La bibliothèque scientifique centrale Vernadsky à Kiev

Les collections françaises

Raïssa Kyrytchenko

Fondée en 1918, la Bibliothèque scientifique centrale Vernadsky est l'une des dix plus grandes bibliothèques du monde et la plus importante bibliothèque scientifique d'Ukraine par la taille et la richesse de ses fonds. Après une présentation historique de la bibliothèque et de la constitution des fonds, l'auteur dresse un tableau des fonds français qu'elle possède : manuscrits, livres anciens, éditions rares, estampes et fonds musicaux...

Founded in 1918, the Vernadsky scientific central library is one of the biggest libraries in the world and the most important scientific library in Ukraine by its size and the abundance of its collections. After a historical presentation of the library and of the constitution of its holdings, the author draws up a picture of the French collections it has in its possession : manuscripts, old books, rare editions, engravings, etc.

Die 1918 gegründete zentrale wissenschafliche Bibliothek Vernadsky ist eine der zehn größten Bibliotheken in der Welt und die erste wissenschaftliche Bibliothek in Ukraine, wenn man die Wichtigkeit und den Reichtum ihrer Sammlungen betrachtet. Nachdem die Bibliothek selbst und die Bildung ihrer Sammlungen in der Geschichte vorgestellt werden, beschreibt die Verfasserin deren französischen Bestand: Handschriften, alte Bücher, seltene Auflagen, Graphik und Musik...

L’Ukraine d’aujourd’hui compte plus de 50 000 bibliothèques – publiques, universitaires, scientifiques, régionales, d’État, pour enfants, et notamment la Bibliothèque parlementaire nationale d’Ukraine, la Bibliothèque scientifique centrale Vernadsky, la Bibliothèque historique d’État, la Bibliothèque scientifique de l’université Tarass Chevtchenko de Kiev, la Bibliothèque scientifique de médecine, etc.

La première bibliothèque de Russie fut fondée au XIe siècle par le grand duc de Kiev, Iaroslav le Sage. Dans le courant de ce même siècle, la bibliothèque de la Kievo-Petcherskaïa Lavra (la Laure de Kiev, ou monastère des Cryptes) était le centre culturel de la Russie. Le moine Nestor y écrivit sa célèbre Chronique, première grande œuvre littéraire, et source inépuisable de connaissance sur le passé.

La bibliothèque de l’Académie Kievo-Moguelanskaïa, premier établissement d’enseignement en Ukraine et en Europe orientale et grand centre culturel et scientifique aux XVIIe et XVIIIe siècles, possède une collection de renommée mondiale. La plus grande partie de ses fonds est conservée à la Bibliothèque scientifique centrale (BSC) Vernadsky, de l’Académie nationale des sciences d’Ukraine.

La Bibliothèque scientifique centrale Vernadsky

La Bibliothèque scientifique centrale Vernadsky est l’une des dix plus grandes bibliothèques du monde et la plus importante bibliothèque scientifique d’Ukraine par la taille et la richesse de ses fonds. Fondée en 1918 avec le statut de bibliothèque nationale, elle porte le nom du premier président de l’Académie, Volodymyr Ivanovytch Vernadsky, son fondateur.

Avec un fonds de douze millions d’ouvrages (dont plus de deux millions en langues étrangères), 200 000 entrées nouvelles chaque année (dont 75 000 livres en langues étrangères), elle est devenue le plus grand centre scientifique du pays. Y sont conservés les documents les plus variés : imprimés, manuscrits, cartes et plans, estampes, musique, etc. Le système du dépôt légal n’a cessé de l’enrichir en développant en particulier les collections de sciences humaines, naturelles, et techniques.

La BSC est aussi un centre de recherche scientifique sur le livre, sa conservation, son histoire, ainsi qu’un lieu d’échanges, de prêt, un service d’information et un centre de coopération internationale dans le domaine de la bibliothéconomie.

Organisation

La BSC dispose de cinq instituts (bibliothéconomie, livre ukrainien, manuscrits, recherches bibliographiques, archives), de plusieurs départements (bibliographie nationale, livres rares et anciens, collections historiques et de bibliothèques, entrées étrangères et nationales, etc.), de trois centres (le centre culturel, le centre des sciences de l’information et des bibliothèques, le centre de rédaction et d’édition). Des salles de lecture (périodiques, sciences humaines, sciences naturelles et techniques, etc.) sont à la disposition du public. La bibliothèque autrichienne est une bibliothèque dans la bibliothèque.

