performante l'existant, dans un souci de compréhension et d'anticipation des nécessités de l'usage.

C'est bien ainsi que la révolution technologique pourra représenter une forme de progrès. Une accumulation sans gain de sens ne serait que chimère.