Les bibliothèques centrales de prêt en 1955

Suivant une tradition qui remonte aux Journées d'étude des bibliothèques centrales de prêt de décembre 1953, nous publions cette année encore les statistiques concernant l'activité de ces bibliothèques du 1er janvier au 31 décembre 1955. Les deux tableaux qui figurent dans le présent fascicule ont été établis de la même manière que ceux des années précédentes 1.

Un commentaire avait été joint aux dernières statistiques afin d'éclairer la disposition des tableaux et d'attirer l'attention sur certains des résultats obtenus. Au cours de l'année 1955, peu de modifications se sont produites dans l'organisation des bibliothèques centrales de prêt. En effet pour un grand nombre d'entre elles qui ravitaillent en livres la plupart des communes de moins de 15.000 habitants de leur département, il s'agit moins désormais d'étendre leur action que de faire un travail en profondeur. Aussi nous bornerons-nous à faire les quelques remarques que peut suggérer la lecture des deux tableaux ci-joints, nous attardant un peu plus longuement sur les résultats du prêt.

Tableau I.

La première constatation qu'il convient de faire c'est que, dans la plupart des départements, le nombre des communes et des dépôts desservis par le bibliobus (col. 3 et 4) s'est généralement accru de quelques unités. Cette augmentation est particulièrement sensible dans les cinq départements suivants :

L'insuffisance de crédits et, par conséquent, de livres est invoquée pour expliquer le ralentissement généralement observé (Aisne-Isère). Les bibliothèques centrales de prêt de l'Aisne et de la Moselle ont été contraintes de négliger des localités importantes qui auraient bénéficié d'un gros dépôt de livres. Le mot « saturation » est d'ailleurs utilisé à plusieurs reprises. Ainsi la Seine-et-Oise nous dit : « L'année 1955 a été pour la bibliothèque centrale de prêt une année de saturation. Nous atteignîmes péniblement le chiffre de 500 dépôts. Peu ou pas de prospection... Il nous apparaissait qu'il n'était pas sans danger d'augmenter au-delà de ce chiffre le nombre de nos dépôts tant que nos moyens techniques n'auraient pas été modifiés ». L'utilisation en 1956 d'un deuxième bibliobus permettra sans doute de résoudre en partie les difficultés rencontrées dans ce vaste département. En Haute-Garonne toutefois on espère pouvoir desservir entièrement le département à la fin de cette année.

Rappelons à ceux de nos lecteurs qui seraient peu familiarisés avec le fonctionnement de nos bibliothèques centrales de prêt que le nombre des dépôts de livres (col. 4) est ordinairement supérieur au nombre des communes desservies, les plus importantes d'entre elles bénéficiant en effet de plusieurs dépôts.

A l'exception de la bibliothèque des Deux-Sèvres qui a abandonné le bibliobus-caisses au profit du bibliobus-rayons 2, toutes les bibliothèques centrales de prêt ont continué à utiliser le même type de bibliobus (col. 5, 6, 7). Le nombre de tournées par semaine et de dépôts par tournée s'en trouve par suite fort peu modifié. Dans les Deux-Sèvres, on enregistre, comme il fallait s'y attendre, une augmentation du nombre des tournées et une baisse du nombre des dépôts. En Moselle, l'augmentation du nombre des communes desservies a entraîné une augmentation du nombre des tournées, soit souvent 5 par semaine.

Tableau II

Si nous considérons maintenant le nombre des volumes déposés au cours de 1955 dans chaque département, là encore nous constatons que l'apport du bibliobus s'accroît d'une manière constante. Dans l'Indre-et-Loire, l'Isère, la Marne, la Moselle, le Haut-Rhin, les Deux-Sèvres, cette augmentation est même de 10 à 32.000 volumes par rapport à l'année précédente. Ce dernier chiffre relevé dans les Deux-Sèvres s'explique par le fait que le bibliobus, on s'en souvient, n'avait pu fonctionner en 1954 que pendant le premier trimestre. La mise en marche d'un nouveau bibliobus a eu pour conséquence immédiate une circulation plus intense des livres. Dans les autres départements, l'accroissement du nombre des livres déposés est évidemment proportionnel à l'accroissement général du fonds. Il implique d'autre part une augmentation variant de 1 à 14 de la moyenne des livres déposés.

Dans la colonne 15 figurent les divers établissements où sont effectués les dépôts et leur nombre. La répartition n'a guère été modifiée mais là où de nombreux dépôts ont été créés, ils sont faits en majorité dans une école. Il suffira de constater que la Moselle, avec 62 nouveaux dépôts, et la Haute-Garonne, avec 32, comptent respectivement 51 et 29 écoles nouvellement desservies.

