Les fonctions des personnels des bibliothèques universitaires

Une enquête

Éric Simonetti

Cet article présente les résultats d'une enquête sur les fonctions des personnels des bibliothèques universitaires qui met en évidence l'incidence, en terme d'encadrement, de la discipline desservie par l'unité documentaire. Pour une grande partie d'entre elles, les bibliothèques universitaires peuvent ainsi être considérées, au regard de leurs ressources humaines, comme un regroupement d'unités documentaires desservant un champ disciplinaire unique.

This article presents the results of an inquiry into the functions of university library personnel which shows the effect, in terms of staffing, of the discipline served by the documentary unit. For the most part, university libraries can be considered, with regard to their human resources, as a regrouping of documentary units serving a unique disciplinary field.

Dieser Aufsatz stellt die Ergebnisse einer Untersuchung über die Funktionen des Personals in Universitätsbibliotheken dar und zeigt die personellen Rückwirkungen ausgehend von der Dokumentations-abteilung auf den angestammten Arbeitsbereich. Eine große Zahl von Universitätsbibliotheken kann so in Bezug auf das Personal als ein Zusammenschluß von Dokumentationseinheiten gesehen werden, die eine gewisse Disziplin betreuen.

L’enquête sur les fonctions des personnels des bibliothèques universitaires s’inscrit dans un mouvement plus large d’élaboration d’outils de gestion, d’évaluation et de dialogue communs aux bibliothèques, aux directions de l’administration centrale et aux établissements universitaires, dont elle constitue une étape importante 1.

En effet, on dispose aujourd’hui, notamment dans le cadre de l’enquête régulière ESGBU (Enquête statistique générale auprès des bibliothèques universitaires, dont les principaux résultats donnent lieu à la publication d’un Annuaire des bibliothèques) d’une connaissance fine (qui reste à approfondir pour les nouveaux métiers et nouveaux services) de l’activité des bibliothèques. La démarche évaluative implique, en préalable, de rapporter les éléments décrivant cette activité à des informations décrivant les ressources mobilisées pour l’accomplir.

Les ressources humaines, dans leur totalité, représentent la plus grande part, quantitativement et qualitativement, des ressources sur lesquelles s’appuie l’activité des bibliothèques : il importe donc d’en avoir une connaissance précise et exhaustive, ce que ne permet pas le simple rapprochement des outils de gestion des personnels, du fait de la diversité des statuts, des modes de financement et des niveaux de décision.

La connaissance de l’affectation de ces ressources humaines aux différentes fonctions accomplies doit en outre permettre :

– d’une part, d’introduire une dimension gestionnaire et opérationnelle en confrontant activité et moyens sur des segments circonscrits de l’activité ;

– d’autre part, de prendre en compte, en fonction des spécificités de chaque bibliothèque, l’équilibre entre les différentes missions qui lui incombent.

La méthode

L’enquête est un recensement exhaustif, en équivalents temps plein des ressources humaines de la bibliothèque (et de chacune de ses unités d’organisation – le plus couramment les sections –, de façon à prendre en compte l’organisation de la bibliothèque et à rechercher l’influence éventuelle de paramètres mieux définis à l’échelle des unités, au premier chef, les disciplines desservies), selon trois dimensions.

La première de ces dimensions concerne l’affectation aux différentes fonctions. Ont été définies huit fonctions bibliothéconomiques opérationnelles : la constitution des collections, le traitement documentaire, la conservation des collections, l’accueil et l’information des usagers, la formation, l’assistance documentaire, la communication de documents, les prêts entre bibliothèques et cinq fonctions support : la valorisation des collections, l’informatique documentaire, la direction d’unité documentaire, l’administration générale, les tâches d’intérêt collectif.

La deuxième dimension concerne le mode de financement de l’emploi (pouvant correspondre au statut des personnes) et la troisième la catégorie, en référence aux catégories de la fonction publique.

L’enquête permet, pour chaque unité d’organisation, un croisement de ces trois dimensions.

Les bibliothèques universitaires

4 730 équivalents temps plein ont été recensés, à la date du 1er décembre 1996, dans les 95 bibliothèques participant à l’enquête. Ils se répartissent ainsi :

– par fonctions : 18 % sont affectés aux fonctions de direction et d’administration, 4 % aux autres fonctions support et 78 % aux fonctions bibliothéconomiques. Ces dernières se répartissent ainsi : 23 % pour la communication de documents, 20 % pour la conservation des collections, 17 % pour le traitement documentaire, 13 % pour l’accueil et l’information, 11 % pour la constitution des collections, 8 % pour le prêt entre bibliothèques, 6 % pour l’assistance documentaire et 2 % pour la formation.

