La nouvelle bibliothèque scientifique de Poitiers

Jeanne Giraud

Un campus de 40 hectares environ à 4 km du centre de Poitiers groupe maintenant les différents établissements de la Faculté des sciences dont une nouvelle bibliothèque. Son organisation matérielle suit les conceptions nouvelles : division des études supérieures en trois cycles; ceci a donc entraîné l'ouverture de salles spécialisées suivant le « plan divisionnel ». Son emplacement est central et des possibilités d'extension sont prévues. Description détaillée des nouveaux locaux.Quelques compléments à l'article paru précédemment dans le B. Bibl. France. 9e année, n° 5, mai 1964, pp. 197-209 pour les disciplines suivantes :
- Langues et littératures romanes;
- Histoire;
- Histoire de l'art;
- Sciences économiques et sociales

Lorsque, dans les premières années de l'après-guerre, la vie universitaire put reprendre un cours normal, la Bibliothèque de l'Université de Poitiers se présentait encore, tant dans son fonctionnement interne que dans ses dispositions matérielles, à peu près telle qu'elle avait été réalisée en 1902. Dans le bâtiment de la place Notre-Dame-la-Grande, qu'elle partageait avec la Bibliothèque municipale, la Faculté de droit et le Secrétariat des Facultés, elle occupait partiellement deux étages en façade, deux étages et des combles sur deux côtés de la cour intérieure. De minimes travaux réalisés entre les deux guerres n'avaient consisté qu'en quelques modifications d'affectation dans les services publics. La salle des professeurs était sommairement installée dans une pièce de dimensions restreintes (4,15 × 5,40). On y accédait par une pièce plus petite baptisée « salle des périodiques » dont l'unique matériel de présentation consistait en une table rectangulaire sur laquelle s'étalaient, dans un ordre difficile à garder, les numéros récents des périodiques les plus courants. Quant à la salle de lecture, elle pouvait recevoir 110 lecteurs; elle hébergeait aussi le catalogue-dictionnaire.

Une seule adjonction aux magasins depuis le début du siècle : un dépôt de 10 m sur 6,90 m, situé en façade, et dont l'équipement en rayonnages métalliques à étagères mobiles - grande innovation pour la bibliothèque - avait dû être interrompu au début de la guerre, faute de matériaux. Partout ailleurs l'installation des magasins, réalisée en rayonnages de bois à étagères fixes, dont la rangée supérieure était à 2,70 m de hauteur, nécessitait l'usage d'échelles ou de marchepieds. Les liaisons verticales entre la salle de lecture et les magasins situés au niveau supérieur étaient assurées par deux escaliers et deux monte-livres mus à la main, dont un long usage avait fortement perturbé le fonctionnement.

Nul ne songait alors à prévoir « l'explosion scolaire » ni l'ampleur corrélative du développement de l'enseignement public. Cependant, même dans les perspectives restreintes auxquelles on se référait, la nécessité d'une extension de la bibliothèque s'imposait. La salle de lecture devenait insuffisante, les casiers destinés aux usuels étaient combles. Plus inquiétante encore était la situation des dépôts; dans un rapport sur le service en 1949-1950 on signale qu'il ne reste plus que 150 mètres de rayonnages disponibles : à peine de quoi recevoir un accroissement de 4 à 5 ooo volumes.

Dès 1950, on cherche des remèdes à l'embouteillage croissant. Les solutions proposées sont bien timides encore car on s'en tenait alors aux agrandissements sur place et à l'utilisation du moindre espace libre - où triomphait l'ingéniosité de l'architecte.

On envisagea d'abord d'aménager en magasins des combles situés sur la cour au-dessus de la Faculté de droit et qui présentaient l'avantage de communiquer directement avec le dépôt des périodiques. En mai 1950, plans et devis étaient demandés à cet effet; mais ce projet, dont la réalisation n'allait pas sans difficultés techniques, n'eut pas de suite.

Dès le mois de mars de la même année, par contre, avaient été approuvés un projet d'aménagement (dans un local jusqu'alors sans affectation, situé en façade) d'une salle des professeurs un peu plus spacieuse que la précédente et un complément d'équipement en rayonnages métalliques du dépôt dont la guerre, comme nous l'avons dit plus haut, avait suspendu les travaux.

