Nécrologie

Guy de Valous

Guy de Valous vient de mourir subitement dans sa 8Ie année, le 6 mars dernier, encore en pleine activité intellectuelle, après une carrière de 41 ans dans les bibliothèques. Né en 189I à Tostat (Hautes-Pyrénées), après des études secondaires en Autriche et à Lyon, il fait une licence d'histoire et est reçu au concours d'entrée à l'École des chartes en octobre 1915. Mais, passé sur sa demande du service auxiliaire au service actif, il est mobilisé, blessé, décoré de la Croix de guerre et termine comme interprète de langue allemande près la Commission d'armistice. Démobilisé en 1919, il reprend ses études en préparant un diplôme d'études supérieures d'histoire et de géographie. Tout en faisant sa licence en droit, il passe l'année suivante le diplôme d'aptitude aux fonctions de bibliothécaire universitaire ; il est nommé à la Bibliothèque de la Faculté de droit et renonce alors à faire sa 2e année des chartes où il donne sa démission.

En 1922, il est chargé de mission aux Archives d'État de Vienne pour l'inventaire du fonds lorrain des archives de Ballplatz, mission qui eut pour résultat le reversement en 1924 d'importantes collections de ce fonds dans divers dépôts français. A son retour il poursuit ses travaux d'abord dans le cadre de l'École pratique des hautes études où il présente en 193I une thèse sur la liturgie clunisienne. Il entreprend alors sa thèse de doctorat qu'il soutiendra brillamment en 1936 et qui obtiendra le Ier prix Gobert en 1937. En 1940, il quitte la Bibliothèque de la Faculté de droit pour la Bibliothèque Sainte-Geneviève; il en sera le conservateur en chef jusqu'en 196I. Nommé dans un moment difficile il s'était profondément attaché à cet établissement et lorsque vint l'heure de la retraite, M. Julien Cain, directeur des bibliothèques, lui écrivait dans un témoignage qui résume toute la qualité de son action : «... Je tiens à vous exprimer ma reconnaissance pour l'impulsion qui a été donnée à la bibliothèque Sainte-Geneviève grâce à la compétence et à l'autorité sans défaut dont vous avez fait preuve pendant vos 20 années de direction, malgré les difficultés que pouvait présenter un établissement aussi varié et important... »

« Autorité sans défaut » certes, mais juste et bienveillante; tout le personnel, quel que fût son grade, trouvait audience auprès de lui et il savait laisser à ses collaborateurs une certaine liberté d'action tout en assumant les responsabilités de la direction. A cette activité professionnelle exemplaire, il joignait un goût de la recherche historique et de l'érudition dont témoigne la longue liste de ses travaux parmi lesquels il faut citer notamment ceux concernant l'abbaye et l'ordre de Cluny, Le Domaine de l'Abbaye de Cluny des origines au XIe siècle (1923), Le Monarchisme clunisien des origines au XVe siècle (thèse 1936), Le Temporel et la situation financière des établissements de l'ordre de Cluny du XIIe au XIVe siècle (Thèse complémentaire) Jean de Bourbon évêque du Puy... abbé de Cluny (1949), Cluny, l'Abbaye et l'ordre (1953) (extrait du Dictionnaire d'histoire et de géographie ecclésiastiques); plusieurs éditions de textes : Avec les Rouges aux Iles du Vent, souvenirs du chevalier de Valous 1790-1793 (1930), Sur les routes de l'Émigration -Mémoires de la duchesse de Saulx-Tavannes (1933) et de nombreux articles de revues en particulier des communications aux Congrès des sociétés savantes. Lorsque la mort l'a surpris, il corrigeait les épreuves d'un dernier ouvrage sur le Patriciat lyonnais aux XIIIe et XIVe siècles.

Sa haute culture, sa forte personnalité et la passion de son métier le placent dans la tradition des grands conservateurs des bibliothèques de l'Université de Paris.