– par catégories : 17 % relèvent de la catégorie A, 22 % de la catégorie B, 61 % de la catégorie C.

Ce pyramidage est sensiblement différent selon les fonctions et distingue les fonctions les plus qualifiées (constitution des collections, formation, assistance documentaire, avec respectivement 51 %, 62 % et 45 % de catégories A) des autres fonctions (conservation des collections, communication de documents, avec respectivement : 87 % et 93 % de catégories C).

– par mode de financement : 59 % des ressources humaines recensées relèvent de la filière des bibliothèques ; 21 % sont des statutaires et contractuels de l’État hors filière des bibliothèques ; 8 % sont financés par le budget de la bibliothèque et de l’université. Plus de 8 % correspondent à des mesures d’insertion professionnelle (CES essentiellement).

Lorsque l’on compare les bibliothèques, on observe :

– une extrême diversité des poids des différentes fonctions. Cela va, par exemple, de 5 à 27 % pour la fonction « traitement documentaire », de 7 à 46 % pour la fonction « communication de documents » ;

– une grande diversité des pyramidages, qui va, par exemple, de 10 à 38 % pour les catégories A, de 32 à 81 % pour les catégories C ;

– une relative régularité des modes de financement principaux ;

– mais un recours très différent aux mesures d’insertion : de 0 à 30 %.

L’échantillon observé est, il est vrai, peu homogène (bibliothèques de taille – en collections et nombre de lecteurs inscrits – de vocation et d’ancienneté de création fort différentes).

La recherche de corrélations linéaires a été conduite sur les principales caractéristiques des bibliothèques :

– nombre de lecteurs ; taille de la collection ; disciplines et cycles desservis ; nombre de sites physiques ; nombre d’unités effectuant du service public ; proportion de la collection en libre accès ;

– proportion des ressources humaines affectées aux différentes fonctions ; proportion des différentes catégories de personnels ;

– ratios généraux : nombre de lecteurs inscrits par ressources humaines et taille de la collection par ressources humaines.

Cette recherche permet d’avancer, à l’échelle des bibliothèques, les conclusions suivantes : d’une part, les ratios lecteurs inscrits par équivalents temps plein et taille de la collection par équivalents temps plein croissent respectivement avec le nombre de lecteurs et la taille de la collection. Ce résultat traduit globalement un effet de taille attendu.

D’autre part, ni les répartitions du lectorat par disciplines ou par cycles, ni aucune autre des caractéristiques étudiées (nombre de lecteurs, taille des collections, nombre de sites…) ne semblent jouer de rôle déterminant dans l’explication de la diversité observée en termes de dotation, de répartition par fonction et de pyramidage des ressources humaines.

Ainsi, ces résultats, à l’échelle des bibliothèques, ne permettent pas de construire une typologie en termes de ressources humaines.

Les unités documentaires

L’échec de la démarche à l’échelle des bibliothèques a conduit à étudier les caractéristiques des unités documentaires. Ont été identifiées 463 unités d’organisation, dont les principales caractéristiques sont connues. Parmi elles, 358 unités ont déclaré un lectorat et 333 sont des unités documentaires desservant un public universitaire.

Parmi ces 333 unités, ont été recherchées celles qui desservent un lectorat « monodisciplinaire » et appartiennent à une bibliothèque, au sein de laquelle les fonctions bibliothéconomiques ne sont pas centralisées. 165 unités documentaires remplissent ces critères : 35 unités desservent les disciplines scientifiques, 53 unités les disciplines médicales, 41 unités les disciplines de lettres, langues et sciences humaines et sociales et 36 unités les disciplines économiques et juridiques.

Parmi ces 333 unités ont été identifiées 84 unités documentaires dites d’enseignement, pour lesquelles moins de 10 % du lectorat relèvent du troisième cycle et des enseignants-chercheurs ; 37 unités documentaires de deuxième et troisième cycles, pour lesquelles moins de 10 % du lectorat relèvent du premier cycle ; 24 unités documentaires dites de recherche, pour lesquelles les lecteurs de troisième cycle et les enseignants-chercheurs représentent plus de 80 % du lectorat ; 154 unités documentaires dites « tous cycles », dont le lectorat ne satisfait aucune des conditions précédentes ; 34 unités pour lesquelles le lectorat n’est pas réparti par cycle.

