Les construits des années soixante-dix font le bilan

Entretien avec la rédaction

Françoise Danset

Édith François

Pierre Louis

Les responsables de trois bibliothèques municipales (Malakoff, Metz et Cergy-Pontoise), dont les bâtiments ont été mis en service entre 1972 et 1979, font le bilan de leurs locaux. L'implantation et les accès de l'équipement, la place accordée à chacune des sections ou des fonctions de la bibliothèque, les aménagements et les implications du libre-accès, l'organisation des services internes de la centrale et du réseau, tous ces sujets sont évoqués sous trois angles : la programmation et la réalisation du bâtiment, les modifications et les améliorations apportées jusqu'à maintenant, la capacité de l'équipement à s'adapter aux développements de la bibliothèque.

The managers of three municipal libraries (Malakoff, Metz and Cergy-Pontoise) strike the balance of their buildings which have been put into service between 1972 and 1979. The buildings position and approaches, the importance of each section or service of the library, the arrangements of the open access and its consequences, the organization of the central library and the network; all these problems are looked at in the following bearings : planning and construction of the building, various changes effected up to now, flexibility of the building according to the develop.ment of the library.

Comment évaluer le bâtiment d'une bibliothèque ? Nous avons demandé aux responsables de trois bibliothèques municipales (Malakoff, Ville nouvelle de Cergy-Pontoise et Metz) de se livrer devant un magnétophone au jeu du bilan. Ces trois équipements que beaucoup de choses opposent, leur âge, l'importance de la ville et leur implantation notamment, ont un point commun : ils sont habités depuis un temps suffisamment long (cinq ans pour le plus récent) pour susciter davantage qu'un simple état des lieux. Divers facteurs interfèrent sans se confondre : l'adéquation des locaux aux besoins exprimés au moment de la construction, leur vieillissement, le développement de la bibliothèque, l'émergence de nouvelles activités. Faire le bilan, c'est finalement se demander : comment évolue le bâtiment d'une bibliothèque ?

BBF. Remontons aux origines, pour ne pas dire aux fondations... Les bibliothèques que vous dirigez sont de conceptions et de tailles très différentes. On peut même se demander s'il n'y a pas une différence de génération entre les équipements de Malakoff, âgé de 12 ans, et de Cergy-Pontoise qui en a cinq.

Edith François. Malakoff est très exactement de la « génération de 68 » puisque la décision de construire a été prise cette année-là. Le projet s'est inscrit dans la rénovation du centre-ville, à côté de la mairie et du théâtre. Lorsque je parle de « centre-ville » il s'agit du centre urbain et non du centre géographique : Malakoff est relativement étiré et il serait nécessaire de disposer d'une annexe. Mais la conjoncture actuelle -Malakoff se dépeuple comme toutes les communes limitrophes de Paris - ne permet guère de l'espérer ; nous devons nous contenter du bibliobus mis en service il y a 17 ans.

Une bibliothèque doit être ouverte ou fermée

Le site de la bibliothèque est satisfaisant mais le terrain disponible était limité : 680 m2 sur lesquels il a fallu « empiler » quelque 1 700 m2 utiles. Ce n'est pas par hasard que j'évoque des piles : l'architecte avait dès le départ conçu un volume en jeu de cubes, tout en décrochements. Même après remaniements l'équipement porte la marque de ce parti : les deux corps de bâtiments sont décalés d'un demi-niveau et chacun se répartit verticalement sur quatre niveaux. Ce décalage est accentué par l'agencement des circulations verticales qui ne desservent qu'un niveau sur deux... Nous avons été - et nous restons encore - séduites par le caractère « chahuté » de la bibliothèque, mais il faut reconnaître que le fonctionnement en a pâti. Le bâtiment comportait aussi plusieurs données contradictoires: d'un côté un très grand souci d'ouverture, puisque lors de l'inauguration il n'y avait pratiquement ni portes ni serrures à l'intérieur (cela a bien changé depuis); et de l'autre, l'aspect extérieur sacrifiant à la mode (brique, aluminium brossé et verre fumé), ce qui donne une façade aveugle pour les gens de l'extérieur alors qu'une fois passée l'entrée, le bâtiment se veut accueillant et chaleureux, tout en présentant malgré tout une certaine opacité : aujourd'hui encore, beaucoup de gens continuent d'ignorer l'existence des services publics placés aux niveaux supérieurs, la salle de lecture et la discothèque.

Françoise Danset. Nos deux équipements présentent plusieurs points communs en dépit de contextes différents. La bibliothèque de Cergy-Pontoise a été implantée dans le cadre d'une ville nouvelle : il s'agit de desservir un territoire très étendu avec des points d'urbanisation assez importants. Les villes nouvelles étant avant tout des opérations volontaristes, nous avons dû en rabattre par rapport aux prévisions initiales : le réseau devait comporter 4 annexes de 800 m2 avec une centrale de 2 100 m2 et le bibliobus.

Il en comportera deux de la taille prévue, plus une annexe - provisoire en théorie - de 200 m2.

Site excellent, accès difficile

La centrale, qui a été le premier équipement ouvert, a été conçue dans le cadre d'un projet intégré (le conservatoire, l'hôtel de ville et le centre d'animation culturelle en forment l'ossature). Là-dessus se superposent les partis pris d'aménagement de la ville nouvelle avec séparation des accès routiers et des dalles piétonnières; tout cela donne lieu à un ensemble assez complexe : un site excellent - la bibliothèque est sur un lieu de passage en plein centre-ville - mais des accès compliqués. L'unité des services publics est affirmée mais ceux-ci se répartissent sur trois niveaux (2 étages + 1 mezzanine) sans parler des bureaux et des magasins qui occupent trois niveaux supplémentaires. On a ainsi abouti à un équipement séduisant, très ouvert mais à l'origine assez rigide et morcelé.