Sous la rubrique « divers » ont été groupés, comme l'an dernier, les dépôts consentis en grande partie à des groupements : établissements d'enseignement, colonies de vacances, établissements hospitaliers, maisons de repos, centres de rééducation, usines, etc...

En ce qui concerne le fonds de la bibliothèque, son développement est très inégal suivant les départements. Certaines bibliothèques donnent la priorité aux acquisitions de livres pour enfants (Bouches-du-Rhône, Haute-Garonne, Indre-et-Loire, Isère, Bas-Rhin, Seine-Maritime) d'autres à celles de documentaires(Aisne, où les achats de livres pour enfants et de documentaires sont à peu près équilibrés, Gironde, Seine-et-Oise). Ailleurs c'est la catégorie « romans » qui est généralement la mieux représentée.

Nous avons souvent insisté auprès des directeurs des bibliothèques centrales de prêt pour qu'ils nous fournissent des résultats chiffrés du prêt et plusieurs d'entre eux ont fait un réel effort pour nous donner sur ce point des renseignements, ce dont nous les remercions.

Ces renseignements, il faut bien le dire, sont loin d'être d'une exactitude rigoureuse pour la raison que nous avions déjà signalée l'an dernier : l'impossibilité d'obtenir de tous les dépositaires des statistiques. Et quand bien même tous les dépositaires fourniraient des statistiques, elles n'auraient encore qu'une valeur approximative. Car, comme l'indiquent bien souvent les directeurs des bibliothèques centrales de prêt, le dépositaire lui-même ne mentionne généralement pas les livres qu'il emprunte pour lui et pour sa famille. D'autre part, dans le Loir-et-Cher et le Tarn, on souligne que « les ouvrages d'enfants, souvent prêtés en classe, ne font pas toujours l'objet d'un enregistrement de prêt; les livres circulent souvent de mains en mains avant d'être rendus; ces prêts échappent au contrôle ». Cette remarque ne s'applique d'ailleurs pas uniquement aux livres pour enfants. Il faudrait pouvoir aussi tenir compte des ouvrages lus par toute une famille ou prêtés de voisin à voisin.

Il s'ensuit que les résultats sont partiels et, pour en tirer des conclusions, il nous faudrait au moins connaître le chiffre de la population des communes ayant effectivement fourni des statistiques.

Retenons toutefois le Tarn dont l'étude a porté sur 217 communes comptant 146.517 habitants et qui enregistre un pourcentage de lecteurs inscrits de 8,5 %, chiffre qu'il conviendrait d'ailleurs de multiplier par 2 ou même par 3.

La répartition des lecteurs par âges nous a été donnée par plusieurs bibliothèques. Dans le Rhône et dans le Tarn, on constate que les enfants d'âge scolaire constituent 42 % du total des lecteurs, ce qui confirme les observations faites antérieurement 3. Dans l'Hérault, cette proportion est légèrement inférieure (30 %) tandis qu'en Haute-Garonne elle atteint 48,5%. L'Indre-et-Loire dépasse même ce pourcentage.

Les adolescents sont beaucoup moins bien représentés : 16 % en Haute-Garonne et dans le Tarn, 10 % en Indre-et-Loire. Nous relevons d'ailleurs à ce propos des opinions quelque peu différentes. La directrice de la Bibliothèque centrale de prêt du Tarn fait la remarque suivante : « Les jeunes de 15 à 21 ans lisent plus que nous le supposons ». Nous lisons en revanche dans le rapport de la Bibliothèque centrale de prêt du Rhône : « Si l'on excepte les dépôts dans les Maisons de jeunes, dans de nombreuses communes les lecteurs de 15 à 25 ans ne lisent pas ou très peu. Dans d'autres, une vingtaine environ, les jeunes forment au contraire la majorité des lecteurs. » Quelle est la raison de ce contraste? Bien entendu la personnalité même du responsable. Enfin dans l'Indre-et-Loire, on note : « Malheureusement, lorsque les enfants ont quitté l'école, ils continuent rarement à emprunter des livres d'où la très faible proportion d'adolescents parmi nos lecteurs. »

Si, dans l'Isère, « on peut considérer que la totalité des enfants fréquentant les 515 écoles où existe un dépôt, sont des lecteurs... les résultats sont malheureusement moins satisfaisants lorsqu'il s'agit des adolescents et des adultes ». D'une manière générale, en effet, le nombre des enfants est plus élevé que celui des adultes. Toutefois le Tarn enregistre un pourcentage de lecteurs adultes égal à celui des enfants (42 %) tandis qu'en Haute-Garonne la proportion est de 35,5 % et en Indre-et-Loire de 26 % 4.