Parmi les 299 unités pour lesquelles le lectorat est réparti par cycles, la correspondance avec les données de l’ESGBU est assurée pour 174 unités.

Les disciplines desservies

L’incidence des disciplines desservies est avérée sur plusieurs caractéristiques des ressources humaines des unités documentaires.

La proportion de personnels de la filière des bibliothèques parmi l’ensemble des ressources humaines de l’unité différencie nettement les unités de Sciences et de Médecine fortement dotées, et de façon assez homogène, en personnels de cette filière (70 %), des unités de Lettres et de Droit plus modestement dotées (58 %) et de façon très hétérogène.

La proportion de personnels relevant de mesures d’insertion professionnelle (CES) parmi l’ensemble des ressources humaines de l’unité varie fortement selon la discipline desservie : les unités de Médecine font le plus faiblement appel à ce mode de financement des emplois (5 %) ; en revanche, les unités de Lettres y ont plus fortement recours (11 %). Cependant, dans toutes les disciplines, l’amplitude de cette proportion est importante.

Le poids des fonctions « constitution des collections » et « traitement documentaire » parmi l’ensemble des fonctions bibliothéconomiques de l’unité distingue nettement, avec cependant une amplitude importante, entre les unités de Médecine (plus faible proportion : 20 %) et les unités de Lettres (plus forte proportion : 30 %).

Le poids des fonctions « conservation des collections » et « communication de documents » parmi l’ensemble des fonctions bibliothéconomiques de l’unité différencie, avec cependant une amplitude importante, les unités de Médecine (plus faible proportion : 36 %) des unités de Droit (plus forte proportion : 48 %).

Le poids de la fonction « prêt entre bibliothèques » parmi l’ensemble des fonctions bibliothéconomiques de l’unité différencie nettement, avec une amplitude importante, les unités de Sciences (14 %) et surtout de Médecine (plus forte proportion : 18 %) des unités de Lettres (6 %) et de Droit (plus faible proportion : 5 %).

Répartition du lectorat par cycle

L’incidence de la répartition du lectorat par cycles est avérée sur plusieurs caractéristiques des ressources humaines des unités documentaires.

La proportion des ressources humaines de catégorie A différencie les unités documentaires de recherche (29 %) des autres unités (19 %).

Le poids des fonctions « conservation des collections » et « communication de documents » parmi l’ensemble des fonctions bibliothéconomiques de l’unité distingue les unités documentaires de recherche pour lesquelles ce poids est le plus faible (36 %) ; il est de 44 % pour les unités documentaires d’enseignement.

Le poids des fonctions « accueil », « formation » et « assistance documentaire » parmi l’ensemble des fonctions bibliothéconomiques de l’unité différencie les unités documentaires de deuxième et troisième cycles (28 %) des autres unités (20 %).

Le poids de la fonction « prêt entre bibliothèques » parmi l’ensemble des fonctions bibliothéconomiques de l’unité distingue nettement les unités documentaires d’enseignement (5 %), les unités de deuxième et troisième cycles (10 %) et les unités de recherche (20 %).

Au total, si la répartition du lectorat par cycle permet de repérer de nettes tendances, les amplitudes de variation sont importantes, du fait sans doute du rôle des disciplines. Les régularités sont plus franches lorsque l’on compare les unités selon la discipline desservie. L’incidence des disciplines sur les caractéristiques des bibliothèques semble ainsi plus importante que celle de la répartition du lectorat par cycle. Un croisement de ces deux critères n’est cependant pas significatif du fait de la taille de l’échantillon.

La recherche d’une typologie

La recherche d’une typologie a pour objet, du fait de la grande diversité des établissements observés, d’identifier des groupes de bibliothèques présentant des caractéristiques communes, afin d’établir des comparaisons au sein de sous-ensembles plus homogènes et de renforcer la pertinence de ces comparaisons.

Cette recherche constitue l’unique voie pour se dégager de l’alternative entre l’approche strictement individuelle de chaque bibliothèque dans toutes ses spécificités, qui obère toute possibilité d’évaluation raisonnée de la politique technique de documentation universitaire à l’échelle nationale, et la réduction à la moyenne, sans grand sens, compte tenu de la diversité observée.