Pierre Louis. La nouvelle bibliothèque centrale de Metz est très différente des 2 cas qui viennent d'être cités : il s'agit d'un équipement « lourd » (5 400 m2) desservant une agglomération de 180 000 habitants. Aux fonctions d'accueil et de diffusion s'ajoute celle d'une bibliothèque classée (fonds d'étude, conservation) mais, surtout, dès l'origine, les élus avaient voulu lui donner une vocation plus large, ce qui a conduit à l'appellation officielle de Médiathèque. Je note au passage que l'usage de ce terme n'est pas encore aussi banalisé qu'on pourrait le souhaiter et que, parfois, il peut conduire certains interlocuteurs, dans le domaine de l'audio-visuel régional par exemple, à perdre de vue le caractère municipal de l'établissement, et il peut arriver que la Médiathèque soit sollicitée pour de nouvelles missions, en matière de production audiovisuelle, sans que les définitions et les moyens nécessaires aient pu être mis en place par la municipalité.

Il est impossible, dans la situation de Metz, de limiter l'audiovisuel aux activités de diffusion et de visionnement définies il y a quelques années à l'image de Beaubourg. C'est une caractéristique fondamentale de la bibliothèque, la volonté de prendre en charge non seulement la diffusion mais aussi la production de documents audiovisuels - même si, pour le moment, la Médiathèque est essentiellement une bibliothèque.

Centre en retrait

A l'inverse de celles de Cergy et de Malakoff, la bibliothèque a été légèrement excentrée pour être implantée dans le nouveau quartier du Pontiffroy, qui, à l'origine, devait être un nouveau centre d'activités en ville. Or ce quartier n'a pas eu l'extension prévue et, sept ans après son ouverture, la Médiathèque reste entourée de cellules commerciales souvent vides ou murées. Elle se trouve à 10 bonnes minutes de marche du centre-ville avec un accès essentiellement piétonnier. On ne se rend guère à la Médiathèque en faisant ses courses, ou même en allant « en ville »; ce problème d'accès en cul-de-sac se double d'un défaut de « lisibilité » architecturale : pour la quasi-totalité des usagers, venir à la Médiathèque implique contourner ou longer un bâtiment que l'on ne perçoit jamais pour lui-même. L'entrée principale est définitivement tournée vers ce qui ne sera problablement jamais le coeur d'un quartier vivant.

En contrepartie, le bâtiment procure d'indéniables satisfactions, notamment la disposition en rez-de-chaussée des sections adultes et enfants ainsi que de la salle polyvalente. La perception que l'on peut avoir de ces éléments (y compris de la discothèque, en étage) est satisfaisante... une fois qu'on y est et qu'une signalisation interne satisfaisante aura pu être mise en place.

BBF. Quel bilan tirez-vous de vos relations avec les maîtres d'œuvre ?

EF. Je suis la seule ici à avoir suivi l'opération de bout en bout. Comme je l'ai dit, le parti architectural avait été arrêté dès le départ et c'est dans ses contraintes que nous avons dû nous insérer. Par contre les relations ont été beaucoup plus poussées pour tout ce qui concerne l'aménagement intérieur : palette des couleurs, matériaux, etc. Le mobilier a également été étudié en étroite collaboration : au départ l'architecte avait prévu de dessiner le mobilier mais on a fini par se rallier à un mobilier standardisé avec quelques éléments spécialisés pour les banques de prêt ou la section enfants. (Par la suite nous nous sommes félicitées d'avoir pris cette option qui permet de réassortir facilement le mobilier...). Mais les relations avec l'architecte n'ont pas continué au-delà de l'inauguration du bâtiment alors qu'en définitive nous avions beaucoup travaillé ensemble.

FD. Je n'ai pas personnellement suivi la construction de la bibliothèque centrale mais j'aurais tendance à faire la même analyse en m'appuyant sur mes expériences d'annexes. Le volume et le parti architectural sont fixés dès le départ puisque l'opération d'aménagement a fait l'objet d'un concours ; après quoi il ne reste plus qu'à bricoler : j'ai pu faire rajouter un bureau et un coin cuisine à l'annexe St Christophe mais ces éléments apparaissent rapportés. Par ailleurs la discothèque s'insère dans un demi-cercle sur un vide en façade : avant même l'ouverture je sais déjà qu'elle ne pourra pas fonctionner de façon très satisfaisante.

Pour en revenir à la bibliothèque centrale, nous nous sommes livrés à un certain nombre de transformations mais sans véritable concertation avec l'architecte. Il aurait été préférable de pouvoir s'expliquer et de lui faire comprendre le pourquoi de ces modifications, cela n'a pas eu lieu. En fait, je ne l'ai rencontré qu'une seule fois; je crois qu'un bâtiment terminé, c'est comme la dernière page d'un livre qu'on referme !

En fait les modifications ont porté surtout sur le mobilier (spécialement dessiné lui aussi) dont une partie est allée à la casse... Certains éléments étaient volumineux et rigidifiaient l'espace en le fractionnant en une mosaïque de petits coins si bien que la bibliothèque se trouvait incapable d'accueillir véritablement le public. C'est peut-être l'erreur fondamentale du programme : la sous-estimation des espaces nécessaires à tous les niveaux (public,.personnel et magasin). Certes notre situation dans un bâtiment intégré nous donne une marge de manœuvre avec l'utilisation possible des autres équipements, mais celle-ci reste limitée : l'auditorium de la discothèque a été supprimé au bénéfice de la section prêt (trop petite) mais nous n'utilisons guère l'auditorium du conservatoire, notre plus proche voisin, car ses 250 places excèdent très largement nos besoins. Par contre, la discothèque ne prête pas de partitions et laisse cette responsabilité au conservatoire : tout ceci marque bien que l'intégration a davantage d'incidences au niveau fonctionnel que matériel.