Si nous cherchons à savoir quelles sont les professions les mieux représentées parmi les lecteurs des bibliothèques centrales de prêt, nous nous trouvons en présence d'indications non chiffrées qui rendent impossible toute conclusion. Cependant le sondage effectué dans le Tarn, sur 217 communes desservies, a donné les résultats suivants : outre les 23 % d'enfants d'âge scolaire, on compte 24 % d'agriculteurs, 17 % d'ouvriers et artisans et 17 % de fonctionnaires, commerçants et divers.

Le nombre de volumes prêtés en 1955 permet de se rendre compte du coefficient d'utilisation des livres. Un lecteur lit en moyenne, en une année, 10 livres dans le Tarn, 13 dans le Loir-et-Cher, 15 dans l'Indre-et-Loire, 16 dans l'Hérault 5. Mais, alors que nous avons pu observer que les enfants étaient de meilleurs lecteurs que les adultes, les résultats du prêt montrent que les adultes lisent davantage que les enfants. Dans l'Indre-et-Loire 54 % du nombre total des prêts sont consentis aux adultes, 46 % aux enfants, dans le Loir-et-Cher la proportion est respectivement de 55 % et de 45 %; dans le Rhône et l'Ain, de 65 % et de 35 %. Une exception toutefois : la Moselle avec 45 % d'ouvrages prêtés aux adultes et 55 % aux enfants.

Que dire de la qualité des lectures? C'est généralement à une élévation du niveau des lectures qu'aboutissent les conclusions des directeurs des bibliothèques centrales de prêt. Cette observation a été faite notamment dans le Loir-et-Cher. Dans plusieurs départements où l'on a restreint, et même parfois supprimé, les dépôts de romans policiers et de romans sentimentaux faciles, le nombre des lecteurs n'en a pas pour autant diminué. Ainsi dans l'Aisne, « la suppression presque totale des romans sentimentaux n'a pas en tout cas entraîné la baisse que l'on pouvait craindre ». C'est qu'en effet, comme on nous l'indique dans le Tarn « l'orientation des lectures... est en partie liée à la composition du fonds... Les romans sentimentaux et faciles, les romans policiers donnent un pourcentage très faible de lecture, car nous en avons très peu. Lirait-on davantage si des concessions plus grandes étaient faites dans le choix des livres, sans doute, mais nous ne pensons pas que ce genre de facilité soit à rechercher pour une oeuvre de culture ». Même opinion en Moselle : « Si nous consentions à des concessions dans ce domaine, le nombre de prêts s'établirait à plusieurs centaines de milliers. C'est une raison de plus pour faire de la propagande pour les bons livres. »

Bien entendu, sans parler des romans, c'est toujours aux récits de voyage et, à un moindre degré, aux livres d'histoire contemporaine que vont les préférences des lecteurs. A ces ouvrages viennent se joindre parfois des livres d'art (Aisne, Haute-Garonne, Hérault, Loir-et-Cher). Le succès de la collection « Goût de notre temps » publiée chez Skira nous est signalé à trois reprises. On constatera que les documentaires suscitent parfois en Indre-et-Loire plus de demandes que les romans. En Haute-Garonne, « il arrive souvent que, l'intérêt des « histoires » faciles étant épuisé dans un dépôt donné, les lecteurs découvrent soudain l'attrait d'un documentaire. C'est tardivement, en général, au moment même du passage du bibliobus; on nous demande alors de laisser le livre qui fournit une longue carrière ». Enfin, dans le Rhône, en faisant la statistique des prêts dans les dépôts de toute catégorie, on s'aperçoit que « les romans et les ouvrages classés atteignent des moyennes à peu près semblables ».

Comment peut-on expliquer ce goût pour les documentaires si souvent délaissés? Le directeur de la Bibliothèque centrale de prêt de Moselle nous en fournit une raison : « Les récits d'histoire contemporaine concernant les deux guerres ont été plus lus que les ouvrages se rapportant à des époques antérieures. Mais ces derniers ont eu leurs adeptes parmi les lecteurs rebutés par l'hermétisme de trop de romans contemporains. C'est un fait : l'abus de l'analyse psychologique dans les romans pousse le lecteur vers des ouvrages où l'intrigue lui est livrée presque à l'état pur (ouvrage du genre Ceram : Des dieux, des tombeaux, des savants) ». Cette vérité, le lecteur, bien souvent la méconnait, confirme la bibliothécaire de la Haute-Garonne : « Un public ignorant encore à peu près tout du livre ne se doute pas qu'un roman contemporain français est beaucoup moins à sa portée souvent qu'un documentaire vivant et bien fait. C'est là qu'intervient au premier chef le rôle des dépositaires. »

