Chronique des bibliothèques

Bibliothèque nationale.

Exposition.

Dans une suite d'expositions consacrées à l'histoire de l'estampe en France, la Bibliothèque nationale montre cette année le développement de la gravure au XVIe siècle 1. Cette époque était restée toujours dans l'ombre, au profit des Primitifs français ou de tels siècles plus connus comme le XVIIIe.

La galerie Mansart, avec ses quatorze panneaux, se prête bien à une exposition didactique; M. Jean Adhémar a pu réaliser une disposition assez claire. On voit d'abord le bois en couleurs du xve siècle et du début du XVIe (de magnifiques épreuves de papier de tenture, de cartes à jouer, d'images populaires); puis deux panneaux sont consacrés à Jean Duvet, le premier peintre-graveur français, un orfèvre de Langres, qui doit quitter la Bourgogne pour se réfugier à Genève, où il grave après 1541 sa suite de l'Apocalypse (terminée en 1555, éditée en 1561). Ses burins ont une originalité, une poésie étrange (derrière laquelle on songe à Dürer) qui l'a fait considérer comme le premier de nos surréalistes.

Puis viennent les estampes de l'École de Fontainebleau, gravures de reproductions au burin ou à l'eau-forte, exécutées par des Italiens après 1545, et qui ont eu un succès énorme mais pas immédiat.

Les guerres de religion favorisent le retour au bois sous la forme populaire; la rentrée d'Henri IV à Paris, au contraire, encourage la taille-douce; dans ce procédé triomphent des Flamands venus d'Anvers, qui seront les maîtres des graveurs français du XVIIe siècle.

L'exposition appelle l'attention sur plusieurs artistes : Milan, maître de Boyvin, Fantuzi, Luca Penni, Antoine Caron dont la fille épousera Thomas de Leu, lequel aura pour gendre Claude Vignon. On a joint aux estampes non une évocation du livre illustré, ce pourrait être le sujet d'une exposition spéciale, mais une présentation de livres d'images (livres de broderie, Bibles illustrées, Métamorphoses d'Ovide, ouvrages sur la perspective destinés à la formation des artistes, et qui aideront à la réalisation de l'académisme souhaité par les Valois.

Bibliothèques municipales.

Amiens (Somme).

A l'occasion du cent-cinquantième anniversaire de la fondation du Lycée d'Amiens, une exposition rétrospective a été organisée à la Bibliothèque municipale d'Amiens sous les auspices de l'Association des anciens élèves du Lycée et de la Société des amis de la bibliothèque.

Dans l'ancienne salle de lecture, transformée en salle d'exposition, ont été disposés des manuscrits, brochures, portraits, bustes et documents divers provenant de la Bibliothèque municipale, des Archives départementales de la Somme, de la Bibliothèque nationale, de la Bibliothèque de l'Arsenal, du Musée d'Abbeville, ainsi que de collections particulières, notamment celles de l'évêché.

Le dimanche 3 mars, à 10 h, M. René Billières, ministre de l'Éducation nationale, accompagné de MM. Gilbert Jules, ministre de l'Intérieur, et Max Lejeune, secrétaire d'État aux Forces armées, de M. le Préfet de la Somme et de M. le Maire d'Amiens, fut reçu à l'entrée de l'établissement par M. Paul Logié, conservateur de la bibliothèque, qui lui présenta l'exposition, en présence de M. René Normand, président de la Société des amis de la bibliothèque, de M. Boutmy, président de l'Association des anciens élèves du Lycée et de nombreuses autres personnalités.

Le dimanche suivant 10 mars, à 15 heures, M. René Normand fit dans la même salle, en présence du président et des membres du bureau de l'Association des anciens élèves du Lycée, du conservateur de la bibliothèque et d'une cinquantaine d'anciens élèves et membres de la Société des amis de la bibliothèque, un exposé sur l'histoire de l'ancien Lycée et commenta ensuite les diverses pièces exposées.

Bordeaux (Gironde).

Grâce à un crédit spécial octroyé par la ville de Bordeaux, la Bibliothèque municipale s'est rendue acquéreur, à la vente de livres et manuscrits qui a eu lieu le 14 mars 1957 à l'Hôtel des ventes de Paris, des manuscrits suivants de Montesquieu :

Éloge de la sincérité. - Discours de la considération et de la réputation. - Remarques sur certaines objections que m'a faites un homme qui m'a traduit mes « Romains en Angleterre ». - Mémoire sur les dettes de l'État. - Mémoire contre l'arrêt du Conseil du 27 février 1725.

La Bibliothèque municipale de Bordeaux a exposé, du 16 au 31 mars 1957, deux-cents peintures et dessins destinés à l'illustration de Don Quichotte de Cervantès, œuvres de l'artiste espagnol Nicomedes Gomez.

Colmar (Haut-Rhin).

La Bibliothèque municipale de Colmar présente, de mars à juin 1957, une exposition consacrée à l'Ex-libris alsacien et moderne. Cette manifestation met en évidence l'étonnante richesse de la production des XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles. On y remarque notamment l'unique exemplaire qui subsiste encore de l'ex-libris de Jacques Sturm, le diplomate strasbourgeois, celui, rarissime, de l'humaniste Spiegel, et aussi celui du chevalier bibliophile Egenolphe de Ribeaupierre.

