La bande dessinée

par Louis Baize

Jean-Bruno Renard

Seghers, 1978. - 254 p. : ill., tabl. ; 19 cm. -(Coll. Clefs; 57.)

Ce « panorama historique, technique et sociologique de la bande dessinée » est un dossier clair, bien documenté et qui, s'il ne contient aucune révélation, se recommande par son effort d'objectivité. Aucun aspect essentiel du phénomène ne nous semble avoir été passé sous silence. Peut-être la partie historique est-elle un peu trop développée, d'autant que l'absence d'index ne permet pas de retrouver commodément un nom de personnage, de dessinateur, de scénariste ou de périodique. Et, inévitablement, il y a des énumérations qui, par moment, peuvent lasser. C'est que J.-B. Renard insiste à juste titre sur les origines de la bande dessinée : comme François Caradec, il rend un juste hommage au Genevois Topffer (vers 1830) et au français Georges Colomb (qui signa Christophe, vers 1890); sur ses liens avec la caricature, avec l'imagerie populaire, avec la presse, et - au début du XXe siècle - avec le cinéma et le dessin animé. Il s'efforce de ne passer sous silence aucune «école», aucun auteur, aucun périodique qui lui semble avoir eu - même momentanément - une influence, un public.

Dans son introduction, il propose une définitiou à la fois vague et précise : « un récit dessiné et imprimé » où dans « la très grande majorité » des cas, « un texte... se combine... avec l'image»; avec, de plus « la parution périodique des récits, dont les héros se retrouvent d'épisodes en épisodes »... (p. 11).

Genre populaire - ce qui l'a fait longtemps dédaigner par les enseignants et les intellectuels - la bande dessinée l'est éminemment : souvent les personnages « échappent » littéralement à leur créateur : ils lui survivent pendant des années grâce à de nouveaux scénaristes et dessinateurs. Ces « personnages... sont beaucoup plus que de simples références... Ils sont le support de projections psychologiques »... (p. 227) comme peuvent l'être les héroïnes du cinéma. Sont bien expliqués les phénomènes d'identification et de compensation, ainsi que l'importance de l'humour ou du fantastique.

Et l'on appréciera que la bande dessinée soit remise à sa juste place - qui n'est pas secondaire - comme expression et témoin des sensibilités collectives. L'auteur sait bien, cependant, qu'elle ne peut tout raconter : ni l'histoire de France ni les tragédies de Corneille, ni rendre les équivalences du style si particulier de la comtesse de Ségur. Son domaine n'en reste pas moins immense et difficile à délimiter.

J.-B. Renard semble avoir à peu près tout lu de ce qui compte, en français, sur le sujet. Son étude, complétée par une bibliographie de 80 références et un choix de 30 séries « pour constituer un « fonds bandes dessinées » dans les bibliothèques » est une excellente introduction et un ouvrage de référence.