Au cours de l'année 1953, étaient enfin amorcés la restauration de la salle de lecture, d'une vétusté affligeante, et le remaniement de ses dispositions; il était alors possible de porter à 160 places sa capacité. Un monte-charge accompagné, à gauche de l'entrée, établissait les relations avec les deux étages de magasins.

Ces différents travaux, réalisés au cours des années 1953-1956, apportaient des améliorations sensibles, soit au bénéfice de la fréquentation, en accroissant le nombre des places et en offrant aux lecteurs un cadre plus commode et plus accueillant, soit pour le service en augmentant un peu la superficie des dépôts et en accélérant les liaisons entre les étages. Toutefois, en avril 1956, si Mr le Directeur général, à la suite d'une visite, se montrait assez satisfait des salles publiques, il soulignait « l'état lamentable » des magasins et l'impossibilité de réaliser sur place « une transformation efficace ». Il apparaissait de plus en plus clairement que l'ère était passée des aménagements de détail sans commune mesure avec le développement de l'activité universitaire.

En 1955, le transfert en banlieue de la Faculté des sciences, contiguë à la Bibliothèque et s'ouvrant sur la rue de l'Université, était déjà décidé et il semblait que les locaux abandonnés par elle conviendraient aux « importantes extensions » dont on commençait bien à voir la nécessité pour la bibliothèque sans toutefois en réaliser encore très exactement l'ampleur. Cette solution était d'ailleurs d'autant plus discutable que deux autres organismes, situés dans le même bâtiment que la Bibliothèque universitaire, subissaient une égale crise de croissance : la Faculté de droit et la Bibliothèque municipale. Les trois organismes ne pouvaient se développer concurremment sur place; les moyens envisagés d'abord : surélévation, utilisation de combles, adjonctions d'ailes, étaient dépassés.

Il fut alors question d'abandonner entièrement à la Faculté de droit l'ensemble des locaux de la Bibliothèque qui aurait été relogée dans les bâtiments de la Faculté des sciences, totalement remaniés, où la Bibliothèque municipale aurait également pu trouver des dégagements. Un programme fut ébauché sur cette base, mais rapidement on s'aperçut que les surfaces disponibles seraient insuffisantes, la possibilité d'extensions en hauteur (auxquelles on était alors favorable) étant limitée par les servitudes qu'imposait l'étroitesse des rues limitrophes. On ne continua pas l'étude.

D'ailleurs, dès la fin de 1956, sans abandonner officiellement le principe d'une bibliothèque commune aux trois Facultés, commencent à se faire jour la possibilité et bientôt la nécessité de « l'éclatement » de la Bibliothèque, dont l'acte initial serait la création d'une Section sciences dans le cadre du vaste complexe scientifique qui allait être implanté en dehors de la ville.

Ce projet prit forme rapidement au début de 1957. A la date du 28 février, le Conservateur présente à la Direction des bibliothèques un programme général déterminant les surfaces jugées nécessaires pour les différents organes de la future bibliothèque. Ce programme est approuvé dans son ensemble le 26 mars. Les architectes désignés sont ceux du complexe universitaire : MM. H. Bernard et E. Hur.

Le programme était établi en fonction des 2 700 étudiants de sciences prévus pour 1970 (en 1962-63 le chiffre de 2 052 a déjà été atteint). La salle de lecture de 500 m2 devait contenir 200 places et les magasins avoir une capacité de 250 000 à 300 ooo volumes, le fonds de départ (fonds scientifique de la Bibliothèque à cette date) étant évalué à 100 ooo volumes au maximum.

Au cours du second semestre 1957, les terrains où devait s'élever le futur complexe scientifique étaient acquis et il était dès lors possible d'étudier les conditions générales de son aménagement.

D'une superficie de 40 hectares environ, de forme trapézoïdale, à 4 kilomètres du centre-ville, le campus, desservi au nord par la route de Chauvigny, (R. N. 15I), au sud par la route de Limoges (R. N. 147), est d'accès direct et facile quand on a franchi le Clain et les faubourgs est de la ville. Il fut conçu comme devant grouper, outre un restaurant et une résidence universitaires, tous les organes d'une Faculté des sciences : laboratoires et amphithéâtres, serres et animaleries, hall industriel, sans oublier les bâtiments administratifs - et la bibliothèque; enfin, au sud, en bordure de la route de Limoges, des installations sportives.