Toutefois, les créations contemporaines envoyées par les artistes de toute la province ne sont pas éclipsées par la proximité de ces spécimens armoriés, souvent de grand format. Leur qualité artistique et leur nombre (plus d'un millier n'a pu trouver place dans les vitrines) témoignent d'une véritable renaissance de l'ex-libris et, partant, de la bibliophilie alsacienne.

Douai (Nord).

L'exposition Douai et le Douaisis de Charlemagne à Charles le Téméraire 2 organisée avec la collaboration du Musée de Douai et des membres de l'enseignement, par la Bibliothèque municipale, a été prolongée, en raison de son succès, jusqu'à la fin du mois de mai. Près de 5.000 élèves des établissements d'enseignement primaire et secondaire notamment, l'ont visitée en groupes conduits par les instituteurs et les professeurs.

Neuilly-sur-Seine (Seine).

La municipalité de Neuilly-sur-Seine a ouvert, le 19 février 1957, dans les locaux de sa bibliothèque municipale une discothèque de prêt. Pour en constituer le fonds initial, une enquête avait été effectuée auprès des lecteurs de la bibliothèque, sous forme d'un questionnaire portant sur leurs préférences. C'est la musique classique qui a remporté le plus grand nombre de suffrages, distançant de loin le jazz, les « variétés », la musique religieuse, la danse, la musique folklorique et les enregistrements parlés.

Les disques sont prêtés, pour une durée de quinze jours, aux usagers ayant acquitté un droit d'inscription de 100 francs. Le tarif de location varie selon le format des disques et le nombre d'emprunts dont ils ont fait l'objet et correspond à un amortissement de ces disques au bout de quinze emprunts. Un tableau de planning porte les fiches des disques présents par ordre alphabétique. L'emprunteur en retire la fiche correspondant à l'enregistrement choisi; celui-ci lui est alors remis en échange de cette fiche qui est ensuite insérée dans une pochette individuelle, portant le nom du lecteur, et classée dans un échéancier.

Reims (Marne)

Du 3 novembre 1956 au 22 février 1957 s'est tenue à la Bibliothèque municipale une exposition consacrée à l'Illustration du livre par les procédés originaux (bois, taille-douce, lithographie).

Du 1er au 23 mars, la bibliothèque a présenté l'exposition itinérante de la Gravure norvégienne contemporaine.

Lecture publique.

Haute-Vienne.

La Bibliothèque circulante départementale de la Haute-Vienne vient de faire paraître, sous forme de brochure multigraphiée, le catalogue de ses livres d'agriculture. Cette liste, qui contient 416 volumes, se termine par deux index alphabétiques des auteurs et des titres.

Bibliothèque de l'École nationale des langues orientales vivantes.

Par décret du 19 mars 1957, l'École nationale des langues orientales vivantes est autorisée à accepter la donation faite par l'Institut byzantin de Boston des ouvrages et collections constituant la bibliothèque de l'Institut byzantin (J. O., n° 72, 26 mars 1957, p. 3171).

L'Institut byzantin fut fondé à Boston en 1930 par l'éminent archéologue Thomas Whittemore, ami fidèle de la France, dans le but d'encourager les études byzantines dans le monde ainsi que les recherches et les études sur les monuments byzantins. C'est ainsi que l'Institut fut autorisé en 1931 par le gouvernement turc à dégager les célèbres mosaïques de Sainte-Sophie (à Istanbul) de la couche de plâtre qui les recouvrait, de les restaurer, les étudier et les publier.

Parallèlement à la fondation de cet Institut, M. Whittemore créait à Paris un Centre d'études byzantines, dépendant de l'Institut byzantin de Boston et comportant une bibliothèque dont le noyau fut constitué par la collection privée de M. Whittemore, transférée à cette occasion de Londres et de Boston. M. Whittemore, qui mourut en 1950, avait toujours exprimé le désir de voir cette bibliothèque, qui avait trouvé un local dans les bâtiments de l'École nationale des langues orientales vivantes, définitivement fixée à Paris. C'est sous cette condition qu'il l'avait léguée, par son testament, à l'Université américaine Harvard ou, en cas de refus de la part de celle-ci, à l'École des langues orientales vivantes. L'Université Harvard ayant refusé ce don, c'est l'École des Langues orientales qui en a hérité.

Cette bibliothèque, qui contient des ouvrages très rares et les séries complètes des grandes collections consacrées à l'histoire et à l'art byzantins, se compose de cinq sections dont la seule énumération suffira à indiquer la richesse de ses fonds : 1° Revues spécialisées; 2° Histoire de l'art paléo-chrétien et byzantin. Archéologie; 3° Histoire byzantine; 4° Histoire des églises orientales (et liturgie); 5° Églises coptes. Art copte.

