Un portail d'innovation pédagogique

Les dossiers électroniques de la bibliothèque de l'université de Barcelone

Lluïsa Nuñez

Le projet de création d’une bibliothèque virtuelle de matériel éducatif comme complément à l’enseignement traditionnel à destination des enseignants et des étudiants s’est transformé en un outil de formation à l’utilisation des technologies de l’information pour les étudiants, les enseignants et les bibliothécaires. Il promet finalement de devenir un portail universitaire pour la modernisation de l’enseignement.

The plan to create a virtual library of educational material as a complement to traditional teaching, aimed at university lecturers and students, has transformed itself into a training tool for handling information technology for the students, lecturers and librarians, which promises in the end to become a way forward for universities for the modernisation of teaching.

Das Projekt einer virtuellen Bibliothek von Studienunterlagen für Studenten und Lehrpersonal als Ergänzung zum traditionellen Unterricht wurde in ein Lehrmittel zur Anwendung von Informationstechnologien umgewandelt und dient Studenten, Lehrern und Bibliothekaren gleichermassen. Nun verspricht es ein Universitäts-Internet-Portal zur Modernisierung der Unterrichtsmethoden zu werden.

El proyecto de crear una biblioteca virtual de material docente para el uso de profesores y alumnos como complemento de la enseñanza presencial, se ha convertido en una herramienta de educación en el uso de las tecnologías de la información para estudiantes, profesores y bibliotecarios, y promete devenir un portal universitario para la innovación de la docencia.

Quand, au début de l’année 1998, quelques professeurs et bibliothécaires ont commencé à expérimenter le web comme moyen de publier des contenus éducatifs, l’université de Barcelone (UB), tout comme les autres universités catalanes, commençait à percevoir les changements qui façonnent l’environnement actuel. Ces changements concernent aussi bien la baisse de la natalité – et donc celle de la population étudiante –, que la diversité des itinéraires dans l’enseignement secondaire après les réformes de 1995, ou encore la compétence, depuis peu, des nouvelles universités publiques et privées, les nouveaux métiers, la pression croissante de la société, l’évaluation de l’enseignement et l’exigence de qualité.

En allant plus loin, on peut dire que les étudiants de l’UB sont confrontés – comme ceux de bien d’autres universités, espagnoles ou européennes – à la même situation pédagogique, à savoir la massification, les cours magistraux et de courte durée, le peu de contacts entre étudiants et enseignants. On note également l’importance des supports polycopiés, le faible usage de la bibliothèque en tant que source documentaire, mais sa forte utilisation en tant que salle de travail, le faible recours aux nouvelles technologies pour le travail universitaire. En revanche, les étudiants manifestent un fort intérêt pour les technologies en ce qui concerne la communication personnelle et les loisirs (méls, messagerie instantanée, web, chat -bavardage, MP3...).

Si les étudiants sont plutôt d’accord avec ces remarques, ils relèvent, entre autres problèmes, que les bibliothèques et les services d’information sont insuffisants et inadaptés ; que les enseignants sont ignorants en matière de nouvelles technologies ; et que, en général, l’information est inadéquate et de peu d’intérêt.

Que les technologies de l’information soient devenues incontournables dans la formation de futurs professionnels ne fait aucun doute pour les enseignants et les chercheurs. Que nous ne soyons pas préparés pour donner ces formations est une opinion qui revient avec force dans les réunions et séminaires d’enseignants. Et si ces deux idées figurent le plus souvent dans les discours des politiques, elles ne se traduisent pas toujours par des actions qui pourraient contribuer à améliorer sérieusement la situation.

Il est vrai que très peu d’universités peuvent se permettre de mettre en place le programme de formation tout à la fois individualisé, progressif, dynamique et permanent dont aurait besoin leur personnel enseignant. Il y a bien quelques solutions intéressantes d’un point de vue technologique, comme, par exemple, les classes et campus virtuels, qui se développent un peu partout avec la participation ou le parrainage de banques, de compagnies téléphoniques ou de groupes éditoriaux, très intéressés à investir le marché éducatif pour s’initier à la commercialisation de l’information électronique. Mais ces aventures aboutissent le plus souvent à créer des produits de laboratoire, de plus ou moins bonne qualité, peu adaptés à la pratique de la majorité des étudiants et enseignants. De plus, ces produits ne constituent plus aujourd’hui un moteur de changement, tel que peut réussir à l’être un bon projet de technologie de l’information, élaboré au sein d’une structure éducative.

Un modèle diamétralement opposé

Le projet mis en place par la bibliothèque en 1999 (cf encadré 2) répond à un modèle diamétralement opposé. Il n’y a pas eu de parrainage éditorial ni bancaire, et il n’y a pas eu non plus de budget extraordinaire, ni de laboratoire de recherche en éducation. On a compté sur l’enthousiasme et la créativité des professeurs et des bibliothécaires et sur le pouvoir du web. Et aussi sur un système d’organisation horizontale, proche des groupes d’usagers.