Quelques impératifs s'imposèrent d'emblée pour l'implantation de la bibliothèque : situation centrale, au cœur même de l'ensemble, afin qu'elle fût également accessible de tous les lieux de travail et de la résidence; isolement du bâtiment, non seulement placé en retrait des voies de grande circulation afin d'y préserver le calme et le silence nécessaires au travail, mais encore entouré d'espaces vides qui ménageraient des possibilités d'extension; orientation des salles de travail au mieux de l'ensoleillement et de l'éclairage naturel. Ces diverses conditions furent retenues et, dès les premières études du plan masse, la bibliothèque apparut à peu près au centre de la surface bâtie, l'entrée principale tournée au nord, vers la route de Chauvigny, la salle de lecture au midi, les locaux administratifs à l'est.

Le 23 septembre 1958, une première étude était présentée; elle appelait quelques remaniements ne modifiant guère le programme général indiqué plus haut, ni surtout la conception et les proportions des différents organes qui restent celles de la bibliothèque traditionnelle : une grande salle de lecture (620 m2 en définitive), une salle des professeurs de dimensions beaucoup plus réduites (48 m2 pour 10 à 12 places), une salle des catalogues, une salle des périodiques, une salle de références. Voilà pour le service public. Toutefois pour n'être pas emprisonné dans un immobilisme qui commençait à apparaître périmé et préjudiciable, on avait eu le souci dominant d'assurer en quelque sorte la plasticité du nouvel organisme en ménageant des possibilités de transformation et d'adaptation. En façade nord, au-dessus de l'entrée et de la loge du gardien, étaient prévues : une salle sans affectation définie, susceptible de se prêter à des besoins temporaires et variés : expositions, auditions, « séminaires » ou accueil - puis une enfilade de 3 « carrels » ou petites salles de travail, ébauches déjà des « salles spécialisées » qui caractérisent nos conceptions actuelles.

Quant aux magasins, on cherchait alors à réaliser une économie de place en les édifiant sous forme de blocs à plusieurs niveaux que de nombreuses liaisons verticales rendent d'une exploitation facile et rapide pour le personnel de service.

C'est donc dans cette optique que furent conçus et groupés les différents organes de la bibliothèque, grand quadrilatère est-ouest, à un seul niveau pour la salle de lecture au midi, à 2 niveaux pour les deux façades nord et est. A l'angle formant la jonction entre ces deux ailes, fut placée la tour à livres de 10 niveaux (280 m2 par niveau), d'une capacité de 250 ooo volumes environ.

Diverses études sur ce plan furent élaborées durant l'année 1959 et aboutirent en décembre à une mise au point jugée assez satisfaisante pour que les appels d'offres fussent lancés au cours du printemps 1960. En septembre 1960 commençaient les travaux et l'on pouvait prévoir un délai de deux ans pour leur achèvement.

Cependant, au cours des mois où s'étaient précisées les études de détail sur le schéma de la bibliothèque traditionnelle, qui semblait immuable, les projets de bibliothèques spécialisées se multipliaient; au début de 196I on comptait une quinzaine d'établissements à créer : soit que, comme à Poitiers, des fonds scientifiques fussent détachés d'une bibliothèque de type encyclopédique pour constituer une « section », soit qu'on eût à organiser de toutes pièces des bibliothèques pour les Collèges scientifiques universitaires ou les nouvelles Universités. L'étude de ces réalisations avait fait surgir une foule de problèmes. Il apparaissait qu'aux méthodes nouvelles du travail scientifique et aux besoins d'une « clientèle » accrue devait correspondre une structure nouvelle des bibliothèques, tant dans leur fonctionnement et, si l'on peut dire, leurs rapports avec le public, que dans les locaux à concevoir en fonction de ces impératifs nouveaux. Un « aggiornamento » était devenu non seulement souhaitable mais nécessaire et réclamé par les usagers.