Son importance et son utilité s'accroissent du fait qu'elle complète un ensemble incomparable de documents et d'ouvrages relatifs à Byzance et au christianisme oriental, les deux autres organismes de cet ensemble étant le fonds de l'Institut d'études byzantines et néo-helléniques de l'Université de Paris, à la Sorbonne, et la bibliothèque de la Maison des PP. Assomptionnistes, éditeurs de la Revue des études byzantines (8, rue François Ier), possédant surtout des ouvrages relatifs à l'histoire et aux institutions byzantines.

Musée du livre et de la banque à Lyon.

Pour commémorer en 1958 le bi-millénaire de la fondation de la ville de Lyon par C. Munatius Plancus, la municipalité lyonnaise a décidé notamment de créer deux musées, dont l'un sera plus spécialement consacré à l'histoire de l'imprimerie et de la banque.

Centre d'études supérieures de civilisation médiévale de l'Université de Poitiers.

Le Centre d'études supérieures de civilisation médiévale de l'Université de Poitiers, fondé en 1954, a pour but d'offrir aux étudiants parvenus au niveau des recherches personnelles un ensemble d'activités en rapport avec les sujets de leurs travaux. L'étude de la civilisation médiévale, objet propre du Centre, a été volontairement restreinte à la période dite « romane » (Xe, XIe et XIIe siècles). Les cours, d'une durée de huit heures environ par semaine, ne revêtent pas le caractère d'un enseignement doctoral; ils constituent des exercices d'initiation aux méthodes de la recherche dans les différentes disciplines. Ces travaux de séminaire sont basés sur l'exploitation la plus large du matériel de documentation du Centre et ont comme but secondaire d'accroître et de perfectionner ce matériel.

Dès l'origine, la bibliothèque du Centre a reçu en dépôt le fonds médiéval de la bibliothèque de l'Institut d'histoire de l'art de la Faculté des lettres. Ayant le souci constant de ne pas faire double emploi avec les autres bibliothèques poitevines, elle n'achète que des ouvrages dont la rareté, le prix élevé ou l'origine étrangère rendent souvent l'acquisition difficile. Cette bibliothèque, malgré le nombre encore modeste des titres en rayons, est donc déjà unique par son objet et ses méthodes. Sont tout particulièrement à noter dès maintenant ses portefeuilles de tirés à part ainsi que ses revues. On trouve à la bibliothèque, à l'heure actuelle, environ 80 périodiques. Progressivement le Centre s'abonnera à toutes les revues intéressant, d'une manière ou d'une autre, fût-ce partiellement, les Xe, XIe et XIIe siècles.

Avec la bibliothèque, la photothèque constitue l'un des principaux instruments de travail du Centre. Elle groupait à la fin de l'année 1956 environ 20.000 photographies, de grand et moyen format, des vues diapositives 8 ½ X 10 et 5 × 5, des collections de négatifs et des photos-contact. Chaque photographie est soumise à une identification et une analyse rigoureuses.

Enfin le troisième instrument de travail est constitué par le fichier de documentation qui est essentiellement alimenté par les dépouillements de revues récentes (depuis 1949) : articles, comptes rendus, chroniques, bulletins critiques. Il se cantonne très étroitement dans la période romane. Autant que possible le titre du livre est suivi de la mention des comptes rendus dont il a fait l'objet. Le fichier-matières a été l'objet d'une attention toute particulière. L'ordre en est alphabétique, mais l'emploi systématique de très nombreuses fiches de renvois et de regroupement ou de synthèse permettent aux chercheurs de faire très rapidement le point d'une question. Un troisième fichier classe les événements, les œuvres et les personnages dans un ordre strictement chronologique. Un autre répertoire chronologique rassemble les œuvres littéraires tant en latin, qu'en langue vulgaire. Une section spéciale est consacrée aux manuscrits enluminés du point de vue bibliographique et iconographique. Sont envisagés également des répertoires de congrès et d'expositions, de même qu'un regroupement des volumes de mélanges jubilaires.

D'autres projets sont à l'étude parmi lesquels il faut mentionner une collection de microfilms reproduisant soit des manuscrits enluminés inédits, soit des ouvrages importants et introuvables; une discothèque groupant des enregistrements d'oeuvres musicales ou dramatiques du Moyen âge; une collection de fac-similés paléographiques; une collection de plans, de relevés, de schémas, de vues cavalières, etc.

Enfin les étudiants et les professeurs du Centre d'études supérieures de civilisation médiévale disposent encore des ressources que leur offrent, outre la Bibliothèque universitaire et la Bibliothèque municipale de Poitiers, la bibliothèque de la Société des antiquaires de l'Ouest et celle de l'Abbaye de Ligugé, située à 7 km de Poitiers, et siège de la Revue Mabillon.

  1. (retour)↑  Bibliothèque nationale. Paris. - La Gravure en France au XVIe siècle. Préf. de Jean Adhémar, ... - Paris, Bibliothèque nationale, 1957. 20,5 cm, 47 p. recto n. ch., multigr.
  2. (retour)↑  Voir : B. Bibl. France. 1re année, n° 11, nov. 1956, p. 806.