Programmer, c'est prévoir

BBF. Ceci nous amène aux problèmes de programmation...

PL. Qui ne doivent pas être sous-estimés : en simplifiant les choses à l'extrême, je pourrais dire que Metz est globalement satisfaisant pour les services « normés » : section adultes, section jeunesse, discothèque - encore que cette dernière se révèle trop petite. Paradoxalement, cette nouvelle réalisation pèche par ses éléments spécifiques ou novateurs : en premier lieu le Relais de littérature de jeunesse (appelé Relais pédagogique sur le plan) de 57 m2, sans équivalent dans la région, qui est un centre de documentation à l'intention des enseignants, des éducateurs en formation ou non, mais aussi des parents, et qui a vocation à toucher un large public; or cette dernière carte n'est guère jouable car le Relais est une salle accessible par le fond du couloir desservant les services internes du premier étage. Nous étudions la possibilité de le transférer au rez-de-chaussée, au sein de la section jeunesse, ce qui impliquerait des réductions de surface : celle-ci sera réduite de 50 m2, qui s'ajouteront aux 50 m2 de l'heure du conte déjà reconvertie en atelier audiovisuel.

Autre donnée défaillante : l'audio-visuel. Si l'on pense que dans une médiathèque, l'audiovisuel, c'est autre chose que le visionnement sur place de produits documentaires - voie qui pourrait être remise en cause assez rapidement -, il faut lui donner une véritable place : l'intégrer et lui reconnaître une spécificité, y compris au niveau des surfaces. En dehors du fait que le rythme de travail peut différer notablement de celui des autres services, un service audiovisuel devrait disposer de bureaux, d'un atelier de montage, d'aires de visionnement individuel et d'un espace où la diffusion collective est possible dans de bonnes conditions. Si ces quatre éléments ne sont pas réunis, le risque est grand de voir l'audiovisuel se développer en dehors de la médiathèque, ou de le voir grignoter les autres services ; c'est ce qui se passe à Metz où l'heure du conte a été transformée en atelier de montage, le problème de l'espace de diffusion restant entier, car la polyvalence de la salle d'exposition est toute relative. Par ailleurs, s'il ne s'agit pas d'un phénomène de mode, les problèmes à résoudre pour l'introduction de la micro-informatique risquent de se poser dans des termes assez voisins de ceux rencontrés par l'implantation de l'audiovisuel.

Dernier élément qui n'a pas pu être traité de façon satisfaisante au niveau du programme : la prise en compte de services communs à l'ensemble du réseau des bibliothèques de quartier. Il faut dire que le réseau des bibliothèques de quartier est actuellement peu de chose et était encore plus réduit il y a dix ans; en 1985, nous disposerons d'une annexe de 500 m2 et de quatre bibliothèques s'échelonnant entre 200 et 60 m2.

FD. Metz n'est pas le seul endroit où le fonctionnement du réseau n'a pas été pris en compte. A Cergy où la programmation des , annexes a été presque concomitante de celle de la centrale, les services intérieurs sont insuffisants pour la seule centrale ! Nous avons déjà réservé dans l'annexe de St-Christophe, à 5 kilomètres, une surface de 60 m2 destinée au stockage des livres défraîchis retirés du libre-accès de la centrale. Quant aux bureaux, on peut dire qu'ils ne sont pas suffisants. Au départ, j'étais la seule à avoir un bureau; il existait un secrétariat et tout le reste du personnel disposait, en tout et pour tout, de deux grandes salles baptisées « traitement et équipement du livre ». Deux grandes salles, dont l'une mal éclairée et tout en longueur - et donc impossible à cloisonner - où s'entassent respectivement 5 à 7 personnes, des chariots, des livres, un terminal de saisie et une machine à café. Le personnel et les livres (en cours de traitement) du bibliobus restent mélangés à ceux de la centrale. Nous avons par contre récupéré un espace de travail interne à la section enfantine. Actuellement nous nous battons pour maintenir l'unité du réseau, menacée du fait de l'évolution de la ville nouvelle, mais cette unité repose plus sur la gestion informatisée que sur les possibilités matérielles de la centrale.

EF. Au moment de la programmation on prévoyait de desservir une population de 40 000 habitants. En fait Malakoff s'est dépeuplée et n'en compte plus que 32 000. C'est cette régression qui nous permet de tenir car les services publics, programmés selon les normes de 1968, sont bien justes, tout comme les bureaux.

Les espaces d'animation

BBF. Vos bâtiments comportent tous les trois les espaces d'animation prévus par les normes. Quel bilan en tirez-vous au bout de plusieurs années de fonctionnement ?

EF. Un bilan plutôt positif: les locaux d'animation à Malakoff comportent un hall d'accueil, agréable et bien distribué, et une salle polyvalente, au premier étage, pouvant fonctionner de manière indépendante des autres services. L'animation pour les enfants c'était la salle d'heure du conte (38 m2) mais j'en parle au passé car elle a depuis été transformée en salle de travail.