La recherche de corrélations, à l’échelle des bibliothèques, a révélé l’existence et la consistance d’un lien entre la taille de la collection, le nombre d’inscrits, le ratio nombre d’inscrits par équivalents temps plein et le ratio taille de la collection par équivalents temps plein. Elle n’a pas permis d’identifier une dépendance des différentes caractéristiques observées par rapport aux disciplines desservies.

L’étude des unités assurant du service public a fait apparaître un rôle des disciplines desservies par l’unité.

La recherche des corrélations à l’échelle des unités confirme celles établies à l’échelle des bibliothèques entre le nombre d’inscrits et le ratio nombre d’inscrits par équivalents temps plein et entre la taille de la collection et le ratio taille de la collection par équivalents temps plein.

Elle indique par ailleurs qu’à l’échelle des unités, la corrélation entre le ratio nombre de lecteurs inscrits par équivalents temps plein et le nombre de lecteurs inscrits varie fortement selon la discipline desservie par l’unité :

– toutes unités0,55

– sciences0,75

– médecine0,35

– lettres0,41

– droit0,58

En outre, l’amplitude et les variations (valeur moyenne et concentration sur une bande) du ratio nombre de lecteurs inscrits par équivalents temps plein en fonction du nombre de lecteurs sont sensiblement différentes selon la discipline desservie par l’unité d’organisation (cf. graphiques).

Pour les unités desservant les disciplines scientifiques, la valeur moyenne du ratio est élevée (342) ; les valeurs du ratio ont une large amplitude (de 120 à 750 environ) ; l’effet de taille est très prononcé ; on observe une concentration sur une bande (18 unités sur 35 ont un ratio compris entre 260 et 380).

Pour les disciplines médicales, la valeur moyenne est basse (215) ; les valeurs du ratio ont une faible amplitude (de 90 à 370 environ) ; l’effet de taille est peu prononcé ; on observe une large bande de concentration (40 unités sur 53 ont un ratio compris entre 160 et 330).

Pour les disciplines littéraires, la valeur moyenne du ratio est intermédiaire (305) ; les valeurs du ratio ont une large amplitude (de 140 à 790 environ) ; l’effet de taille est peu prononcé ; on observe la présence de plusieurs bandes de concentration (sur 41 unités, 12 ont un ratio compris entre 140 et 200, 11 ont un ratio compris entre 315 et 380).

Pour les disciplines juridiques et économiques, la valeur moyenne du ratio est intermédiaire (292) ; les valeurs du ratio ont une large amplitude (de 100 à 780 environ) ; l’effet de taille est prononcé ; on observe une concentration modérée sur une large bande (21 unités sur 36 ont un ratio compris entre 170 et 310).

Ce constat de l’existence d’un lien, à l’échelle des unités documentaires, entre le ratio d’encadrement, le nombre d’inscrits et la discipline desservie conduit à rechercher si l’approche par unités d’organisation et disciplines desservies peut rendre compte de la diversité observée à l’échelle des bibliothèques.

Idée directrice

L’idée directrice est de considérer chaque bibliothèque (pour les fonctions bibliothéconomiques) comme un regroupement de quatre unités documentaires « monodisciplinaires » (Sciences, Médecine, Lettres et Droit), dotées des caractéristiques propres à chaque discipline. La taille de chacune de ces unités est déterminée à partir de la taille de la bibliothèque et de la proportion de son lectorat relevant de la discipline 2. Elle consiste ensuite à examiner si la bibliothèque se comporte ou non, en terme de ratio nombre d’inscrits par équivalents temps plein, comme ce regroupement d’unités documentaires.

Une telle approche est légitimée par le fait que chaque bibliothèque dessert un ensemble de plusieurs disciplines et que cette combinaison de disciplines, dans des proportions différentes, peut masquer l’effet de chacune d’entre elles. S’ajoute à cela le fait que, si la dotation globale des ressources humaines de chaque bibliothèque ne prend pas en compte la répartition de son lectorat par discipline, en revanche, l’affectation interne de ces ressources prend nécessairement en compte des obligations de service différentes liées à la discipline.

Cette approche est toutefois biaisée par l’estimation de la répartition par discipline, basée ici sur le public potentiel de la bibliothèque (cette estimation est cependant sans doute assez proche de la réalité), ainsi que pour les bibliothèques ayant des unités d’organisation de taille très différente dans la même discipline.

