Les perspectives de la rétroconversion

Annie Le Saux

A l'écoute des professionnels, l'Association de l'Ecole nationale des bibliothécaires organise des journées d'information sur différents points névralgiques concernant les bibliothèques. C'est une de ces questions, qui tourmentent actuellement les bibliothécaires, qui était à l'ordre du jour, le 9 novembre 1990, à l'Institut national agronomique. Comment transformer, à moindre coût, rapidement, et en produits de qualité, des catalogues manuels en catalogues informatisés lisibles en machine ?

Réservoirs de notices

Parmi les solutions offertes aux bibliothèques françaises, il en est une qui consiste à puiser directement dans les trois réservoirs de notices reconnus en France que sont OCLC, BN-OPALE ou SIBIL. La présentation des bases OCLC et BN-OPALE - la base SIBIL n'était pas représentée lors de cette journée - fut suivie d'applications de récupération par des bibliothèques à partir de ces réservoirs.

Chacune de ces deux bases propose quatre méthodes de récupération des notices. OCLC permet d'opter pour Microcon, Tapecon, Recon, ou Retrocon, suivant que la bibliothèque a ou n'a pas de fichier informatisé ou suivant les volumes à convertir.

BN-OPALE offre également quatre formes de récupération des notices :
- par requêtes (ouvrages français et étrangers) : la bibliothèque intéressée envoie à la BN une bande magnétique comportant sa requête. Les clés de recherche sont soit numériques (numéro d'ISBN, numéro de notice, ou numéro de la bibliographie nationale) soit alphabétiques (nom de l'auteur, titre, date, édition, éditeur).
- sur profil, selon un ou plusieurs critères. Ce sont des bibliothèques ou centres de documentation spécialisés qui ont choisi cette forme de récupération : notamment la bibliothèque d'Angoulême pour les notices d'albums de bandes dessinées ou le CNDP pour les manuels scolaires.
- à partir du CD-ROM, qui contient environ 450 000 notices bibliographiques de monographies françaises en UNIMARC. La bibliothèque intéressée s'abonne au CD-ROM pour 6 500 F par an, ce qui lui donne le droit de récupérer les notices, avec la possibilité de modifier la localisation sur la notice.
- par accès en ligne : cette forme est en train de se mettre en place. L'accès se fera via Transpac. La bibliothèque municipale de Rennes a servi de site test. Les notices d'autorité, sur format INTERMARC, sont fournies sur bandes magnétiques.

Les points forts de BN-OPALE, estime la BN, sont son exhaustivité - la base contient actuellement 1 300 000 notices d'ouvrages français, de 1975 à nos jours -, la qualité de ses notices, due à la normalisation des accès, des contrôles et de la fourniture et, depuis 1980, l'obtention des mots matières indexés en RAMEAU.

Il est sûr que l'un des problèmes de la récupération des notices par OCLC est l'indexation matière. Les vedettes en anglais, si elles ne sont pas trop contraignantes pour les lecteurs en sciences le deviennent nettement plus pour ceux en sciences humaines. Les 21 millions de notices de cette base, dont un peu plus d'un million de notices en français, suffisent-ils à compenser cet inconvénient ? D'un autre côté, les vedettes matières de RAMEAU ne sont pas non plus la panacée. Nombre de bibliothèques ont un fichier matière maison et se voient donc dans l'obligation de convertir une à une leurs fiches de mots matières en RAMEAU.

Sociétés de service

Une autre possibilité de récupérer des notices est de faire appel à une société de service. Deux sociétés françaises spécialisées en saisie de données, les Ateliers informatiques du Centre et la Société Jouve étaient présentes à travers les expériences de la Bibliothèque nationale pour le Nouveau catalogue général et de la bibliothèque d'HEC.

C'est pour mieux répondre à certaines spécificités de bibliothèques françaises, qu'OCLC a entrepris de collaborer avec deux sociétés de service. Et, la BN, qui « offre » d'une part les services de sa base BN-OPALE, fait d'autre part appel aux Ateliers informatiques du Centre pour effectuer le chargement des 450 000 ouvrages du Nouveau catalogue général dans cette même base BN-OPALE. Recruter du personnel supplémentaire pour effectuer la saisie semblait une solution par trop irréaliste. C'est donc pour une sous-traitance des opérations préalables à la saisie, de la saisie elle-même et des opérations postérieures à la saisie, qu'elle a opté.

Troisième opération en cours pour la BN et faisant suite à l'étape du Nouveau catalogue général, celle du Grand catalogue, qui a entrepris la conversion des millions de notices de la BN, classées dans plus de quarante catalogues et fichiers répartis entre les quatre principaux départements de la bibliothèque.

Le principe de cette opération, prévue en trois phases, est de sous-traiter un maximum, la BN ne voulant consacrer ni temps ni personnel à des préparations préalables. Ce sont donc des sociétés habituées à la saisie de masse et à la saisie de notices bibliographiques qui sont contactées. La BN a pour autre exigence la sauvegarde de toutes les notices et de tout le contenu de chaque notice. Pour cela, elle fournit les originaux les plus à jour, souvent surchargés de notes et de corrections. Enfin, l'aboutissement au format INTERMARC constitue une dernière condition.

Exigences et contraintes ont également déterminé le choix par la bibliothèque du Groupe HEC d'une société de service - la société Jouve. Les résultats des tests effectués à partir des réservoirs existants offraient un taux de recouvrement faible, surtout pour les notices courantes. De plus, en phase d'informatisation, la bibliothèque devait avoir un outil commun avec les 31 autres établissements participant, comme elle, au réseau de la Chambre de commerce de Paris. Ne pas fermer la bibliothèque faisait aussi partie des contraintes. Il fallait donc aller vite, bien et tout cela en même temps que l'informatisation et la mise en accès libre de la bibliothèque.

Chaque bibliothèque étant un cas particulier - en fonction de son fonds, français ou étranger, ancien ou récent, spécialisé ou encyclopédique -, des études de faisabilité précèdent le choix de tel ou tel système par les bibliothèques, dans lesquelles il convient de tenir compte du coût bien sûr, mais également du taux de recouvrement des notices, qui peut aller de 40 % à 78 %, de la rapidité de l'opération, et de la possibilité de prise en charge de l'opération par le personnel de la bibliothèque. Quelle que soit la spécificité de chaque bibliothèque, les performances attendues sont toujours les mêmes : quantité, qualité, rapidité.