Le hall est en permanence le siège d'expositions, programmées par nous-mêmes ou par d'autres organismes. Elles sont d'autant plus regardées qu'il faut les traverser pour aller à la section adultes. Du fait de ses dimensions (50 m2), certaines expositions débordent le hall pour se prolonger dans la salle polyvalente. Mais nous essayons de l'éviter : la fréquentation de la salle polyvalente est, de toute évidence, bien moins importante que celle du hall. D'autre part une exposition immobilise la salle au détriment d'autres activités organisées à la même occasion. De manière générale, la salle polyvalente est aussi une salle de réunions à l'usage de nombreux clubs ou associations mais cette orientation n'est pas exclusive : on y a accueilli, non sans mal, une représentation théâtrale; un concert va avoir lieu prochainement. Dans l'ensemble c'est un élément bien utilisé.

PL. Sur le plan matériel, notre salle polyvalente nous donne satisfaction : l'espace est très bien dimensionné (200 m2), l'endroit présente une forte unité et s'ouvre sur le hall d'entrée par une baie vitrée. A l'usage, certains problèmes apparaissent : la polyvalence ne doit pas se réduire à banaliser des mètres carrés; je regrette en particulier l'absence de structures permettant de découper l'espace; mais cela n'est peut-être pas irréversible ; par ailleurs, bien placée sur plan, sa visibilité et sa transparence depuis le hall sont insuffisantes. Elle sert essentiellement à des expositions; en effet, le quartier, totalement mort le soir, ne se prête guère à des manifestations culturelles ou des réunions; nous nous efforçons de maintenir la salle en activité par des expositions toute l'année.

FD. A Cergy, les locaux d'animation ont été pensés en fonction du contexte intégré. Il n'existait pas au départ de salle dite polyvalente mais une salle de réunions de 80 m2. Par ailleurs le hall d'accès est très réduit et permet tout juste d'amorcer une exposition. Enfin l'introduction de l'audiovisuel, même à petite échelle, appelait un remodelage car il était hors de question de l'installer à la discothèque. Tout cela a fait que l'espace de réunions a été transformé en lieu d'expositions pour les deux tiers et, pour le dernier tiers, en salle de visionnement collectif équipée d'un seul moniteur. Il n'y a pas de cloisonnement, les deux fonctions se trouvent donc mêlées.

Tout cela n'est pas très satisfaisant, moins du fait de la suppression des salles de réunions (on trouve aisément l'équivalent dans le centre de Cergy), qu'à cause des locaux d'expositions qui restent petits (60 + 80 m2) et séparés : il faut organiser et baliser tout un parcours depuis le hall. Certes, nous avons pu utiliser l'une ou l'autre des grandes salles d'expositions du centre mais cela nécessite un lourd investissement en temps et en énergie (fléchage, gardiennage, etc.). Ce type d'opération montre bien, lui aussi, l'intérêt et les limites de l'intégration : nous disposons théoriquement des locaux et du concours des techniciens du Centre d'animation culturelle mais à condition de s'insérer un an à l'avance dans son planning et ce n'est pas toujours aussi facile qu'on pourrait le croire.

Ceci dit l'intégration apporte indéniablement un « plus » à l'animation de la bibliothèque, dans la mesure où certaines activités sont conçues et montées collectivement.

PL. II est une autre sorte d'animation à laquelle nos locaux se prêtent mal a priori: je pense à toutes les activités de promotion du livre (livres du mois, mini-expositions sur des thèmes d'actualités, etc.) qui, pour les raisons que j'ai dites, ne peuvent trouver place dans la salle polyvalente. Actuellement ces manifestations prennent place à l'entrée de la salle de prêt, dans un endroit trop passant. Nous étudions une redistribution des fonctions de cette salle, ce qui devrait permettre de dégager une solution acceptable.

La liaison prêt-lecture

BBF. Comment voyez-vous l'articulation de la section adultes ? Vos équipements paraissent bien diversifiés de ce point de vue.

EF. A Malakoff nous vivons le schéma des anciennes bibliothèques - le prêt au rez-de-chaussée, la lecture au premier étage. Malgré l'installation au dernier moment d'un escalier intérieur, nombre de nos habitués ignorent encore l'existence de la salle de lecture... L'absence d'unité visuelle est donc un gros handicap; en contrepartie nous avons peu de problèmes de bruit.

Nos périodiques « chevauchent » chronologiquement les deux sections : la quasi-totalité des 120 titres est présentée dans la salle de prêt - ensuite les hebdomadaires sont transférés au niveau lecture où ils restent un an avant d'être éliminés. Le coin périodiques a posé quelques problèmes et il a fallu changer les sièges qui avaient été installés au départ, de très jolis sièges mais fragiles et peu confortables.

FD. A Cergy, nous nous trouvons dans une situation inverse : la section adultes est dans un seul volume et les zones de lecture et de périodiques sont en mezzanine. En conséquence, c'est dans l'espace lecture qu'il y a le plus de bruit ! C'est une zone surchargée, totalement investie par un public très jeune de scolaires et de lycéens qui y viennent pour travailler, mais pas toujours uniquement pour travailler. Il y règne un certain bruit qui gêne les autres utilisateurs et nous oblige à faire la police, sans grand succès... Il faudrait penser ce problème du bruit dans les sections adultes - créer une salle de travail silencieuse et des petites salles pour accueillir les groupes. Il est vrai que cela faciliterait le vol ou le vandalisme qui sont déjà l'un de nos problèmes, que l'installation d'un système antivol n'a que partiellement résolu.