Seconde raison du succès plus grand rencontré par le documentaire : il existe de plus en plus, dans cette série d'ouvrages, des livres bien faits et surtout agréablement illustrés. Même les ouvrages de sciences pures, appliquées et techniques sont souvent empruntés dans le Loir-et-Cher parce que « l'on publie maintenant sur ces sujets des livres bien illustrés avec des couvertures attrayantes ». De son côté, la directrice de la Bibliothèque centrale de prêt de l'Isère affirme : « La présence, dans tous nos envois, de volumes documentaires illustrés de photographies modifierait entièrement la proportion de lecteurs adultes qui se feraient inscrire dans les dépôts. Malheureusement le prix de tels ouvrages en limite les possibilités d'achat. »

Les livres d'agriculture sont également parmi les ouvrages documentaires les plus demandés. Dans le Tarn, le développement de l'enseignement agricole et la collaboration de la bibliothèque avec les Services agricoles et les instituteurs itinérants, chargés de l'enseignement agricole, ont eu pour conséquence un accroissement des prêts dans cette série. Et dans l'Hérault où onze centres de documentation rurale fonctionnent et où l'on prévoyait la création de six nouveaux centres avant octobre 1956, la bibliothèque centrale de prêt contribue dans une large mesure au fonctionnement de ces centres.

Mais le plus ou moins grand succès rencontré par les documentaires dépend aussi de la place que les bibliothécaires leur réservent dans leurs acquisitions. Il semble en effet que dans certaines bibliothèques la part faite aux documentaires soit très restreinte tandis que les romans et les livres pour enfants absorbent la majorité des crédits. Ceci d'ailleurs pour répondre aux vœux des lecteurs. Mais peut-être y aurait-il lieu de mieux équilibrer les deux catégories : romans et documentaires, et de montrer aux lecteurs que certains documentaires peuvent être aussi passionnants qu'un roman.

Il faut enfin parler de l'influence de la radio, du cinéma et même des bandes dessinées des journaux sur la lecture. En Haute-Garonne et en Indre-et-Loire, l'adaptation radiophonique du Comte de Monte-Cristo a provoqué un nombre de demandes « qui a dépassé toutes nos prévisions et toutes nos possibilités ». On peut faire la même remarque pour l'Histoire de France racontée à Juliette. En ce qui concerne l'influence du cinéma, il suffira de rappeler l'exemple de Don Camillo, de Le Rouge et le noir. En Haute-Garonne, on ajoute : « Dans les régions situées loin de Toulouse où les films sont présentés avec un certain retard, nous constatons la même influence; aidés par le dépositaire qui est souvent en même temps abonné à la cinémathèque départementale, nous arrivons à prêter, au moment où le film passe, Madame de, Goupil-mains-rouges. » Cependant en Indre-et-Loire, on constate que certains films n'ont suscité aucune demande, tel M. Ripois et la Némésis de Louis Hémon. On pourrait souhaiter que la radio et le cinéma, dont l'influence est certaine, puisse jouer un rôle plus grand en faveur d'œuvres de valeur.

Nouvelle venue parmi les moyens de diffusion, la télévision commence elle aussi à jouer un rôle en France. Une série d'expériences a été précisément faite en 1954, en partie dans l'Aisne. Dans plusieurs villages dotés de télé-clubs, les réactions du public ont fait l'objet d'une enquête dont les résultats ont été publiés en 1955 6. Or la Bibliothèque centrale de prêt de l'Aisne dépose des livres dans tous les villages de l'Aisne où fonctionne un télé-club, mais on n'a enregistré aucune influence des émissions télévisées, sur les demandes de lecteurs. « En règle générale, d'après l'expérience de villages où sévissent des postes de télévision, l'incidence sur la lecture est nette et parfaitement négative; lit-on dans le rapport. Ainsi à Serain, les chiffres de prêt d'adultes sont tombés de 200 à 70 depuis l'installation d'un poste chez un particulier... Cet exemple particulièrement net n'est malheureusement pas le seul. » Mais sans doute y a-t-il lieu d'attribuer à l'attrait toujours très vif qu'exerce la nouveauté cette désaffection du public pour le livre et on peut espérer que, cet attrait épuisé, les télé-spectateurs redeviendront des lecteurs.

