Nécrologie

Marie Guittet

D'une notice nécrologique consacrée à Mlle par M. Maurice Jusselin, archiviste honoraire d'Eure-et-Loir, nous extrayons les renseignements suivants :

Mlle Marie Guittet, bibliothécaire de Chartres, est décédée dans cette ville le 16 juin 1959, des suites d'une douloureuse maladie contre laquelle elle avait courageusement lutté pendant huit mois.

Née le 6 avril 1900 à Chartres même où son père exerçait la profession d'architecte, elle avait obtenu le brevet supérieur en 1917; elle travailla alors en qualité de secrétaire dans le cabinet de son père. En même temps, elle poursuit ses études secondaires, passe avec succès le baccalauréat et consacre ses moments de loisir à la préparation d'une licence de lettres classiques. Les cours de Charles Picard, qu'elle suit avec enthousiasme, sont à l'origine de son mémoire pour le diplôme d'études supérieures, consacré aux cratères à sujets figurés des types Borghèse, Pisan et de ceux des fouilles de Madhia.

Ses titres, une propension naturelle à diriger, à éduquer semblaient désigner Mlle Guittet pour le professorat mais, ayant dépassé la trentaine, elle ne pouvait plus entrer dans les cadres de l'enseignement, qui pourtant se révélait comme sa plus exacte vocation. Heureusement s'offrait à elle un autre champ d'action, celui des bibliothèques. En 1938, elle obtint le Diplôme technique de bibliothécaire et fut inscrite en 1939 sur la liste d'aptitude aux fonctions de bibliothécaire.

Aussi, quand en 194I, la municipalité de Chartres décida de recruter un bibliothécaire diplômé, la candidature de Mlle Guittet, que ses titres, joints à la considération dont jouissait sa famille, désignaient à ce poste, fut-elle acceptée.

Mlle Guittet se mit courageusement au travail; en 1942, elle organisait une exposition sur « Les Arts du livre à la bibliothèque de Chartres ». La destruction par les bombes et le feu de la Bibliothèque municipale, le 16 mai 1944, devait fournir à Mlle Guittet l'occasion de donner la preuve de ses qualités d'organisation. Dans l'hôtel que la Société archéologique venait de céder à la ville et qui était affecté à la bibliothèque, restaient plus de dix mille volumes d'histoire locale et régionale, mais dans les autres disciplines, tout était anéanti. Mlle Guittet réussit à rouvrir le dépôt au public dans les moindres délais, en même temps qu'elle s'appliquait à reconstituer les collections perdues, non point avec des trésors comparables à ceux qui faisaient l'ornement de l'Hôtel Montescot, mais avec des ouvrages répondant réellement aux besoins des lecteurs actuels.

De l'énorme travail accompli, des témoignages nombreux subsistent : plus de trente mille ouvrages classés sur les rayons, cent mille fiches auteurs et matières. Déjà s'annonçait le jour qui verrait s'achever l'œuvre de rénovation. L'emplacement du bâtiment neuf qui serait la bibliothèque était choisi, les plans étaient dressés, les crédits assurés : dans peu d'années aurait lieu l'inauguration, au cours de laquelle un juste hommage serait rendu aux efforts et aux mérites de Mlle Guittet. Le destin lui a refusé cette satisfaction.

Mlle Guittet laissera le souvenir d'une personnalité très attachante, joignant à une connaissance exacte des devoirs de la femme au foyer les attraits que procure la culture des arts d'agrément. Mais on ferait d'elle un portrait incomplet si on passait sous silence sa haute valeur morale, puisée dans sa foi chrétienne et qui attirait envers elle la plus respectueuse déférence. A ce titre, elle fut réellement un exemple. La foule recueillie qui se pressait à ses obsèques a prouvé combien elle était regrettée.