La BSC est aussi l’unique dépositaire des publications de l’Organisation des Nations Unies en Ukraine, avec un fonds de plus de 500 000 volumes. Elle assure l’édition d’ouvrages à partir de ses fonds : un annuaire d’information La science en Ukraine, des catalogues – parmi lesquels le catalogue collectif Périodiques étrangers conservés à la BSC et dans les bibliothèques spécialisées des instituts de l’ANS d’Ukraine de 1665 à 1990, un index annoté Périodiques étrangers de l’industrie du livre dans les fonds des bibliothèques spécialisées de l’Académie des sciences d’Ukraine (1985). Depuis 1993, paraît Bibliotetchny Visnyk, une revue scientifique théorique et pratique (histoire des bibliothèques d’Ukraine et du monde, histoire des collections, formation professionnelle, bibliothéconomie, etc.).

Depuis 1989, elle est installée dans un immeuble moderne de vingt-sept étages, où près de mille places, réparties en treize salles, sont offertes aux 50 000 lecteurs inscrits.

Les fonds précieux

Les fonds les plus précieux sont restés dans l’ancien bâtiment, non loin de la cathédrale Sainte-Sophie. Constitués à partir de la collection privée de l’historien du XIXe siècle Markevytch (plus de 10 000 volumes), de celles du premier lycée de Kiev, de l’université impériale Saint-Vladimir de Kiev, de l’Académie religieuse de Kiev, de la Kievo-Petcherskaïa Lavra, des églises, des couvents, des collections privées des comtes lithuaniens Chreptovytchy, Mikochevsky, Jablonovsky, Mochynsky, ils proviennent aussi de bibliothèques privées de savants et d’écrivains (Kostomarov, Krymsky, Grave, Ijakevytch, etc.), et de l’acquisition de collections privées.

Manuscrits, livres anciens et éditions rares

L’Institut des manuscrits compte 400 000 documents – des textes en langues slaves (fin du XVe et XVIe siècles), en grec, en latin, en français, en arabe –, et une collection de papyrus, des lettres originales d’écrivains et de scientifiques d’Ukraine et d’Europe. Un fonds de manuscrits français particulièrement précieux y est conservé.

Le Département du livre ancien et des éditions rares possède plus de 30 000 documents – incunables (livres imprimés avant 1500), « paléotypes » (livres imprimés de 1501 à 1550), auteurs de l’Antiquité, du Moyen Age et de la Renaissance (slaves, latins, français, allemands, etc.). On y trouve environ 1 300 volumes en langue française publiés en France, en Suisse, et aux Pays-Bas, ainsi que le plus important fonds ukrainien d’imprimés anciens, parmi lesquels Apostol (le Livre des Apôtres, de 1574) d’Ivan Fedorov, Ostrojskaja Biblia (la Bible d’Ostrog), et la plus grande collection de livres en caractères cyrilliques (7 000 volumes).

Plus de 500 incunables, dont plusieurs sont de renommée mondiale et proviennent de maisons d’éditions célèbres en Europe, alimentent ce fonds (éditions aldines, stéphaniennes, elzéviriennes).

La BSC possède plus de 2 500 « paléotypes ». Une riche collection de la première moitié du XVIe siècle réunit des œuvres des réformateurs, d’humanistes européens, comme Guillaume Budé, Érasme, les Estienne, famille d’humanistes, imprimeurs et éditeurs français, ou Politien, poète et humaniste italien.

On y trouve aussi des œuvres d’Aristote, Héraclite, Hérodote, Homère, Tite-Live, etc. ; des œuvres d’écrivains français du XVIIe siècle et du siècle des Lumières – La Fontaine, Racine, Montesquieu, Voltaire, Rousseau, Condillac, Beaumarchais, etc., ainsi que deux éditions françaises consacrées à l’histoire de l’Ukraine 1.

Le fonds précieux en langues européennes

Le Département des collections historiques et des bibliothèques possède un important fonds précieux d’ouvrages en langues européennes – plus de trois millions de volumes – dont près de 70 000 en français. Ces ouvrages, qui vont du XVIe au XXe siècles, sont des références dans le développement de la culture ukrainienne et des cultures européennes, particulièrement de la culture française.

Ils faisaient partie des fonds de la bibliothèque de l’université impériale Saint-Vladimir de Kiev, de la collection privée du dernier roi polonais S. A. Poniatowsky, de la bibliothèque de l’Académie religieuse de Kiev, de la bibliothèque de l’Académie de médecine chirurgicale de Vilnius, du lycée de Kremenets (en Volhynie), de collections privées...

Estampes et fonds musicaux

La section des estampes et reproductions possède de nombreux ouvrages français (livres, albums, gravures, reproductions, photographies, dessins). Des œuvres de compositeurs français sont conservées dans le fonds des partitions et des éditions musicales. On peut y trouver le catalogue alphabétique et thématique d’œuvres musicales ayant appartenu au comte Alexei G. Razoumovsky (XVIIIe-XIXe siècles), et des œuvres de compositeurs français – Berton, Boïeldieu, d’Alayrac, Barrier, etc.