PL. L'allure générale de la section Adultes à Metz est plutôt réussie, mais l'organisation interne est moins évidente. Au niveau de la programmation, deux fonctions essentielles avaient été retenues : le prêt (400 m2) et le travail sur place (300 m2). Aujourd'hui, trois besoins nouveaux doivent être pris en compte : la documentation locale et régionale : il faut trouver des solutions dans la salle de travail; l'audiovisuel: il a trouvé son « coin » à côté du bureau de renseignements; les périodiques : pour l'instant, ils sont répartis en deux groupes : les quotidiens et les magazines d'information générale sont au fond de la salle de prêt; les autres périodiques sont en salle d'étude. Cette partition n'est pas du tout satisfaisante et nous allons tenter de tout regrouper à l'entrée de la salle d'étude qui présente déjà des titres à vocation grand public, mais sous-utilisés en raison de leur emplacement. Nous espérons que ce nouvel aménagement n'apportera que peu de perturbation aux habitudes de la salle de travail; nous allons maintenir le nombre des usuels tout en proposant quelques places assises supplémentaires. Nous voulons tenter le pari de regrouper l'ensemble des périodiques présentés (environ 370) et cela n'est possible que dans la salle de lecture; la place dégagée en salle de prêt sera utilisée pour des expositions thématiques.

Par ailleurs, apparaît le problème de la capacité d'accueil de cette salle de prêt : à mesure que les années passent, nous mettons en libre-accès une part toujours croissante de nos acquisitions. Parallèlement, une partie du fonds vieillit et se démode sans perdre pour autant tout son intérêt. La solution serait de les mettre dans un magasin de « proximité », sans doute à classement Dewey mais non accessible au public.

Le magasin de l'étage inférieur qui sert déjà de réserve aux bibliothèques de quartier, pourrait, à la rigueur et après réorganisation, tenir ce rôle; mais le travail de tri, les problèmes de cote et, surtout, la nécessaire intervention sur les fichiers commandent de coupler cette opération avec le « grand chantier » de l'informatisation prévue pour 1985.

Les autres facettes du libre-accès

FD. Nous avons également ce problème de vieillissement des collections, que nous commençons à stocker dans nos magasins. Si nous n'avions pas entamé avec les bibliothèques de la région une politique de conservation partagée des périodiques, nos magasins seraient déjà complètement saturés. Mais je crois qu'il faut également parler de l'autre problème du libre-accès, le vol, devant lequel on ne peut rester passif. Les statistiques de disparition des ouvrages à Cergy atteignaient 2 000 volumes par an : elles nous ont permis d'obtenir l'installation d'un système de détection qui devrait être amorti en deux ans ! Mais l'opération, qui n'avait pas été initialement prévue, n'a pas été facile : il a fallu reconditionner les circulations...

Le vol, ou plutôt le système de surveillance, est une donnée d'ensemble qui ne paraît jamais vraiment prise en compte et qui doit être traitée de manière globale : il faut prévoir un système antivol, mais l'ouverture des fenêtres, le cheminement des issues de secours, l'implantation des sanitaires et des postes de travail du personnel doivent aussi être pensés en fonction de cette nécessité. A Cergy, où la délinquance n'est pas particulièrement importante, nous avons eu pourtant droit à tout : vol de livres, vol de sacs à main, découpages. Et il est parfois difficile d'expliquer la différence entre bibliothèque et cafétéria ! Je n'ai pas l'âme d'une pionne mais je suis sans cesse obligée de poser ce problème de la surveillance qui est le corollaire du libre-accès. Il n'est pas envisageable de consacrer la majeure part des crédits d'acquisition au réassortiment des fonds qui ont été dévalisés, d'autant que ces crédits sont régulièrement en baisse.

PL. Je souscris à cette analyse. J'étais au départ assez peu sensibilisé à la question puisque je venais des BCP où l'on ne rencontre guère ce genre de difficulté. Après avoir hésité quelque temps, j'ai demandé à la mairie l'inscription d'un crédit pour un système antivol, surtout après avoir pris connaissance de certains chiffres de disparition auprès de bibliothèques informatisées sans dispositif antivol.

EF. Les deux facettes du libre-accès doivent être prises en considération : personnellement, je me préoccupe peut-être davantage du vieillissement des collections. Je préciserai mon propos en insistant sur le problème de la taille du stock. Nous disposons au total de 55 000 ouvrages dont 40 000 environ en section de prêt adultes. Je crois vraiment que c'est un chiffre à ne pas dépasser : au-delà les gens se sentent perdus devant l'immensité du choix. Quant au vol, pour le moment je tiens bon et je n'ai pas encore de système de détection. Je ne nie pas pour autant le problème -une bonne partie du Journal de l'année a disparu par la fenêtre du premier étage. Comme je l'ai dit tout à l'heure, la bibliothèque n'avait à ses débuts guère de portes et de serrures; le jour de l'inauguration mon sac à main a disparu... Depuis nous avons rajouté des portes, des serrures et des systèmes d'alerte. C'est le matériel qui a été le plus convoité : les haut-parleurs et l'amplificateur de la salle polyvalente ont été déménagés et si la discothèque n'avait pas été installée dans les hauteurs, au deuxième étage, elle aurait probablement été dévalisée.

Des livres à la discothèque ?

BBF. Venons-en justement aux discothèques. La majorité d'entre-vous estime la sienne trop petite, semble-t-il.

EF. L'unanimité et non la majorité, car à Malakoff la discothèque de prêt a, elle aussi, absorbé la salle d'écoute collective. Faute de crédits, elle a longtemps fonctionné uniquement comme discothèque d'écoute, avec 1 000 disques; en deux ans la situation s'est modifiée du tout au tout : il y a maintenant 6 000 disques auxquels s'ajoutent des cassettes et, bientôt, des disques compacts, tous supports qui dédoublent le stockage. La fonction auditorium a donc disparu au bénéfice du prêt. Ce choix n'est pas totalement satisfaisant car il se déroule toujours des séances d'écoute collective et il faut alors improviser : on aligne des chaises entre les bacs ou on déménage dans la salle polyvalente...

