Bibliothèques et documents numériques

concepts, composantes, techniques et enjeux

par Catherine Cyrot

Alain Jacquesson

Alexis Rivier

Nouvelle édition. – Paris : Éd. du Cercle de la librairie, 2005. – 573 p. ; 24 cm. – (Bibliothèques).
ISBN 2-7654-0915-3 42 €

Réédition refondue et mise à jour de l’ouvrage de référence paru en 1999 au Cercle de la librairie, l’ouvrage d’Alain Jacquesson et Alexis Rivier, Bibliothèques et documents numériques, traduit le souci d’en resituer les évolutions majeures dans une perspective plus longue. Le tout nouveau chapitre sur les fondements historiques des documents numériques retrace l’évolution très rapide, mais aussi rappelle les expériences préalables, souvent largement oubliées, qui ont posé les prémices des développements actuels. Témoignent aussi de cette réflexion, les développements sur la notion de document revisitée, ou les péripéties de l’e-book. Cet ouvrage suit au plus près l’actualité, comme en témoignent la place attribuée à XML et les recherches sur les textes scannés. Enfin dans le souci pédagogique d’aider les bibliothécaires dans leur choix sur des notions parfois peu familières, des encarts techniques complètent cette approche pédagogique avec un rappel terminologique sur les normes ou les outils sous-jacents.

Un panorama complet et actualisé

Dans la partie sur la création des documents numériques, l’ouvrage présente un panorama très large de ces derniers. Les développements sur les périodiques électroniques dans le monde de l’enseignement et de la recherche sont très complets, les usages grand public indiqués seulement pour mémoire. Après une introduction un peu rapide sur la normalisation (TEI, par exemple), l’ouvrage recense les grands projets de numérisation des textes, ce qui fournit au lecteur un point de départ pour les explorer plus avant. Enfin un chapitre nouveau par rapport à l’édition précédente est consacré au secteur en plein développement des thèses électroniques. Là encore, de nombreuses expériences enrichissent la réflexion.

Le chapitre sur la numérisation des collections anciennes est un peu court, et c’était peut-être une gageure de l’aborder si rapidement. On retrouvera dans le chapitre sur les collections spécialisées des éclairages plus spécifiques qui complètent cette approche, notamment sur les collections iconographiques, les cartes et plans ou les manuscrits. Le traitement des documents multimédias est éclaté dans les différents chapitres, ce qui rend plus difficile une vision globale de cette problématique spécifique.

La troisième partie traite des bibliothèques face aux documents numériques. Après une introduction rapide sur les moteurs de recherche, les répertoires, les méta-moteurs, l’auteur met en exergue des outils spécialisés moins connus dans le domaine de la recherche et le développement de nouveaux outils liés à l’open access. Avec la mise à disposition des bibliothèques numériques, on est au cœur de la problématique de l’ouvrage avec des réflexions approfondies sur la structure des documents, la granularité de l’information et l’organisation des accès. Cette réflexion se poursuit au chapitre suivant avec le traitement bibliographique des documents numériques : les méthodes d’identification du document, l’évolution des normes ISBD et Marc, le rôle des métadonnées posent bien les problématiques du traitement du document numérique en bibliothèque. La réflexion sur les portails de bibliothèques resitue rapidement les accès dans une problématique plus globale. Le chapitre sur les nouvelles méthodes de lecture est plus une ouverture sur des problématiques à approfondir, pour les bibliothécaires intéressés par ces nouvelles recherches, qu’une présentation des développements en cours.

En terrain mouvant

À partir de l’étude menée par le Council of Library and Information Resources en 1994, toujours d’actualité, le chapitre sur la préservation des documents pose les fondamentaux des problématiques d’archivage, sans apporter encore de solutions aux questions auxquelles personne à ce jour ne peut répondre : durée de vie des supports, accessibilité des contenus, variabilité et volatilité de l’information numérique. L’exemple de JSTOR (Journal Storage) préfigure bien les évolutions à venir pour la préservation des documents numériques.

On reste un peu sur sa faim en lisant le nouveau chapitre sur les archives ouvertes, même si l’auteur insiste sur la difficulté d’avoir une vue d’ensemble dans un secteur aussi mouvant. Après avoir rappelé en préambule les initiatives de Budapest et Berlin, il présente les initiatives PLoS (Public Library of Science) et Sparc (Scholarly Publishing and Academic Resources Coalition ) et le rôle des licences Creative Commons, il souligne le problème fondamental : l’accès aux documents y dépend entièrement du bon vouloir du fournisseur de données. On relira à ce propos l’ouvrage collectif : Les archives ouvertes : enjeux et pratiques, publié par l’ADBS en 2005 *.

Cet ouvrage présente un panorama complet des bibliothèques numériques ; il approfondit bien certaines problématiques comme le traitement bibliothéconomique des documents numériques, et propose de nombreuses applications pour les bibliothécaires soucieux de trouver des exemples significatifs. Certains de ces développements nécessiteraient un livre à eux tout seuls, mais c’est le pari de cet ouvrage de couvrir l’ensemble des problématiques du document numérique, quitte à être parfois un peu rapide. Les lecteurs se reporteront à la bibliographie annexée à chaque chapitre, ou aux indications bibliographiques commentées dans le corps du texte pour approfondir tel ou tel aspect : cahier des charges pour la numérisation, ou archives ouvertes par exemple.

Le livre d’Alain Jacquesson et Alexis Rivier resitue les paradigmes du document numérique dans la pratique professionnelle des bibliothécaires et leur donne de nombreuses pistes pour approfondir les problématiques ébauchées, à partir d’une explicitation des enjeux et de la présentation des principales techniques utilisées. La clarté de ses exposés et le souci de mettre à la disposition de tous les professionnels des problématiques souvent complexes à appréhender font partie de ses principales qualités.

  1. (retour)↑  Voir la critique d’Yves Desrichard dans le BBF, 2005, no 6.