C'est dans le dessein d'informer les responsables des nouveaux organismes de cette mutation dans la conception des bibliothèques que furent organisées par la Direction des bibliothèques les journées d'études des 19 et 20 janvier 196I. Les directives nouvelles qui furent alors rendues obligatoires modifiaient profondément l'organisation matérielle de la bibliothèque qui devait traduire la division des études supérieures en 3 cycles définis par des méthodes de travail différentes. A côté de la salle de lecture de conception classique qui continuerait à offrir aux débutants les ouvrages généraux et les manuels élémentaires, il convenait d'ouvrir des salles spécialisées où les étudiants de 3e cycle, les enseignants et les chercheurs accéderaient directement à un grand nombre d'ouvrages, systématiquement groupés selon les divisions de la Classification décimale universelle. On évaluait à 30 ou 40 000 volumes les ouvrages à mettre ainsi à la disposition des lecteurs. A la limite, les magasins ne seraient plus destinés qu'à archiver les fonds primitifs et les ouvrages des salles spécialisées lorsqu'ils devraient y être remplacés par des ouvrages plus conformes aux derniers résultats de la recherche. Ainsi les proportions respectives magasins-salles de lecture se trouvaient totalement modifiées au bénéfice des salles publiques qui n'étaient plus de simples salles de lecture mais de véritables lieux de travail, annexes du laboratoire.

Si indispensable que fût ce radical « bouleversement » de la bibliothèque scientifique, il était impossible, dans le cas de notre nouvelle section, de reprendre dans leur ensemble les structures fondamentales du bâtiment, dont le gros œuvre était déjà en cours. Aussi avions-nous le regret de voir cette réalisation tant attendue faussée au départ puisqu'elle reposait sur des données brusquement dépassées.

Il ne restait donc qu'à adapter pour le mieux aux exigences nouvelles le plan déjà arrêté. La grande salle de lecture n'appelait pas de modifications. Mais il s'agissait d'organiser selon le « plan divisionnel » obligatoire l'ensemble des locaux que le plan traditionnel répartissait en : catalogue, salle de bibliographie, salle des périodiques, salle des professeurs, soit une superficie totale de 427 m2. Heureux encore, comme nous l'avons dit, qu'avait été retenue dès les premières études la notion de disponibilité des différents organes à des usages non définis au départ. Aucune cloison fixe n'avait été admise entre le catalogue et la salle de bibliographie, entre celle-ci et la salle des périodiques; ces différents locaux devaient être séparés par des cloisons de glace susceptibles d'être déplacées le cas échéant pour en modifier les superficies respectives. Ces cloisons n'étaient pas encore commandées, ce qui permit d'organiser, sans gaspillage de crédits, un ensemble de salles spécialisées, conformes aux nouvelles normes en délimitant des « alvéoles » au moyen de rayonnages de I,20 m accolés dos à dos. Entre ces alvéoles, des circulations aisées permettraient de passer d'un secteur à l'autre. La salle désignée sur le plan comme « salle des professeurs » était seule munie d'une cloison de maçonnerie; mais, communiquant avec la salle à alvéoles, elle s'intégrait sans difficulté majeure dans le nouveau système de secteurs spécialisés. Nous arrivions donc ainsi à organiser, outre une salle des catalogues précédemment prévue (82 m2), 6 salles spécialisées : soit une salle de 82 m2 (physique et chimie), 4 alvéoles de 50 m2 environ chacune (mathématiques, mécanique, sciences de la terre, sciences biologiques) et une salle de 64 m2 - primitive salle des professeurs - pour les généralités.

Ces modifications, dont l'étude avait été entreprise aussitôt après le colloque de janvier 196I, furent mises au point au cours des mois suivants. Les travaux purent ainsi continuer sur les données nouvelles sans remaniements onéreux et sans retard sensible.

Les appels d'offres pour le mobilier (rayonnages des salles, fichiers, bureaux, tables et sièges) eurent lieu en septembre 1962.

En février 1963, la construction était pratiquement terminée et les clés remises. Le gardiennage fut aussitôt assuré, tandis que se poursuivaient quelques finitions intérieures. Le mobilier était livré au printemps suivant et l'on pouvait fixer la mise en service partiel pour la rentrée 1963.

Le bâtiment, auquel on accède par une voie perpendiculaire à la route de Chauvigny, est en outre desservi à l'est, du côté des installations de service, par un qua prévu pour la réception des chargements volumineux.