PL. A Metz, la discothèque est deux fois plus grande qu'à Malakoff (186 m2) et si nous avons la possibilité d'utiliser la salle polyvalente comme auditorium, dans la pratique, pour les raisons que j'ai indiquées tout à l'heure, c'est totalement exclu. Il reste que les surfaces attribuées à la discothèque apparaissent insuffisantes au fil des années : la présentation des bacs à disques occupe, au centre, l'essentiel de l'espace disponible; outre l'espace de travail interne qui a été réaménagé depuis l'ouverture, les autres fonctions ou supports sont réduits à la portion congrue : cassettes, bientôt compact-disc, écoute sur place au casque, partitions, revues et documentation musicales. Actuellement, nous nous posons quelques questions sur ce dernier point : prêter, à la discothèque, les partitions ainsi que les ouvrages sur les oeuvres elles-mêmes semble une bonne solution; par contre, les ouvrages plus généraux sur la musique et les musiciens ont davantage leur place dans la section de prêt. L'approche mélomane, voire musicologique -on emprunte un disque, la partition et la documentation sur l'œuvre - existe, mais elle est minoritaire pour le public des discothèques.

En dehors du Relais de littérature de jeunesse mentionné plus haut, la discothèque est le seul service public situé au premier étage; c'est une bonne solution, car la discothèque est bien accessible depuis le hall d'entrée et attire pour une large part un public spécifique que nous espérons mieux connaître par l'informatique.

FD. Mon expérience va dans le même sens; notre petit fonds d'ouvrages de musique, pratiquement gelé lorsqu'il se trouvait dans la discothèque, est beaucoup plus emprunté depuis qu'il a été redescendu dans la section de prêt.

BBF. Par contre vous n'avez jamais envisagé de rapprocher l'audiovisuel de la discothèque ?

FD. A Cergy, l'audiovisuel a presque représenté une gêne car nous n'avons vraiment pas la place de l'accueillir, que ce soit à la discothèque ou à la section adultes. C'est pour cela que nous nous sommes limités à un seul moniteur avec lequel sont programmées des séances de diffusion collective des vidéocassettes.

PL. A Metz, je l'ai dit, nous avons choisi de faire sa place à l'audio-visuel, mais, pour le moment, il ne s'agit que de visionnement individuel dans la section prêt, sans programmation, comme à Beaubourg. Ce qui par contre nous éloigne de la BPI, c'est le mode de présentation et d'accès : nous avons renoncé aux fantômes disposés sur les rayonnages. La présentation multimédias ne me paraît viable qu'à Beaubourg où les documents, qui ne sortent pas, ont tous plus ou moins le même statut. A Metz, les démarches sont beaucoup plus différenciées : les usagers qui viennent emprunter un livre ne sont pas là pour visionner une cassette - et ceux qui veulent voir un film savent bien le trouver sur les listes que nous mettons à leur disposition. Le problème principal de l'audiovisuel, c'est l'absence de locaux de diffusion collective pour les adultes et pour les enfants. Pour ces derniers, l'audiovisuel ne peut guère fonctionner que de cette manière et il faut donc disposer d'une salle; nous nous servons de l'atelier d'activités (57 m2) mais il s'agit là d'une cote mal taillée.

Des sections enfants à géométrie variable

BBF. Les sections enfants semblent avoir appelé beaucoup de redéfinitions...

EF. A Malakoff, la section pour enfants n'a pas été réduite, mais remodelée. Il faut dire que nos surfaces (112 m2 pour la section prêt-lecture et 38 m2 pour l'heure du conte) ne nous laissaient guère de marge de manœuvre. Très vite, nous nous sommes aperçues que c'était une erreur de regrouper le prêt et la lecture dans un si petit volume : la cohabitation était difficile entre les tout petits, bruyants et agités, et les plus grands qui faisaient déjà un travail documentaire. Ces derniers envahissaient alors la salle des adultes, ne trouvaient pas la documentation adaptée, faisaient du bruit... On a donc fini par se décider à sacrifier l'espace d'heure du conte, maintenant devenu une petite salle de documentation avec tables et rayonnages. Maintenant l'heure du conte se fait dans un coin de la section prêt; c'est un facteur de gêne mais moindre que précédemment.

La section pour enfants a bénéficié également de l'adjonction d'un bureau pour son personnel. Ce bureau est malheureusement placé un étage et demi plus haut, sans communication directe; mais ce compartimentage est le fait de tous les éléments de la bibliothèque qui sont tous dissociés les uns des autres.

FD. C'est surtout dans la section enfants que nous avons cassé du bois, au nom d'une analyse analogue à celle de Malakoff. Les surfaces de départ étaient très honorables (320 m2 pour l'ensemble) mais toute une ribambelle de demi-cercles de 6 mètres de diamètre (les tout petits, les moins petits, les plus grands, etc.) figeaient et mangeaient littéralement l'espace. Sauf deux conservés pour les petits, nous les avons remplacés par des rayonnages et par des tables. Avec la suppression de la banque de prêt, un espace de travail cohérent pour les plus grands a été dégagé. Un bureau habitable a été repris à l'extrémité de l'atelier d'activités - très fréquenté ainsi que l'heure du conte qui est facilement surchargée. Maintenant la section pour enfants fonctionne de manière correcte.

