8e journée nationale RAMEAU

BnF – 15 novembre 2017

Thierry Clavel

Trois ans après la 7ème journée nationale RAMEAU, cette 8e édition 1 – associée cette année avec la journée Transition bibliographique du groupe Systèmes & données – a rencontré un vif succès : plus de 240 inscrits répartis entre le Petit auditorium de la BnF et une salle mitoyenne, venus principalement pour le thème central de la journée : la réforme de RAMEAU.

Illustration

Dans son introduction, Sylviane Tarsot-Gillery (directrice générale de la BnF) a mis en avant l’importance du travail collaboratif avec le réseau, axe stratégique fondamental pour le développement de RAMEAU. Elle a illustré son propos en annonçant que les journées RAMEAU allaient passer d’un rythme triennal à annuel. Pour Florence Ménard, responsable du Centre national RAMEAU (CNR), « RAMEAU est entré dans une nouvelle phase », passant d’une syntaxe précoordonnée, devenue inadaptée pour la recherche sur le Web et chronophage en terme d’indexation, à une logique entité/relation tournée vers le linked data.

Une activité orientée vers davantage de collaborations

La matinée était consacrée aux activités du CNR et aux données RAMEAU. Du bilan statistique relaté par Pierre Pouliquen (BnF/CNR), on retiendra quelques chiffres : tout d’abord, moins d’un quart des bibliothèques du réseau font des propositions. Avec environ 1 200 propositions RAMEAU annuelles en 2016 et 2017, la baisse brutale amorcée en 2016 se confirme. Par ailleurs, si la participation des bibliothèques du SUDOC est stable, celle de la BnF diminue, au point d’être dépassée par le réseau suisse RERO qui totalise à lui seul 23% des propositions en 2017. Cette baisse significative montre à quel point le réseau RAMEAU a besoin de la participation active de ses membres mais aussi d’étendre ses collaborations. Frédérique Hauville (BnF/CNR) présentait ensuite les chantiers d’intégration des caractères non latins (CNL) et des formes translittérées dans les notices RAMEAU. Ces travaux conséquents ont permis d’harmoniser les autorités RAMEAU avec les autres autorités BnF, et améliorent l’interopérabilité et la réutilisation des données du référentiel français par des catalogues dans d’autres langues.

Illustration
Notice RAMEAU enrichie par des formes en graphie non-latine et translittérées

Le bilan du programme de révision systématique du vocabulaire RAMEAU, 10 ans après son lancement, était présenté par Virginie Triboulin (BnF/CNR). Les chiffres sont impressionnants, surtout lorsqu’on sait que ce chantier toujours en cours est 100% humain : entre 2007 et 2017, 54 684 notices RAMEAU ont été revues, soit près de la moitié des noms communs. Ce travail réalisé par les experts du CNR intègre différents volets : refonte complète du domaine, révision et normalisation des notices, attribution d’un label qualité.

Enrichir et aligner ses données avec RAMEAU

La deuxième partie de la matinée, intitulée « Jouer avec les données RAMEAU », était introduite par Anila Angjeli (BnF, cheffe du projet de Fichier national d’entités).

Le projet LOTERRE (Linked Open TERminology REsources), dont le nouveau portail est prévu fin 2017, consiste en un « triplestore » (comprenez un entrepôt de données structurées en triplets RDF) où l’INIST proposera ses ressources dans le format SKOS (Simple Knowledge Organization System), sous licence ouverte (CC BY 4.0), avec des identifiants pérennes ARK (Archival Resource Key) et DOI (Digital object identifier). L’INIST et le CNR ont commencé une démarche d’enrichissement mutuel des référentiels RAMEAU et de la terminologie INIST (plus de 200 000 concepts). Les deux thématiques pilotes, taxonomie des poissons et thermodynamique, ont été présentées. À titre d’exemple, pour la catégorie poissons, sur 459 fichiers SKOS RAMEAU et INIST qui ont été comparés, 183 notions n’existaient pas dans la terminologie INIST. Julien Sempéré (Université Paris-Saclay) évoquait ensuite la « méthode du ficus » : identifier et utiliser l’existant pour lier les données du patrimoine scientifique avec RAMEAU. Un autre exemple d’enrichissement était présenté par Joseph Chantier (BnF) : plus de 40 000 notices d’un fonds ancien de médecine, contenant une cote Clément, ont été indexées de manière automatique avec RAMEAU et la classification Dewey, grâce à des alignements entre RAMEAU et la Cotation Clément. L’opération a en outre permis de valoriser ces collections en les rendant visibles sur Gallica et data.bnf.fr.