L'ensemble de l'édifice est réalisé en béton. Le dépôt de livres est constitué par une ossature métallique supportant les planchers en béton de chaque étage et servant en même temps d'armature au système de rayonnages métalliques. Les toitures sont en terrasse; un paratonnerre surmonte la tour; par mesure de sécurité, celle-ci est isolée du reste du bâtiment et fermée par des portes coupe-feu.

Les liaisons verticales entre les dix niveaux du dépôt sont assurées par deux escaliers, un monte-charge accompagné, d'une charge utile de 500 kilogrammes, et deux monte-livres pour les transports plus légers. Trois escaliers, dans les ailes nord et est, établissent les relations entre le rez-de-chaussée et l'étage unique.

Le sol des salles publiques est recouvert en tapis caoutchouc collé sur ciment, beaucoup moins sonore que le linoléum; ce matériau par contre a été utilisé pour les circulations, salles de manipulations et autres locaux où le silence a moins besoin d'être protégé.

Une chaufferie collective située à 500 mètres environ alimente tous les bâtiments de la Faculté des sciences, les locaux de l'administration et la Bibliothèque dans le sous-sol est de laquelle est installée la sous-station qui lui est propre. Le chauffage des magasins est effectué par des tuyaux à ailettes, celui des salles publiques par des plinthes chauffantes dissimulées par les rayonnages qui en garnissent le pourtour; ceux-ci sont isolés à distance convenable.

Dans les dépôts, l'éclairage diurne est procuré par d'étroits châssis préfabriqués en béton armé, de 0,45 X 2,10, au nombre de 32 par étage courant, répartis sur les faces nord et sud; l'ensoleillement si préjudiciable à la conservation des livres est ainsi évité. Sur les deux autres faces, une baie pratiquée à chaque niveau éclaire l'arrivée du monte-charge et des escaliers.

La salle de lecture au contraire bénéficie au midi et à l'ouest d'un abondant éclairage naturel, par de larges et nombreux châssis de béton; les salles spécialisées qui s'étendent parallèlement à la salle de lecture et n'en sont séparées sur toute leur longueur que par une paroi de glace, reçoivent de cette salle leur éclairage, renforcé par des sheds. La protection solaire est assurée par des rideaux métalliques roulants à lames orientables. Les vitres, sur châssis de bois, ont un double système d'ouverture, soit le battant basculé sur fiche horizontale, soit le battant s'ouvrant à la française sur fiche verticale; ainsi peuvent être réalisées une ventilation totale et la possibilité du nettoyage sur les deux faces.

Pour l'éclairage artificiel, l'incandescence a été adoptée dans toute la bibliothèque. Dans la salle de lecture, des plaques de staff perforées fixées sur ossature métallique assurent la correction acoustique; elles supportent en outre un isolant thermique et reçoivent les spots destinés à l'éclairage.

Franchies les portes de verre qui constituent sur la façade nord l'entrée principale de la Bibliothèque, l'arrivant, après avoir traversé un vestibule de forme rectangulaire, pénètre dans un hall d'où il lui est facile de saisir à la fois toute l'ordonnance des services publics dont le cloisonnement est uniquement réalisé par des glaces. L'ensemble apparaît spacieux, bien dégagé et d'une luminosité où la teinte de l'acajou, choisi pour le mobilier, met une note chaude et attrayante.

Une vaste banque, dont le plus grand côté (10,75 m) se présente à gauche du hall, se retourne en équerre à son extrémité, de sorte que son plus petit côté (5,75 m) est orienté vers la salle de lecture; ce double mouvement fait de la banque à la fois un poste de contrôle et de renseignements à l'entrée de la bibliothèque et un bureau de prêt et de surveillance pour la salle.

L'agencement des portes qui débouchent sur le hall est prévu de telle sorte qu'il permet de fermer la salle de lecture et les salles spécialisées, tout en laissant au public l'accès au catalogue et à la banque; de là, la possibilité d'organiser, si besoin est, un service de prêt en dehors de l'horaire du service de lecture.

En face de l'arrivant et perpendiculairement au hall d'entrée s'étend la salle de lecture longue de 42,75 m, large de 14,50 m. Enfin à droite du hall, face à la banque qui en contrôle ainsi l'entrée, on trouve en enfilade successivement la salle du catalogue, naturellement accessible à tous les usagers, et les salles spécialisées. Deux postes de renseignements et de surveillance, destinés à être occupés par des sous-bibliothécaires spécialisés dans les relations extérieures et la pratique de la C.D.U., se trouvent l'un à la jonction du catalogue et de la première salle spécialisée, l'autre entre les deux salles placées à l'extrémité opposée.

