La mise en ligne des documents numérisés

Quels besoins et quelle offre en logiciels ?

Régis Dutremée

La journée d’étude organisée par Médiadix le 23 mai dernier, intitulée « La mise en ligne des documents numérisés : quels besoins et quelle offre en logiciels ? » a permis à un public important et représentant tous les secteurs de la profession (bibliothécaires, archivistes, documentalistes) de balayer les enjeux de la numérisation depuis la définition des besoins jusqu’au travail avec le prestataire. Des interventions, trop nombreuses pour être toutes reprises ici, ne seront rapportés que les éléments qui jalonnent l’ensemble de la problématique.

Dans son introduction, Thierry Claerr (Direction du livre et de la lecture) a rappelé que seulement 42 % des fonds numérisés par les bibliothèques municipales étaient en ligne, et que si, longtemps, la numérisation avait été valorisée comme outil de conservation, c’est surtout son rôle dans la diffusion pour la démocratisation des savoirs qui la rend incontournable, une fois les problèmes de droits levés.

Solutions techniques pour la gestion et la mise en ligne

Christian Ducharme (CD-Script) ne pouvant être présent, c’est Isabelle Westeel (bibliothèque municipale de Lille) qui a présenté le Powerpoint de ce dernier : « Comment mettre en ligne des documents numérisés ? Solutions techniques pour la gestion et la mise en ligne ». Il lui semble évident aujourd’hui que l’objectif premier de la numérisation est la diffusion, car la conservation numérique est incertaine et nécessitera une mutation de support régulièrement. Il a souhaité attirer l’attention de l’assistance sur le choix du public visé, en évitant une séparation arbitraire entre « grand public » et public spécialisé. En fonction de la consultation que l’on souhaite proposer, les trois grandes options sont : le texte intégral (BM de Lisieux), le feuilletage en mode image (Gallica), et le PDF océrisé apparu plus récemment et proposé de plus en plus pour la presse, comme sur le site Normannia. Ont été rappelés les objectifs, les formats, les modes de consultation et les outils de gestion. Christian Ducharme ne préconise pas l’acquisition d’un outil de gestion électronique de documents pour les bibliothèques, car ceux-ci sont trop lourds et ne correspondraient pas vraiment aux besoins. Il insiste sur l’intérêt de séparer les fonctions de gestion et de publication.

Attentes des bibliothèques pour la diffusion

Philippe Lévy (Six & Dix) a ensuite répondu à la question : « Quelles sont les attentes des bibliothèques pour la diffusion des documents numérisés ? » en partant des « constats à travers les cahiers des charges ». Fut présenté un panorama des différents cas de figure de mise en ligne de numérisations (documents nés numériques ou numérisés à partir d’un document traditionnel), et cela pour tous les types de documents : imprimés, audiovisuels, graphiques, manuscrits, pédagogiques, électroniques (bases de données, cédéroms…). Le questionnement que le consultant doit susciter porte, entre autres, sur l’origine (interne, commerciale, libre), le support et ses formats, ainsi que sur les droits d’accès souhaités (libre/restreint, gratuit/payant…). Son intervention fut l’occasion de rappeler les modalités de gestion et les outils correspondant aux différents besoins (importation en masse et traitement par lot, extraction automatique des métadonnées, stockage et indexation, type de navigation…). Les avantages de la gestion d’inventaire en EAD (Encoded Archival Description) ont été rappelés, ainsi que les freins au développement de la numérisation en ligne : aspects juridiques, coûts, travail d’indexation, limites des progiciels et manque de conviction des décideurs.

Les promesses du web 2.0

La table ronde « Les promesses du web 2.0 pour la consultation des documents numérisés », modérée par Isabelle Rouquet (Médiadix) et Vincent Giolito (Plusnews.fr), réunissait, entre autres, Emmanuelle Bermès (Bibliothèque nationale de France) pour l’exemple de la maquette Europeana, et Valérie Néouze (Sous-direction des bibliothèques et de l’information scientifique) pour Persée. Ce fut l’occasion de rappeler les grands apports attribués au web 2.0 dans ses dimensions sociales, architecturales et techniques, ainsi que les applications concrètes auxquelles on l’identifie : blogs, RSS, wikis, tagging… Selon la formule consacrée, le web 2.0 permet l’échange « all to all » là où le web 1.0 se déclinait prioritairement « one to all ». Emmanuelle Bermès a présenté les prochaines fonctionnalités d’Europeana (tags, RSS, espace de travail…) et la manière dont elles ont été testées auprès des usagers, ce qui est particulièrement important pour toutes les fonctions interactives comme l’a enseigné l’expérience de Persée dans sa première version où des fonctions du web 2.0 n’avaient pas trouvé leur public. Emmanuelle Bermès a relevé l’impact de la bibliothèque numérique sur le métier, car cette dernière ne peut exister simplement à côté de la bibliothèque traditionnelle. Elle suscite une exigence accrue au niveau du service public en même temps qu’un repositionnement dans l’accès au document.

L’intervention d’Alexis Monville (Programme Adele, Direction générale de la modernisation de l’État), qui a brillamment plaidé la cause du logiciel libre en mettant en avant son rôle dans la modernisation de l’État, a été particulièrement écoutée, tout comme celle de François Houste (LSF Network), chargé de dévoiler les arcanes de la visibilité d’une bibliothèque numérique sur internet. Objectif final évidemment attendu tant l’accès via les moteurs de recherche est indispensable, mais que certaines technologies compromettent néanmoins : animation flash, Ajax, JavaScript…