Les échanges internationaux

La BSC entretient des relations d’échanges internationaux de livres et de périodiques avec 1 502 institutions culturelles et scientifiques dans 73 pays.

A partir de 1927, ont commencé des échanges avec des bibliothèques et des grandes institutions scientifiques et culturelles françaises 2. Fondé en 1934, le Service des échanges internationaux a été réorganisé deux ans plus tard en Département des entrées étrangères. Jusqu’à fin 1940, les échanges, source principale d’enrichissement du fonds étranger, ont été assurés avec 1 700 organisations dans 51 pays.

En 1939, le gouvernement français a fait un don exceptionnel d’environ 1 000 ouvrages – encyclopédies, ouvrages de référence, anthologies littéraires, revues scientifiques, ouvrages du siècle des Lumières, et d’écrivains français tels Flaubert, Aragon...

Après la Seconde Guerre mondiale, les échanges ont repris avec la Bibliothèque nationale, l’Institut de France, l’Académie des sciences et d’autres institutions. Dans les années 60, les échanges avec le CNRS et le Centre de recherches nucléaires étaient très étroits et efficaces.

Aujourd’hui, la BSC effectue des échanges avec 81 partenaires en France (bibliothèques, sociétés savantes, universités, instituts scientifiques) 3. Les périodiques français constituent un ensemble de journaux et de revues scientifiques des XVIIIe et XXe siècles en sciences humaines, sociales et naturelles 4. De 1990 à 1994, la BSC a reçu par échange avec la France plus de 7 000 livres et périodiques 5. Ces fonds et ceux des bibliothèques spécialisées des instituts de l’académie nationale des sciences ont été complétés par l’acquisition de revues et de journaux français – en 1995, plus de cinquante abonnements ont été souscrits 6.

Les expositions

Pour la première fois, au mois de mars 1995, a eu lieu une exposition de livres français, grande manifestation franco-ukrainienne, à l’initiative de l’Ambassade de France en Ukraine, de l’Institut français d’Ukraine et de la BSC. Les 1 300 ouvrages français présentés – provenant d’environ cent maisons d’édition françaises – ont été offerts par le ministère des Affaires étrangères français, la BNF et la Maison des sciences de l’homme.

Ces dons exceptionnels traduisent la volonté du gouvernement et des grandes institutions culturelles français de nouer des relations suivies avec l’Ukraine afin de développer des échanges intellectuels entre les deux pays. Et, de plus en plus souvent, le Centre culturel de la BSC propose, avec le concours de l’Institut français d’Ukraine, des expositions artistiques (livres, photographies, etc.), des soirées musicales, ou des semaines du cinéma français...

Mars 1996

Illustration
Quelques exemples d'ouvrages des collections françaises

  1. (retour)↑  Beauplan, Guillaume Le Vasseur, Description d’Ukranie, qui sont plusieurs provinces du royaume de Pologne, contenues depuis les confins de la Moscovie, jusqu’aux limites de la Transilvanie… Ensemble, leurs mœurs, façons de vivre et de faire la guerre, par le sieur de Beauplan, Rouen, J. Cailloüé, 1660. Annales de la Petite-Russie ou Histoire des cosaques-saporogues et des cosaques de l’Ukraine... ; traduites d’après les manuscrits conservés à Kiev, enrichies de notes, par Jean-Benoît Scherer, t. II, Paris, Cuchet Libraire, 1788.
  2. (retour)↑  Institut d’études slaves de l’université de Strasbourg, Institut des langues orientales, Institut de France, Académie des sciences, Bibliothèque nationale, Université de Paris à la Sorbonne.
  3. (retour)↑  Dont la Bibliothèque nationale de France, l’Académie d’agriculture, l’Académie des sciences morales et politiques, l’université de la Sorbonne, L’INIST-CNRS, l’Institut d’études slaves, l’Institut de France, l’Académie des sciences, l’Institut Pasteur, l’École des langues orientales, la Société mathématique de France, le Muséum national d’histoire naturelle, l’École des hautes études en sciences sociales…
  4. (retour)↑  Almanach de Paris (1858-67), Annales de l’agriculture française (1852-70), Annales des mines (1857-1975), Revue archéologique (1844-1992), Revue d’histoire littéraire de la France (1895-1990), Annales de l’Institut Henri Poincaré (1935-1995), etc.
  5. (retour)↑  Le Bulletin des bibliothèques de France, Céramique moderne, Économie et politique, Femme pratique, Livres de France, Bibliographie nationale française, Populations, Art et décoration, Annales de limnologie, etc.
  6. (retour)↑  Dont l’Annuaire de l’art international, Décoration internationale, Défense nationale, L’Express, Le Figaro, L’Humanité-Dimanche, Folklore de France, Le Monde, Paris-Match, Revue du Louvre et des musées de France, etc.