Le pourtour des salles est entièrement garni de rayonnages adossés aux murs ou aux cloisons de glace; ils sont de deux types différant seulement par la hauteur : 2,05 m ou I,20 m. Les plus bas s'étendent le long des murs percés de fenêtres, ou bien, accolés dos à dos, servent à délimiter les alvéoles des salles spécialisées. La salle des catalogues elle-même comporte quelques rayonnages afin de compléter la documentation propre de la bibliothèque par des catalogues d'autres bibliothèques spécialisées, des catalogues collectifs, des ouvrages sur les divers systèmes de classement, etc. Le mobilier spécial de cette salle se compose de 38 fichiers exécutés comme le reste de l'ameublement en acajou sipo, sur piétement noir.

Dans la salle de lecture, quelques rayonnages-pupitres de 1,25 m sont placés perpendiculairement aux rayonnages latéraux et délimitent ainsi des sortes de boxes pour le classement systématique et la consultation des usuels de grand format. Des rayonnages-pupitres figurent aussi dans les salles spécialisées.

Dans tous ces éléments de rayonnages, les tablettes sont soutenues par des crémaillères métalliques aisément réglables. Un système ingénieux permet d'utiliser le même rayonnage soit pour le classement des volumes soit pour la présentation des fascicules de périodiques ou leur conservation durant l'année en cours.

En effet, des tablettes-présentoirs peuvent s'adapter en quelques minutes sur n'importe lequel de ces meubles; mises en place à l'avant du rayonnage, elles constituent un plan légèrement incliné muni d'un rebord à sa partie inférieure, pour éviter le glissement du fascicule, retenu d'ailleurs à mi-hauteur par une tringle souple; elles pivotent sur des taquets et peuvent alors venir à l'horizontale, découvrant les fascicules rangés à plat sur les tablettes normales du meuble. Ce dispositif permet d'affecter selon les besoins un plus ou moins grand nombre de rayonnages à la présentation des périodiques. Là encore on a recherché une grande souplesse dans l'utilisation de ces meubles.

Les tables, de I,80 X I,40, sont destinées chacune à 4 lecteurs et peuvent, selon l'opportunité, soit être placées bout à bout par groupes de 2 ou 3, soit disposées isolément dans les salles spécialisées pour donner plus d'aise aux usagers. Montées sur piétement de tube carré de forte section peint en noir, elles sont renforcées par une poutre centrale invisible qui assure l'absolue rigidité du plateau de bois, gainé d'une matière bleue inattaquable aux frottements et intachable. Les chaises en bois courbé sont à siège rembourré recouvert de vinyl également de couleur bleue. Quelques tabourets réglables, répartis dans les différentes salles, permettent de travailler commodément au niveau des pupitres.

Amsi équipée, la Bibliothèque peut, au départ, recevoir aisément 340 à 350 lecteurs et leur offrir en libre accès, sur près de 1 ooo mètres de rayonnages, plus de 28 ooo volumes (environ 16 700 dans la salle de lecture, 12 ooo dans les salles spécialisées). De plus, il convient de rappeler que sa capacité en lecteurs et en livres peut être facilement accrue et que, si besoin est, un développement est immédiatement réalisable. Au moment de sa mise en service, en effet, il reste encore à équiper les deux locaux situés en façade au Ier étage, d'une superficie globale de 200 m2, qui peuvent recevoir une soixantaine de lecteurs.

Ces salles doivent sous peu être organisées de la façon suivante : la première (66 m2), que l'on trouve en débouchant de l'escalier situé auprès de la banque de prêt, doit être aménagée, comme nous l'avons dit plus haut, de façon à être utilisée très librement en salle de réunion ou d'exposition; il suffira de la munir d'une table et d'une quarantaine de sièges pliants aisés à ranger contre les parois pour faciliter la circulation si l'on doit y apporter du matériel d'exposition. La salle suivante, d'une superficie double, qui représente les « carrels » du plan primitif, constituera une salle de travail avec des rayonnages en pourtour et quelques-uns en épis déterminant des boxes, des tables individuelles, des sièges. De la sorte, elle serait dès qu'il le faudrait utilisable en salle spécialisée et permettrait de remanier la disposition de celles du rez-de-chaussée si une distribution nouvelle apparaissait souhaitable.

