95e Congrès national des sociétés savantes

La ville de Reims recevait du 23 au 27 mars 1970 le 95e Congrès national des sociétés savantes qui s'était plu à venir y saluer, après Pau en 1969, l'une des jeunes universités françaises. Les autorités régionales, départementales et municipales - et tout particulièrement M. Jean Taittinger, député-maire de Reims - avaient accueilli très favorablement cette manifestation qu'elles encouragèrent non seulement en facilitant son organisation matérielle mais en participant aux réunions et en offrant des réceptions en l'honneur des congressistes.

M. Jean Gay, recteur de l'Académie de Reims, et l'Université de Reims accordèrent également une aide efficace sur le plan matériel et un concours éclairé sur le plan scientifique. M. Devèze, doyen de la Faculté des lettres et sciences humaines de Reims, dirigea avec compétence et dévouement le comité local d'organisation du Congrès, assisté dans ses lourdes tâches par M. R. Gandilhon, conservateur en chef, directeur des services d'archives de la Marne, et M. R. Laslier, conservateur de la Bibliothèque municipale de Reims.

L'organisation scientifique du congrès incombait à la section d'histoire moderne et contemporaine du Comité des travaux historiques et scientifiques dont le président très actif et toujours attentif, M. M. Baudot, inspecteur général des Archives de France, n'eut de cesse de veiller à la qualité du programme proposé, au bon déroulement des séances de travail et rehaussa lui-même l'éclat de la réunion en exposant brillamment, lors de la séance de clôture, la vie privée et la carrière d'un Ministre champenois méconnu, le comte de Saint-Florentin (1705-1777).

L'histoire de l'enseignement en France avait été le thème plus particulièrement recommandé aux historiens et plus de cinquante communications lui furent consacrées, sans omettre la magistrale conférence inaugurale de M. M. Devèze sur l'Enseignement en Champagne. Un rapport de M. J. Le Goff, directeur d'études à l'École pratique des hautes études, sur l'Enseignement dans l'Occident médiéval du XIIe au XVe siècle, les problèmes posés par les sources et leur exploitation, les aspects déjà étudiés et ceux restant encore à éclairer, fut suivi d'un débat très animé. Une autre réunion très vivante fut la table ronde dirigée par M. P. Leuilliot, directeur d'études à l'École pratique des hautes études, sur la Pédagogie dans l'enseignement primaire du XVIIe siècle à la réforme Jean Zay, au cours de laquelle des spécialistes de l'enseignement laïc et de l'enseignement religieux se répondirent.

Enfin une instructive exposition sur l'histoire de l'enseignement en France jusqu'à la fin du XIXe siècle, présentée avec beaucoup de soin et un goût très sûr dans les salles du Musée Saint-Denis, avait été organisée par M. R. Laslier et son adjoint, M. P. Botineau, qui eurent le mérite de savoir à la fois exploiter les immenses richesses en manuscrits des bibliothèques de la région pour la période moyenâgeuse et se livrer à une difficile sélection parmi les nombreux documents d'archives, ouvrages et objets existants pour les périodes moderne et contemporaine. Ils furent très efficacement aidés dans leur tâche par M. R. Gandilhon, pour la recherche des documents d'archives.

En archéologie, la « ville » fut le thème qui inspira le plus grand nombre de communications : de l'habitat antique à la ville des temps modernes. L'architecture civile et religieuse et les monuments de la région Champagne-Ardenne furent également des sujets fréquemment choisis; la « Porte de Mars » à Reims retint tout particulièrement l'attention des congressistes qui formèrent le voeu de voir entreprendre très prochainement sa restauration.

Comme d'habitude, les séances de travail furent agrémentées de visites des sites et des monuments les plus dignes d'intérêt pour les historiens et les archéologues : c'est ainsi que le Reims historique fut présenté par M. H. Druart, président de la Société des amis du Vieux Reims, la visite historique et archéologique de la ville de Troyes conduite par M. G. Bernard, directeur des Services d'archives de l'Aube, Mlle F. Bibolet, conservateur en chef de la bibliothèque municipale de Troyes et M. H. Jeannet, professeur de lettres, et celle de Châlons par M. G. Clause, maître-assistant à la Faculté des lettres et sciences humaines de Reims. Plus particulièrement réservée aux préhistoriens fut l'excursion aux grottes préhistoriques de Coizard et la visite du Musée d'Épernay dirigées par M. R. Joffroy, directeur des antiquités préhistoriques de la circonscription Champagne-Ardenne, et son adjoint M. B. Chertier. Enfin les monuments de Reims n'échappèrent pas non plus à la curiosité des congressistes qui découvrirent la Porte de Mars et les cryptoportiques de la place du Forum avec M. E. Frézouls, directeur des antiquités historiques de la circonscription Champagne-Ardenne, et revirent avec une meilleure compréhension la cathédrale et l'ancien archevêché de Reims, l'abbaye Saint-Remi et son musée grâce aux explications de M. M. André, architecte des monuments historiques, de M. R. Vassas, architecte en chef des monuments historiques, et de M. F. Pomarède, conservateur des musées de Reims.

