L'accessibilité de la documentation dans les bibliothèques scientifiques du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche
Yves Laissus
On sait que le concept d' « évaluation » est à la mode dans les bibliothèques : il s'agit, par-delà la collecte et l'exploitation simplifiée de données statistiques ou qualitatives rendant compte des activités des établissements, de proposer, qui une utilisation plus fine des données, qui une approche plus circonstanciée de tel ou tel service, de façon à en mesurer « l'efficacité », sachant que l'évaluation se définit autant par ce au nom de quoi on évalue que par ce qu'on évalue.
Réalisée sous la direction d'Yves Laissus, inspecteur général des bibliothèques, l'enquête présentée dans L'accessibilité de la documentation dans les bibliothèques scientifiques du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche correspond à une demande du ministre de l'Education nationale de février 1990. On croit donc deviner qu'elle s'inscrit dans la continuité du fameux rapport Miquel consacré aux bibliothèques universitaires, qui contribua à la prise en compte de leur « grande misère », et aux notables améliorations budgétaires, statutaires ou matérielles qui ont été et sont encore mises en œuvre pour que la documentation universitaire française puisse se mesurer aux « modèles » anglais ou allemand.
Un rapport technique
Le rapport rédigé par Yves Laissus est un document volontairement technique, limité aux sections sciences des bibliothèques universitaires, des services communs de la documentation ou de grands établissements scientifiques. Les résultats de l'enquête, collectés selon une méthodologie scrupuleusement décrite, occupent 70 des 120 pages du document : on y verra la certitude qu'une bonne évaluation doit se bâtir à partir de données (quoique non exclusivement) dont l'élaboration est clairement définie, et qui sont accessibles à tous, sans passer par le filtre d'une interprétation préalable.
Pour autant - et c'était le but de l'étude - Yves Laissus résume les principaux éléments recueillis dans sa présentation, en les mettant le plus souvent en regard des données de l'ESGBU (Enquête statistique générale auprès des bibliothèques universitaires) mais aussi des préconisations du rapport Miquel déjà cité.
Une situation contrastée
Selon les indicateurs et les services proposés, la situation est sensiblement contrastée. Ainsi, le taux d'encadrement semble s'être dégradé : certes, des créations de postes en nombre ont eu lieu ces dernières années, mais elles ont mal compensé « l'explosion » du nombre d'étudiants, d'enseignants et de chercheurs. Par contre, l'audience des bibliothèques s'est accrue, et, dans les bibliothèques scientifiques comme dans d'autres, le pourcentage d'inscrits augmente, signe tout à la fois d'une plus grande conscience de leurs besoins documentaires de la part des usagers et, sans doute, de ce que les bibliothèques peuvent satisfaire plus largement leurs demandes.
De fait, et même si la documentation scientifique se heurte au problème du coût des documents (ouvrages comme périodiques), en constante et forte augmentation, le nombre de volumes acquis et d'abonnements contractés, tout en restant très en deçà des moyennes allemandes ou anglo-saxonnes, est en forte hausse.
Conséquence là encore logique de ce double mouvement d'augmentation des inscrits et du volume des collections, le nombre de prêts est en augmentation elle aussi très sensible, de même que l'utilisation du prêt entre bibliothèques, même si ce dernier est « quasiment monopolisé » par les chercheurs.
Sans être nouveaux - ces indications correspondent à des évolutions connues, largement analysées dans les commentaires apportés à l'ESGBU - les faits rapportés dans l'enquête d'Yves Laissus s'appuient sur une analyse fine de quelques établissements représentatifs, menée en concertation avec les responsables de ces établissements, qui en garantit la cohérence et la crédibilité, et qui apportera aux responsables d'établissements comme de sections sciences d'utiles éléments d'appréciation.