PL. La section jeunesse dispose actuellement d'une surface publique de 254 m2. Si nous y intégrons à moyen terme le Relais de documentation, cela représentera une amputation de quelque 50 m2 qui devrait pouvoir être partiellement compensée par une redistribution des éléments de prêt. Ce qui serait également souhaitable, c'est une salle de travail où l'on pourrait garantir des conditions minimum de silence. Il faudrait aussi que la section jeunesse puisse « retrouver » la salle d'heure du conte (46 m2) qui a été - progressivement mais sûrement - investie par le service audiovisuel. Au départ, il ne s'agissait que d'un grand meuble de rangement, qui devait permettre un fonctionnement normal du local d'animation. A présent, l'audiovisuel est une donnée intrinsèque passée dans les faits et dans les murs.

Par ailleurs, l'implantation de la section jeunesse appelle des réserves par son accès au terme d'un long couloir coudé, masquée par un bloc sanitaire et flanquée d'un patio bitumé dont la raison d'être m'échappe.

EF. Son accès doit tout de même poser moins de problèmes qu'à Malakoff où il est nécessaire de descendre toute une volée de marches pour y arriver - ce qui signifie que la bibliothèque est fermée aux handicapés car il est nécessaire de prendre l'escalier pour accéder à l'ascenseur ! (De toute façon, les dimensions de l'ascenseur ne permettent pas, au surplus, d'accueillir les chaises roulantes... ).

La section pour enfants enfin, placée en contrebas, souffre du parti architectural: les vitres fumées en font un espace très sombre. Certes, l'éclairage a été renforcé mais l'éclairage constitue justement le « point noir » de l'aménagement intérieur: le système retenu, (éclairage incandescent) est très agréable mais peu pratique et insuffisant.

Donnez-nous des bureaux...

BBF. Vous avez tous les trois insisté sur la nécessité d'un bureau pour la section enfants. Comment analysez-vous le problème de l'organisation des services intérieurs et de leurs dimensions ?

FD. Il faut en effet distinguer les deux choses; à Cergy l'ensemble des services intérieurs couvre maintenant environ 200 m2, dont 60 m2 de bureaux, ce qui, même après les remaniements qui nous ont fait gagner environ 25 m2 (sur la salle d'activités de la section enfantine), reste insuffisant, en particulier à la discothèque où le travail interne se fait dans la salle de prêt et d'écoute. La notion d'organisation est donc fondamentale. Les salles de catalogage et de traitement sont nécessaires mais le personnel doit aussi pouvoir disposer de bureaux propres, que ce soit à proximité des services publics (adultes, enfants ou discothèque) ou à l'intérieur de la chaîne de traitement. Il doit aussi disposer d'un local (réunions, coin cuisine) ce que nous n'avons pas non plus à Cergy.

PL. A Metz également, on peut regretter la taille des services intérieurs; à la discothèque, nous avons récupéré les mètres carrés destinés à l'écoute pour en faire un espace de traitement et de manutention. Si l'on excepte deux petits bureaux semi-publics (l'un ouvrant sur la salle de prêt adultes (13 m2), l'autre implanté à l'avant de la salle de prêt en section jeunesse (11 m2) mais, lui aussi, « récupéré » par l'audiovisuel), l'essentiel du travail interne est réalisé au premier étage, au-dessus des salles de prêt et de lecture adultes. C'est un parti satisfaisant dans son principe avec 5 bureaux de 30 m juxtaposés et 2 salles, indexation/catalogage d'une part (95 m2) et reliure/ équipement (100 m ) d'autre part. Le directeur du service est le seul à disposer d'un bureau personnel et pour le reste, les surfaces sont parfois bien insuffisantes : on a dû placer à un moment jusqu'à 5 personnes dans un des bureaux de 30 m2 qui ne devrait pas normalement en accueillir plus de 3, alors que le secrétariat et le standard téléphonique occupent 4 personnes dans un bureau bien bruyant.

Indéniablement, l'organisation du travail est un des éléments les plus délicats à programmer - et l'utilisation prochaine de logiciels intégrant toutes les fonctions en temps réel va poser des problèmes tout à fait nouveaux - d'autant plus qu'à Metz, il s'agissait de regrouper sous un même toit les services internes d'une centrale et des bibliothèques de quartiers alors que les modes de fonctionnement des uns et des autres n'étaient pas forcément en phase... Ne pas sous-estimer a priori les nécessités et les contraintes du travail interne est l'une des conditions essentielles pour un bon fonctionnement en réseau.

EF. Il ne faut pas non plus méconnaître le risque d'une sous-évaluation a posteriori: à Malakoff, j'ai déjà dû défendre l'intégrité des surfaces de la bibliothèque qui intéressaient beaucoup les autres services municipaux. Les espaces de bureaux ne sont pourtant pas considérables : outre le petit bureau de la section enfants et celui de la discothèque, les services intérieurs se réduisent à trois bureaux où huit personnes sont amenées à travailler : le mien, la salle de catalogage et celle d'équipement. Or ces bureaux sont naturellement déserts lorsque nous sommes en service public... Il est quasiment impossible d'argumenter pour obtenir une majoration des bureaux alors que le dossier que j'ai présenté pour faire réaménager l'heure du conte est passé sans difficulté. FD. Il faudrait aussi réfléchir très rapidement aux incidences de l'informatisation sur l'articulation des services intérieurs. L'unique terminal de saisie de Cergy-Pontoise est, pour le moment, implanté dans la salle de catalogage. Lorsqu'on passera au stade suivant, l'automatisation des commandes, il se posera tout un problème d'organisation du travail : dégager le terminal vers les aires de réception des livres ou, au contraire, faire succéder les gens sur un poste fixe en reconstituant le circuit du livre... Tout cela peut poser des problèmes d'engorgement, d'ergonomie et le circuit du livre en sera modifié.

BBF. Il nous reste à parler des magasins.