En géographie, si M. R. Brunet, directeur de l'Institut de géographie de l'Université de Reims, organisa une visite documentée et très intéressante de l'agglomération de Reims, dont il étudia la croissance, le site et l'aménagement, les séances en salle se ressentirent de la non-participation des géographes locaux. Une excursion dans le vignoble champenois, comprenant un arrêt à l'abbaye de Hautvillers et une visite des caves de champagne Pommery, était savamment commentée par M. Gandilhon et le colonel Bonal, délégué à l'accueil du Comité interprofessionnel des vins de Champagne.

Dans le domaine des sciences, le Congrès de Reims vit confirmé l'intérêt porté à l'histoire des sciences : plus d'une vingtaine de communications, dont la moitié au moins consacrées aux inventeurs et savants de la région Champagne-Ardenne. M. H. Guénebaut, doyen de la Faculté des sciences de Reims - qui accueillait d'ailleurs tout le congrès dans les locaux de sa Faculté - présida lui-même une séance de travail au cours de laquelle furent présentés les travaux de spectroscopie moléculaire de son laboratoire; il avait en outre prévu pour les scientifiques la visite de l'usine Boussois-Souchon-Neuvesel, sous la bienveillante et compétente direction de M. Tournier La Ravoire, président directeur général. En chimie, d'intéressantes communications furent présentées sur les progrès récents de la synthèse en chimie organique et sur la structure des produits naturels. Toujours très fréquentées furent les séances de géologie et de minéralogie, animées comme chaque année par M. le Professeur J. Orcel, membre de l'Institut, et celles de biologie végétale, organisées avec une grande méthode par M. le Professeur E. Boureau. Les géologues trouvèrent un accueil particulièrement bienveillant à Reims auprès de M. D. Laurentiaux, professeur à la Faculté des sciences, qui organisa à leur intention une excursion dans le vignoble champenois au cours de laquelle il leur présenta les formations éocènes de la Montagne de Reims. Enfin les séances de biologie générale et animale et de médecine offrirent l'occasion aux congressistes de découvrir les travaux poursuivis par la Faculté des sciences de Reims en biologie et en biochimie du développement, et par celle de médecine et de pharmacie dans la pratique de la cinématographie et de la photographie endobronchiques, dans l'étude des aspects physio-pathologiques de la médecine sportive et dans la diététique du vin.

Les débats du 7e colloque des présidents de sociétés savantes portèrent sur la coopération entre sociétés savantes dans le cadre du département; animés par M. R-H. Bautier, chargé par le Comité des travaux historiques et scientifiques de centraliser les différents point de vue et auteur d'un rapport sur le sujet, ces débats firent la lumière sur les diverses possibilités de collaboration, éminemment variables selon les régions.

En l'absence de M. le Ministre de l'Éducation nationale, qui avait toutefois tenu à adresser un message de sympathie et d'intérêt à tous les participants au Congrès, et en l'absence de M. le Directeur des Bibliothèques et de la lecture publique, la séance de clôture fut présidée par M. M. Caillet, inspecteur général des bibliothèques, qui rappela l'intérêt que présentaient ces échanges annuels entre universitaires, chercheurs, érudits, membres des sociétés savantes, mit en évidence l'intérêt régional de telles réunions qui, en proposant des thèmes régionaux, permettaient à tous ceux qui participaient à la vie culturelle, scientifique et technique de leur terroir de s'exprimer, et enfin réaffirma l'attachement que le Comité des travaux historiques et scientifiques portait à sa mission de correspondant des sociétés savantes françaises.

Le prochain Congrès national des sociétés savantes se tiendra à Toulouse du 13 au 17 avril 197I et étudiera les « contacts et influences réciproques entre la France du Nord et la France du Midi »; à cette occasion, une vaste synthèse de la vie et des activités des sociétés savantes de la région sera tentée.