Malgré un plan primitif répondant à des conceptions aujourd'hui dépassées, les possibilités de transformations qui avaient cependant été ménagées dès l'origine et les modifications internes qui ont pu de la sorte être réalisées à temps, ont permis à la Bibliothèque de s'adapter assez bien au « bouleversement » des structures reconnu nécessaire, mais longtemps freiné par la modicité des ressources et que le IVe plan d'équipement devait permettre de réaliser.

En cas de nécessité, l'isolement du bâtiment permet d'envisager l'édification de salles ou de dépôts annexes. Nous ne bâtissons plus pour des siècles; à l'architecte ou à l'administrateur d'aujourd'hui, « l'usure rapide et l'évolution accélérée des programmes » interdisent de se proposer un tel but.

Terminée pour la rentrée de 1963-1964, la Bibliothèque a pu commencer à s'ouvrir au public le 12 novembre 1963; mais son emménagement et son utilisation devront suivre le rythme des mises en service successives des divers enseignements sur le campus. C'est ainsi que pendant l'année scolaire 1963-64, seuls ont fonctionné route de Chauvigny l'enseignement et les travaux pratiques de chimie et le laboratoire de physiologie animale. Ce sont donc les seuls ouvrages ressortissant à ces disciplines qui ont été mis en service lors de l'ouverture de la Bibliothèque. L'emménagement a franchi une seconde étape en juin et juillet 1964 avec la mise en place des fonds de physique, mathématiques et mécanique, préparés pour la rentrée 1964. L'installation terminale, pour les enseignements et par suite pour la Bibliothèque, comprendra les sciences biologiques et les sciences de la terre; elle ne peut guère être prévue avant la rentrée 1965.

Cette mise en place par paliers, si elle a pour le travail intérieur de graves inconvénients, obligeant de répartir le personnel entre la Section sciences et la Section centrale où fonctionnent encore plusieurs services relatifs au fonds scientifique, a du moins pour les usagers le grand avantage de ne pas entraver la consultation ou le prêt par les perturbations d'un déménagement massif. Le prêt ni la lecture sur place n'ont à aucun moment été suspendus à la Section centrale. Le prêt, au moins pour les usuels, a commencé à la Section sciences dès l'ouverture, l'emménagement ayant été effectué par petits transports dans les semaines précédentes.

La fréquentation au cours des premiers mois de fonctionnement partiel a accusé une progression encourageante malgré le nombre encore limité des ouvrages en service. Les lecteurs semblent apprécier la situation centrale de la Bibliothèque qui leur permet d'y venir travailler aisément entre les cours ou les travaux pratiques. Déjà ils profitent des facilités de consultation que leur offre la nouvelle organisation. L'initiation du public aux méthodes du classement systématique se fait plus aisément au bénéfice d'un petit nombre de lecteurs que dans une salle pléthorique et de nouvelles habitudes se créent rapidement parmi les usagers. La proximité de la résidence amènera nécessairement à la Section sciences des étudiants de toutes disciplines. Aussi un fonds de culture générale est-il en voie de constitution. Il permettra aux « scientifiques » de perfectionner leur formation générale, aux autres lecteurs de trouver sur place pour leur travail une annexe de la Section centrale, tant que celle-ci n'aura pas rejoint sur la route de Chauvigny la Section sciences.

Dans un proche avenir, en effet, la Faculté de droit et des sciences économiques ainsi que la Faculté des lettres et des sciences humaines viendront s'établir avec tous leurs services sur un nouveau campus à proximité du complexe scientifique actuel, qui n'en sera séparé que par la largeur de la route. Dans ce regroupement si souhaitable de la vie universitaire, la Section sciences aura joué dans son domaine propre un rôle de pionnier, modeste mais que nous voudrions efficace : souhaitant que des expériences de cette première section spécialisée - et de ses insuffisances mêmes - sortent des enseignements et des directives pour la réalisation plus accomplie des sections qui seront bientôt créées à ses côtés.

Illustration
Plan de masse du complexe scientifique universitaire de Poitiers