Nous avons donc pu voir, d'après ce commentaire, que l'évolution des bibliothèques centrales de prêt si elle subissait actuellement un ralentissement bien naturel, n'en était pas moins satisfaisante et leurs progrès continus. Il faudrait se reporter deux ou trois ans en arrière pour être frappé des résultats obtenus. Citons simplement le Loir-et-Cher où en 1952 le nombre de livres déposés était de 44.496 et le nombre des livres prêtés 80.947; en 1955 ces nombres sont passés à 75.343 et à 210.113. Ainsi avec un peu de recul, on réalise mieux le chemin parcouru.

Nous nous sommes efforcés, cette année, de dégager quelques généralités sur le prêt des livres. Généralités en effet, puisqu'à maintes reprises, nous avons signalé l'imprécision de nos données. En ce domaine d'ailleurs, une simple interprétation des chiffres ne servirait à rien. Le facteur humain joue un rôle essentiel et il est difficilement contrôlable. Il a déjà été dit que la géographie humaine, la démographie et la sociologie conditionnent l'organisation d'un service de lecture publique 7. De même on enregistrera des variations sensibles selon que la région envisagée est purement agricole ou en partie industrielle, selon que les gros bourgs, possédant librairies et cinémas, sont nombreux ou bien qu'on a affaire à un éparpillement de petits hameaux isolés.

Facteur humain également, la présence de dépositaires actifs dirigeant parfois non seulement le dépôt de livres mais aussi un télé-club, un ciné-club ou un groupement de jeunes et qui transforment radicalement l'ambiance d'un dépôt tandis qu'ailleurs on attend le lecteur qui ne vient pas spontanément.

Enfin même si l'on s'en tient aux prêts de livres qui se traduit en chiffres concrets, peut-on en tirer des conclusions péremptoires? Un livre prêté n'est pas forcément un livre lu. Et d'autre part si nous relevons, parmi les auteurs demandés, les noms de Marcel Proust, Simone de Beauvoir, Jean-Paul Sartre, André Gide, Georges Bernanos ou Jean Giraudoux, cela ne signifie nullement que le niveau intellectuel, dans tel département, est très nettement supérieur. Encore faudrait-il savoir combien de fois ont été empruntés A la recherche du temps perdu ou Les Grands cimetières sous la lune. On peut craindre en effet qu'il ne s'agisse d'un emprunt isolé fait par tel instituteur, tel professeur retraité ou le médecin du village.

C'est pourquoi nous comprenons très bien les scrupules qu'éprouvent les directeurs des bibliothèques centrales de prêt lorsqu'on leur demande des éléments chiffrés. Bien souvent ils ne peuvent faire part que de leurs impressions, l'intuition jouant ici un plus grand rôle que les mathématiques. Néanmoins ces impressions sont loin d'être négligeables puisqu'elles permettent de se faire une idée de la « physionomie » du département et de donner à la bibliothèque une orientation qui soit conforme à cette physionomie.

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Tableau I

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Tableau II (1/2)

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Tableau II (2/2)

  1. (retour)↑  Voir : B. Inf. Dir. Bibl. France. 3e année, n° 1, janvier 1954, pp. 24-27. - B. Inf. Dir. Bibl. France. 4e année, n° 9, sept. 1955, pp. 248-262 et tabl. annexes.
    FRANCE. Bibliothèques (Direction). - Cahiers des bibliothèques de France. II. Lecture publique rurale et urbaine. - Paris, Bibliothèque nationale, 1955, pp. 257-259.
    Ont été en outre indiquées, à la suite du département, les dates de création des bibliothèques.
  2. (retour)↑  Pour l'explication de ces termes, on se reportera au « Manuel de la lecture publique rurale ».
  3. (retour)↑  Voir dans Les Cahiers des bibliothèques de France, le rapport sur « Le Bibliobus et l'école », pp. 162-187.
  4. (retour)↑  Il serait vain de vouloir établir une répartition par sexe. Car, suivant une observation relevée dans le rapport du Rhône, si les femmes sont plus nombreuses que les hommes parmi les lecteurs de la bibliothèque, cela ne signifie en aucune façon qu'elles lisent beaucoup plus que les hommes. Mais elles empruntent des livres pour toute leur famille.
  5. (retour)↑  Signalons que dans ce dernier département le prêt est consenti aux étudiants ce qui modifie quelque peu l'aspect du problème.
  6. (retour)↑  Dumazedier (Joseph). - Télévision et éducation populaire. - Paris, Unesco (1955). - 21,5 × 13,5, 283 p. [37 ill. en 18], pl., graph., cartes, front.
  7. (retour)↑  FRANCE. Bibliothèques (Direction). - Manuel de la lecture publique rurale en France. - Paris, Centre national de documentation pédagogique, pp. 11-13.