PL. A Metz, les surfaces sont confortables (1430 m2 au total dont 150 pour la réserve précieuse), mais l'éloignement du magasin à périodiques (au sous-sol, 280 m2) par rapport aux autres magasins des 2e et 3e étages nécessite la présence d'un magasinier supplémentaire pour répondre aux demandes de communication, d'autant plus que le monte-charge n'aboutit pas dans la salle de lecture. Et à terme, comme un peu partout, le problème des périodiques sera posé...

EF. Toutes proportions gardées ce sont des problèmes du même ordre qui se posent à Malakoff. Les réserves du sous-sol suffisent largement à nos besoins et nous avons pu y accueillir les archives communales. Y sont entreposés les ouvrages de l'ancienne bibliothèque et surtout les livres retirés du libre-accès. Je me pose d'ailleurs beaucoup de questions à ce sujet - jusqu'où peut-on aller, car, à Malakoff, retirer des livres des espaces de lecture et de prêt signifie l'interruption de toute communication au public car les fiches sont également retirées du catalogue. Nous conservons donc pour conserver... ce qui n'est pas notre vocation première. Les magasins ont aussi vocation à accueillir le fonds du bibliobus. Fort heureusement, ce fonds n'a pas été créé, le bibliobus s'alimente régulièrement sur la centrale; la gestion en effet serait des plus épineuses car il n'y a aucune liaison mécanique entre le garage et les réserves, reliés par un simple escalier...

FD. Magasins et garage du bibliobus sont de plain-pied et l'accès vers les services intérieurs se fait au moyen d'un monte-charge qui, heureusement, n'est pas toujours en panne. Comme je l'ai dit le problème des magasins tient à leur exiguïté mais, dans l'immédiat, nous avons pu y parer.

PL. La solution de ces problèmes de conservation - conservation sur place des ouvrages, conservation partagée des périodiques ou d'autres collections - me parait passer par l'informatique. C'est une des données de la coopération sur laquelle il est à présent possible de réfléchir utilement. Les magasins de proximité devraient se généraliser mais leur mise en œuvre ne représente qu'un aspect du problème; si celui-ci n'est pas traité de manière globale, tous les équipements se retrouveront en état de crise à plus ou moins longue échéance.

Au bout du compte...

BBF. Après cet examen des services, que pensez-vous du bâtiment, plusieurs années après l'ouverture ?

EF. Plutôt du bien; la bibliothèque vieillit bien et reste attractive plus de dix ans après son ouverture. Mais c'est un bâtiment qui coûte cher, qu'il s'agisse du nettoyage des vitres de façade ou de la peinture, et la municipalité fait des économies sur ce chapitre. Ce manque d'entretien ne se voit pas trop pour le moment car les matériaux employés au départ étaient de très bonne qualité.

FD. A Cergy, le bâtiment vieillit... La moquette est trouée - elle sera changée partiellement au prochain budget - et il y a des fuites un peu partout ! Comme tout l'intérieur est peint en blanc, les murs sont maculés sur 1,50 m de haut. Or il n'est pas question d'obtenir la moindre restauration; les vitres extérieures ne sont plus nettoyées qu'une fois par an et je me bats pour maintenir mon quota d'heures de ménage... Tout cela est regrettable car le centre intégré de Cergy est un bâtiment superbe, à l'extérieur comme à l'intérieur.

EF. L'entretien et la maintenance de tous ces équipements représentent des charges énormes dont on a du mal à prendre conscience; les sommes que je gère personnellement représentent à peine le dixième des dépenses totales de la bibliothèque. Je crois qu'au départ les élus sous-estiment les coûts de fonctionnement du bâtiment mais c'est une réalité qu'on ne peut, hélas, plus faire semblant d'ignorer.

PL. A Metz, dans l'ensemble, le bâtiment vieillit bien; l'impression de qualité qui se dégage à l'intérieur du bâtiment a pu être maintenue en particulier grâce à l'attention qui peut être portée à l'entretien régulier.

BBF. Et si c'était à refaire ?

FD. Il faudrait repenser les services intérieurs : à cette réserve près, Cergy, tel qu'il a été remanié, est un très bel équipement qui a beaucoup de succès. Le point faible tient à la coordination du réseau mais, dans le cadre de la ville nouvelle, les annexes disposent d'une très grande autonomie (et des bureaux correspondants). Par contre, elles devraient être plus nombreuses qu'elles ne le sont.

PL. Si c'était à refaire, ce serait peut-être ailleurs car le site choisi, dans une conjoncture économique qui a évolué depuis, ne s'avère pas le plus payant. Et ce serait, sans doute, un bâtiment tourné vers la vieille ville avec davantage de « présence » architecturale. A cette réserve près, la Médiathèque est un lieu agréable, bien perçu et qui, peut-être, a une âme.

EF. Il en va de même à Malakoff. Mais si c'était à refaire, la totalité de la section pour adultes serait au rez-de-chaussée, sur un seul niveau - et il y aurait des bureaux à tous les étages. Il n'y a pas eu au départ d'erreur fondamentale mais c'est la conception d'ensemble qui a vieilli. Le problème de Malakoff, c'est avant tout un problème de génération.

BBF. En définitive, vous portez des appréciations nuancées...

EF. Jusqu'à un certain point car aucun de nous trois ne s'en tient au seul inventaire des oublis et des erreurs. On arrive malgré tout à résoudre une partie des problèmes et à s'adapter aux contraintes. L'évolution d'un équipement c'est autant une affaire de créativité que de flexibilité; un bâtiment est ce qu'en font ses usagers mais j'énonce là une vérité vieille comme le monde !