Dans cette logique, on a déterminé, pour chaque unité fictive selon sa discipline et sa taille (taille calculée à partir du lectorat de la bibliothèque, la proportion de ce lectorat relevant de la discipline concernée), à partir des constats observés sur les 165 unités réelles desservant une discipline unique, un encadrement « théorique » de la valeur du ratio nombre de lecteurs inscrits par équivalents temps plein.

Par recomposition des quatre unités documentaires monodisciplinaires fictives, en fonction de la répartition du lectorat par discipline, on peut ainsi calculer, pour chaque bibliothèque, un encadrement « théorique » de la valeur du ratio nombre d’inscrits par équivalents temps plein.

Ainsi, par exemple, une bibliothèque ayant 10 000 lecteurs inscrits, dont 60 % relèvent des Sciences, 20 % de la Médecine et 20 % du Droit, sera considérée, pour les fonctions bibliothéconomiques, comme le regroupement de trois unités documentaires fictives : une unité de sciences ayant 6 000 inscrits, une unité de médecine ayant 2 000 inscrits et une unité de droit ayant 2 000 inscrits.

La dotation « théorique » (c’est-à-dire établie à partir de l’échantillon d’unités monodisciplinaires observées dans l’enquête) de chacune de ces unités fictives sera calculée en tenant compte de la discipline et de la taille de l’unité. Cette dotation sera encadrée (détermination d’un minimum et d’un maximum théoriques) en fonction des caractéristiques statistiques des unités réelles de la même discipline.

Par somme des trois unités fictives, on obtient ainsi un encadrement « théorique » de la dotation de la bibliothèque considérée, puis un encadrement « théorique » du ratio pour cette bibliothèque. Le ratio réel de la bibliothèque est connu par le recensement : on examine enfin si ce ratio réel est compris entre les bornes de l’encadrement « théorique ».

Pour plus de la moitié des bibliothèques (51 sur 95), la valeur du ratio réel de la bibliothèque se situe dans l’encadrement théorique calculé (à ± 0,6 écart-type).

Parmi les bibliothèques pour lesquelles la valeur du ratio réel n’est pas incluse dans l’encadrement théorique, figurent :

– 12 bibliothèques (sur les 16 que compte l’échantillon, bibliothèques récentes ou de petits établissements universitaires) ayant un nombre d’inscrits inférieur à 5 000 lecteurs ;

– 9 parmi les 11 bibliothèques à fonction CADIST importante que comprend l’échantillon (9 parmi les 18 bibliothèques ayant un rôle de CADIST) ;

– 14 parmi les 20 bibliothèques ayant un secteur monodisciplinaire dominant (plus de 7 500 inscrits représentant plus de 70 % de la bibliothèque).

Parmi les bibliothèques ne répondant pas à ces critères, on en trouve 39 sur 53 pour lesquelles la valeur du ratio est incluse dans l’encadrement théorique.

Ces résultats tendent à indiquer que la modélisation de la liaison entre ratio nombre d’inscrits par équivalents temps plein et nombre d’inscrits selon la discipline n’est pas satisfaisante pour les valeurs extrêmes (très petites et très grandes) des nombres d’inscrits dans les différentes disciplines.

La démarche ne conduit pas à proprement parler à une typologie des bibliothèques, mais à une compréhension de l’affectation de leurs ressources humaines en fonction des disciplines desservies et de l’importance (en lecteurs inscrits) de chacune de ces disciplines.

On peut ainsi identifier le groupe des bibliothèques que le modèle proposé (regroupement de quatre unités documentaires monodisciplinaires) décrit de façon satisfaisante (groupe L) ; trois groupes de bibliothèques que le modèle ne décrit pas de façon satisfaisante : les bibliothèques de petite taille (groupe D) ; les bibliothèques ayant une fonction CADIST importante (groupe C) ; les bibliothèques ayant un secteur disciplinaire dominant (groupe B).

Les pistes de travail

Le résultat présenté ici ne permet pas de définir, pour chaque groupe de bibliothèques, un ratio de référence susceptible de s’appliquer à toute bibliothèque du groupe. Il permet en revanche, pour les bibliothèques répondant au modèle linéaire (groupe L), de proposer un ratio « de référence » propre à la bibliothèque tenant compte de la répartition de son lectorat entre les différentes disciplines, de l’importance du lectorat de chaque discipline, ainsi que des taux d’encadrement différents selon les disciplines et, pour chaque discipline, différents selon l’importance du lectorat dans la discipline.