Illustration
Encadré 2 - Le projet en quelques chiffres

En réalité, les objectifs initiaux de la bibliothèque étaient de vérifier et d’actualiser les bibliographies recommandées par les enseignants et d’encourager les étudiants à les utiliser. En publiant ces bibliographies sous forme de pages web, on pouvait créer des liens avec les notices du catalogue et mettre en place, par exemple, un système de réservation pour le prêt. C’est de là qu’est venue l’idée d’améliorer l’accès et l’utilisation de l’information, en numérisant par exemple les lectures recommandées, articles de revues ou chapitres d’ouvrages. Les professeurs eux-mêmes proposèrent d’autres documents à numériser et éditer : images extraites d’atlas d’anatomie, de diapositives d’art, de microscope électronique, de techniques chromatographiques, de tables de données numériques, astronomiques, de tables de logarithmes, de cartes, de feuilles de calcul, d’archives du son avec des fragments musicaux, des séries d’exercices, et des simulations en langage Java.

Un hôtel de cours virtuels (cf écran 2)

Illustration
Ecran 2 - Cours d'odontologie avec une collection d'images

Bientôt émergea le concept de dossier, conçu comme un espace web, préparé et défini pour que chaque professeur puisse publier, selon ses critères, les documents utilisés par ses étudiants pendant et en dehors des heures de cours (cf écran 2). Pour cela, un dossier est organisé en répertoires et fichiers, avec un espace de communication pour les étudiants et un autre espace pour l’édition et la préparation du dossier. Chaque enseignant peut créer son propre dossier ou le partager avec d’autres.

Pour éditer et tenir à jour un dossier, il n’est pas nécessaire de connaître le langage HTML, ni d’autres techniques, puisqu’on peut publier des documents générés avec la majorité des applications bureautiques. Bien que l’environnement web constitue à lui seul un excellent facteur de motivation pour s’y mettre : « Comment puis-je mettre une bannière de couleur sur la page de mon dossier ? », « Mes étudiants préfèrent les séries de format Jpeg aux présentations Powerpoint, savez-vous comment je peux les convertir ? », « Existe-t-il un logiciel pour protéger mes documents de toute modification ? » sont en effet des questions devenues tout à fait habituelles de la part des enseignants utilisateurs. Dans cet hôtel de cours virtuels, la bibliothèque s’occupe de l’hébergement des documents, de la protection des droits d’auteur, du contrôle d’accès des étudiants et enseignants depuis leur domicile, et des copies de sauvegarde. On a désigné un bibliothécaire correspondant pour chaque groupe d’utilisateurs, et mis en place des responsables de services : assistants pour la publication des fichiers, assistant pour la création de liens et de fichiers, ainsi que des responsables de produits : administrateur de forum (cf écran 1) et de courrier électronique, d’espace de chat (cf écran 3), éditeur de collections d’images, concepteur d’exercices interactifs

Illustration
Ecran 1 - Un forum de discussion dans une discipline (Droit commercial)

Illustration
Ecran 3 - Un espace de chat dans un cours de droit commercial, avec un message prévenant de la réservation d'une salle

. Le système fonctionne sur un serveur IIS, et, pour la première phase, une application spécifique – Eres, de Docutek 1 –, a été acquise.

En mai 2000, a été mis en place un processus d’évaluation du projet avec les professeurs et étudiants utilisateurs. Des résultats de cette évaluation a surgi l’idée de redéfinir l’application pour mieux l’adapter aux usagers et se doter des moyens de continuer à développer des services. La nouvelle application est écrite en Asp, HTML et JavaScript ; elle fonctionne depuis la rentrée 2000-2001.Aujourd’hui, plus de 650 enseignants ont demandé un code d’accès et disposent d’un dossier. Depuis février 2000, nous avons sollicité, pour les enseignants, des cours comme « Édition de matériel éducatif sur support numérique », « Traitement de l’image », ou « HTML ». Grâce à une subvention pour la modernisation pédagogique, la bibliothèque a installé des postes pour que les professeurs puissent numériser, éditer et convertir tout en disposant de l’assistance d’un bibliothécaire.

En mai 2000, a été mis en place un processus d’évaluation du projet avec les professeurs et étudiants utilisateurs. Des résultats de cette évaluation a surgi l’idée de redéfinir l’application pour mieux l’adapter aux usagers et se doter des moyens de continuer à développer des services. La nouvelle application est écrite en Asp, HTML et JavaScript ; elle fonctionne depuis la rentrée 2000-2001.Aujourd’hui, plus de 650 enseignants ont demandé un code d’accès et disposent d’un dossier. Depuis février 2000, nous avons sollicité, pour les enseignants, des cours comme « Édition de matériel éducatif sur support numérique », « Traitement de l’image », ou « HTML ». Grâce à une subvention pour la modernisation pédagogique, la bibliothèque a installé des postes pour que les professeurs puissent numériser, éditer et convertir tout en disposant de l’assistance d’un bibliothécaire.