Un vocabulaire riche et fiable mais une syntaxe complexe

Nathalie Bourdeau (BnF/CNR) clôturait la matinée par un retour sur l’atelier collaboratif du 10 octobre 2017 qui réunissait usagers RAMEAU et membres du CNR. Les points positifs relevés sont la richesse, la structuration et la fiabilité du vocabulaire ainsi que sa facilité d’accès et la réactivité de l’équipe du CNR. Les principaux points négatifs sont le manque d’intuitivité du langage, sa syntaxe complexe ainsi que le manque de traçabilité de l’information dans les autorités. Parmi les évolutions souhaitées par les utilisateurs, signalons les alignements avec des thésaurus métier et la simplification de la syntaxe.

La réforme de RAMEAU : révolution et transition

Mandaté en 2016 par le Comité opérationnel RAMEAU, le groupe de travail sur la syntaxe RAMEAU a rendu son rapport final 2 en avril 2017. Le projet de réforme est basé sur ses recommandations.

Pour Vincent Boulet (BnF, responsable des autorités), RAMEAU a déjà atteint « une force de frappe du niveau des LCSH » (Library of Congress Subject Headings). C’est un outil qui doit maintenant tenir compte de la révolution informatique en cours, notamment du Web de données liées : abandonner la syntaxe pour aller vers une logique de liens entre entités mais aussi « embarquer dans le train de la transition bibliographique » et intégrer à terme le fichier national d’entités (FNE). A. Casanova (BnF) a pour sa part précisé à quoi ressemblerait RAMEAU « le jour d’après ». Le langage sera recentré sur les sujets noms communs (concepts et objets).

Illustration
Chantier de la syntaxe RAMEAU sur bnf.fr : http://rameau.bnf.fr/chantier_syntaxe/intro.html

Intégrer RAMEAU dans le programme transition bibliographique et l’aligner sur le modèle IFLA-LRM

Dans la perspective du FNE et d’un alignement sur le modèle IFLA-LRM, les notices RAMEAU seront réparties en quatre référentiels : genre et forme, lieux, temps et sujets. Les lieux seront ouverts à différents usages : indexation matière, informations biographiques ou d’édition, et seront enrichis : coordonnées géographiques, liens à d’autres vocabulaires (Geonames, Getty), tandis que le référentiel « temps » contiendra les ex-subdivisions chronologiques actuelles ainsi que les évènements et sera moins franco-centré qu’avant. Le référentiel « sujet » contiendra, quant à lui, les noms communs.

Illustration

La feuille de route était présentée par Olivier Rousseaux (ABES) : le projet devrait durer quatre ans, de 2017 à 2021. En 2018, on devrait voir publier le référentiel Genre/forme, et en 2019 la mise en œuvre du lissage terminologique et la suppression des listes de subdivisions par domaine. À terme, c’est la disparition des vedettes construites et de toute la syntaxe RAMEAU qui est annoncée. Quant aux changements de pratiques d’indexation, ils devraient être effectués par étapes, au fur et à mesure du calendrier, de la publication des référentiels spécifiques et de la documentation.

La thématique des formations RAMEAU était présentée par Armelle Thévenot (communauté d'agglomération de Marne et Gondoire) : à partir de 2019, les sessions de formation RAMEAU devraient s’inscrire dans la logique de la transition bibliographique dans un format probablement plus court qu’actuellement. Des formations de formateurs sont également à prévoir.

Étienne Cavalié (BnF) expliquait ensuite les conséquences pratiques de la refonte de RAMEAU, notamment la question essentielle de l’articulation des concepts entre eux dans un contexte sans précoordination : comment, par exemple, lier un évènement ou un lieu à une période puis transmettre correctement l’information aux machines ? Tout ceci devra être pensé, dans une approche plus globale, avec les projets menés parallèlement : Intermarc Nouvelle génération, Transition bibliographique et nouvel outil de production des métadonnées de la BnF.

Stéphanie Daligault (BnF) présentait ensuite les travaux sur le nouveau référentiel Genre/forme. Son périmètre inclut les autorités RAMEAU genre/forme ainsi que les différentes typologies utilisées par les départements spécialisés de la BnF : audiovisuel, cartes et plans, manuscrits, photographies.

Dernière intervenante « métier », Maria Nasilowska (BN Pologne), dans un français impeccable, nous a parlé de la réforme du langage d’indexation matière de la Bibliothèque nationale de Pologne, projet similaire à la refonte de RAMEAU pour ce qui est de l’abandon de la précoordination et du passage à des descripteurs post-coordonnés.

C’est à Sophie Mazens (ministère de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation) que revenait la conclusion de cette journée.