Il permet aussi de comparer le ratio réel de la bibliothèque à ce ratio de référence pour évaluer la dotation de la bibliothèque. Cette comparaison ne doit pas être faite individuellement, mais correspondre à une évaluation des priorités sur l’ensemble des bibliothèques : il ne peut s’agir que d’une évaluation de priorités en fonction de l’ampleur comparée des écarts entre ratio de référence et ratio réel.

Il permet, enfin, de disposer d’un outil de dialogue avec la bibliothèque en termes de spécificités, d’évolution de son lectorat et de projets portés par la bibliothèque.

Pour les autres bibliothèques, la démarche doit être affinée. Les bibliothèques du groupe D (petites bibliothèques en lectorat) ont un ratio faible. Il convient de prendre en compte les moyens humains nécessaires au fonctionnement d’un outil documentaire desservant un lectorat limité (l’effet de taille joue défavorablement sur ces bibliothèques, plus défavorablement encore pour les bibliothèques multi-sites). Certaines des bibliothèques appartenant à ce groupe devront par ailleurs être évaluées en fonction du lectorat attendu au terme du développement de l’établissement universitaire de rattachement – il en est par ailleurs de même pour certaines bibliothèques du groupe L.

On notera que le modèle proposé aboutit à des ratios calculés faibles, mais resserrés, dus à la prise en compte de l’effet de taille.

Les bibliothèques du groupe C (fonction CADIST) ont une mission spécifique assortie de moyens, que le modèle proposé ne prend pas en compte. De ce fait, globalement, les valeurs du ratio calculé sont supérieures aux valeurs du ratio réel. L’évaluation de leurs ressources humaines pourrait être réalisée de façon comparable à celle des bibliothèques du groupe L en prenant en compte leur fonction CADIST (ratio de référence lié à la taille et aux disciplines desservies corrigé par une prise en compte de la fonction CADIST).

Pour les bibliothèques du groupe B ayant une composante disciplinaire de taille très importante, la valeur élevée du ratio calculé par rapport au ratio réel témoigne de la mauvaise évaluation, dans le modèle proposé (les calculs sont fondés sur un grand nombre d’unités de taille moyenne), de l’ampleur et du sens de l’effet dû à la taille très importante d’une composante disciplinaire.

Précautions méthodologiques

In fine, la fiabilité de l’évaluation proposée est fortement conditionnée par la fiabilité du nombre de lecteurs déclarés : ce nombre est en règle générale fiable. Toutefois, quelques bibliothèques sont dans l’impossibilité de distinguer entre lecteurs et étudiants inscrits à l’université de rattachement, ce qui peut fausser quelques résultats individuels.

La démarche présentée porte sur les ressources humaines affectées aux seules fonctions bibliothéconomiques et devrait, pour acquérir un caractère opérationnel, prendre en compte les autres fonctions.

Cette démarche porte sur l’ensemble des ressources humaines affectées aux fonctions bibliothéconomiques, quel que soit leur statut. L’apport de ressources humaines ne relevant pas de la filière des bibliothèques influence bien sûr les résultats proposés, fortement et de façon très différente selon les bibliothèques.

Les résultats présentés ici seront exploités, au cours de l’année 1997-1998, dans le cadre d’un Annuaire des bibliothèques identifiant les bibliothèques comparables, présentant les données et indicateurs principaux qui caractérisent chacune d’elle, assorti d’une proposition de démarche d’analyse individuelle.

Novembre 1997

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Unités par discipline et inscrits croissants

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Ratio Lecteurs inscrits par équivalents temps plein des fonctions bibliothéconomiques (par unité d'organisation)

  1. (retour)↑  Cette enquête a été réalisée et traitée au cours de l’année universitaire 1996-1997 (la date de référence des résultats présentés est le 1er décembre 1996) à la demande de la Sous-direction des bibliothèques (Direction de l’information scientifique, des technologies nouvelles et des bibliothèques, Ministère de l’Enseignement supérieur).
  2. (retour)↑  En fonction des disciplines desservies par la bibliothèque, une ou plusieurs de ces unités peuvent bien sûr être « vides ».